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| Allez, Allez, fusillons notre jeunesse, finis les feignants remplis d'allégresse ! [Terminé] | |
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Messages : 195 Inscription le : 27/05/2008 Age IRL : 32
| Sujet: Allez, Allez, fusillons notre jeunesse, finis les feignants remplis d'allégresse ! [Terminé] Mer 8 Mai 2013 - 22:16 | | | « Lohan, t’as une lettre.. Le teylus avait jeter un coup d’œil sur le parchemin, -Je peux te la lire si tu veux ? - Oui, vas y - C’est..C’est…elle avait sentit un peu d’angoisse dans sa voix. une convocation du fiel » Les conversation s'étaient tus nette dans la salle commune et juste après elle avait entendu de petits chuchotements. « Qu’Est-ce qu’il te veux ? lui avait on demandé », -qu’Est-ce que tu as fait de mal avait-elle entendu.
« Je ne sais pas » Et on lui avait jeté des silences suspicieux.
Elle n’en avait pourtant pas la moindre idée, et même en se creusant la tête, elle ne trouvait rien. Elle était peut être sortie, une ou deux fois la nuit, mais elle était certaine de ne pas avoir été vue. Elle n’avait jamais rien piquer aux cuisine, arrivait à l’heure en cours, était discrete mais toujours là. Elle se savait presque qu’irréprochable et cela la rassurait, même si au fond, elle sentait que le fiel arriverait toujours à trouver quelque chose qui n'allait pas. Mais pourquoi donc l'avait-elle convoquée, elle ?
Elle avait repris la lettre de la main du Teylus doucement.
« Je verrais bien, ça ne doit pas être si grave… » « Ouais, t’as raison, t'es sérieuse, t'as pas à t'en faire. » Le son de la voix sonnait trop peu juste pour qu’elle soit convaincue.
Le mythe qui entourait le nouvel intendant l’angoissait un poil et c’était de la faute des Teylus: Astragale tremblait à chaque fois qu’on prononçait son nom et les autres complotaient contre lui, en silence, pour se soustraire à sa main de fer. Mais elle, elle n’en avait pas peur du fiel pas peur du tout. Et même s’il était sévère, tranchant et froid, il était juste , et plutôt prévisible. Il se tenait au code, ça ne plaisait pas beaucoup à tous le monde, les élèves grognaient, elle avec, accompagnés par les professeurs qui n’avaient pas peur de se faire mal voir. Mais Aziel semblait venir d‘une autre époque, comme leurs uniformes, et il ne changerait pas. Et justement, c’était ça qui lui semblait rassurant.
Astragale n' était pas présente au moment de la lettre et elle espérait que la rumeur n’arrive pas jusqu’à elle. Elles s’inquiétait un peu pour rien, Astra, et Lohan n’avait pas envie de la voir se tordre les doigts en tramblant, ça l’aurait rendu nerveuse. Elles devaient toutes les deux sortir voir le fameux marché l’’après midi de la convocation et Lohan ne voulait pas changer leurs plans pour une histoire de fiel maussade. Ca allait être une belle après midi de début d’été, elle mangeraient les premières glaces à la cérises de la saison, écouteraient les histoires du marchand de perles de Shawna -si l’homme existait vraiment- et s’éclabousseraient au bord de la fontaine de la Neera. il n’y avait pas lieu de s’inquiéter.
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Il faisait chaud, tout ce soleil lui piquetait la nuque et rameutait les élèves dans les jardins. C’était parfait. Elle avait pensée à leur intendant qui devait pourrir dans sa cellule, sa geole de la capitale , loin de l’été et de leur insouciance. Pauvre Jehan. Jehan criminel, elle ne savait pas. même si l’idée de voir ce grand corps maladroit élaborée une pensée de meurtre la faisait sourire. Jaune . Condamné à mort le Jehan, allons ,c’était une mauvaise plaisanterie, Jehan, leur Jehan ? Était ce nouveau poste à la cour qui lui étais monté à la tête ? Cette vie qu’elle s’imaginait de frasque et de complot qui ne lui convenait pas ? Ou alors, alors..hypothese la moins probable, leur intendant avait donné une image de lui qui était différente de ce qu’il était réellement. Un double jeu, . Elle ne savait pas et ces pensée la plongeait dans la plus grande perplexité.
Le nom d’Aziel s’étalait maintenant, à la place de Jehan, elle sentait les petits sillons creusé sur la plaque de métal . Aziel Ril'Krysant ca devait dire, ou peut être sire Aziel Ril'Krysant, ou peut être encore Sire Intendant Aziel et Ril 'Krysant.
Elle n'avait pas hésité, elle avait frappé, sure d’elle, et avait attendu calmement le entrer. Tout était si différent du temps ou elle allait renverser les armoires pour récupérer les flutes volées de Shawna. La pièce sentait le propre, il n’y avait plus cette odeur perpetuelles de poussière mélangée à celle des divers objets, poils d'animaux ou reste de nourriture qui peuplaient le bureau de Jehan, ça sentait le net, le rien en somme. Et le rien était rigide,
Elle s’avança à une distance du bureau, attendit quelques seconde que son interlocuteur prenne la parole, puis comme il ne disait rien, elle supposa qu’il attendait d’elle qu’elle s’exprime .
« Seigneur Ril'Krysant, fit elle docilement ..Vous m’avait convoqué.? »
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| | Messages : 62 Inscription le : 14/09/2012 Age IRL : 53
| Sujet: Re: Allez, Allez, fusillons notre jeunesse, finis les feignants remplis d'allégresse ! [Terminé] Sam 18 Mai 2013 - 21:04 | | | Aziel Ril’ Krysant souriait.
C’était suffisamment rare pour être noté. Oh, ce n’était pas un sourire plein de dents, même un sourire plein de lèvres, non, c’était un petit sourire qui s’enroulait dans une des commissures et s’étirait légèrement, un sourire très plat, pas courbé. Une esquisse de rictus, peut-être, révélant des dents très droites, bien à leur place, un peu abîmées et un peu vieillies par le temps. Il regardait par la fenêtre, où un grand soleil brillait. Il brillait même si fort qu’on se serait cru à la capitale, loin du climat si rigoureux de ce Nord rustre. Aziel chantonna une prière au Dragon, entre ses dents, tapant la mesure du bout de ses doigts, les mains croisées dans le dos. Une prière très légère, très douce, celle que l’on dit le matin pour remercier le Dragon d’enflammer le soleil et de leur permettre de repousser les ténèbres. En comparaison, toutes les grandes prières dites par les grands prêtres impériaux lors de la mort de Empereurs parlaient des cieux qui s’ouvraient et des larmes de la Dame qui se déversaient sur la terre, pendant des jours et des jours, pour pleurer une âme grande qui venait de se détacher de son enveloppe terrestre. Le soleil se cachait pour qu’on ne voit pas ses larmes de feu, et le Dragon déployait ses grandes ailes noires dans le ciel pour empêcher toute lumière de troubler la période de grand Deuil. Le soleil était une augure. Son augure.
Parallèlement, son travail à l’Académie se passait de mieux en mieux, et il n’avait à remercier que sa propre résistance à la pression. Cette école de bouseux s’était avérée bien plus difficile que prévue à faire rentrer dans les rangs, les problèmes étaient multiples et pas toujours orthodoxes, et l’équipe pédagogique des moins conciliantes. Mais il lui semblait que petit à petit, sa présence était moins étrangère, et s’il y avait encore énormément de choses à y déplorer, cela se corrigerait avec le temps. Les yeux observateurs s’étaient braqués sur d’autres horizons, là où on tendait le crêpe noir et où de nombreux ordres étaient donnés pour préparer la nouvelle impératrice au rôle qui lui écherait le temps venu. C’était une occasion à saisir, même s’il souhaitait faire tant de choses bien plus importantes, laisser tomber ces idioties pour retourner à la capitale où son rôle s’avérerait crucial. Sifflotant une ôde aux dieux, il rédigea l’ordre de convocation de Lohan Gayana. Commencer par celle-là. Sa présence à l’Académie l’avait toujours gênée. Déjà, que l’on se permette de donner leurs chances aux gueux, il trouvait cela inacceptable, mais que l’on se permettre de faire des farces en apprenant aux estropiés à se battre…
*
Le contact fut rompu sitôt que les coups résonnèrent à sa porte. Ecrire des lettres était beaucoup trop long désormais, et il avait du se résigner à communiquer par les Spires avec les différentes personnes de la capitale avec lesquelles il devait s’entretenir, malgré sa répugnance à ce genre de procédés et sa difficulté à le maintenir très longtemps. Seule la Dame Nil’ Tremaine restait hostile à tout contact mental, et il devait communiquer avec elle par le moyen d’intermédiaires. Bientôt, pourtant…
Il lui fallut plusieurs secondes pour mettre ses spires en ordre, fermer proprement l’accès à l’Imagination et reprendre contact avec la réalité, secondes que la convoquée prit pour entrer, malgré le fait qu’il ne lui eut pas permis d’entrer. Lohan Gayana se présenta maladroitement devant lui, le menton un peu trop haut, les yeux regardant dans le vide. Les handicapés le dérangeaient profondément. Si les dieux avaient choisi de diminuer certains être humains, c’était qu’ils le méritaient et ils auraient dû rester à leur place. Pas tenter de s’intégrer à une école pour personnes normales promises à un avenir bien meilleur. Malheureusement, pour l’instant, il n’avait trouvé aucun motif pour la mettre à la porte sans attirer l’attention.
- Veuillez vous asseoir, Demoiselle Gayana. Il reprit, devant son immobilité. Le siège sur votre gauche, à longueur de bras.
Pathétique.
- La plupart du temps, lorsque je convoque des élèves dans ce bureau pour les sermonner, ces élèves ont fait quelque chose qui mérite que je les sermonne. C’est bien tout votre problème. Vous n’avez rien fait. Depuis des années.
Il eut le réflexe de lui montrer le dossier qu’il gardait sur ses progrès comme il en gardait sur chaque élève, avant de se rendre compte de la vanité d’un tel geste.
- Vous êtes entrée à l’Académie de Merwyn plusieurs années auparavant sous l’égide de mon prédécesseur, afin de vous perfectionner dans le maniement des armes. Néanmoins, alors que tous les autres élèves montent une pente de progression plus ou moins rapide, vous n’avez toujours pas accompli la moindre avancée. Vous êtes toujours bois, alors que tous les autres élèves de votre génération sont déjà sortis de cette école.
Aziel Ril’ Krysant poussa un soupir entre agacement et lassitude. Combien de temps encore devrait-il perdre son temps avec de telles affaires alors qu’il devait se rendre à Al-Jeit au plus vite pour assister aux funérailles ?
- Cela ne peut plus durer. Je n’ai pas les pouvoirs de vous mettre à la porte de cet établissement sans faute grave, notre Libérateur bien-aimé ayant mis sous sa protection tous les élèves qui entrent dans cette école. Néanmoins, je vous le dis très clairement. Si, aux prochaines épreuves de passage, vous échouez encore une fois, l’Académie de Merwyn se déleste de la moindre responsabilité envers vous.
Malgré sa forte envie de la jeter dans la ville et de regarder le travail de la Dame s’accomplir sur les plus démunis et les créatures diminuées, Aziel Ril’ Krysant ne pouvait se permettre la cruauté, aussi tenta-t-il malgré tout d’adoucir le ton de sa voix et de se tenir aux principes posés par le Libérateur ?
- Connaissez-vous de la famille ou quiconque qui voudra bien de vous ?
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| | Messages : 195 Inscription le : 27/05/2008 Age IRL : 32
| Sujet: Re: Allez, Allez, fusillons notre jeunesse, finis les feignants remplis d'allégresse ! [Terminé] Dim 29 Déc 2013 - 18:27 | | | Il y avait du récif, dans les tons durs d’Aziel. Avant même qu’il ne prononce la sentence elle entrevit la fin du microcosme confortable, la fin d’un nid qu’elle avait cru éternellement malléable, la fin du rêve embrumé, la fin de l‘Aca, pour elle. Puis il débita implacable la sentence, et elle se tordit les mains, nerveusement. Ses pupilles courraient au bout de ses doigts, sensibles, adroits. Que pouvait elle reprochait à ces membres dévoués ? , Sa paume gauche écorchée par la chaleur du baton était leste à mimer, à apprendre, à transmettre. Elle savait faire rouler un poignard dans ses doigts, elle savait frapper juste là ou il fallait, elle tressait à l’aveugle, en couronne pour retenir sa chevelure avant l'entrainement , elle reconnaissait le squelette des paysages qu’elle frollait éternellement. Et pourtant l’echec. Oui, juste maintenant. L’echec. Les doigts pas assez habile, pas assez prompt pour être ..Comme les autres.
Elle sentait une boule au ventre lui serrait l’estomac et l’odeur du rien lui prendre le nez pendant qu’il parlait. Tout ce qu’elle s’était répétée pour elle, en tremblant lui arrivait dans le nez à un moment ou elle sentait quelque chose se construire entre les Teylus et ou les perspectives de sorties avec Astragale l’enthousiasmait. Elle savait que ca allait un jour arriver, et au fond, c’était ça qui était douloureux. Elle pali , tendue, elle tenta de sourire, un peu, juste pour montrer que ce n‘était pas si grave. La bouche cousue par les mots, tétannisée Tout remonter du fond, et aller ressortir par ses yeux s’il continuait
Elle aurait voulu qu’il ne la voit pas se défaire, qu’il s’adresse à elle sans utiliser ce ton qu’on donnait aux petits enfants, qu’ils se quitte d’adulte à adulte en se serrant la main peut être. Mais il la vit palir puisqu’il demanda presque mielleux, comme un rachat ce qu’on allait faire d’elle: Une aveugle abandonné aux portes de l’académie, à moitié gelé par les neiges d’Al-Poll, cela devait faire mauvais effet sur les seuils du libérateur.
Au fond d’elle, ça hurlait sourdement. Elle ne pouvait pas tout laisser ici, toutes ces choses qu’elle avait commençé sans pouvoir achever, ces gens qu’elle connaissait à peine et qu’il fallait rencontrer, vraiment.
Et pourtant, et pourtant, dans sa tête elle bricolait ensemble en patchwork, un nid de coton pour les paroles d’Aziel. Ce n’était pas injuste au vu de toutes les fois ou elle avait préférait fuir la sévérité du maitre d‘armes , les fois ou elle était sortie la nuit, les fois ou elle avait baissé les bras, les fois ou elle avait dit, affirmer, que ça n’était pas sa voie -finalement-. Le souvenir d’Anaïel est de ses mots sifflants, dans sa tour, n’avait-ce pas été l’avertissement auquel elle aurait du se fier ? Partir, tant qu'elle pouvait choisir. Partir, avant qu'on la renvoie avec des mots affligés.
Après tout ce n’était pas si grave -se souffla-t-elle peu convaincu, c’était dur mais pas si grave. Il faudrait juste quitter ces hauts murs et bâtir un bout de vie autre part qu’ici. C’était inquiétant, c’était l‘inconnu ..Et pas si grave. Et puis, avec un peu de chance elle réussirait à passer les prochaines épreuves du passage, alors pourquoi s’en faire maintenant. Puis au fond, elle était pour les autres une camarade de passage, ils s'affligeraient un peu de son départ mais ils l'oublierait. Et elles les oublieraient. La vie. Il s’écoula quelques petites secondes entre la question et la réponse, le temps qu’elle ravale la boule qui montait dans sa gorge
"Je me débrouillerai". Fit-elle d’une voix qu’elle aurait voulu claire
Il avait déjà prévu son départ. Les épreuves n'étaient qu'un prétexte pour la renvoyer.
Et elle souffla discrètement une bonne fois pour retrouver un peu de calme, avant d’enchainer.
« Je vous ai entendu, je vais faire pour le mieux. Est-ce que je peux sortir maintenant ?"
Elle ne dit rien sur sa cecité , rien de ce que tant elle comprenait que l’argument ne soit pas valable. Elle n’avait jamais voulu de ce pathétisme qui déclenchait la sollicitude forcenée des gens autour d’elle, alors elle s’y tiendrait . Pas aujourd’hui, même lorsque l’handicap aurait pu lui servir,
Elle sortie lorsqu’il lui permis . Il y avait trop de soleil dehors pour pleurer, ou même faire la tête, ça lui tapait sur le crane, tellement s‘était chaud, malgré la neige. Fort, vivifiant, aveuglant même dans l'obscurité . Elle s’était dirigée vers la fontaine et avait tourné, tourné en rond , en réfléchissant- pas vraiment réfléchir en fait, mais reproduire dans le noir les crissements de son crane en marchant consciencieusement dans ses traces de pas. Puis elle s’assis sur le bord de la fontaine pour attendre Astra, cherchant à trouver les flaques de lumière à travers l’ombre de la haie pout faire bruler ses mains Quelque chose l’atteint mollement à l’épaule et la fit sursauter. Une boule de neige qu’elle n’avait pas entendu voler venait de s’écraser sur sa manche.
Elle ne chercha pas à répliquer, elle tourna la tête vers l'origine , en mettant un bras devant son visage, prudente.
La neige glaçait les odeurs sous sa fraicheur fondue et les bruit mat des pas se ressemblaient tous
« Astra ? » demanda-t-elle, inertaine de l’identité de son adversaire.
Elle aurait aimé que ça soit elle, elle aurait aimé qu'elle vienne la délivrer de sa rencontre avec Aziel comme d’un mauvais souvenir, qu’elle vienne lui parler de perles, de la tarte succulente de midi, des derniers déboires de Cerys, de la neige ou de la pluie.
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| | Messages : 61 Inscription le : 20/10/2011 Age IRL : 33
| Sujet: Re: Allez, Allez, fusillons notre jeunesse, finis les feignants remplis d'allégresse ! [Terminé] Lun 3 Fév 2014 - 10:41 | | | Il y avait eu une punition, ça aurait pu être quelque chose de l'ordre du divin, du moins, c'est ainsi qu'Astragal le prit. Quelque chose de complètement hasardeux, inexpliqué, mais dont se dégageait un sens particulier, exutoire. Dans un premier temps, lorsque Ril'Krysant l'avait fait appeler, Astragal, comme à son habitude, s'était laissé aller aux plus terribles conjectures. L'accident découvert, quelqu'un qui aurait parlé, tout ça qui volerait en l'air – quoi, mais c'était impossible, pas par ce temps, pas avec les flocons qui tombaient tout doucement, pas à la découverte de ce que « froid » signifiait, pas avant d'avoir pu vivre tout ce qu'il y avait à vivre à Teylus.
Elle était entrée dans le bureau, les larmes lui brulant les yeux, toutes excuses dehors et le fiel, en face, plus glacial qu'un courant d'air, avait juste grincé « La porte ». Alors bon, tout s'était ravalé derrière sa grande façade de fille, la fille était plus forte que l'actuel Astragal, pas encore à la hauteur de ce qu'elle voulait être en lui. C'était tombé, elle avait avoué, sans y penser, sans écouter, et fin, une aprèm, pour ça, certain diraient que c'est peu-cher. Peut-être. Astragal ne savait pas, on ne la condamnait pas pour meurtre, c'était pour le meurtre qu'elle s'amendait, qu'elle frottait fort par terre avec la brosse-à-dent. C'était pas une tâche rouge-sang-séché, ça aurait aussi bien pu.
La vérité, c'est que ça lui avait fait du bien, un bien fou, incommensurable. Tout était bien. Astragal vivait dans son conte de fée, comme dans une de ces boules du marché qu'avait un jour ramené une élève riche, boule qui contenait tout un village miniature, sur lequel on pouvait faire tomber la neige. La petite bulle était en place, bien en place autour d'elle. Le clan nouveau était là, avec ses tensions, ses multiples et grands secrets, avec ces isages, ces êtres qu'elle aimait et qui prenaient pour elle la place des premiers amis, de la nouvelle famille. Il y avait Halina, la grande soeur, le modèle, Loeva, la câline, tout douce, toujours légère, infiniment calme et si belle, il y avait Einar, sa tripelette, son meilleur ami, son frère, celui qu'elle préfèrait, le vrai. Il y avait, Cérys, le petit moucheron agaçant mais si fidèle, au final. Y avait le général, ses ténèbres merveilleusement attirantes, ces gentillesses toujours timides de dernière minute. Kloa, pire qu'une soeur, la seule peut-être qui était thülle, bien plus qu' Astragal ne le serait jamais. Le sang, de toutes façons, ne signifiait rien, rien du tout. Mais Kloa comptait pour tous ses silences, pour tous ses regards, qui étaient d'une neutralité parfaite et dont le dégout étaient absents. Plus qu'eux tous, il y avait Lohan- presqu'une mère, presqu'une peluche, mieux qu'un souvenir, quelque chose qui s'inventait, nouveau. Lohan, c'était celle qui lui assurait le confort, une place toujours au chaud près de la cheminée, un petit mot gentil entre deux portes, et qui ne demandait rien. Lohan, c'était la possibilité de rêver à aller à Al-Poll tout à l'heure, alors qu'elle savait presque tout, le pire, peut-être. Le reste, ce n'est pas qu'Astragal ne voulait pas lui en parler (en réalité, au stade de confiance où elles en étaient, Astragal lui aurait sans réserve confié sa vie, absolument entière, toutes ses peurs, toutes ses blessures, toutes ses faiblesses, et sans crainte) juste, le reste, Astragal voulait de plus en plus croire qu'il était possible que ça n'ait pas d'importance.
Kloa lui avait prouvé. Ca pouvait « ne pas en avoir ». On pouvait s'en foutre, pourquoi pas Astragal soi-même ? Lohan l'aimait, aimait Astragale, oh comme ce « e » là était particulier, tout doux, franc. Avec Lohan, Astragal n'avait pas à avoir peur de se trahir, pouvait juste être. Et cette liberté de l'être était plus grisante encore que le secret de leur relation, qui les blessait toutes deux mais affermissait le bonheur de la plus jeune. Il n'y avait même plus la peur vicérale et vomitive du Grand Rouge. On s'habitue à tout, et Aziel n'avait rien vu... rien. Et on craint moins les cerbères lorsqu'ils sont aveugles.
Ce jour-là, il n'y avait personne, Teylus était plus vide que le lit d'Aziel en hiver, et les présents étaient tous fatigués, occupés, sans qu'Astragal puisse dire à quoi.
Il neigeait de jolis flocons, comme hier, comme avant, et pouvait-on réellement s'habituer à un spectacle pareil ? Astragal était insouciante, oublieuse, les dernières traces de culpabilité l'avaient quitté quand sa punition avait pris fin. Secrètement, alors qu'elle dévalait les escaliers, elle en venait à penser que « oui, la mort d'Hestia avait été une véritable chance ».
Elle était jeune, vivante, et ivre d'avoir purgé sa peine, excitée par la neige qu'elle découvrait cette année, Astragale avait envie de s'encourir très vite chercher Cérys et Lohan, pour cette sortie en ville qui les attendait depuis longtemps dans son petit coeur. Astra n'avait pas de gants -juste ses mains pleine de cals, de tâches de rousseurs en constellation et le rouge du froid au bout des doigts en les promenant dans la neige. Il fallait dire qu'Astra n'avait pas beaucoup de sens du goût ou de l'art, que ce n'était pas quelqu'un qui possédait l'esprit marchombre même dans son petit orteil – alors que dessiner des volutes ou des bonhommes batons, ou des tatouages... ne la passionait qu'un temps, et que la boule de neige la démangeait.
Comme dans un rêve, Lohan apparut-ce pour quoi Astragal ne remercia ni dieux ni Aziel, ces choses-là la dépassaient de loin. Mais la boule de neige apparut et fut lancée, sans qu'il y ait dans le geste une once de cruauté, ou de pensée de « mal ». Bien sûr, Lohan n'aurait pas pu se défendre, ou la griller. Mais ça, c'était si facilement oubliable, ça n'existait pas. A son nom, sans vraiment de surprise, elle s'émerveilla quand même, d'être identifiée, d'être appelée aussi familièrement, qu'il n'y ait aucun reproche. Elle éclata de son grand rire si peu féminin, en hochant la tête, à grand renfort de perles qui s'entrechoquaient.
Il y avait dans ses gestes l'envie de joindre ses mains rougeaudes à celles de Lohan, de l'entrainer dans une ronde géante et de tomber à la renverse. Elle avait entendu Loeva parler de la manière dont on pouvait dessiner des anges dans la neige, et Astra voulait en faire un à Lohan pour que tout le monde voie à quel point c'était une personne géniale. A quel point elles étaient amies. Mais comme elle ne savait pas, et que l'idée que Lohan ne savait peut-être pas la traversait, elle lui lança juste un « Allé, viens ! » de personne qui est plus que jamais un enfant.
« Pas de trace de Cérys depuis la veille, mais merde, la neige, elle ne serait là qu'un temps, et Al-Poll, on savait jamais, quelqu'un aurait pu la faire s'écrouler demain, pourquoi attendre ? Allé, viens, viens, viens qu'on s'y perde, avec nos bourses vides ! On s'en fout, on fera la vaisselle pour payer un chocolat chaud. Ouais, on vendra la bague de Teylus... euh, non, fin, non, c'est un beau bijou, quand même. Non, mais je te le dis, c'est joli, les couleurs te vont bien, ce serait une tragédie de l'enlever. Ah ! »
Ca glissait, mais Astragal dansait pour ainsi dire autour de Lohan, l'asticotant de mais « Alllééééé » comme Einar savait si bien le faire, si bien qu'elle se planta violemment les fesses en terre, jurant comme un charretier. Et la première inquiétude de vrai- accident passée, elles partagèrent un fou rire, un peu nerveux. D'un coup, Astragal réalisait que Lohan risquait doublement de glisser, si elles allaient à Al-Poll ensemble. Elle attrapa la main que l'autre lui tendait – c'était devenu une habitude, pour ainsi dire. Lui coupant la parole par prétexte, et gardant sa main pour être sûre de ne pas la faire tomber, elle l'entraina pourtant plus fermement. « J'ai un argument imparable. Parait qu'il y a des beignets. » TOUT LE MONDE devait aimer les beignets, pas vrai ?
Allé, viens, j't'enmène en voyage, à l'autre bout du pont, à 5 km à peine, mais j't'emmène, et emmène-moi dans tes bagages, je prends tellement peu de place, je suis si légère.. Et parce qu'elle pouvait, et qu'elle pensait aux beignets elle se mit à raconter :
« Tain, le ciel, on dirait une lessive mal faite, j'te jure, c'est plus gris que sous les ongles de Cérys. Je te le dis au cas où tu lui prendrais les mains à l'occasion, j'crois qu'elle ne les a jamais lavé, la dernière fois que j'ai dû la ramener au dortoir, elles étaient encore toutes collantes à cause de la tarte à la mélasse de midi. Non, ce que je veux dire, c'est qu'elle aurait au moins pu se lécher les doigts, c'est trop bon la tarte à la mélasse... je t'avais raconté la fois où j'ai rencontré la grand-mère de Grand Siffleur ? Je sais toujours pas si je dois l'appelée Grande-grand Siffleur, ou quoi. Ah, bon ? »
Et imperceptiblement s'éloigner de la cour et des remparts, en gardant tout simplement sa main dans la sienne en précisant parfois « Gaffe, y a un piège droit devant ».
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