J'ai reçu, plan plan, j'ai reçu, plan plan... [Terminé]

[HRP : Juste la chanson pour vous dire d'où viens le titre : Le Beau Tambour]

Lyuuna se baladait dans les couloirs de l'Académie. Non, en fait d'une certaine manière, elle se perdait. C'était un de ses rares temps libre depuis qu'elle avait commencé les cours et elle souhaitait en profiter pour découvrir ce nouveau monde. Avant elle ne connaissait que le manoir des Sil'Celim et quelque rue d'Al-Jeit, mais c'était tout... Et ce n'était vraiment pas intéressant. Maintenant, elle pouvait sortir dans l'enceinte - plutôt grande il faut dire - de l'Académie. Bon, elle n'avait pas encore fait le tour du bâtiment et avait plus parcouru le plan que l'établissement en lui-même. Et il n'était pas simple ce papier, il était composé de plusieurs parties, montrant les différentes ailes, les différents étages et les différentes salles. C'était complexe pour un novice, mais Lyuuna avait déjà vu des plans du même acabit dans des livres.
La seule chose qui lui manquait, c'était sa bibliothèque. La sensation des livres et la lecture lui manquait. Elle avait besoin de fourrer son nez dans des bouquins pour s'évader un peu. La Dessinatrice se jura de faire un tour à la bibliothèque de l'Académie. On lui en avait dit beaucoup de bien, grande, bien fournis et pleine d'aventure. Le rêve.
Elle repassa un instant en revue ses habits, défroissant les quelques plis qui s'accumulaient sur son surcot. Son uniforme rouge lui allait plutôt bien, même s'il restait passablement moche. Ce qu'elle adorait dans ces vêtements obligatoires, c'était la bague, une belle bague avec le blason de Kaelem gravé sur une pierre rouge. Lyuuna avait l'impression d'être vachement visible avec ces couleurs vives, mais au final en regardant les autres élèves, elle était pas si mal lotis. Déjà les Aequor en bleu pétant, ça pique un peu les yeux, mais en plus de ça, les gardes portaient un uniforme orange... Et ça, c'est plus que perturbant. A chaque fois, elle devait se frotter les yeux quand elle en croisait un, la dessinatrice avait cette désagréable impression que ses deux globes saignaient.
C'était la dure loi de l'Académie, surtout depuis qu'Aziel était arrivé... Apparemment, l'Intendant n'était pas aussi génial qu'elle le pensait. Il était strict et faisait respecter le code Merwynien à la ligne près. D'après le dire de certain élève, son prédécesseur était bien moins exigent et tout le monde pouvait porter ce qu'il voulait. Du coup Aziel baissait un peu dans son estime, mais elle lui devait le respect. C'était un peu grâce à lui que Lyuuna était ici.
D'ailleurs, c'était où, ici ? Parce que se balader c'est bien, mais autant savoir où elle allait. La jeune femme posa le nez dans son plan et fouilla. Elle regarda les alentours. Déjà, elle était au rez-de-chaussé. Ensuite, elle remarqua une porte sur laquelle était notée « salle d'arme ». La dessinatrice regarda le papier qu'elle avait en face d'elle et trouva enfin la susnommé salle. Elle se trouvait donc dans l'aile Ouest, dans un des couloirs.
Elle continua à flaner, ici et là, regardant les élèves, disant bonjour à quelques rares connaissance Kaelem, sifflotant l'air de la comptine que sa mère lui chantait dans son enfance. Elle s'installa contre un mur et plongea son regard de nouveau dans le plan. Dame, qu'elle était grande cette Académie. Elle avait hâte de l'explorer, de vadrouiller. Elle avait aussi hâte de maîtriser son don du dessin et devenir une véritable Sentinelle. D'ailleurs, les cours de combat étaient obligatoire pour le devenir... Elle ne se sentait pas trop tenté par ces derniers, mais s'il fallait en passer par là pour accomplir son rêve, alors elle irait jusqu'au bout et se donnerait à fond.
En parlant de combattant, Lyuuna remarqua des élèves plutôt carré se vanter de quelconque prouesse, bandant leurs muscles. Cela devait être les champions de leurs classes, ceux qui martyrisaient les plus faibles et les nuls. Elle refoula sa haine, non ce n'était pas le moment, absolument pas le moment. La Dessinatrice se replongea dans sa carte. Un jour elle deviendrait forte et protégerait tout le monde. Un jour.
Un léger vent frais soufflait de l'extérieur. Un des élèves avait eu la bonne idée d'ouvrir une fenêtre, histoire d'aéré un peu et de rafraîchir l'atmosphère. Lyuuna apprécia la petite brise, jusqu'au moment où quelqu'un d'autre fut pris de la même idée que l'élève précédent. Une autre fenêtre s'ouvrit, créant un appel d'air - aussi nommé courant d'air - qui fit s'envoler le plan que la Kaelem avait dans les mains.
Ne voulant pas perdre ce papier précieux, elle s'élança à sa suite, gardant au mieux son calme. La feuille voletait, jouait avec le vent. Lyuuna hurla de fermer les fenêtres, suppliant quelqu'un de l'aider. Elle bouscula quelque élève et finit par attraper le plan... Mais avec le visage... La peur monta rapidement, elle sentait le basculement avec Na arriver. Et elle continuait à courir, bêtement. C'est alors qu'elle rencontra un autre corps, chuta lourdement, entrainant cette autre personne avec elle et tout devint noir. Na avait pris le relais.

La première chose que Na sentit en prenant le contrôle fut qu'elle était en train de tomber. Elle ne savait pas pour quelle raison, ne se souvenait strictement pas d'avoir trébuché ou d'avoir été poussée. Mais elle pouvait clairement sentir que ses points d'équilibre n'étaient pas en place et que son corps avait pris une position étrange. Ce qui lui fut confirmé à peine une fraction de seconde plus tard lorsqu'elle se sentit atterrir. Sur quelque chose d'anormalement mou pour être du carrelage ou du parquet.
La seconde chose qu'elle sentit fut que la personne, car c'était apparemment une personne, sur laquelle elle était malencontreusement retombée la repoussa violemment. Ce qui enclencha une nouvelle phase de choc, avec une surface bien dure cette fois-ci.
Oui, Na sentit tout cela alors qu'elle n'avait même pas encore totalement émergé. Il lui fallait toujours un petit temps pour que pensées cohérentes et souvenirs se mettent en place. Pour qu'elle puisse véritablement voir et entendre. Pour que ses sens se connectent totalement avec sa propre conscience, le toucher étant toujours la première chose qu'elle ressentait. Pas longtemps au fond, juste assez pour achever le Dessin. Mais ce temps avait été suffisamment long pour qu'elle se sente tomber puis repousser. Et ce alors qu'elle était encore comme sourde et aveugle. Et que par conséquent, elle ne comprenait strictement rien à ce qui pouvait bien lui arriver.

Aussitôt retombée pour la seconde fois, Na sentit simultanément une vague de colère et de douleur l'envahir. Un flot de rage qui grondait dans le creux de son thorax, jouant d'un tambour sourd contre ses côtes. Et chaque coup qui s'accélérerait suivant le rythme désordonné de son propre coeur. Des aiguilles de souffrance se plantant dans sa peau. Et leurs chocs, électriques, propagés et répétés sans cesse par chaque nerf comme une infernale litanie.
Elle avait beau avoir l'habitude, elle détestait toujours autant cela. Chez elle, toutes les émotions étaient décuplées. Comme si un tiraillement devenait soudain déchirement. Et cette fois ci, c'était presque pire encore. Une émotion était déjà suffisamment complexe à gérer pour elle alors deux.

C'était dans cette tornade émotionnelle que résider tout le problème d'ailleurs. Elle aimait vivre, mieux encore, elle voulait exister. Mais chacune de ses apparitions amenait son lot de tourments. Un maelström d'ondes négatives qu'elle devait combattre seule. Même lorsque Lyuuna paniquait pour une chose futile, elle avait l'impression de vivre une torture. Alors la jeune fille ne préférait même pas imaginer ce qu'il adviendrait d'elle le jour où son alter ego serait véritablement en danger. En plus de cela, car il y avait toujours plus, lorsqu'elle parvenait enfin à se calmer, Lyuuna reprenait aussitôt le contrôle. Sans lui laisser profiter de ces quelques instants de vie offerts.
Même si elle savait que la jeune Dessinatrice n'y était pour rien, et qu'elle voulait, tout autant qu'elle, lui offrir une vie un peu plus décente, parfois Na en avait marre.
Même si cela avait toujours été comme ca, il y avait des jours où toutes ces épreuves n'étaient plus supportables.
Et aujourd'hui était clairement un jour sans.
Cette constatation laissa une pointe de tristesse s'insinuer en elle, et elle sentit son ventre se serrer, se tendre presque jusqu'à la crampe. Comme un écho aux roulements de ses os et aux vibrations imperceptibles de sa peau. Comme un écho aux élancements de ses muscles et aux pulsations de ses nerfs. Chez elle, la souffrance n'était plus seulement morale. Elle se faisait plus insidieuse, plus vicieuse. A la fois brûlante et glacée. Physique.
Une voix retentit alors, lumière au milieu des ténèbres, la sortant de ce ragoût d'émotion.
- Oh, je suis désolée, je ne voulais pas te pousser ! Mais tu m’as surprise !

Toute à ce qu'elle ressentait, la jeune Na avait presque oublié qu'elle n'était pas seule. Et que ce n'était vraiment pas le moment de se laisser aller comme ca. Peut importe à quel point elle avait mal, elle devait s'efforcer de faire « bonne figure ». Ne pas céder à ses pulsions qui lui disait de sauter sur la personne en face d'elle et de lui faire payer. Et violemment. Non, elle ne devrait même pas avoir de telles pensées, elle ne devait surtout pas se trahir. Oui, juste oublier, juste essayer de se calmer. Un peu.
En plus, la jeune fille, puisque c'était assurément une voix féminine, sur laquelle elle était tombé s'était excusé. Dès lors toutes les règles morales lui interdisaient de la mordre comme elle le désirait si ardemment. Et même si les règles morales n'étaient absolument pas les siennes, elles étaient celles de Lyuuna. Et la jeune fille aurait des ennuis si elle ne refrénait pas ses pulsions meurtrières. Et puis, la jeune femme en face lui souriait. Et étrangement, ce joli sourire atténua, un peu au moins, sa colère intérieure. Ce qui était assurément le pire sentiment à laisser s'exprimer.
Elle fit un rapide tour d'horizon, aussi bien pour tenter de se répérer que pour essayer de chasser ses sombres pensées. Voyant une feuille de papier entre elles, elle la ramassa.
Encore un de ses gestes inconscients qu'elle effectuait sans savoir pourquoi. Réminiscence de la présence de Lyuuna en elle sans doute. Ce n'était pas la première fois qu'elle se sentait attirée par un objet, avant d'apprendre par la suite qu'il était cher à son alter-ego. Et donc à ce corps qu'elles partageaient.
En y regardant de plus près Na reconnu le plan de l'académie et remercia son inconscient de l'avoir récupéré. Il lui serait plus qu'utile si elle devait fuir en courant. Parce qu'elle avait toujours aussi mal. Et parce qu'elle commençait à avoir peur de blesser l'autre jeune fille. La peur. Une nouvelle amie-ennemie, si familière. La peur, elle, naissait entre ses poumons. Comme un serpent, elle s'enroulait autour de ses bronches, remontant jusqu'à sa gorge. Pour toujours mieux l'étouffer. Oui, il lui faudrait sûrement fuir. Comme pour tenter d'échapper à ses propres démons, peines et paniques.
Alors qu'elle mettait en place ses projets d'évasion, la voix de la jeune fille retentit à nouveau.
- Dis, c’est quoi ce plan là ? Tu es perdue ? J’suis là depuis plus de deux ans, je peux peut-être t’aider !...

Dès lors, Na comprit que ce ne serait pas aussi simple. Cette fille, qu'elle ne pouvait s'empêcher de vouloir frapper, semblait véritablement gentille et attentionnée. Et elle avait l'intuition diffuse que si elle filait maintenant, elle serait retrouvée par la suite. Elle, ou Lyuuna. Et Na ne souhaitait vraiment pas faire du tord à son double. Après tout, elles étaient toutes deux tombées sur cette fille.
Fille que Na se permit enfin de détailler.
Elle portait un uniforme noir, et devait donc être d'une autre maison, elle-même portant un uniforme rouge. Elle était plus grande qu'elle, plus musclés aussi et un combat, toute rage aidant aurait sûrement tourné à son désavantage. Elle avait également de jolis cheveux noirs et des yeux gris. Pétillants.
Elle n'avait vraiment pas l'air idiote, pas l'air du genre à gober un de ses excuses pour s'éclipser.
C'était étrange mais d'un certain côté, c'était la première fois qu'elle se retrouvait ainsi confronter à quelqu'un. Bien sur, elle s'était déjà retrouvée face à des gens ou des groupes de gens mais n'avait presque jamais été ainsi le centre de l'attention. Et surtout, elle avait toujours réussi à trouver un prétexte pour quitter la pièce.
Mais là rien. Elles étaient dans un couloir, face à face. Malgré la présence d'autres étudiants autour d'elles, certains même les regardant nonchalamment, elle se sentait comme s'il n'y avait qu'elles. Il n'y avait aucun échappatoire. Et même si il y en avait eu un, elle ne connaissait presque rien de cette académie.

En elle, le tourbillon d'émotion grondait toujours. Celles de Lyuuna mêlées à ses propres doutes. Douleur, colère, tristesse et peur. Ses plus fidèles amies.
Sans qu'elle ne comprenne pourquoi, elle sentit les larmes atteindre ses paupières.
Elle n'avait pas tenu, pas cette fois.
Pourtant au départ, la peur de Lyuuna était si diffuse. Si diffuse qu'elle n'était même pas restée.
Mais ses propres émotions s'en étaient mêlées, s'étaient emmêlées.
Et ca avait été trop. Beaucoup trop.
Elle avait craqué devant quelqu'un.
Une larme, une... et...
Une seconde après elle fondit en sanglot.

Les cahots de ses lèvres cachant sa voix tremblante d'appréhension, pour la première fois de sa vie, elle parla véritablement à quelqu'un.
- Je... Je... sais pas où je suis... Je sais pas où je dois aller... J'ai... mal...

Oui, parmi toutes les émotions, c'était la tristesse, la peur et la douleur qui avaient percées.
La colère avait perdu.
Et c'était beaucoup, beaucoup mieux ainsi.

[Alors tout d'abord désolée pour le temps de réponse, mais j'ai eu quelques examens en début de semaine. En suite, je dois t'avouer que je n'ai pas vérifié mes fautes, mais j'avais vraiment hate de poster, donc je corrigerais ca demain, là dodo.]

Na se sentait désemparée. Perdue. Seule face à un elle même qui la regarderait méprisante. Elle avait craquée. Devant quelqu'un. Pour la toute première fois. Et maintenant, c'était Lyuuna qui allait avoir des ennuis. Combien de temps cela prendrait-il avant que son alter ego reprenne le contrôle et se retrouve face à cette inconnu qui l'avait vu pleurer ? Sans en avoir aucun souvenir. Cela ne paraissait pas si terrible dit comme ca, mais Na en connaissait les conséquences sur le long terme. On finirait par considérer Lyuuna comme folle. Et alors on chercherait à comprendre, à fouiller, dans sa tête. Jusqu'à ce que l'on découvre sa propre existence. Et qu'on l'efface. Oui, elle n'était qu'un dessin. Il suffisait que Lyuuna - ou un autre dessinateur entré dans les spires avec elle - décide d'effacer chacun de ses traits. Et elle ne serait plus. Elle ne serait plus jamais. Gommée.

Et pourtant jusque lors, elle avait toujours réussi à se contrôler. Elle était toujours parvenu à fuir. Pour minimiser les soupçons qui pèseraient sur son existence. Mais pas cette fois. Et pour ca, Na s'en voulait énormément.

- Oh, te met pas dans cet état ! Ça va aller… Tu veux en parler ?…

Voulait-elle en parler ? Ce n'était pas vraiment la bonne question. Elle ne pouvait tout simplement pas en parler. Qui comprendrait une histoire aussi absurde. Et surtout qui accepterait de la garder pour lui. Pour lui seul. Personne. Si elle racontait la vérité à la jeune femme, celle-ci finirait forcément par en parler à quelqu'un d'autre. Et de fil en aiguille, le résultat serait le même. Gommée.
De toute façon, même si elle avait voulu, même si elle avait pu parler, elle en aurait été physiquement incapable. Elle avait la gorge bien trop serrée par ses peurs et ses pleurs pour parvenir à prononcer le moindre mot. Elle n'était qu'une boule de nerfs, de nerfs ardents, tendus, gonflés, prêt à exploser. Elle n'était qu'une boule trop pleine de sentiments qui débordaient comme ils pouvaient en se déversant dans ses larmes.
Jusqu'à ce que la main de l'inconnue se pose sur son épaule. Aussitôt une douce chaleur diffusa à travers sa peau jusqu'à atteindre son coeur. Comme un champ de force qui repoussait ses émotions dévorantes dans le creux de son ventre. Qui les enfermait là pour qu'elles n'en sortent plus. Prisonnières des barreaux de sa cage thoracique.
Jamais personne n'avait eu un tel geste pour elle. Lorsqu'elle apparaissait sous Na, elle s'arrangeait le plus souvent pour rester seule. Alors ses contacts avec d'autres personnes en étaient toujours restés au strict minimum. Toutes ces sensations étaient nouvelles pour elle. Et elle adorait ca.
Ce simple contact, cette petite chaleur. Elle lui rappelait le grand feu de cheminée du manoir devant lequel elle aimait rester en attendant que Lyuuna revienne. C'était une des rares choses qui l'aidait à se sentir mieux là bas. Ça et l'eau chaude coulant sur son corps. Ça et les courses folles dans le domaine, à pieds ou à cheval.
Mais c'était la première fois qu'un contact l'apaisait. Déjà, son corps s'était réchauffé et avait cessé ses tremblements imperceptibles. Déjà une petite flamme s'était allumé au fond de ses yeux, léchant et séchant ses larmes.
Hélas, elle savait ce qu'il allait se passer si elle allait mieux. Lyuuna allait revenir. Ici en plein milieu de ce couloir. Sans souvenirs. Au milieu des gens et face la jeune femme. Et il ne fallait surtout pas que cela arrive. A cette simple idée l'angoisse, enfermé entre ses côtes gronda tentant de percer ces toutes nouvelles défenses. Une étrange bataille intérieure commença. Ses émotions se jetaient contre ses os comme des fauves en cages tandis que les flammes dansantes les défiaient narquoisement. Oui, une bien étrange bataille qui fut interrompu par la voix de la jeune fille.

- Je suis Halina. Et toi, comment tu t’appelles ? Qu’est-ce que tu veux voir en premier ?

Halina. C'était un joli nom pour une flamme. Na l'imaginait véritablement ainsi. Mais pour elle, la jeune fille n'était pas n'importe quel feu. Halina était carré, taillée comme une guerrière. Elle n'était pas la flammèche virevoltante d'un dessinateur. Non, elle l'imaginait plus comme la flamme qui vient lécher l'épée dans l'atelier du forgeron. Cette flamme chaleureuse mais aussi dangereuse si elle n'était pas maniée avec précaution. Cette simple flamme qui pouvait façonnait la plus belle et la plus acérée des lames. Une flamme qui même éteinte restait la plus chaude des braises.
Na hésita alors à se présenter à son tour. Parce que ce n'était pas vraiment elle. Pas vraiment son nom. C'était le sien à elle, la véritable Lyuuna. Et elle ne pouvait pas décemment dire s'appelait Na. Elle ne le pourrait jamais d'ailleurs. Ce serait prendre un risque trop grand.
Mais elle savait aussi qu'elle n'avait pas le choix, il était dans les conventions sociales de donner son nom lorsqu'on le demandait. Et ne pas le faire aurait fini par mettre son alter ego dans l'embarras à un moment donné. Aussi elle lança son nom entre ses dents, à moitié avalé. Comme par peur qu'il brise quelque chose si elle le disait trop fort. Espérant presque que l'autre ne l'entende :
- Lyuuna.

Que voulait-elle voir en premier ? Elle n'en avait aucune idée. Elle ne connaissait rien à cette académie. Rien d'autre que le dortoir dans lequel elle avait déjà émergé. Oui, pour elle les pièces de cette académie n'étaient que des noms sur le plan qu'elle tenait dans les mains. Ces murs n'étaient que des traits de crayon sur une carte et ses pièces que de grands carrés vides. L'académie elle-même n'était que le rêve de Lyuuna. Et pour elle, un espoir un peu fou de devenir réelle à part entière. Avec son propre corps. Un espoir qu'il lui avait même donné envie de venir. Mais la réalité était là. Personne ne savait où se trouvait Merwyn Ril'Avalon et sans lui, tout était perdu... Elle ne resterait qu'un dessin. Et encore si personne ne l'effaçait.

- Je peux te montrer par exemple la Grande Salle, la Bibliothèque, les jardins, les cuisines…

Au mot bibliothèque son regard s'illumina. C'était le lieu parfait ! Lyuuna adorait les bibliothèques et les livres en général. Sa chambre en était remplie. Ils s'entassaient partout, sur les étagères, sur son bureau en piles immenses et certains même à même le sol. Parfois, elle lui conseillait des livres dans son carnet. Mais Na ne lisait pas. Elle ne restait jamais assez longtemps pour avoir le temps de lire quelque chose de toute façon. Et sa bataille intérieure contre les émotions de Lyuuna lui prenait toute son énergie.
Mais si Lyuuna re-émergeait dans la bibliothèque, elle se sentirait dans un environnement familier. Et parviendrait peut être à donner le change. Bien qu'elle en doutait. Lyuuna était une rêveuse, pas une stratège. Mais elle n'avait pas d'autres choix que de compter sur elle. Alors, au milieu de ses compagnons d'aventures qu'étaient les livres, elle pourrait peut être sauver un minimum la situation.

- Bon, commençons par la bibliothèque alors ! On va partir des escaliers de l’aile principale comme ça tu pourras y revenir toute seule !

Avec un petit sourire faible, Na se leva et se lança derrière la jeune femme. C'était la première fois qu'elle avait l'occasion de parcourir l'académie. La première fois que ces noms, ces murs et ces pièces devenaient concrets. Et elle n'en perdait pas une miette. Elle comprenait mieux pourquoi Lyuuna paraissait si enthousiaste dans son carnet. L'académie était immense. Et magnifique. Plus merveilleuse encore que tout ce qu'elle aurait pu imaginer. Elle ne pouvait s'empêcher d'ouvrir des yeux émerveillés sur tout ce qu'elle voyait. Sur chaque minuscule détail.

- Bon, là c’est l’entrée, tu dois connaître, j'imagine. Nous, on venait de l’aile ouest et la bibliothèque se trouve dans l’aile principale. Du coup, on va juste monter les escaliers devant nous jusqu’au premier étage, qui est principalement occupé par la bibliothèque.

Elle buvait littéralement les explications de la jeune femme. Ses mots étaient des soufflets ravivant le brasier en elle. Maintenant ses démons dans leur prison. Elle se sentait de mieux en mieux. Ce qui la ravissait tout en l'inquiétant. Elle savait qu'elle allait bientôt partir. Et elle le regrettait sincèrement. Mais cette amertume était insuffisante pour lutter contre le bien être qu'elle ressentait. Les flammes étaient trop puissante pour laisser la moindre faille dans leurs geôles osseuses. Pour laisser la moindre émotion s'enfuir.

C'est alors qu'elles entrèrent dans la bibliothèque. Et Na compris alors pourquoi Lyuuna aimait tant ce genre de lieu. C'était juste magique. Des étagères immenses, se dressaient devant elles comme des montagnes. Elles les dominaient de toutes leurs puissances, contenant toutes les histoires du monde. Tout le savoir du monde. Comme des géants de bois gardant précieusement leurs trésors. Entre ces étagères labyrinthique, des élèves circulaient dans tous les sens. Au ralenti. Dans un calme quasi religieux. Marée lente et silencieuse qui pourtant semblait envahir tout l'espace. Prête à les engloutir dans leurs flots. Comme des sirènes appelant à les rejoindre. Jamais Na n'aurait imaginer que l'académie puisse avoir autant d'élèves. C'était si différent du manoir où, en dehors des réceptions, il n'y a avait qu'elle, ses parents et son chat. Non, ici tout semblait tellement plus... vivant.
Oui c'est ca, jamais elle ne s'était sentit si vivante. Si réelle. Faisant partie intégrante d'un tout. Car elle savait que les flammes d'Halina était une invitation à rester à ses côtés. Que les flots des élèves de la bibliothèque était une invitation à rejoindre leur communauté. Et que dehors, elle en trouverait d'autres. Des guerriers farouches, des dessinateurs fantasques, des marchombres aériens. Des tornades qui chambouleraient sa vie. Des rocs sur lesquels elle pourrait s'appuyer. Des vagues qui la porteraient et la soutiendraient. Oui, elle voulait faire partie de cette masse d'élèves. Mieux, elle avait la sensation de pouvoir y prétendre. Mais en avait-elle réellement le droit, où est-ce qu'elle cherchait à usurper la place de Lyuuna ? Elle se souvint de l'enthousiasme avec lequel la jeune fille lui avait parlé de l'académie. Ce n'était pas seulement parce que c'était une place pour elle. Non, c'est parce que c'était une place pour elles. Pour elles deux.
Ici, dans ce lieu calme mais pourtant débordant de vie, elle se sentait à sa place. Elle se sentait définitivement apaisée.
Alors que la jeune Halina avait le dos tourné pour mieux lui montrer une section de la bibliothèque, elle décrocha une de ses plumes boucle d'oreilles et la trempa dans sa bague encrier. Puis elle traça dans ses mains quelques lignes. Juste ce qu'il fallait pour que Lyuuna comprenne. « Fille brune Halina, gentille, suivre, fait visiter, bibliothèque [×] ».
Elle releva les yeux et vit Halina quitter la pièce. Elle sourit, s'apprêtant à laisser ce havre à son tour. Elle fit quelques pas en avant pour la suivre.
Et tout s'éteignit.
Ce ne fut pas Na mais Lyuuna qui entendit la dernière phrase d'Halina.

- Alors, elle te plaît ? Qu’est-ce qu’on va voir maintenant ?

« De quoi ? ».
Ce fut la première phrase que Lyuuna se dit en émergeant dans son corps. D'une respiration, elle savait où elle se trouvait. Cela sentait trop le cuir des vieux livres et les pages jaunies par le temps pour ne pas reconnaître ce lieux particulier. La bibliothèque. Qu'est ce qu'elle faisait là ? Elle se souvenait vaguement d'une chute, d'un début de peur, d'un pincement de douleur. Oh, donc c'était ça, Na avait pris le relais. D'un coup, la Dessinatrice lança une phrase qu'elle avait répété dans l'optique de ce petit problème, histoire de se laisser le temps de totalement réfléchir sur la situation

- Désolé, je n'étais pas attentive, tu disais ?

La jeune fille avait maintenant quelques secondes pour comprendre. Elle avait une pointe de stress qu'elle calma aussitôt, c'était bien la seule chose qu'elle pouvait contrôler facilement. Passant nerveusement sa main sur ses yeux, simulant une quelconque fatigue, elle repéra des signes qui n'étaient pas là avant son trou noir. Oh, Na avait pensé à lui laisser des instructions, merveilleux ! « Fille brune Halina, gentille, suivre, fait visiter, bibliothèque [×] ».
Ok... Bon, maintenant il suffisait de décrypter tout cela. Donc déjà, la jeune fille qui lui répétait sa question devait être Halina, oui. Elle était brune, gentille et apparemment, Na l'avait suivit. « Fait visiter », bon d'accord... Mais quoi ? La bibliothèque peut être ? Oui mais alors que signifiait ce carrée avec une croix dedans ? Soudain la question qu'on lui avait posé revint en tête. «  Alors, elle te plaît ? Qu’est-ce qu’on va voir maintenant ? ». Qu'est ce qu'on va voir maintenant ? Bien sûr, la jeune fille qu'elle devait suivre lui faisait visiter l'Académie ! Et la croix... Ben elle demanderait à Na ce soir ! Donc maintenant, choisir une nouvelle destination. Une idée lui vint en tête, d'un ton heureux elle s'exclama :

- Tu sais où se déroulent les cours de dessins ? J'aimerais bien y aller.

Elle ne se doutait pas que sa question pouvait être totalement stupide, elle n'avait pas la même force de déduction que son alter-ego et n'avait pas forcément remarqué qu'Halina avait le physique d'une guerrière.

Ouiii ! Enfin ! Elle allait voir la salle de Dessin et elle était plus qu'excité. Elle trépignait presque d'impatience, suivant Halina avec envie, sautillant a demi sur place. Trépidante, elle écoutait, non, buvait les paroles de la combattante. Couloir à droite, au-dessus du portique Est qui joint les deux ailes. Parfait parfait, elle noterait ça plus tard dans son carnet. Lorsque Lyuuna se retrouva devant la salle, elle regarda la porte avec attention. Elle devait la graver dans son esprit, cela lui servirait dans d'autre moment. Ce n'est pas qu'elle n'avait pas un sens de l'orientation très développée, mais il arrivait qu'elle se perdait. Bon elle avait le plan alors, ça devrait aller.
Elle écouta avec plaisir Halina qui lui expliquait les autres pièces de l'étage. L'infirmerie, oui, cela lui serait utile si la Dessinatrice se blessait lors d'un cours de combat pour devenir Sentinelle... Ou tout simplement en tombant dans les couloirs, maladroite comme elle était, cela lui arriverait sans doute un jour. Elle écarquilla ses yeux quand elle parla de la Salle des légendes... Elle avait beaucoup entendu parler de ce cours... Surtout du professeur. C'était un monsieur qui était très instruit et qui, du coup, devait connaître plein de livres. Lyuuna adorerait parler bouquin avec lui, parler des aventures qu'elle lisait, il lui conseillerait d'autres ouvrages et elle les dévorerait avec plaisir. Mais il était malade. Tous ses rêves s'écroulèrent a ces mots. Non pourquoi ? Il était genre vraiment malade ? Genre indisponible ? La Dessinatrice s'enquit de son état, mais toujours à sa manière.

-C'est vrai ? Sir Cil'Eternit est malade ? Mais, on peut le voir ? Ou il est trop malade ? Il a quoi ? Il n'a pas de problème avec ses yeux ? Ce n'est pas trop grave quand même ? Je pourrais peut-être le visiter ? Il est à l'infirmerie là ?

La jeune femme se tue rapidement. Parce qu'elle s'excitait encore et que cela pouvait impressionner les personnes. Un tel débit de question, ce n'était pas humain, mais elle aimait tellement découvrir. Elle s'excusa prestement.

-Désolé... Je me suis emportée.

Elle faillit rajouter un « encore », mais se retint, après tout, la combattante n'avait pas besoin de connaître sa propre vie.

-Je, j'irais le voir plus tard ! Sinon, tu es combattante c'est ça ? Tu pourrais m'en dire plus sur les cours de combat ?

La Kaelem tortillait ses doigts, elle avait un peu peur de ce cours... Elle n'avait pas l'âme d'une guerrière. Elle tenta alors de se justifier.

-Oui, parce que je veux devenir Sentinelle, du coup, l'entraînement aux armes est obligatoire. Du coup, c'est avec Sir Hil'Guidjek... Il n'est pas trop méchant ? J'ai beaucoup lu sur les guerrier et ils sont toujours du genre un peu bourrin...

Se rendant immédiatement compte de sa bêtise, elle continua en bégayant :

-Non, mais pas que je te considère comme bourrin, tu es très gentille, du coup je ne sais pas quoi penser. Je sais que tout n'est pas comme dans les livres... Mais... C'est compliqué quoi...

La Dessinatrice sentait un basculement proche. Pourquoi était-ce si compliqué ? Pourquoi fallait-il qu'elle soit gênée en se moment-là ? Elle inspira et expira doucement. Lyuuna se calma lentement. Ses joues rougies s'étiolèrent doucement. Elle se posa contre un mur, tâtant ses jambes un peu endolorie. Dame, un siège, vite, sinon elle ne pourrait plus tenir longtemps. La demoiselle demanda donc timidement :

-Euh, sinon, ça te dirait de me montrer un endroit où l'on pourrait s'asseoir ? Comme ça, tu pourras me montrer les endroits importants sur ma carte. Enfin sauf si je ne te dérange pas ? Enfin tu n'as pas cours non ? Ou d'autre obligation ? Je ne veux pas t'empêcher de voir tes amis...

Et mince, encore cette sensation qui lui broyait le ventre. Elle se sentait vraiment gêné d'embêter Halina... Pourquoi c'était toujours compliqué comme ça ? Non, elle ne voulait pas que Na arrive maintenant, alors qu'elle essayait de se faire une nouvelle amie. Soudainement, la Dessinatrice s'en voulu pour cette pensée, elle ne devait pas être égoïste comme ça. Son alter-ego méritait une vie... Mais elle devait se calmer, sinon Halina serait devant une étrange situation. Elle savait bien que le caractère de son autre personnalité était totalement différent du sien. Vite, inspiration, expiration. Oui, comme ça, doucement. Juste se concentrer pour suivre la Teylus.

-Où allons-nous maintenant ?

Un malaise... C'était donc le mal qui touchait Sir Cil'Eternit. Cela fit un choc à Lyuuna de le savoir. Mais maintenant, il allait mieux. Heureusement ! Comme ça, elle pourrait le rencontrer plus facilement. La conversation continua, donc Halina était bien guerrière et elle venait de passer Acier... Que ? Quoi ? Qu'est-ce ? On lui a parlé d'Étincelle pour elle. Cela avait un lien ? Calme, ne pas s'emporter.
La combattante lui expliqua en quoi Sir Hil'Guidjek et elle-même avait un côté bourrin. La Teylus fut assez aimable pour lui accorder son aide lors du premier cours de combat. C'était vraiment gentil, la Dessinatrice était maintenant rassurée, parce que ça avait l'air vraiment flippant... Surtout qu'elle n'était pas une supra combattante de la mort qui tue. Elle avait beaucoup à apprendre. Et tellement de demande.
Un fourmillement de questions brûlaient le cerveaux de Lyuuna. En fait, au fur et à mesure de la conversation, la femme devenait questionnement. C'était une source de curiosité non tarie et cela pouvait devenir dangereux. Si elle explosait, elle engloutirait les personnes l'entourant dans un flot de demande... Et c'était nuisible pour la santé.
Du coup, la Kaelem se taisait, gardait les questions pour elle-même puis les triait. Cela donnait un petit condensé de ce qu'elle voulait savoir. Enfin, pour l'instant, ce qui importait, c'était de s'asseoir. Marcher, c'est bien, mais quand on en a l'habitude. Lyuuna n'avait pas forcément une condition physique des plus remarquables. Du coup, Halina l'emmena dans la salle des loisirs, continuant de lui expliquer les étapes pour s'y rendre. Deuxième étage, Aile principale.
Lorsqu'elles y entrèrent, la guerrière ouvrit les bras en grand dans un Tadam resplendissant. La Kaelem ouvrit ses yeux en grand, cherchant à absorber chaque partie de cette salle. Il y avait de tout. Des tables de jeux, des instruments de musique, des sièges confortables. En bref, que des trucs formidables. Malheureusement, la salle était vide, mais cela devait être vraiment sympa de venir ici entre amis. Peut être que la Dessinatrice irait avec ses futurs amis potentiels. Lyuuna sourit à cette idée, puis répondit à la question d'Halina par une petite blague :

-Tout d'abord, je veux savoir si ces fauteuils sont douillet !

Elle s'élança avec promptitude sur un siège qui entourait, avec d'autre compère, une petite table et s'y installa. Lorsque ses fesses touchèrent le doux coussin bien rembourré, elle ne put réprimer un soupir de soulagement. Ses jambes se détendirent petit à petit. C'était vraiment parfait. La jeune femme déposa son plan sur la table, laissant le temps à la Teylus de s'installer en face d'elle.

-Bon, j'ai plein de questions en tête, mais je ne vais pas t'assaillir comme tout à l'heure, je te le promets.

Souriant doucement, la jeune femme continua :

-Je me demandait où exactement se passait les cours de combat et si on pouvait se procurer une arme ? J'ai lu...

Elle montra une pièce sur la carte.

-Voilà, l'armurerie. On peut s'y servir où ce n'est pas autorisé ? Enfin, ce n'est pas que je veux une arme tout de suite, mais comme les Sentinelles se battent aussi avec des épées, je me disais qu'il fallait que je m'habitue rapidement...

Elle continua dans sa lancé :

-Sinon, tu m'as dit que tu étais Acier... C'est un rang pour les combattants ? Parceque comme moi c'est Étincelle et que je suis dessinatrice, alors je me demandais...

La femme s'avachit dans le fauteuil et observa les environs. Elle aimait beaucoup les instruments, on lui avait appris à jouer du clavecin quand elle était jeune. C'était un son délicat et fin, comme les nobles. Une question lui vint à l'esprit.

-Dit, tu as déjà joué de la musique ? Ce serais cool qu'il y ait un groupe de troubadour à l'Académie. Y'en a un, tu crois ?

Si elle pouvait faire partie de cela, ce serait tellement génial, genre magnifique. Elle pourrait se faire plein d'amis... Et si ce groupe n'existait pas, elle n'aurait qu'à le créer. Oui, bonne idée. Ce serait tellement génial. Une sorte de choral accompagnée par des instruments... Comme ceux que sa mère invitait pour des soirées de charités... Par la suite, Lyuuna observa les différents jeux. Il y avait des jeux de plateau, des jeux de cartes et d'autres étranges truc, posé ici et là.

-Tu sais jouer à ces jeux ? Moi j'aimerais bien, mais je n'ai jamais appris, mon père disait que c'était un divertissement indigne de moi... Même si ça m'a toujours tenté.

Elle sourit à Halina. Son flot de question avait ralentit, mais elle était toujours aussi avide de réponse.

Dame, que ces sièges étaient confortables. Vous voyez, le genre de chaise avec un coussin intégré à l'assise ? Ben c'était le même genre et, bordel, c'était juste magnifiquement douillet. Lyuuna se délectait de cet agréable fauteuil. Sa main caressait doucement le vieux parchemin qui lui servait de plan. C'était un réflexe, à chaque fois qu'elle avait un livre ou quelque chose à base de papier, elle adorait tester le grain, l'épaisseur et ressentir les quelques traits appuyés qu'avait laissé la plume. Appréciant ainsi la feuille, elle écoutait Halina avec toute l'attention possible. Les armes juste pour l'entraînement. D'accord.
Faudrait qu'elle demande à ses amis de Kaelem de l'aider... Parce que combattre, cela avait l'air complexe. Elle avait lu des livres sur des techniques de combats diverses... Y'avait plein de termes techniques comme feinte, pointe, estoc... Des trucs qu'elle n'avait pas forcément compris et qu'elle n'avait pas osé demander parce que c'était « une lecture qui ne convient pas à une jeune fille ». Elle entendait presque la voix de sa mère lui hurler ce qui était bien et pas bien dans son éducation. Maintenant elle était libre... Et c'était le bonheur.
Les armes étaient prêtées, pour avoir une arme « personnelle » fallait demander au forgeron... De toute c'était un peu tôt pour porter une épée... Elle devrait déjà suivre beaucoup de cours de combat avant de savoir manier une arme... Alors en avoir une pour elle toute seule... ça prendrait beaucoup de temps. Cela l'excita quand même un brin avant qu'elle ne se concentre de nouveau sur la conversation.
Étincelle, Flamme, Brasier. Ces trois mots résonnèrent dans sa tête, elle les répéta dans sa moustache, qu'elle n'avait pas. D'ailleurs, cette expression est complètement idiote, d'accord, les hommes peuvent parler dans leurs barbes... Mais les femmes, enfin, sauf les femmes à barbe, mais quand même, pour une femme... Ce n'est pas gentil de parler dans sa moustache pour une femme... Ce serait plus un doux duvet invisible... Bien. Alors, Lyuuna répéta ces mots dans son doux duvet invisible pour les ancré dans sa tête.
Pour les guerriers c'était Bois, Fer, Acier... Du coup, ça voulait dire qu'Halina était au dernier stade, donc c'était une super trop forte guerrière de la mort qui tue... Genre comme on en voit dans les livres... Comme une héroïne de conte, avec une splendide épée sur le côté et une armure qui brille de milles éclat. À cet instant, la Kaelem eut les yeux qui pétillèrent d'admiration. C'était juré, la Teylus serait son modèle de combattante.
En plus de ça, elle avait un certain sens de l'humour... Oui, c'était vrai, la future Sentinelle pouvait se considérer comme Étincelle de Bois, ou Bois d'Étincelle... Le Bois d'Étincelle était cependant plus classe. Du coup, ce sera son nouveau rang. C'était tout simplement gé-ni-al.
Brusquement, la grande guerrière d'Acier discuta sur les instruments, avouant qu'elle n'était pas douée dans cette matière. Lyuuna fit une petite moue, elle, la grande dame en qui elle avait placé tant d'espoir, ne savait pas jouer de la musique. Et bien soit ! Elle, Lyuuna Sil'Celim, allait lui apprendre. C'était pas si compliqué tout de même.
Elle retint quand même que Ichel la « pseudo, presque marchombre », savait joué du luth... Elle irais la voir plus tard, histoire de discuter. Ensuite, vint un sujet qui l'intéressait beaucoup. Les jeux. Dans ses livres d'aventures, les héros jouaient tout le temps aux cartes ou au Haman-Lô. Mais la Kaelem n'avait pu que lire les règles et des exemples... C'était tout de même moins intéressant que de pratiquer. Du coup, la proposition d'Halina était plus que la bienvenue. Elle sauta sur l'occasion.

-Oui, j'veux bien apprendre !

La Dessinatrice se leva brusquement et alla vers les tables pleines de cartes, de pièces et compagnie. Elle caressa les plateaux et regarda un jeu de cartes sur lequel était noté « 54 cartes ». Elle connaissait déjà le nom de toutes les cartes, mais ne savait pas à quoi elle servait et pourquoi c'était toujours « Valet, Dame, Roi, As ». Pourquoi « Dame », ce n'était pas une carte baleine pourtant. Mais elle avait lu que dans certaine version, c'était « Valet, Reine, Roi », du coup, cela l'avait aidé à comprendre.
La Kaelem attrapa le jeu de 54 cartes et le tendit à Halina.

-Tu veux bien m'apprendre un jeu de carte ?

La demoiselle réfléchit un instant, cherchant une petite idée pour remercier la Teylus. Elle se rappela sa promesse qu'elle s'était faite. Du coup, elle ajouta :

-En échange, je t'apprendrais à jouer du clavecin !

Ce n'était pas vraiment une question, ni un ordre, plutôt une affirmation. La Kaelem, toute joyeuse et toute souriante, s'assit sur le fauteuil et écouta la grande guerrière d'Acier.

[HRP : Voilaaaa, je trouvais interessant que Lyuuna apprennes à Halina à jouer du Clavecin, après si ça te dérange je peux éditer. Et puis si y'a d'autre détails qui te géne, pareil ! Et désolé pour le retard ^^ Bisou]

Le marché était conclu. Mais Lyuuna ne comprit pas le principe du « Tope-là ». Était-ce une coutume habituelle ici ? Voulant faire genre, elle ria alors comme son interlocutrice et observa la main qu'elle lui tendait. « Tope-là » ressemblait un peu à « Tape-là », peut être que fallait que la Kaelem utilise sa propre main pour taper dans celle d'Halina. Pensant que c'était la solution, elle le fit. Ce qui, effectivement, était la démarche à suivre.

Voyant qu'il n'y avait aucun problème par la suite, la jeune Dessinatrice sauta un peu de joie parce qu'elle avait appris une nouvelle chose, encore. Maintenant le cours de jeu allait commencer. Mais Halina semblait ne pas savoir par quoi commencer. Il y avait tant de jeux que cela avec des cartes ? Elle pensait que y'avait un jeu qu'on appelait les cartes. Ben oui, à chaque fois, on dit « on joue aux cartes » du coup ça implique qu'il y ait un jeu qui se nomme « les cartes ». Mais, elle laissa ça de côté et écouta avec grande attention les explications de la Teylus.

Une bataille donc... Parce qu'on se bat aussi avec les cartes ? Mais ça doit être étrange, genre « C'est l'heure du Dudududududuel ! ». Chassant cette idée plus que saugrenue, elle se rappela que c'était un jeu, pas un combat. Donc on a chacun un tas de carte équivalent de vingt-six cartes. Oui, Lyuuna savait compter, en effet, cinquante-deux divisé par deux, ben ça fait vingt-six. Qui l'eu crut ! Où en étions nous déjà ? Ah oui, deux paquets de vingt-six cartes. Donc on tire la première et on la montre. La plus forte l'emporte. Trop la classe ! En plus elle venait de gagner le premier round. Du coup ça ne pouvait que s'annoncer trop génial pour la suite. Celle qui obtenait toutes les cartes gagnaient. Le jeu continua, la Kaelem s'y croyait en envoyant ses cartes au combat.

Dans un grand moment de joie, Lyuuna se concentra un peu plus et avec fougue sortie la carte suivante. Un DIX, tiens, prend toi ça ! Ah, mince, Halina avait aussi un dix, mais du coup comment on fait dans ce cas ? Parce que là faut départager. Serait-ce une différence au niveau des couleurs ? Genre le pique l'emporte sur le coeur qui l'emporte sur le trèfle qui l'emporte sur le carreau ? Ou y'avait autre chose ? Peut être de la rapidité alors ! Dans ce cas, la Kaelem avait sans doute gagné, mais elle n'en était pas sûr, vu qu'elle s'était totalement concentré dans son geste.

Ce fut à ce moment de grande réflexion que la Teylus lui expliqua le principe d'une égalité. Donc il faut mettre une carte à l'envers sur la carte déjà posé puis remettre encore par-dessus une carte à l'endroit et là, on reprenait le même principe. Wohwohwoh, Calm Down ! Ça se compliquait un brin là. Parce qu'en plus fallait réfléchir aux égalités quoi. Tout s'embrouillait un peu dans la tête de la Dessinatrice. Se concentrant un peu, elles posèrent les cartes.

Elle avait un cinq et Halina un... un ? Pourquoi alors était-ce elle qui le remportait ? Genre le un c'est plus fort que le cinq ? Depuis quand je vous pris ? Non mais c'est quoi ce scandale ! Alors, Lyuuna se souvint de ce qu'on appelait l'As, c'était la carte un, mais c'était la plus forte quand même. Genre l'As qui pille tout. Était-ce pour cela qu'on appelait les gens très forts dans leurs domaines des As ? Ou c'était peut-être l'inverse...

Enfin bref, toujours est-il que la nouvelle Kaelem était toute heureuse de jouer. C'était amusant et stratégique, mais avec plein de hasard. En plus, elle gagnait. Son tas grandissait tandis que celui de son adversaire devenait tout petit petit. C'était logique en un sens. Mais la Teylus se défendait bien, avec son As là et puis toutes les cartes plus fort que les siennes. C'était trop dur de gagner finalement. Ce que la jeune femme lui confirma. C'était du hasard, donc c'était normal au final. Elle tenta alors de lui expliquer un autre style nommé la Bataille Aline. Cela devait être amusant, Lyuuna avait hâte d'y jouer.

Sauf que la porte claqua, s'ouvrant sur une autre Teylus qui s'époumona sur Halina pour lui dire qu'un nouveau cours de combat allait commencer. Non-mais-oh ! C'était quoi là, une technique pour ne pas perdre à la bataille c'est ça hein. En fait c'était prévu depuis longtemps, genre l'une jouait pendant que l'autre attendait et selon un signal prédéfini l'autre s'élançait dans la salle, coupant court au jeu.

Oui, Lyuuna était frustrée et tentait de trouver des justifications, même si cela ne semblait pas du tout logique. En plus Halina venait de se lever en faisant tomber toutes les cartes. Non mais là, c'était vraiment de la triche, c'est pas possible d'être aussi maladroite ! Mais après avoir ramassé le jeu qui avait chut, la combattante Teylus lui fit une offre qui balaya aussitôt toutes l'animosité qui commençait à monter.

Venir au cours de combat ? Genre comme des amis ? Mais c'était trop génial comme proposition ! En plus avec Halina, la Kaelem était sur de devenir une dure de dure, avec de vrai muscle et des techniques de fifou. Toute heureuse, la Dessinatrice sauta sur ses pieds et attrapa la main de la Teylus.

-Ouiiiii je viens !

Elle rit quand la Teylus lui fit promettre de lui apprendre le clavecin. Tout sourire, finalement, c'était pas si compliqué de se faire des amies.

[HRP : Voilààà ! Donc RP clôturé, j'ai hâte d'en faire un autre avec toi ! Merci pour ce RP o/]