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 Neglecta erat... (RP privé) (RP inachevé)

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Dolohov Zil' Urain
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MessageSujet: Neglecta erat... (RP privé) (RP inachevé)   Neglecta erat... (RP privé) (RP inachevé) Icon_minitimeMer 1 Oct 2008 - 17:07

Le mentaïretint un soupir rageur. Il se savait fautif sur de nombreux tableaux, cestemps-ci tout particulièrement. La mise en marche de ses plans physiques lui avait pompé énormément d’énergie, et encore bien plus de temps.


Il avait bien conscience, par exemple, que sa double identité avait passé le stade du précaire parmi la guilde du chaos, et il n’était pas rare qu’il croise sous sa couverture de noble, un gueux quelconque le toiser, goguenard.
Il fallait bien avouer que lorsqu’il avait le temps, c’était autre chose. Lorsqu’un de ces petits malins osait même lever les yeux sur lui, affirmant ainsi qu’il savait ce que personne ne devait deviner, le noble trouvait toujours un moyen ingénu de le compromettre d’une façon ou d’une autre. Le plus souvent, dans la semaine qui avait suivi leur regard, ils rendaient leur dernier soupir, et ce n’était pas plus mal.


Mais dans l’état actuel des choses… Ce n’était plus envisageable. Premièrement, parce que Dolohov avait décidé d’unifier le chaos pour le faire grimper en puissance ; deuxièmement parce qu’ils devenaient de plus en plus nombreux ; et dernièrement parce qu’autant de meurtre, même lorsqu’on peut prétendre au titre de meilleur orateur de Gwendalavir, finissent par ne pas passer inaperçu, et à devenir plus compromettants que les silences narquois des ombres du chaos.


Il ne pouvait faire autrement; de toutes façons. Tous les haut dignitaires du chaos finissaient à découvert pour ceux qui étaient leur sous-fifres, il s'agissait simplement de s'habituer, d'accepter de devenir une des fondations de la guilde, comme l'avait été le vieux Ghend.
Qui à en perdre une bonne part de sa jeunesse et de son temps libre.

Il s’obligea à ne plus y penser, et leva les yeux sur les nuées cotonneuses..

Le royaume de la dame était d’une magnificence discrète, ce printemps là. A peine quelques moutons épars, masse rondouillardes et bleutées, qui paraissaient frileuse, là, perdus dans ce ciel trop bleu. A quand les merveilleux orages d’été, et la foudre, les chocs, l’odeur d’ozone ? Ce printemps était tout juste ouaté, comme pour compenser l’hiver trop rude, ou contraster toutes les horreurs qui ne tarderaient pas à ce passé.


Les angoisses métaphysiques de Dolohov par rapport à l’existence (ou non) des entités étaient discrètes mais récurrentes, et ce depuis son plus jeune âge. On disait que la dame était douceur et amour, délicatesse et tendresse. La mère présente et câline qu’il aurait pu avoir, dans une autre vie. Ou l’amoureuse qui l’aurait très certainement agacée.


Le dragon ; guerrier furieux, puissant, passionné. La foudre, la fulgurance de ses idées ou de ses coups. Mais incarnés ? Plus forts que tout ? Après tout, les démons existaient bien ; pourquoi les dieux non ?

Mais comment interpréter, alors, tout ce qu’ils permettaient, ces détails
ésotériques, meurtres, désillusions, erreurs, ratés ? La vie des hommes n’était tissée que d’actes manqués. Soit les dieux étaient contre les hommes ;
soit, tout ça était mystifications, moyens de se rassurer. Soit la vie des hommes était un
jeu qui s’étendait sur l’éternité pour le Chevalier et sa Dame, ce qui
reléguait l’orgueilleux blond au même rang que n’importe qui, et balayait
toutes les conventions sociales déterminées (autrement dit, option inenvisageable.) Soit… leur création les avait dépassés, l’homme devenait un ours élastique pour l’homme et eux, ils n’avaient qu’à assister à la déchéance de l’espèce.Peut-être même à la provoquer. Ce qui amenait à la véritable question qu’il se posait depuis quelques temps : lorsque la vie lui serait arrachée, devrait-il rendre des comptes pour ses immoralités ? Devrait-il mentir, même aux êtres éternels, ou tenter de racheter sa peau ? Y avait-il, dans l’absolu, de véritable notion de bien et de mal ? Etait-ce vraiment le Mal, ce chaos qu'il s'évertuait à étendre; ou était-ce réellement une possibilité aussi envisageable qu'une autre à l'évolution du monde de Gwendalavir?



Toutes ses questions qu’il utilisait pour corrompre et déstabiliser ses adversaires, insidieusement, comme tous les mentaïs… qui le faisaient toujours douter, qui l’éloignaient encore des détails purement techniques et surtout, pratique de son plan actuel.
Il se secoua, fixa le lointain ; elle devait arriver bientôt, si elle n’était pas morte. Si elle doutait encore grâce à lui. Il l’avait tant négligée qu’il s’en sentait fautif.
Elle était une arme au même titre que les autres, au mécanisme à peine
moins sûr. Qui pouvait savoir qui elle avait rencontré, ou intéressé après lui ? Peut-être taillait-elle déjà sa voie dans le chaos, trompant, mordant, vengeant toutes ses colères immatérielles ? Ou peut-être doutait-elle plus encore, de tout, de lui, son maître absent plus particulièrement.



Elle était un risque, un risque à attendre, à retrouver, à réapprendre. A ne plus négliger, quitte à manquer, comme cet après-midi là un banquet important, et à faire rendre des comptes à son personnage de jour.
Lorsqu'on envisageait un renversement de situation, rien ne devait être minimisé ou oublié. Pas même une apprentie revêche et auvageonne.

Il lui sembla tout à coup reconnaître un souffle, là, à quelques mètres de lui. Un souffle retenu, de fauve qui guette un autre fauve, attendant on ne savait quoi.


Depuis quand le guettait-elle ? Elle avait dû recevoir son mot mental une dizaine de minutes auparavant.. il était arrivé voilà environ 7minutes. Et il avait rêvassé, preuve indéniable de son surmenage, il était impératif qu’il se reprenne.

Evidemment, la possibilité que ce soit quelqu’un d’autre était non négligeable, mais selon l’homme blond, à traiter avec mépris. Un tiers était si rapidement trompé, à l’idée qu’un galant attende une jeune fille dans les sous bois, tout près de ce magnifique lac qui avait vu éclore tant de romances…
Qu’était-elle devenue, cette mystérieuse enfant des loups ? Plus maigre, encore? Plus grande, plus puissante, blessée? Domestiquer, ou toujours aussi méfiante? Parlait-elle encore?




-Il ne t’est pas interdit de me saluer ; c’est même ce que les conventions les plus bassement humaines exigeraient. Passons, puisque tu les hais, soupira-t-il, feignant la lassitude.





Il se tourna presque instantanément vers elle, autant parce que le contact visuel était important pour impressionner les jeunes apprenties, que parce qu’il se devait de vérifier qu’elle n’était pas en train de lui sauter au cou, bien décidée à l’assassiner. On ne savait jamais, il ne fallait surtout rien négliger.

[Comme toujours uu"]


Alasa
Alasa

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MessageSujet: Re: Neglecta erat... (RP privé) (RP inachevé)   Neglecta erat... (RP privé) (RP inachevé) Icon_minitimeDim 2 Nov 2008 - 20:38

[Comme toujours aussi, pour la peine. Et désolée du retard = p]

Un ciel bleu ou voguent des nuages. De grands arbres verts. Les bruits de la forêt. L'odeur de l'humus, prenante, et.. non ! Ca ne va pas, pas du tout. Frustrée, Alasa porta la main à son flanc en un geste devenu machinal et interrompit sa marche précautionneuse.
Une terre moribonde encore givrée d'hiver ou le noir se mêle à l'ambre, le peuple végétal jamais silencieux aux troncs rigides, sombres, élancés, le lent et exponentiel retour à la vie de leurs appendices feuillus, diaphanes et fragiles, soufflées par quelque brise létale comme une flamme trop jeune; l'embrasement que l'astre pâle, par la trouée de la canopée, confère aux dames hâves, maintenant l'équilibre entre leurs déchirements. Le miroir d'eau sombre si longtemps déserté existant par intermittences au gré du placement des chênes, des hêtres, l'ombre des nuées qui ne parviennent par leur seule présence à confondre entièrement ses secrets, l'apogée de ces profondeurs. La vie palpitante, les prémices presque tangibles d'un réveil annoncé, craint. Les senteurs rétrospectives de pluies et de neige, d'hiver oniriquement cauchemardesque, de fange mouillée, de ciel délavé, de chaleur vacillante, d'herbes sauvages, de vésanie muette, de mort mystifiée. Le son des traques, des fuites et des fleurs qui poussent, la musique d'une branche craquante et celle d'un insecte solitaire. Et l'érosion molle du sol sous les pas, la rassurante perception de sa solidité, l'entrave des cadavres végétaux dévorés par le temps, les douleurs apaisantes dans les muscles, la conscience de son propre corps..
La jeune fille voyait, entendait, ressentait tout cela, cette existence bruissante, ces banalités écoeurantes tout en étant incapable d'y placer des mots autres que simples et désespérément maladroits. En décrivant autre chose, peut-être ? Et quoi ? Ses sentiments ? Des preuves de faiblesse aussi abstraites que mièvres, merci bien. Non, il lui fallait des consonnances glissantes, implacables. Des double-sens foisonnants, des affirmations ambivalentes, pas des phrases transparentes qui en deux sons en dévoilaient plus que ce que d'autres dissimulaient en une minute, sang de Dragon ! Oui mais voilà, l'art de trouver les mots appropriés puis de les tisser entre eux à la manière d'une toile avait toujours paru méprisable à l'apprentie mercenaire; désormais, il se parait plutôt des couleurs d'un ésotérisme rageant.. Subsidiaire. Oligarchie. Entregent. Eglogue. Apocope.
Et tant de sons sans sens.
Entendus de sa génitrice, piochés dans les cours, empruntés au hasard. Non, pas au hasard; jamais les habitants des bois ne tenaient de tels langages. Et pourtant, il lui fallait apprendre, savoir, un énervement violent lui venait lorsqu'elle tentait en vain de restaurer leur signification aux adjectifs les moins obscurs après leur avoir nié tout droit d'existence; cela ne pouvait pas être si compliqué, pourtant ! Elle ne supportait plus les souvenirs de ses précédents échecs et il aurait le verbe distant et impitoyable, comme toujours. L'entendre le manier sans effort, mécaniquement..


Pourquoi maintenant ? Pourquoi la rappelait-il aujourd'hui ? La jeune fille ralentit doucement en distinguant l'éclat de sa chevelure flamme, particulièrement détonnante en ce début de printemps. C'était stupide parce qu'elle n'osait plus s'approcher; pas que cela soit sans danger: il aurait très bien pu la recontacter pour la tuer, effaçant quelques traces un peu compromettantes entre deux jeux de masque. Non, stupide parce qu'après toutes ces saisons.. des mois et il n'avait pas changé, physiquement en tout cas. Un an ? Pas impossible. Un an depuis la mort de Sakura, depuis que les eaux teintées de sang avaient noyé ses dernières illusions inavouées; ce printemps-là, il s'était glissé derrière les ombres et avait disparu après ses dernières instructions, sans doute pour aller étaler son personnage de noble faraud au bal des apparences. Et Alasa s'en voulait à mort de s'être sentie abandonnée lorsque la jumelle Ar'Kriss la regardait se vider de son fluide vital, quêtant l'acceptation d'un pacte nul et non avenu; elle s'en voulait de l'avoir haï plus furieusement que jamais: il ne lui devait rien. Elle n'avait quand même pas cru que lui comptait honorer son serment, puisqu'elle lui avait toujours fait valoir clairement -bien trop- qu'elle ne croyait pas au sien ?

La brune retint son souffle en s'arrêtant à quelques mètres à peine de l'homme silencieux; appréhension rémanente face à la perspective de recroiser ses yeux anthracite distilleurs de doutes, méfiance aussi: pourquoi ne se retournait-il pas ? Elle se déplaçait certes sans bruit mais de là à surprendre un mentaï.. s'agissait-il d'un piège, avait-il véritablement l'intention de se débarasser d'elle ? Chaque seconde reculait l'instant ou il provoquerait une bouffée de révolte du seul timbre de sa voix impassible, sussurée, et elle ne parvenait toujours pas à signaler sa présence dans l'incertitude qu'il l'ait ou non repérée. Non, il n'allait pas déjà la braquer, hors de question; la jeune fille caressa nerveusement à travers le tissu la cicatrice mal recousue puis laissa retomber sa main: les tics de ce genre dénotaient sans mal une anxiété compromettante. Elle s'était jurée de se contrôler, désormais, de garder profil bas et surtout d'apprendre à parler. Mais les heures d'entraînement solitaire dans la forêt à reproduire par mimétisme ou intuition des mouvements de combats déphasés la formaient infiniment mieux que celle où, déambulant au hasard, elle avait marmonné seule des tournures de phrase vacillantes qui lui demandaient de ridicules efforts. Hélas.
Elle aurait pu disparaître dans les sous-bois de Gwendalavir, errer jusqu'à la fin de sa vie inutile mais cette alternative ne lui traversait plus l'esprit depuis bien longtemps; elle-même n'aurait pu s'expliquer pourquoi sa haine ne serait pas mieux préservée loin de ceux qu'elle exécrait.
Elle serait mercenaire du chaos. Tant pis.


La lumière joue dans tes cheveux blonds qui en deviennent presque maladifs; trop pâles. Est-ce bien prudent d'arborer des attributs si facilement reconnaissables ? Et cette odeur que tu dégages, tut sauf naturelle. Pas désagréable cependant, plutôt à ton image: onirique, occulte ainsi qu'un rêve un peu fiévreux.
Il parla enfin mais Alasa eut la quasi-certitude qu'il était perdu dans ses pensées quelques demi-secondes auparavant. Ainsi, le favori du Démon était faillible ? Cette découverte ravit la jeune fille qui parvint à ne laisser échapper qu'un battement de cil au son de sa voix. Bien sûr, toutes ses résolutions ou presque partirent en fumée et le sang battit quelque part dans la région des tempes mais c'était plus un relent de colère froide qu'autre chose, elle parvenait désormais à se contrôler.
Pas encore à obtempérer cependant car au sens de ses mots elle n'apposa qu'un silence déstabilisé. Saluer ? Bien sûr, bien sûr. Les conventions, difficile de les oublier, c'était même la première chose à apprendre pour se fondre dans la masse et pourtant ces mots l'écoeuraient tellement qu'ils se bloquaient. Laisser passer quelques limbes d'immobilité avant de retenir difficilement un rictus incrédule: qu'était-elle censée dire ? Bonjour ? Avec ses vêtements plus inutiles que jamais, son corps encore amaigri par l'hiver l'apparentant à un cadavre hideux et sa crinière de folle, il aurait sans doute perçu cela comme de l'ironie, état d'esprit qu'elle n'était pas loin d'adopter.
Zut. Ses yeux. Vite, détourner le regard avant de s'y égarer. Le regard soigneusement fixé sur l'épaule droite du mentaï, la brune parvint enfin à ouvrir la bouche pour laisser échapper d'un ton un peu trop caustique:


- Salut, maître.

Tant pis pour l'insolence, il y avait déjà la parole. Portant la main à son flanc en ce même geste irréfléchi, elle joua avec le tissu déchiré, bien décidée à ne pas croiser les yeux gris psychotiques.

Dolohov Zil' Urain
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MessageSujet: Re: Neglecta erat... (RP privé) (RP inachevé)   Neglecta erat... (RP privé) (RP inachevé) Icon_minitimeLun 17 Nov 2008 - 17:03

[sans trop savoir sur quelle pente je me risque, mais boncheers ! Ca devrait varier un peu ^^]

Non, l'enfant des loups ne semblait pas décidée à le tuer.
Pas plus qu'elle ne paraissait apprivoisée, et à bien y réfléchir, le contraire aurait été étonnant. Avec le rude hiver que Gwendalavir avait connu, ses contacts humanoïdes avaient dû être rares, et surement peu confiants. Ni longs.

Elle avait changé, certes, mais en quoi? Pour trouver le mot avec certitude, il fallait se concentrer sur ce que son attitude refusait de confesser.


Quelque chose de plus abstrait que ça, ce qui venait à reconsidérer l'évolution psychique que pouvait avoir cette jeune fille famélique...? Perspective aussi dangereuse que grisante. Sous estimer quelqu'un qu'on avait en son pouvoir, c'était envisager à la fois qu'une trahison de sa part pourrait être plus douloureuse, mais que son aide serait à la fois plus efficace et ses jugements plus avisés. Et selon les habitudes orgueilleuses de la logique du Zil' Urain, le fait de douter actuellement des limites physiques et mentales qui maintiendraient son apprentie en respect impliquaient également que tous ses adversaires auraient les mêmes réactions. Quitte à la surestimer à présent, le mentaï s'autorisa un sourire oblique à nuances narcissiques. Même si ça devait attiser la brume de colère qui s'effaçait déjà des prunelles ténèbres.

Elle avait gagné quelque chose. De la maîtrise, surement. de l'entrainement, même dans les sonorités de sa voix...
Par la dame, était-ce bien de l'ironie?

Il y avait quelque chose qui avait changé, aiguisé la voix de l'adolescente, en laissant pourtant flotter au seuil de ses lèvres quelque chose de rauque, de regret, qui atténuait sa causticité. A peine.
Le mentaï prit d'une curiosité tout à coup moins enjouée se prit à détailler les traits de son élève. L'ensemble, maintenant qu'il la contemplait en toute objectivité lui rappelait plus la vipère que le loup. Moins d'attentes du monde extérieur, plus de froideur, plus de venin.

Les mains qui enroulaient nerveusement les filaments de ce qui devait être, à une époque lointaine, une longue robe noire de jolie facture. Qu'elle avait toujours arboré, d'aussi loin qu'il pouvait se souvenir de leur rencontre. Ses mains qui prenaient des positions de défense avec la spontanéité de ceux qui survivent et se battent tous les jours pour exister.Tout ce que lui, né dans l'opulence et la soie, ne pourrait jamais qu'imaginer. Ces mains qui dénotaient avec le nouveau totem que Dolohov lui associait.

Ses yeux qui lui mangeaient le visage, qui se détournaient sans cesse, et luisaient de cet éclat fauve ambigu, qui hurlait son intelligence comme un loup pouvait appeler la lune, qui vous rappelait que cette jeune pousse d'humain était encore animée de cette arme fatale, et pourtant si dérisoire: le désir. Quel qu'en soit sa nature.

Ses longs cheveux charbonneux étaient ternis d'un mélange boue et de sang, souvenirs certains d'une de ses collations. Ses lèvres craquelées et rougies par l'air n'étaient plus victimes de ses étirassions disgracieuses, qu'il avait pu constater précédemment. Ses épaules,enfin, laissaient saillir une musculature valorisée par sa maigreur,et parsemée d'éclats vermeils, signe des petits problèmes de la vie au grand air. Ou de parasites. Ou...

Pire. N'avait-elle justement pas trop changé? Sa survie à l'hiver malgré la précarité de sa position indiquait clairement que les notions de défense, d'attaque et de fulgurance ne lui étaient plus étrangères. Qui pouvait surprendre une proie animale n'avait aucune peine à tenir en respect un être humain. Mais cette nouvelle assurance, pourtant encore vacillante, ses multiples petites plaies ne pouvaient-elles pas dénoter d'une intervention humaine dans sa vie? Humaine et mercenaire. Liée, si il allait jusqu'au bout de ses suppositions, à la folie mal maîtrisée de la sous-fifre Ar'Kriss?

Il glissa la main sous le cachemire laiteux de sa chemise d'apparat, et dégrafa une besace de modèle typiquement mercenaire. Elle se prolongeait sur toute le pourtour de la panse, en poche uniforme et très étroite. L'idéal pour transporter armes, messages, ou fatras utile en cas de coup dur. Il l'avait préparé en pensant à ce qui pouvait rester d'elle, et mis à part les deux morceau de siffleur braisé dans la partie imperméable; elle contenait le matériel minimal pour soigner les plaies les plus disgracieuses et en faire oublier jusqu'à la trace. Utile en somme, mais il faudrait à la jeune fille prouver ce qu'elle valait avant de l'obtenir.

-Bien... C'est un ravissement de constater toutes tes métamorphoses, chère Alasa, nargua-t-il, pour conserver le ton de leur discussion. J'ai amené une collation, et serais honoré si tu me faisais le plaisir de la partager avec moi. Cela nous permettrait de briser les quelques barrières qu'ont pu ériger ces longs mois de séparation. Il y a tellement de choses que nous avons omis d'évoquer ensemble... Ton opinion sur la mode actuelle, tes questions sur notre désordre, tes éventuelles remarques sur tes voisins, raïs, académiciens, autres... Le temps, peut-être?

Certes, disserter sur des sujets futiles n'était pas exactement ce qu'on pouvait appeler une leçon usuelle de la part d'un mercenaire. Mais pour se fondre dans une foule, il était certain qu'il fallait maîtriser les commodités de la conversation classique. Et si l'on espérait survivre, vu la conjoncture actuelle, il était heureux de pouvoir verbaliser ses pensées sous un masque de banalité. Ou, comme c'était également le cas cette fois-ci, de démasquer un secret maladroitement voilé; pour prendre les mesures les plus adaptées.

-Personnellement, dit-il, son sourire prenant doucement des accents carnassier alors qu'il s'asseyait contre un tronc, je me vois surpris de la célérité du temps. En revanche, le climat de ces derniers jours m'apparait comme étant d'excellente augure. Quelques nimbus disséminés ça et là dans le ciel, sans personne qui y prend garde... temps exquis pour pique-niquer. Et demain, un orage violent.

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