Je te verrais un peu moins bien désormais [Terminé]

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Varsgorn frappa le miroir de son poing fermé. Le verre se brisa, écorchant la peau de ses doigts au passage. Il s'en moquait. Son reflet lui avait renvoyé l'image de son oeil détruit. Sa chair brûlée. Le cruel souvenir de ce qui s'était passé dans le manoir de Dolohov. Déjà ancré dans sa mémoire à jamais mais aussi visible sur sa peau.

Il avait réussit à s'enfuir du manoir. Feignant l'inconscience, il avait été sortit de la pièce par un cocher et il avait agit. Le cocher avait été tué et l'ancien mercenaire avait fuit tant bien que mal vers l'extérieur où ses hommes l'attendaient. Le dessinateur du groupe avait voulu emmener directement Varsgorn dans une confrérie de rêveur mais l'ancien mercenaire avait refusé. Son oeil était foutu, il le savait très bien. Même le meilleur des rêveurs ne pourrait rien faire. Et il ne voulait pas partir sans un dernier coup d'éclat. Il voulait voir le manoir réduit en cendres. Les flammes s'emparèrent rapidement de l'édifice mais rapidement des trombes d'eau apparurent. Un dessinateur. Dolohov ou un de ses "employés". Impossible de le dire. Varsgorn ordonna qu'un nouvel incendie soit allumé mais le dessinateur refusa. S'il en créait un autre, il ne pourrait faire un pas sur le côté pour rejoindre les rêveurs. Si bien que ce fut un autre de ses hommes qui fonça avec sa torche pour obéir à Varsgorn. Des cris se firent entendre peu de temps après que les écuries se soient embrasées. L'ancien mercenaire vacilla légèrement et soudain, tout autour de lui disparu. Un pas sur le côté.

On l'avait conduit bien évidemment chez les Rêveurs qui avaient confirmés que l'oeil ne pouvait être guérit. On lui avait proposé de faire disparaître les brulures mais il avait refusé. Si l'oeil ne pouvait être guérit, autant laissé apparents les sévices de la lutte. Evidemment, Varsgorn enjoliverait ce qui s'est passé. L'homme qui lui avait fait ça était mort. Dolohov n'avouerait jamais ce qu'il sait. Sinon, Varsgorn lui collerait une étiquette de brigand ou de Mercenaire sur le dos. Avec le soutien de l'empereur, il n'aurait aucun mal à faire tomber Dolohov.

Il avait demandé le lendemain de sa guérison à son dessinateur de le conduire dans le manoir d'Al-Far, celui qu'il possédait sous le nom d'Eustache Fil'Danger. Depuis, il restait retranché dans son domaine.

Il n'arrivait pas à se faire à son image. Comment pourrait-il alors affronter le regard des autres?

************

Il était resté de nombreux jours dans sa demeure d'Al-Far. Il avait reçu de nombreuses missives. Janos lui avait transmis toutes les lettres, étant une des seules personnes à savoir où son maitre se cachait. Il n'en avait pas lu beaucoup. Mais c'était celle de Myra qui l'avait fait sortir de la torpeur dans laquelle il s'était enfermé.

Il avait donc regagné Al-Poll et l'académie de Merwyn.... de nuit pour que Myra soit la première personne qu'il rencontre.

Aidé de ses réflexes de marchombre et de mercenaire, il s'était introduit dans l'académie sans éveiller l'attention des gardes qui patrouillaient et il s'était présenté devant la porte des appartements de celle qu'il aimait.

Il respira un grand coup et il frappa.

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Le silence de la pièce n'était pourtant plus depuis plusieurs heures. Un son continue résonnait entre les murs, léger, saccadé. Myra ne pouvait se contrôler, elle ne pouvait arrêter de se ronger les ongles nerveusement. Cela faisait depuis des années que ses dents ne furent attirés par ses ongles. Des années qu'elle ne l'avait pas fait. Ce tic nerveux était réapparu quelques jours plus tôt lorsque les semaines d'absence de son amant commencèrent à s'accumuler. Où était-il ? Que faisait-il ? Il la laissait rarement sans nouvelles sur une aussi longue durée, elle commençait à s'inquiéter. Craignant le pire. L'inquiétude la tenait en étau, elle ne pouvait lui échapper.
La dessinatrice se levait chaque matin en pensant à lui, la peur au ventre. Il fallait avouer que l'homme était loin de ne posséder que des amis en ce bas monde. Loin de là. Même si elle le savait débrouillard et non dénué de talent en ce qui concernait le combat, elle ne pouvait s'empêcher d'avoir peur pour lui à chaque fois qu'il lui annonçait qu'il partait en voyage. C'était comme cela, elle ne pouvait rien y faire. Elle tentait donc d'occuper les blancs de ses journées lorsqu'elle ne donnait pas cours. Ce qui était ma fois plutôt rare, cette Académie pullulait d'élèves.
Malgré tout cela, elle ne pouvait arrêter de penser à lui. Elle ne put donc se retenir de lui écrire une lettre ; elle devait savoir où il était. Pour se rassurer. Le papier crissa sous ses doigts, la plume plongée dans l'encre glissa sur les grains de la feuille. Les mots défilèrent devant ses yeux comme destinés à être couchés sur le blanc du papier. Elle fut terminée en quelques minutes ; la dessinatrice voulait bien trop savoir ce qui le retenait autant, mais surtout ce qui l'empêchait de lui donner de ses nouvelles. Ses ongles abandonnés, sa robe de primat enfilée, elle courut dans la volière afin de donner ce courrier en express au fauconnier. Il fut aimable quoique peu loquace et envoya sa lettre immédiatement. Elle le remercia et s'en alla d'un pas allant.
Elle devait se rendre à son cours du matin. Caressant les spires, elle ne put s'empêcher de sourire. Quel contact réconfortant que celui de l'Imagination. Elle ne s'en lassait plus. Frôlant quelques routes, elle fit soudain un pas sur le côté. Cela faisait si longtemps...

***

Cinq jours plus tard.
La salle de dessin était vide. Sans doute normal étant donné que la porte était fermée et que les élèves attendaient à l'extérieur. Elle ne put retenir un sourire. La journée commençait plutôt bien malgré ses inquiétudes.
Elle ouvrit la porte aux jeunes dessinateurs et les salua. Ils entrèrent, le cours débuta. Cours journalier, régulier et identique en tout point à celui de la veille. Théorie, consignes, exercices, conseils, questions, réponses. Rien de bien nouveau. Sauf sans doute la matière du cours. Elle s'autorisait parfois à organiser des minis-tournois dans chaque classe. Tournois rapportant des points à la maison du vainqueur, ceux-ci même rajouté au compte lorsque la coupe recommencera. Il était vrai que l'Intendant avait interrompu cette tradition dès son arrivée, ce qui avait eu pour effet de frustrer les élèves qui s'étaient donnés à fond depuis le début de l'année.
La professeur stoppa net les conversations et débuta son cours. Les consignes données, elle les laissa se dépatouiller dans l'exercice alors que ses pensées s'échappaient par les baies vitrées.

Les heures s'écoulèrent avant qu'une élève ne se décide et vienne tapoter sur l'épaule de la dessinatrice. S'ébrouant presque, elle sortit de ses rêveries et contempla la mine essoufflée de ses élèves. L'exercice était accompli comme le cours. Myra leur sourit, pensive, leur offrit quelques dernières paroles et les invita à quitter la salle de cours.
La porte refermée derrière elle, elle attendit les élèves suivant. Les heures s'enchaînèrent ainsi à une vitesse fulgurante. Perdue dans ses pensées, elle ne se rendait pas compte du temps qui passait. Elle ne vit pas non plus la nuit tomber ni les élèves quitter les tables de la grande salle afin de rallier leur dortoir. Une journée banale qui pourtant passait à une vitesse phénoménale. Ses pensées bien trop rivées sur l'homme qui possédait son coeur.
L'heure passait et il était déjà tard. Elle rallia ses appartements, las. Elle s'inquiétait toujours autant et ses ongles allaient en pâtir à nouveau.
Enfin arrivée dans ses appartements, la primat laissa choir son uniforme sur une chaise et enfila avec délectation une robe vert émeraude. Elle eut cependant à peine le temps de s'assoir près du feu que quelqu'un frappa à sa porte. Elle se leva à contre-coeur pour aller ouvrir. Sa lassitude la lâcha cependant rapidement lorsqu'elle découvrit le visage de son visiteur nocturne. Elle lui sauta au coup pour le libérer quelques minutes après. Elle le frappa sur le bras.

- Tu pourrai me donner de tes nouvelles, espèce de trésorier à la noix ! Je me faisais un sang d'encre moi, pendant que...

Les mots se stoppèrent derrière les lèvres de Myra lorsque son regard se posa sur le visage de son amant. Mouvement de recul. Pétrifiée. Effrayée, presque. Son inquiétude remonta instinctivement. Son sixième sens ne la trompait jamais, elle avait pressenti que quelque chose s'était passé. Mais que c'était-il passé au juste...
Elle ne se posait pas encore cette question, bien trop effrayée par ce qu'elle venait de découvrir. Elle ne savait pas comment réagir, ses gestes restaient vagues, sans réelle conviction.
Etait-ce un rêve ? Etait-ce la réalité ? Elle s'approcha. Il fallait qu'elle sache, il fallait qu'elle soit certaine qu'elle ne rêvait pas. Elle arriva à sa hauteur. Varsgorn n'avait pas bougé d'un pouce. Immobile devant elle, attendant sans doute des paroles qui tardaient à venir. Les mains de la dessinatrice remontèrent lentement vers son visage. Vers son oeil.
Un bandeau.
Du cuir.
Son oeil droit.
Sa main tremblait, elle ne la contrôlait plus. Sourcils froncés, elle réussit enfin à stopper ces membres. Myra releva le cache-oeil avec douceur.
Découverte. Horreur. Des brûlures, partout. L'odeur n'était plus, tout comme son son oeil. Varsgorn prit soudain la main de la primat qui se laissa faire. Il l'abaissa, puis fit de même avec son bandeau. Myra était perdue. Soudain, sa parole sembla revenir. Bien décidée à mettre des explications sur ceci.

- Vars... Varsgorn... Ton oeil, il... tu aurais dû rentrer, ou au moins me prévenir ! Ce n'est pas possible, dis moi que ce n'est pas possible ! Comment t'es-tu fait ça ? Ton oeil, les brûlures, tu n'y vois plus. Tu souffres ? Qui t'as fait ça ? Pourquoi ? Pourquoi ne m'as-tu pas prévenue ? Qui est l'imbécile, le raï dégénéré, le foutu imbécile qui t'as fait ça ? Je...

Elle n'arrivait plus à réfléchir, elle n'avait qu'une envie, savoir. Et faire regretter ce geste à l'agresseur de son amant.
Il restait cependant une seule question qu'elle n'osait poser. Qui que cela pouvait être, il ne pouvait qu'être puissant pour avoir réussi à blesser l'ancien mercenaire ainsi. Ce n'était pas un guerrier de bas étage, loin de là. Mais qui cela pouvait-il bien être...

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Myra lui sauta d'abord au cou, puis elle le frappa. Varsgorn ne réagit pas. Il attendait. Il se doutait qu'elle n'avait pas vu le bandeau sur son oeil. L'obscurité sûrement. Il s'était attendu à sa colère aussi. Un silence total pendant son voyage. Sa réaction était logique.

Soudain, les mots semblèrent se stopper dans sa gorge. Elle avait vu le bandeau.

La dessinatrice leva une main tremblante vers le visage du trésorier. Varsgorn la laissa faire. Il était inutile de l'arrêter. Elle avait le droit de voir ce qu'il s'était passé. Sous les doigts fébriles de la femme, le bandeau bougea et ce qu'il cachait fut dévoilé. L'horreur se lut dans les yeux de Myra et Varsgorn lui prit le bras pour l'abaisser. Il en fit de même avec son bandeau.

Un flot de paroles sortit de la bouche de Myra. Si rapide qu'on avait l'impression que les mots étaient tous collés entre eux.

- Vars... Varsgorn... Ton oeil, il... tu aurais dû
rentrer, ou au moins me prévenir ! Ce n'est pas possible, dis moi que ce
n'est pas possible ! Comment t'es-tu fait ça ? Ton oeil, les brûlures,
tu n'y vois plus. Tu souffres ? Qui t'as fait ça ? Pourquoi ? Pourquoi
ne m'as-tu pas prévenue ? Qui est l'imbécile, le raï dégénéré, le foutu
imbécile qui t'as fait ça ? Je...

Avant de prendre la parole à son tour, Varsgorn la poussa légèrement dans ses appartements afin d'y entrer. Il ferma la porte derrière lui. Il était inutile de continuer cette discussion dans les couloirs.

Il avait eu le temps de réfléchir à ce qu'il dirait à Myra.

- Je ne t'ai rien dit pour ne pas t'inquiéter.

Difficile de dire cela sachant qu'elle s'était tout de même inquiéter pour lui sans qu'il ne dise rien. Mais il savait que s'il avait dit qu'il avait été blessé mais qu'il désirait rester loin des gens pour le moment, elle aurait fait un pas sur le côté pour le retrouver.

- Je ne souffre plus, les rêveurs se sont bien occupés de moi.

Seul son égo était blessé. Et cette plaie-là, il aurait du mal à la refermer.

- C'est un brigand qui m'a attaqué par surprise afin de me voler. Sa maudite torche m'a brulé le visage.

Il n'avait pas voulu le mentir mais il commençait à connaître Myra et il savait très bien qu'elle serait capable de se lancer dans une croisade pour faire payer celui qui avait touché à Varsgorn. Dolohov avait fait suffisamment de dommage, inutile que Myra aille se frotter à lui.

Le masque d'inquiétude n'avait pas quitté le visage de Myra. Varsgorn s'approcha et l'embrassa.

- Ne t'inquiète pas, le plus dur sera d'affronter le regard des autres. Tu n'as pas à t'en faire.

Il entendait déjà la rumeur qui traverserait l'empire en un rien de temps. Mais il s'en moquait. Il n'y avait que le regard de deux personnes qui l'importait. Celui de Myra et celui d'Enelyë. Il faudrait qu'il aille voir sa fille adoptive dès le lendemain matin. Il fallait qu'elle apprenne la nouvelle de sa bouche et non par la rumeur que les élèves ne manqueraient de faire grossir. Pour certains, ils seraient un héros qui aurait affronter de nombreux ennemis. Pour la majorité, qui le détestait, le héros serait celui qui l'avait éborgné.

- Je m'excuse de ne pas t'avoir prévenu. Je n'arrivais pas à affronter mon image dans le miroir. Je voulais rester seul......

Il marqua une pause.

- Je suis vraiment désolé.

[Edition possible, j'espère que tu auras assez de matière pour répondre Wink

]

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Pour ne pas l'inquiéter ? Myra s'était sans doute bien plus inquiétée en ne voyant aucune nouvelle qu'en en ayant entre les mains. C'était une chose qu'elle savait bien faire ; s'inquiéter pour les autres. Surtout lorsqu'elle connaissait le passé du trésorier. Il y avait de quoi s'inquiéter. Le pourcentage de ses ennemis était loin de se trouver dans les négatifs.
Il ne souffrait plus. Comment savoir s'il ne lui mentait pas ? Elle n'arrivait plus à dire un seul mot. Ces derniers restaient coincés dans sa gorge dans l'attente d'une quelconque ouverture. Ses yeux étaient rivés sur ce cache-oeil, sur ce vide qu'elle devinait derrière le cuir. Ses mains tremblaient encore, elle ne savait plus où se mettre. Ses doigts commencèrent à se crisper, son coeur battait plus fort que de coutume.
L'explication de Varsgorn ne tenait pas la route. Si cela avait été quelqu'un d'autre, sans doute, elle l'aurait cru. Mais il s'agissait de Varsgorn. Il ne pouvait s'être fait avoir aussi facilement par un brigand et sa torche. Il lui mentait. Elle savait reconnaître le mensonge en lui, elle le perçait rapidement. Peut-être était-il un guerrier sans failles, mais à elle, il ne pouvait rien cacher. C'était sans doute une de ses seules faiblesses. Elle. Elle était sa faiblesse.
Pourquoi lui mentir ? Etait-ce aussi grave que cela, que s'était-il passé pour qu'il ne daigne pas lui livrer l'entière vérité ? L'inquiétude marquait toujours les traits de la dessinatrice. Il le voyait bien. S'approchant d'elle, il l'embrassa. Pour la rassurer sans doute. Mais cela n'avait aucun effet sur elle. Elle s'inquiétait et rien ni personne ne pouvait rien y faire.

Bien sûr qu'elle s'en faisait, elle l'aimait. Comment pouvait-il lui demander de ne pas se préoccuper de lui, de ne pas s'en faire. Elle faillit lui redonner un coup pour le faire réagir, mais elle ne le put. Son regard ne quittait pas le sien. Et ses paroles la transperçaient. Il voulait être seul... La solitude n'était bien souvent pas la meilleure solution et il paraissait ne pas le savoir.
Myra avait expérimenté la solitude. Elle se souvenait de ce sentiment d'impuissance et de vide qu'elle avait alors ressenti. La solitude était un fardeau bien trop lourd à porter, elle ne savait comment ceux qui la côtoyaient tous les jours faisaient pour ne pas devenir fous. La solitude n'était pas le pire. Le plus effroyable était l'égarement que l'on pouvait ressentir face à la situation qui nous englobait et nous dévorait de l'intérieur.
Elle devait faire comprendre au trésorier qu'il n'était pas seul, qu'il ne devait plus affronter ce genre de choses dans son coin. A présent, il l'avait elle. Il devrait faire avec.
Myra arrêta d'observer l'oeil caché pour jeter un regard empli de colère à l'homme qui se tenait face à elle.

- Rester seul ? Et moi, je sers à quoi hein ? J'suis une simple décoration ? Une punaise de plus dans ton tableau de chasse ?

La colère ressortait. Colère contre l'homme qui avait éborgné son amant, colère contre lui, colère contre elle. Contre son impuissance. Elle ne savait plus où elle en était, elle ne savait plus trop quoi dire. Sa colère parlait pour elle.

- J'vais te dire à quoi je sers ! Je suis là pour toi, raï buté et dégénéré ! Et que tu ne sois pas venu me voir, que tu ne te sois pas confié à moi plus tôt me met dans une colère sans nom !

Elle était vexée qu'il n'ait pas voulu se confier à elle, qu'il ait voulu garder tout cela pour lui. Elle était vexée, mais ne pouvait s'empêcher de vouloir le prendre dans ses bras.

- Si tu veux être seul, autant l'être entre mes bras, imbécile.

La primat avait murmuré sa dernière phrase, mais cela ne la rendait pas pour autant douce et agréable. Elle lui en voulait, même si ce n'était pas sa faute. Elle s'inquiétait, c'était normal.
Elle sembla soudain s'affoler et fit tourner Varsgorn sur lui-même ; elle voulait vérifier qu'il n'ait rien d'autre. Car après tout, son ennemi l'avait atteint à l'oeil. Pourquoi ne l'aurait-il pas eu autre part. Rien. Que son oeil, une seule blessure. Une blessure de trop.
Les sentiments de Myra se confondaient entre eux, elle passait de l'un à l'autre sans aucun ordre de logique. Son esprit égaré, elle ne gérait plus ses émotions. La colère revint lorsqu'elle se souvint de son mensonge. Son poing se leva à nouveau et elle le frappa. Peut-être comprendra-t-il enfin ce qu'elle essayait de lui inculquer dans sa tête.

- Et ne me mens pas, tu sais pertinemment que tu n'y arrives pas avec moi !

La dessinatrice n'arrivait plus à gérer ce qu'elle ressentait. Après ce coup et ses paroles, elle sauta au coup de son amant et l'embrassa longuement. Lorsqu'elle se retira, quelques larmes s'étaient glissées aux coins de ses yeux flammes.

- Si tu ne veux pas me dire la vérité, dis le moi en face. Mais n'invente pas des mensonges plus gros qu'Al-Jeit... Et arrête de me faire peur comme ça.

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Les paroles de Myra frappèrent Varsgorn avec plus de forces que si elle avait levé la main sur lui. Toute sa vie, il avait été seul. Quand il était jeune, il était entouré de domestiques, de serviteurs mais pourtant, il avait été seul toute son enfance. Ses parents n'avaient jamais été vraiment présent et des domestiques payés pour faire plaisir à leurs maîtres, ce n'était pas la même chose que de vrais amis, des amis avec qui jouer, des amis avec qui partager ses secrets, des amis en qui on pouvait avoir confiance. Varsgorn n'avait pas eu le droit à cela. Ses parents avaient toujours refusé qu'il s'aventure hors des limites du domaine. Ses seuls compagnons de jeux avaient été les enfants des domestiques, mais une nouvelle fois, ce n'était pas comme de vrais amis.

Toutes ses années de solitude l'avaient rendu bien évidemment solitaire. Du coup, quand il vint à l'académie de Merwyn, il ne se fit que de vagues connaissances. La seule personne avec qui il fut vraiment proche, ce fut bien évidemment sa maître marchombre. Mais quand il rejoignit le Chaos, cette seule personne devint pour lui une véritable ennemie. En tant que mercenaire, il cultiva la solitude qui l'avait accompagné toute sa vie. Cette solitude était sa force. Puis, quand il avait renoncé à sa vie de mercenaire, il ne pouvait plus faire marche arrière. Comment pouvait-il avoir la confiance des autres après une vie dans la Chaos? C'était impossible et lui-même n'était pas sûr de le vouloir.

Mais aujourd'hui, c'était différent. Il n'était plus seul. Il y avait Myra. Il y avait Enelyë. Il devrait changer ce qui avait accompagné sa vie pendant tant de temps. Il devait bannir cette solitude.

Le poing de Myra le tira de ses pensées. Il la prit dans ses bras.

- Je suis désolé, vraiment désolé.

Il l'embrassa.

- Je n'ai pas l'habitude de me confier, pardonne moi.

Il lui caressa la joue.

- Je... Je....

Il hésita. Devait-il tout lui avouer? Il avait presque honte de ce qui était arrivé. C'était lui qui avait provoqué Dolohov. Tout était de sa faute. Il était responsable de son malheur. Non, il ne devait plus mentir. Il aimait Myra, il était temps de lui prouver.

- J'ai été voir un homme quand j'étais à Al-Vor. Un homme qui m'avait provoqué. Mon passé de.... Mon passé m'a rattrapé et j'ai été chez lui. Nous nous sommes battu et tu as le résultat devant toi. Il s'appelle...

Il marqua une pause, hésitant à lui avouer le nom de celui qui l'avait rendu borgne. Mais une nouvelle fois, il se fit violence et il avoua.

- Il s'appelle Dolohov Zil'Uraïn.

Il avait tout dit. C'était la première fois qu'il se confiait autant.

- Désolé de t'avoir mentit.

[j'espère que tu auras une idée pour répondre]

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Seules des excuses sortaient de la bouche du trésorier. Rien de plus. Des excuses ? Ce n'était pas dans ses habitudes. Etait-il à ce point touché par ce qu'il lui était arrivé ? Que cachait donc ce mensonge pour qu'il se comporte ainsi devant elle ? Tout ceci était bien trop curieux pour qu'elle ne s'y attarde pas. Et Myra aimait savoir la vérité. Surtout lorsqu'il s'agissait de proches. Elle ne pouvait concevoir que l'on fasse souffrir ces derniers devant elle.
Varsgorn l'embrassa langoureusement, pour se faire pardonner. Encore des excuses. Il n'avait pas l'habitude de se confier... Parfois elle oubliait cette vie passé qu'il avait eu, elle oubliait qu'il fut un temps où il n'accordait sa confiance qu'à lui-même. Etre solitaire toujours sur ses gardes. Elle oubliait qu'il apprenait la confiance et l'amitié. L'amour.
Un mercenaire était humain en apparences. Ses gestes et son comportement relevait de la bête. L'ancien mercenaire apprenait à vivre avec autrui.
Il lui caressa la joue, hésita. Les mots ne semblaient pas vouloir résonner dans la pièce, stoppés par une barrière invisible. L'hésitation perdurait dans le temps, mais la dessinatrice ne s'en formalisait pas. Elle attendait, ses yeux fixés sur lui. Un éclat d'encouragement brillait dans son regard flamme.

Prend ton temps, j'attendrai les minutes dont tu as besoin.

Le temps se rallongeait. La voix de stentor de Varsgorn résonna soudain dans l'entrée des appartements.
Son passé... Les soupçons de Myra étaient fondés. Son oeil, cela ne pouvait qu'être le résultat d'une altercation entre lui et un ancien allié – ou ennemi – . Dans tous les cas, quelqu'un vivant encore dans ce monde qu'était le chaos.
Sauf que c'était bien le trésorier qui s'était délibérément jeté dans la gueule du loup. Son oeil, il ne devait sa perte qu'à lui-même. La primat avait beau penser cela, elle ne pouvait s'empêcher de maudire le nom qu'il ne pouvait prononcer. Il hésita moins longtemps.
Le nom. Enfin. Dolohov Zil'Urain. L'étrange impression de connaître ces syllabes l'envahit soudain. C'était peut-être qu'une impression après tout. Même si elle ne pouvait s'empêcher de rechercher dans sa mémoire un souvenir qui pouvait être rattaché à ces quelques lettres.

Ses pensées se stoppèrent lorsqu'il s'excusa à nouveau. Trop en une seule journée. Avait-il seulement adressé de pareilles excuses à quelqu'un d'autre dans sa vie ? Elle en doutait. Peut-être à sa file adoptive. Et encore. Il n'était pas homme à s'excuser. Bien trop d'amour propre.
Myra lui prit la main, sourit, et le tira jusqu'au grand canapé rouge qui trônait dans ses appartements. Imposant, on pouvait croire qu'il était le seul maître de ces lieux. Ils s'assirent, elle dut se battre contre son envie de se blottir contre lui. C'était la première fois qu'ils parlaient à coeur ouvert, tous les deux. Elle ne pouvait gâcher ce moment. Ceux-ci étaient tellement rares. Après tout, peut-être n'était-ce que le début. Peut-être se détendrait-il quelque peu et se confierait-il plus à elle ? Peut-être.
La dessinatrice l'observait, cajoleuse. Son regard ne pouvait s'empêcher de tomber sur ce vide qu'elle devinait. Prenant ses mains dans les siennes, elle caressait cette peau rugueuse forgée au fil des entrainements.

- J'ai eu peur pour toi... Connaissant tes anciennes relations.

Zil'Urain. Elle avait retrouvé. Nobles, elle avait sans doute croisé quelques uns de leurs membres dans des diners mondain lorsqu'elle était enfant. Elle n'en savait pas plus. A vrai dire, elle ne s'intéressait que très peu à la noblesse. Pour certains, c'était la seule vie digne d'être vécue, pour d'autres elle était enviée. Myra n'avait jamais porté attention aux privilèges qu'elle avait de par son nom. Les Ril'Otrin n'étaient peut-être pas aussi influents que certaines autres familles, mais ils avaient leur place dans les diners mondains.
Zil'Urain. Dolohov. Ce nom resterait gravé dans sa mémoire. Soudain, elle sut. S'il était du passé de son amant, il était mercenaire. Un homme du chaos dans un monde si privilégié. Leur pouvoir s'étendait-il plus loin encore ? Ou avait-il une limite ? Elle en doutait. Le chaos pullulait dans toutes les racines de Gwendalavir.

Myra éloigna ces pensées pour jeter son regard dans celui de l'être aimé. Ses yeux... Personne ne l'avait jamais regardé ainsi. Ce fut à ce moment qu'elle se rendit compte de la valeur qu'avait ce qu'elle tenait entre ses mains. Ses yeux orangés ne pouvaient signifier qu'une seule chose.

Tu es là, c'est tout ce qui m'importe. Oeil ou pas...

Elle ne pouvait cependant empêcher les questions d'affluer.

- Dis moi... Ce Zil'Urain. Fait-il parti du chaos ?

La curiosité était forte. Bien trop pour qu'elle l'ignore. Soudain, un murmure. Peut-être ne l'avait-il pas entendu.

- Promet-moi de ne plus tenter le diable ainsi... Ou emmène-moi avec toi...

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Les mots de Myra furent comme une révélation pour Varsgorn. "Ce Zil'Urain. Fait-il partit du Chaos?". Le trésorier n'avait jamais fait le rapprochement. Trop occupé par la perte de son oeil et l'humiliation qu'il avait reçu. Mais maintenant que Myra en parlait, tout cela apparaissait comme une évidence. Sa résistance formidable au combat ne pouvait être la conséquence d'un simple entraînement de noble. Un simple noble se serait fait balayer par un homme qui maîtrisait à la fois l'entraînement marchombre et mercenaire. Dolohov était un fils du Chaos. Certainement de haut grade vu qu'il maîtrisait le Don. Un Mentaï. Le Chaos avait finalement réussit à faire payer sa trahison à Varsgorn. Un oeil en moins.

- Promet-moi de ne plus tenter le diable ainsi... Ou emmène-moi avec toi...

Ce n'était qu'un murmure mais Varsgorn l'avait entendu. Il ne pouvait promettre une telle chose. Tenter le diable, c'était presque devenu un besoin pour lui. Il avait créé la personne d'Eustache Fil'Danger pour protéger Myra et Enelyë, pas pour arrêter les affaires louches et dangereuses. C'était d'ailleurs la raison pour qu'il ne puisse promettre à Myra de l'emmener avec lui. La mettre en danger alors qu'elle n'avait pas reçu un enseignement poussé lui permettant de se débrouiller seule face à des tueurs sans scrupules n'était pas envisageable. Maintenant qu'il l'avait trouvé, il ne voulait pas la perdre. Il aurait pu lui mentir et promettre tout de même mais s'il y avait bien une personne a qui il ne souhaitait pas mentir, c'était Myra. Lui cacher certaines vérités, oui mais lui mentir, non.

- Je ne peux pas te promettre une telle chose. Le Chaos continuera certainement à me poursuivre toute ma vie. Le danger me colle désormais à la peau.

Il l'embrassa.

- Et je ne t’emmènerais jamais. Te perdre sera la pire chose qui pourra m'arriver. Je t'aime.

Il approcha sa bouche de son oreille.

- Je te promets simplement de faire plus attention désormais, dit-il dans un murmure.

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