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 Twinkle, twinkle, little star [Terminé]

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Gwëll Yil'Sleil
Gwëll Yil'Sleil

Flamme
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MessageSujet: Twinkle, twinkle, little star [Terminé]   Twinkle, twinkle, little star [Terminé] Icon_minitimeDim 27 Jan 2013 - 21:00


    Gwëll se releva péniblement et se remit à pleurnicher lamentablement. Elle épousseta son pull et regarda d'un œil larmoyant son genou écorché, réécorché où le sang perlait. C'était au moins la dixième fois qu'elle tombait depuis qu'elle s'était levée. Elle clopina encore quelques mètres et, trébuchant, elle retomba. Sanglotant doucement, elle ne se releva pas immédiatement. Elle n'en pouvait plus, de ces jambes flageolantes, de ce corps qui ne la portait plus. Elle en avait assez de ces genoux croûtés par le sang séché et la terre qui s'agglutinait dans le liquide encore poisseux. Elle avait à peine réussi à se sortir de son lit, à vaguement s'habiller et à se traîner jusqu'au rez de chaussée. Et elle était là, juste devant les grandes portes, désemparée, les bras ballants. Le sourire avait quitté son visage. Elle se releva et traîna les pieds jusque devant les écuries, s'appuyant contre un mur. Elle replaça derrière son oreille une mèche couleur miel sale, déjà, et s'appuya lourdement sur le battant de bois. Puis elle le poussa de toutes ses forces et il s'ouvrit. Sans réelle volonté, elle se dirigea vers l'ouverture du grand paddock au bout de l'aile du bâtiment. Elle se hissa difficilement par dessus la porte et se laissa tomber de l'autre coté. Comme une masse. Ses coudes tapèrent sur le sol et ses doigts rougirent quand elle s'en servit pour les essuyer. Elle s'agenouilla et la terre sèche picota ses écorchures. Un bruit de sabot se fit entendre et elle leva les yeux. L'équidé venait à sa rencontre avec toute la curiosité qui le caractérisait. Il approcha ses naseaux du visage de sa propriétaire et renifla bruyamment dans son visage. Piteusement, elle serra ses bras autour de son encolure et elle attendit qu'il la relève. Compréhensif, il fait ce qu'elle attendait. Et elle se retrouva debout, la tête enfouie dans son poil doux, sans plus bouger. Lui même ne bougeait plus. Il était là, et il ne voyait pas pourquoi elle n'était pas comme d'habitude, il ne comprenait pas d'où venait cette sensation que si il bougeait, elle tomberait sans chercher à se rattraper. Subitement, elle se ressaisit un peu. C'était comme une étincelle qui naissait doucement dans sa tête. Elle se redressa et elle posa ses mains sur le dos du petit cheval. Et elle poussa un peu sur ses bras. Mais ses pieds ne décollèrent pas d'un demi-centimètre. Par dessus son épaule, l'animal la regardait, inquiet. L'étincelle s'étint brusquement et elle cessa de forcer. Elle ne faisait plus que se maintenir debout et, encore, difficilement, sur ses jambes tremblantes. L'étalon le sentit et il se coucha à ses pieds pour l'aider à monter sur son dos. Mais elle même n'était pas sûre d'être capable d'y arriver. Même aussi simplement. Elle se laissa tomber plus qu'elle ne s'assit et il se releva doucement. Gwëll peinait à se maintenir en place et elle se demandait même ce qui faisait qu'elle ne tombait pas vu la tenue qu'elle avait. Le dos rond, les épaules relâchées, même sa tête ne tenait plus droit. Jingle tenta un pas et sa tête dodelina. Alors il avança précautionneusement, un pas après l'autre, comme si il marchait sur une surface gelée dont il n'était pas certain de la solidité. Comme s'il marchait sur des oeufs, et c'était un peu ça. ***Elle ne savait pas comment elle avait réussi à passer la barrière, ni comment elle se maintenait sur le dos de son cheval, mais elle y parvenait tant bien que mal. Plus amorphe que vive, elle encaissait les secousses du petit galop qu'il avait pris. Elle ne savait pas où elle allait, mais elle avait confiance en son destin. Ou, devrais-je dire, elle n'arrivait pas à ne plus lui faire confiance. Ni à ne plus faire confiance à quoi que ce soit. Les foulées ralentirent, se firent plus saccadées et puis elles se stoppèrent. Gwëll se laissa glisser jusqu'au sol et elle ré-essuya ses coudes. Puis elle se leva péniblement et elle marcha vers la porte. Elle manqua la seule et unique petite marche du perron et elle tomba de tout son long. Elle se griffa le bras contre la pierre dure et se cogna la tempe sur le palier. Elle se releva, encore -ça devait bien faire cent fois qu'elle se relevait depuis qu'elle s'était levée, au moins- et elle toqua lamentablement à la porte. Quelqu'un, de l'autre coté, appuya sur la poignée et le battant s'ouvrit. On lui fit signe de rentrer et elle s'exécuta, sans conviction. Sa vie était guidée et malgré les rampes des deux cotés, il lui semblait que sa voie tombait doucement, titubait, comme si elle était ivre. Ce devait être ça, sa voie devait être ivre. On lui demanda ce qu'elle avait et ses yeux tombèrent dans un regard couleur d'acier. Regard qu'elle avait déjà croisé, mais dont elle avait du mal à se souvenir. À vrai dire, elle ne se souvenait plus de rien, sa tête avait dû cogner trop fort.



[Si ça te va ]

Amarylis Luinïl
Amarylis Luinïl

Maître rêveur
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MessageSujet: Re: Twinkle, twinkle, little star [Terminé]   Twinkle, twinkle, little star [Terminé] Icon_minitimeLun 25 Fév 2013 - 20:37

La merveilleuse idée qu’Amarylis avait eu en acceptant d’aider Gareth prenait bien des tournures étranges. Et pas forcément plaisantes. Elle arpentait donc la Confrérie d’un pas plutôt paniqué et nerveux, vérifiant à chaque angle de mur que personne ne s’y trouvait. Ses recherches sur les patients devenaient de plus en plus risquées et poussées. On comprenait mal pourquoi la rêveuse passait autant de temps en compagnie des sans espoirs. Certains y trouvaient une prochaine nouvelle victoire pour l’avancée médicale, croyant encore qu’elle cherchait un moyen pour réveiller ceux que le coma avait pris. D’autres la pensaient naïve et utopiste de vouloir sauver tout le monde.
Elle ne prenait pas garde aux paroles de couloir, sachant bien qu’un mot de trop pourrait la trahir. Mais là. Là, il ne fallait surtout pas qu’elle croise un quelconque rêveur. Il verrait automatiquement sur son visage qu’il venait de se passer quelque chose de grave. Et la Maitre Rêveuse était une très mauvaise menteuse.
Elle atteint enfin ses appartements, essoufflée, et claqua précipitamment la porte derrière elle, poussant le plus grand soupir de soulagement possible.

-Ah, te voilà.

La rêveuse hurla, et attrapa la lampe la plus proche, prêt à la balancer sur l’inconnu qui occupait ses appartements. Lorsqu’elle se retourna, son geste lui parut dérisoire et mal venu.
Jùn lui faisait face, la mine ébahie par sa tentative d’attaque. Il fronça les sourcils, inquiet de la voir si pâle, tremblante, le visage en sueur.

-Que se passe-t-il ?

Elle voulu le réprimander, lui demander pour qui il se prenait à se trouver ici, sans son autorisation, mais les évènements récents lui revinrent en mémoire, et elle du se taire. Quoi de plus logique à ce que son amant se trouve dans ses appartements ? C’était d’une logique imparable. Il fallait juste qu’elle s’y fasse. Elle voyait Jùn. Et Jùn la voyait.
C’était terriblement gênant comme situation. Elle prenait seulement conscience maintenant qu’avoir accepté un homme dans sa vie, cet homme dans sa vie, mettait fin à toute intimité et secrets. Comment garder impénétrable ses expérimentation alors qu’il était toujours là. Tout le temps. Le matin, à son réveil, le midi pour déjeuner avec elle, l’après-midi lors de ses cours, et le soir, pour diner, parler de leurs journées et se coucher. Sans arrêt à ses côtés, et gentil, en plus. Prévenant, doux et aux petites soins. Voilà à présent qu’elle n’avait même plus de coin personnel pour craquer.
Elle reposa dans un sourire d’excuse la lampe, passa une mèche derrière son oreille, et tenta de reprendre contenance.

-Rien, tu m’as juste fait peur. Ce n’est rien.

Les yeux de menthe la fixèrent l’espace de deux secondes pour comprendre qu’elle mentait. Il s’approcha, inquisiteur, et lui prit la main. Amarylis se fit violence pour ne pas la retirer, par pur réflex. Elle avait encore énormément de mal à se faire au fait de voir quelqu’un. Et se montrait donc très maladroite. Elle tenta de jouer sur cela.

-Il faut que je prenne l’habitude de te voir à mes côtés…tout le temps.

-Tu n’aimes pas me voir ici ? S’offusqua-t-il.

-Oh, si bien sûr ! C’est juste que…je n’ai jamais…tu es mon premier, Jùn.

Elle se força à lui donner un timide baiser, espérant que cela clôturerait le sujet, mais il n’en fut rien. Jùn n’était pas dupe.

-Ama…que s’est-il passé ?

Elle soupira. Mettre au courant l’homme qui partageait sa vie de ses magouilles allait vite devenir indispensable. Mais elle aurait voulu faire tarder un peu plus la chose, histoire d’avoir de quoi lui prouver le bien fondé, et pas en lui apportant une constatation qui faisait plus peur qu’autre chose.
En effectuant un test légèrement plus précis qu’à l’habitude sur l’un des comateux, le corps de ce dernier avait réagi par un soubresaut, puis avait ouvert les yeux. Avant de mourir. Définitivement. Les « sans espoir » finissaient tous par mourir, donc cela ne posait pas de problèmes officiellement. Mais Jùn savait bien qu’Amarylis ne serait pas dans un état pareil pour la mort de l’un d’eux. Elle tenta de trouver une alternative, puis soupira, prête à se résigner.
La cloche annonçant qu’un blessé arrivait aux portes d’Eoliane la sauva. D’un bond, elle quitta la pièce, saisissant l’excuse.

-On en reparle plus tard. Lança-t-elle derrière elle, louant d’avance le blessé, aussi égoïste que cela pouvait être.

Elle dévala les escaliers, trop heureuse de s’en sortir ainsi. Arrivée à la porte, elle put entendre le coup faible que portait son invité à celle-ci. Le coup faible d’un enfant. Toute trace de joie disparut de son visage à cette pensée. Elle lui ouvrit, et la reconnut aussitôt. C’était l’enfant du groupe d’élèves de la dernière fois. Ceux qui étaient revenus traumatisés et blessés gravement et qui n’avaient osé piper mot de leurs aventures. L’un d’eux avait même failli étrangler Elisha par sa folie. Et elle, Gwëll, au milieu de tous ces combattants, paraissait comme l’enfant perdue qui n’avait rien à faire là. Elle semblait si petite, et si fragile. Elle se souvenait avoir chanté pour elle.
Elle la cueillit dans ses bras, comme un petit animal blessé, et la serra contre elle avec tout l’amour d’une mère. Naturellement, elle la porta, sachant bien qu’elle ne ferait pas un mètre de plus. Elle n’avait pas encore ausculté la petite, qu’elle savait déjà qu’elle la garderait avec elle un moment. Dans son supplice de mal de cœur et ses larmes, elle avait lu bien plus qu’une douleur physique.

Elle l’emmena jusqu’à ses appartements, préférant ce lieu autrefois intime que les salles d’examens, souvent bien trop intimidantes pour de petits êtres comme elle. A son grand soulagement, Jùn ne s’y trouvait plus. Elle allongea Gwëll sur le fauteuil le plus douillet possible dans lequel elle se lova, sans jamais rompre le contact avec la rêveuse. Amarylis se sentait soudainement triste de la revoir ainsi, dans cet été, et à la fois heureuse de pouvoir prendre soin d’elle. Elle passa sa main dans la chevelure noisette de sa nouvelle protégée et lui offrit un sourire doux et rassurant.

-Gwëll, Gwëll, ne pleure plus, je suis là !

Amarylis attrapa une des larmes et la vit valser dans l’air dans un clin d’œil décerné à la jeune fille, espérant lui tirer un sourire, aussi faible soit-il. Puis elle détailla l’étendue des blessures. Rien de bien grave, des écorchures. Mais infectées de boues et de petits graviers.

-Je vais te lâcher la main. Mais juste deux minutes. Juste le temps d’aller chercher de quoi te laver tes entailles. Je reste dans cette pièce, d’accord ?

Elle n’avait pas l’air très d’accord, aussi reprit-elle le chant avec lequel elle l’avait apaisé lors de leur dernière rencontre.

« Au delà des mers, vivait un vieux berbère
Ami du vent d’été, avait bien du mal à respirer.
Le zéphyr vint à lui, et lui promit la vie ,
Mais les mois passèrent, et il ne vit guère
Aucun vent s’amener, pour promesse à respecter.
Alors qu’un matin, son souffle s’éteint,
Trois coups martèlent, la porte du mortel.
Le vieillard du se lever, et son corps malmener,
Pour un dernier espoir, de voir autre chose que le noir.
Ce n’était pas un démon, qui épousa ses poumons,
Mais bel et bien l’azilé, pour une nouvelle vie lui donner. »


Tout en continuant le conte, elle put se dégager de l’étreinte craintive de l’élève de l’Académie, et prendre avec hâte le nécessaire pour nettoyer les plaies avant de les soigner. Elle revint donc vite avec un pichet d’eau tiède, une bassine et des serviettes propres. Elle fit couler de l’eau dans la bassine et y trempa une première compresse. Puis, le plus délicatement possible, elle commença à nettoyer les genoux noirs de la petite. Elle lui parla le plus naturellement possible pour lui faire oublier toute douleur.

-Tu te souviens de moi, Gwëll ? C’est Amarylis. Comment te sens-tu ? Tu veux bien m’expliquer ce qu’il t’est arrivé ?

Je suis là, à présent, n’ai crainte. Je serais toujours là.





Gwëll Yil'Sleil
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MessageSujet: Re: Twinkle, twinkle, little star [Terminé]   Twinkle, twinkle, little star [Terminé] Icon_minitimeSam 9 Mar 2013 - 17:19

    Elle se sentait tomber et, cependant, elle sentait qu'elle ne tombait pas.
    Il y avait ces deux bras, et ce corps, qui la retenaient, qui la serraient bien. Oh, elle ne se sentait pas, bien, bien sûr, sinon, elle ne se serait pas laissée aller comme ça, il aurait eu une certaine retenue. Mais là, elle avait juste envie de pleurer, envie de crier, envie de cesser, envie que tout ça s'arrête et, pourtant, pas envie que ça se termine.
    Elle sentait qu'elle avait besoin d'en parler, qu'on s'occupe d'elle, qu'il fallait y faire quelque chose. Bien évidemment, elle aurait pu choisir de juste fermer les yeux, penser à autre chose, oublier. Mais ça aurait été de la faiblesse et ça serait revenu, au moment inopportun.

    Elle crispa les poings, serra les paupières et ses larmes imbibèrent le tissus de la robe, en face. Tout contre elle, elle entendait un cœur qui battait, doucement. Ce n'était pas le sien. Le sien, elle le devinait, tapait trop fort. Il voulait sortir, exploser. Il ne voulait plus être à elle, ne voulait plus être en elle.
    Elle sentit qu'on la portait, qu'on la transportait. Et contre son oreille, il y avait toujours ce cœur qui essayait d'apprendre au sien. Elle ouvrit un peu les yeux, mais elle ne distinguait rien qu'un peu de tissu pâle, qu'elle sentait, doux, contre sa joue.

    On la déposa dans un fauteuil tout mou et elle pleurait encore. Elle entendait encore le cœur, ce rythme, tranquille. Elle sentit qu'on caressait ses cheveux et elle entendit une voix douce, rassurante. Ses mains en trouvèrent une autre à laquelle elle se raccrocha comme à une bouée dans la tempête, à une lueur dans la nuit. Cette main, c'était rien, cette main c'était tout.
    On lui demanda de ne plus pleurer.
    Elle ne pleurait plus, mais les larmes continuaient à couler, inexorablement, le long de ses joues et jusque dans son cou. Elle les sentait glisser et sa peau était inondée, mais elle ne les désirait plus, elle les supportait seulement. Au milieu de cette marée, elle distingua un visage. Tendre, doux, entièrement tourné vers elle et qui lui souriait. Une larme valsa et cela fit comme une perle, comme une étincelle.
    Sa respiration, hachée de sanglots se calma doucement et elle commença à se sentir un peu mieux. Elle aurait voulu que cette étreinte ne s'arrête jamais.

    Les doigts se dérobèrent de son emprise et les larmes revinrent.
    Elle allait être seule, encore. Et cette solitude la hantait. Seule, seule, seule, pour toujours et à jamais. Elle suffoqua et tenta de se débattre contre ce démon qui revenait, elle perdait pied.
    Elle entendit, à nouveau, la voix, mais cette fois ci, ce n'était plus pareil, elle ne voulait pas lui obéir, elle ne voulait pas faire ce qu'on lui demandait, elle voulait être égoïste et garder cette main. Après tout, qu'était-ce qu'une main au regard d'un cœur ? Un simple bout de chair et elle en avait besoin.

    Les mots jaillirent comme du néant et ils trouvèrent un écho en elle. Elle se souvient du visage souriant et du la tisane chaude. Elle se souvint des mains bleues et des remèdes qui sentaient les fleurs.
    Elle ferma les yeux et se laissa bercer. Très vite, elle s'assoupit. Elle était à bout de forces.

    Un contact humide sur son genou la tira d'un sommeil sans rêves. Ses yeux s'ouvrirent et malgré que les larmes s'étaient taries, l'émotion la submergea à nouveau. Une boule s'était formée dans sa gorge.
    On lui offrit un prénom qu'elle accepta sans broncher. Elle ne se sentait pas la force de dire quoi que ce soit. Mais, en son fort extérieur, elle se souvenait de tout. D'Amarylis, de ses chouettes, de sa voix magique, de ses chansons de ses mains de fée, de ses grands yeux et de son cœur d'or. Elle avait envie de la serrer dans ses bras, mais elle avait aussi envie de pleurer, surtout.


    Lya m'a laissée. Elle est... Partie. Je ne la reverrai plus jamais. Je suis...

    Les mots se bloquèrent dans sa gorge, comme si sa voix refusait d'admettre ce que son cœur criait. Elle était seule, à jamais. Abandonnée par tous.

    Je suis seule.

    Le mot résonna dans la pièce, un instant, peuplant le silence parfait qui s'y était logé à lui seul. Puis il résonna encore dans son esprit. Quand il fut complètement éteint, la pression qui reposait sur ses épaules explosa et elle éclata en sanglots.
    Immédiatement, Amarylis la prit dans ses bras, mais elle ne parvint pas à endiguer le flot de larmes.


    ...Lya est partie faire sa vie, c'est bien normal, mais maintenant... Oh, maintenant, je suis seule, elle me manque tellement.

    Mais ce n'était pas tout, bien sûr, parce que des amis, elle en avait d'autres, il y avait Enelyë, bien entendu, et Attalys et Ichel et plein d'autres encore, mais ce vide, c'était ce vide qui lui faisait mal.

    Et...

    Elle ignorait comment dire, comment tout dire, c'était comme si les mots étaient de simples sons comme si ils ne signifiaient plus rien. Des papillons cloués au sol, des arbres sans feuilles, des jours sans lumière, des nuits sans étoiles. Des mots sans âme.

    Je n'ai plus de famille... Elle, elle m'a aussi ...Abandonnée.

    Les mots la fuyaient, elle fuyait les mots. Elle redoutait qu'ils puissent retrouver un sens et signifier quelque chose qui l'effrayait.

    Mes parents ont... coupé les ponts, je dois... Voler de mes propres ailes...

    Ils reprirent soudainement leur profondeur et les sillons de ses larmes se firent torrents.

    Mais, je ne sais pas voler, Amarylis, je vais m'écraser !

    Ses sanglots la secouèrent alors qu'elle enfouit son visage dans ses mains, dans le cou bien doux de la rêveuse. Celle ci referma ses bras autour d'elle, comme des grandes ailes et elle lui murmura des mots doux à l'oreille.
    Sur un fil, au bord du gouffre, le regard happé par le vide, Gwëll avait peur de tomber.




Amarylis Luinïl
Amarylis Luinïl

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MessageSujet: Re: Twinkle, twinkle, little star [Terminé]   Twinkle, twinkle, little star [Terminé] Icon_minitimeSam 30 Mar 2013 - 20:06

Amarylis ne savait qui était Lya, quoi que le prénom lui dise quelque chose, mais elle devait être une personne très proche de la petite, pour que son départ l’affecte autant. Au mot « seule », elle prit Gwëll contre en lui chuchotant le contraire. Mais prétendre l’inverse ne suffirait pas, elle le savait bien. Elle-même n’avait que trop souffert de solitude ces derniers temps. La rêveuse sonda les larmes de sa protégée du jour et y vit qu’il n’y avait pas que Lya. Gwëll était petite frêle et enfantine, mais tout comme Juliet, elle savait être forte. Elle en était intimement persuadée. En effet, elle continua ses aveux, et la suite lui fit froid dans le dos. Plus de famille. Orpheline. C’était le pire abandon qui soit, et ça, Amarylis pouvait en témoigner. Elle s’en voulait chaque jour d’avoir quitté si brutalement sa famille, mais leur en voulait plus encore ne jamais avoir cherché à la récupérer. On n’abandonne pas son enfant. Pas tant qu’il n’est pas prêt. Et même s’il semble l’être, on le retient, on garde un lien. On en coupe pas toute relation comme si l’on avait juste élevé un animal jusqu’à le vendre ou le manger.
Elle resserra son étreinte,lui murmurant des paroles rassurantes, plus prise au cours qu’autre chose. A l’instant, elle était en colère. En rogne contre ses parents indignes qui osaient laisser un bijou pareil s’écraser à terre. Certes, à vue d’œil elle n’était plus une enfant, mais au niveau psychologique…une brindille, prête à casser au moindre coup de vent trop fort ! Il fallait la protéger, et non pas la pousser du nid pour qu’elle vole de force. Déposant un baiser sur son front, elle lui fit une promesse.

-Tu n’es plus seule Gwëll. Je suis là, et moi je ne t’obligerai pas à voler. Et si tu tombes, je te rattraperai, et te soignerai.

Elle sentit les sanglots s’atténuer dans sa nuque, et sourit, passant sa main dans la longue chevelure de l’élève.


-Tu sais, ici Jingle pourrait avoir une amie, aussi. Tu m’avais parlé de chevaux la dernière fois. Et bien j’en ai un, moi aussi. Je joue avec Djiwëlle, une jument qui avant jouait avec…

Sa voix dérailla légèrement.


-…avec mon papa. Ce n’était pas mon vrai père, mais c’était mon papa. Et il jouait avec Djiwëlle.

Ewen lui manquait, chaque jour, chaque seconde. Il avait été toute sa famille, ce qui n’était donc pas grand-chose et à la fois tout. Elle berça la jeune fille contre son cœur, sentant un drôle de sentiment s’installer. Elle ferma les yeux, et le rêve se déversa. Il soigna les plaies les moins graves, et administra une sensation de calme et d’anti-douleur dans l’esprit de Gwëll. Quant à la jeune femme, son propre rêve lui injecta une vision.
Assise dans l’un de ses fauteuils, elle ne berçait plus sa protégée, mais un enfant, un nouveau-né. Et dans ce rêve là, elle possédait les formes et le ventre de la femme qui vient d’accoucher. Elle apaisait les pleurs de sa progéniture du chant des chouettes, et elle-même laissait des larmes rouler sur ses joues, des larmes de bonheur. Elle était mère. Elle venait durant neuf mois de porter cet enfant, le sentant grandir, et ne voulait qu’une chose au monde : le choyer pour le restant de ces jours.
En rouvrant les yeux, elle sentit ses joues humides, et la tête toujours enfouie de la petite dans son coup lui indiqua qu’il s’agissait de ses propres pleurs. Fugaces, mais existants.

-Je ne suis pas ta mère. Mais…je pourrais être ta maman, si tu le veux.

Maman. A l’instant où ses paupières closes lui avaient envoyé l’image de son rôle de mère, elle avait prié pour entendre ce mot, rien qu’une fois. Elle était devenue célèbre accoucheuse dans Gwendalavir, mais devait être bien une des seules femmes aussi âgée à ne pas avoir eu d’enfant. Elle n’en aurait jamais. Pas de son ventre, il était bien trop tard. Mais elle pouvait être une maman, pour Juliet comme pour Gwëll et fonder sa propre famille. En dehors du rêve. Elle s’imagina, l’espace d’un instant, se rendre à l’Académie, non pas pour des soins, mais pour venir chercher sa fille, et lui préparer son goûter, l’entendre raconter sa journée, et lui lire une histoire avant qu’elle ne s’endorme, dans la chambre qu’elle lui aurait préparé.

Elle chassa ses espoirs et son besoin de maternité pour se re-concentrer sur les blessures de Gwëll. L’un de ses genoux était encore bien enflammé, malgré le rêve. Avec des gestes doux et prudents, elle se dégagea de celle qui pourrait être sa fille, afin d’attraper la boite des bandages. Elle l’ouvrit devant la fillette pour lui en montrer le contenu, et les couleurs.


-De quelle couleur veux-tu habiller ton genou ? Tant qu’à être une blessée, autant être la plus belle des blessées, non ? Jùn est très doué en dessin, il pourra même t’y dessiner un cheval ou autre chose !

De ses doigts fins, elle ôta une mèche qui collait aux joues de l’académicienne.


-Il n’y a pas que la couleur du bandage que tu pourrais choisir. Les couleurs de ta chambre, par exemple.

Amarylis déglutit, nerveuse. Elle tremblerait presque, déjà trop attachée à Gwëll. Il lui avait suffi d’une étreinte et d’un rêve pour trouver d’où provenait le dernier vide de son cœur. Elle avait besoin d’elle. Elle voulait une fille, elle voulait cette fille. Elle voulait être appelée Maman. Et pour de vrai, pas comme Juliet pouvait l’appeler Reine ou tout autre surnom amusant. Elle voulait reconnaitre l’aequor légalement, comme chair de son cœur.

Gwëll Yil'Sleil
Gwëll Yil'Sleil

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MessageSujet: Re: Twinkle, twinkle, little star [Terminé]   Twinkle, twinkle, little star [Terminé] Icon_minitimeJeu 4 Avr 2013 - 17:03

Les petits morceaux de son cœur cognaient fort dans sa poitrine et elle les entendait jusque dans sa tête. Ça faisait un bruit décousu, comme un chœur de battements de cœur qui résonnait à l'infini.
Des morceaux grossiers, elle l'entendait, puisqu'ils sonnaient sourdement. Étrangement, au fond d'elle, elle se disait qu'elle s'attendait plutôt à quelque chose de plus fin, un son plus cristallin. Parce qu'elle trouvait que son cœur devait ressembler à un tesson de bouteille puisqu'il avait implosé en mille miettes éparses dans sa poitrine.

Amarylis déposa un bisou sur son front et, au milieu des larmes, Gwëll eut un sourire timide. Amarylis était rêveuse et elle saurait certainement recoller les morceaux de cœur aussi bien qu'elle faisait disparaître les bleus et les bosses.
La réponse de la rêveuse lui fit tout bizarre, dans la poitrine. On lui avait souvent témoigné présence, mais jamais, à vrai dire, de cette manière. Typiquement, c'était le genre de déclarations qu'elle lisait dans les romans et qui faisaient battre son petit cœur et même, des fois, pleurer ses yeux. Mais jamais on ne lui avait destiné. Elle versa une larme d'émotion, mais ce n'en était qu'une parmi un torrent d'autres.

Puis le sens des mots lui parvint réellement et elle eut la pensée qu'elle ne serait plus seule, maintenant, parce qu'Amarylis le lui avait promis. Et elle avait confiance en elle, elle savait qu'elle pouvait compter sur elle. Elle lui avait promis.
La lumière avait un peu changé. C'était comme si le jour c'était levé au milieu de la nuit et c'était un peu ça, en plus. Parce que les bouts de cœur de Gwëll, à l'intérieur s'étaient mis à briller. Une petite lueur d'espoir et c'était magique parce que là où un seul cœur aurait donné une lumière diffuse quoique forte, ces fragments là donnaient mille reflets de mille couleurs, comme un arc en ciel, mais à l'intérieur.
Elle posa la main sur sa poitrine et elle sentit ce ronronnement que d'autres auraient attribué aux poumons mais qu'elle savait être ce cœur qui souriait à nouveau. De toutes manières, les autres croyaient toujours savoir sans jamais rien vérifier.

Amarylis parla de Djiwëlle et dans ses mots, Gwëll ressentait tout l'amour que la rêveuse portait à ceux qui l'entouraient. Et ce papa, qui faisaient résonner étrangement les sons dans sa bouche, faisait briller son cœur dans sa poitrine, parce que les larmes qui sortaient de ses yeux et qui venaient jusqu'à son cou brillaient de ce feu chatoyant de couleurs. Parce que le cœur d'Amarylis était peut être pas répandu en fragments mais il n'en restait pas moins qu'il n'était plus d'un bloc.
Et quand Gwëll posa son oreille dans le creux de l'épaule de la rêveuse, elle entendit ses fragments de cœur qui battaient la même mesure que les siens. En phase, écrivaient les histoires.

Puis les battements se firent chanson.
Une chanson qui parlait de chouettes et de voyages dans des pays lointains. Une chanson qui racontait une histoire et qui berçait quelques fois ses rêves. Une chanson qui brillait de bleu et de douceur. C'était la chanson qu'on lui avait chanté, quand elle était venue à la confrérie pour la première fois, quand elle sortait du labyrinthe et qu'elle était blessée de partout.
Certes Amarylis ne chantait pas, mais c'était tout comme, parce que Gwëll se souvenait de chaque mot, de chaque parole comme si on venait de lui chanter. À vrai dire, désormais, à chaque fois qu'on rêvait pour elle, elle entendait la musique et la chanson prenait vie d'elle même.

Elle ferma les yeux. Alors Amarylis parla. Sa voix était hésitante et on pouvait sentir qu'elle cherchait ses mots un peu comme Duncan faisait, avec son grand livre, pour trouver les mots les plus beaux à leur donner.
Et ses mots à elle, même si elle n'avait pas le grand livre, étaient très bien choisis et ils surent émouvoir Gwëll. Certes elle ne saisissait pas réellement la distinction entre mère et maman, mais elle ressentait une nuance à la manière dont le disait Amarylis et, particulièrement, dans ses yeux qui brillaient, elle voyait la différence. Et elle savait lequel des deux elle préférait.

Saisie, Gwëll ne bougeait plus. Elle ne savait pas trop quoi dire et, de toutes manières, même si elle avait su, elle n'aurait rien pu dire, parce que, soudainement, c'était comme si ses lèvres s'étaient collées et pour toujours parce que quand elle essayait de parler, ça marchait plus et que même respirer, c'était pas facile, parce qu'elle avait oublié au début et que par le nez, c'était pas très suffisant.
Dans sa tête, c'était nettement plus actif, déjà. Toutes ses pensées se bousculaient et elle ne savait plus trop où elle en était. Une part d'elle même voulait sauter au plafond et crier que oui, que tout de suite, que absolument. Mais l'autre part était plus raisonnable et se demandait comment ça se passerait et comment ça serait possible. Et surtout le tout était terriblement ému et déstabilise.

Elle se serra un peu plus fort contre la rêveuse et c'était sa manière de dire qu'elle était d'accord et qu'il n'avait jamais été question que ce ne soit pas une bonne idée.
Amarylis se dégagea doucement et elle ouvrit un coffre en métal. Dedans, il devait y avoir approximativement toutes les couleurs de l'arc en ciel sur des rouleaux de bandes en coton. La rêveuse lui demanda d'en choisir une pour son genoux et elle lui dit que Jun, qu'elle ne connaissait pas, pourrait lui dessiner ce qu'elle voudrait dessus.


Oh, je voudrais la blanche !

Amarylis la regarda étonnée, certainement qu'elle avait pensé qu'elle choisirait une couleur bien vive, très colorée et pas le blanc qui était juste une nuance. Mais Gwëll savait ce qu'elle voulait et elle voulait lui montrer quelque chose.
Elle mit la bande en place, sur le genou et rangea une mèche qui traînait sur son visage. Gwëll ouvrit la bouche pour parler et lui dire de regarder, mais elle fut plus rapide.


De... ma chambre ?

Gwëll avait la gorge un peu nouée et les émotions revenaient. Elle voulait toujours, oh, ça, oui, c'était certain. Mais quelque chose la retenait de laisser éclater ses sentiments.

Je... Je voudrais te montrer quelque chose. Regarde...

Elle se concentra sur le blanc du pansement et ferma les yeux.
Une spirale ambrée naquit qui grandit doucement, tournant et retournant sur elle même en des arabesques délicates. Elle ralentit, vira puis cessa brusquement. Un bourgeon naquit, du bleu même des cheveux de la rêveuse. Puis il grossit, paresseusement. Il explosa plus qu'il ne s'ouvrit et les mille couleurs des pétales se répandirent en raies colorées tout alentour. Au cœur de la fleur tournoyait un bourgeon couleur d'or qui éclot lentement en mille pétales minuscules et chatoyants.
La fleur grossit quelques secondes et de son centre tomba une perle irisée qui se transforma en papillon ivoire avant de toucher le sol. Il s'envola légèrement et vit se poser sur l'une des excroissances les plus proches du bouton.


Je voudrai une chambre toute blanche... Avec une fenêtre pour regarder les fleurs.

Amarylis. Tu savais que tu portais un nom de fleur ?


Amarylis Luinïl
Amarylis Luinïl

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MessageSujet: Re: Twinkle, twinkle, little star [Terminé]   Twinkle, twinkle, little star [Terminé] Icon_minitimeSam 13 Avr 2013 - 15:38

Amarylis n’envisageait déjà plus le refus. Elle se refusait corps et âme à ne pas devenir mère. Et pas n’importe quelle mère. Sa mère. Elle ne voulait pas Gwëll juste parce qu’il était trop tard pour elle pour tomber enceinte. La génétique avait ses raisons. Et voulait Gwëll parce qu’elle le sentait, tout simplement. Avec son instinct de mère. Ce petit truc enfoui en elle qui ressortait à présent, comme des hormones, et qui lui certifiait ce qu’elle devait faire face à cette enfant. Peut-être était-ce ce même instinct qu’avait eut sa propre génitrice en voulant à tout prix emporter Lyssandréa avec elle, en quittant la caravane de son ex-mari. Instinct foireux qui n’avait pas bronché une seule seconde à se débarrasser de son autre fille. Certes, Amarylis avait voulu partir avec Ewen, mais elle n’était qu’une gamine, elle ne prenait nullement conscience des conséquences. Et personne. Non personne n’avait insisté pour la garder, au final. Et la rêveuse s’offusquait que les parents de la petite aequor en fasse de même. On devait se battre pour ses enfants. A vie et à sang.
Aussi avait-elle la gorge nouée que sa protégée puisse ou non accepter cette demande si singulière. En guise de réponse, elle voulut lui montrer quelque chose. Et si la directrice d’Eoliane avait été étonnée du choix de couleur, elle comprit à l’instant le pourquoi du comment. Les arabesques de fleur rendaient au blanc toute sa superbe. On disait trop souvent que le blanc n’était pas une couleur, mais Amarylis leur donnait tort. Elle aimait le blanc tout comme elle aimait la neige et le froid. Elle sourit, touchée, admirant l’œuvre de Gwëll. Il y avait bien trop de différence entre le don du dessin et le don du rêve pour qu’elle puisse comprendre comme elle s’y prenait. Mais qu’importe. Il y avait de la magie là-dedans. Et encore plus dans la phrase qui suivit. Les larmes naquirent aux creux des paupières de la Mère qui hocha la tête, incapable d’émettre le moindre son.
Elle lui offrirait un jardin pour chambre si elle le voulait. Avec des milliers de fleurs à s’en ruiner. Et elle pourrait à volonté dessiner sur tous les murs d’Eoliane, qu’elle n’en serait pas fâcher, bien au contraire. Cette Confrérie n’avait que trop manquer de couleur. Et en choisissant le blanc, contre toute attente, la dessinatrice lui apportait ce manque. Dans ce blanc aux milles couleurs, elle crut y revoir Héol et Gladyss défiant les cieux d’hiver, et le sourire tendre d’Ewen, et les yeux de Mael. Et les morts. Et les vivants. Et les oubliés. Et les regrettés.

Sa main aux rides naissantes vint prendre celle de son enfant et la choyer. Puis, elle l’enjoint à se lever et à la suivre. Elle marcha d’un pas lent, afin de ne pas faire souffrir les genoux de la jeune fille. Elles traversèrent ainsi les couloirs et les escaliers jusqu’à sortir dans les jardins intérieurs. Puis rentrèrent en chœur dans une serre. Il n’y régnait pas encore les chaleurs étouffantes de journée, mais une fraicheur matinale appréciée. Dans cet espace étaient cultivées toutes les fleurs médicinales des rêveurs. Et Gwëll aimait les fleurs, ce qui offrait une occasion de partage que la rêveuse n’aurait pas la sottise de laisser passer.
Elle la conduit tout d’abord vers des petites fleurs blanches à quatre pétales dont le cœur était formé de petites boules jeunes duveteuses.

-Ce sont des jasmins. Elles sont assez rares en Gwendalavir, donc je profite des voyages des herbologistes pour m’en procurer. Car elles sont surtout très utiles en tisane. Si un soir tu as du mal à dormir ou un mal de tête persistant, il te suffit de boire des jasmins infusés, et en l’espace d’une demi-heure tu iras bien mieux !

Puis, juste à côté, elle lui désigna une autre espèce, cette fois-ci d’un orange sanguin, aux pétales bien plus rondes, comme des lobes et nombreuses. Le cœur ne formait qu’un, verdâtre.

-Des chrysanthèmes. J’en fais un élixir qui permet de calmer. Lors de gros traumatismes ou de stress, le cœur d’une personne bat trop vite ou trop lentement. Cet élixir permet de les calmer de rendre au cœur sa vitesse normale.

Les suivantes avaient des tiges grandes et épaisses. Et la fleur en était petite, repliée sur elle-même comme un bouton violet. On en avait du mal à percevoir les boutons dorés à l’intérieur.

-Ce sont des fleurs d’Amarante. Oui, ça ressemble un peu à mon nom, mais cela n’a rien à voir. On peut manger les pétales crue, cela donne de l’énergie. Mais je conseille toujours de la cuisiner, car on ne sait jamais quelle bestiole a pu gambader dessus.

Plus loin, à nouveau sur de grandes tiges, des bouquets rouges en bataille, qui traitaient les infections urinaires. Puis, aussi orangées que des fruits d’été, aux pétales soignés et en forme d’étoiles, des lys, qui favorisaient la digestion. Pour rester dans l’orange, il y avait les fleurs de souci, ressemblant fortement aux marguerites, et que les rêveurs utilisaient pour cicatriser les plaies. Dans un coin, flottant dans une petite source d’eau, des lotus, fleurs roses et blanches aux pétales recourbées sur elles-mêmes, étaient appréciées car chaque partie, chaque graine ou pétale de ces fleurs étaient non seulement comestibles, mais aussi curatifs. Et encore et encore des fleurs, comme l’hibiscus aux énormes pétales dont le centre n’est autre qu’une tige au bout perlé de couleurs qui, lui, soigne les maux de gorge.
A l’écart de toutes ses plantes, dans un vase, résidaient des fleurs blanches et bleues. Leurs formes s’apparentaient un peu à celles des lys, mais plus ouvertes et possédants des tiges en leurs centres, se terminant par des petites clochettes.

-Des amaryllis. Les bleues ne sont pas naturelles. Je les ai colorées, par plaisir. Je trouvais que le bleu allait si bien avec le blanc ! Je te montrerais, si tu veux, un jour, comment colorer sans don du dessin !

Elle caressa du bout du doigt une des pétales.

-Elles sont à l’écart car elles ne doivent jamais être ingérées. Contrairement aux autres, elles sont poison et provoqueraient la mort dans les heures qui suivent. Au contact, on ne risque rien, elles sont inoffensives. Mais à avaler…

Elle soupira. Elle avait eut à en donner, pourtant, parfois. Lorsqu'elle ne pouvait plus rien faire pour son patient et qu'il souffrait inutilement.

-J’aurais aimé porter le nom d’une fleur qui guérit plutôt qui ne donne la mort. Mes parents ne devaient sans doute pas connaitre cet aspect caché de l’amaryllis.

Un sourire s’étira néanmoins sur son visage.

-Ewen disait qu’elle m’allait bien cette fleur, car elle fleurit à la fin de l’hiver. Tout comme moi. L’hiver me ressource.

Amarylis passa son bras autour de sa protégée et la serra contre elle.

-Et toi, quelle fleur aimerais-tu être ?

Gwëll Yil'Sleil
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MessageSujet: Re: Twinkle, twinkle, little star [Terminé]   Twinkle, twinkle, little star [Terminé] Icon_minitimeVen 19 Avr 2013 - 19:14

Certains disent que le gris n'est pas une couleur, mais une nuance.
Gwëll, elle, ne pouvait se résoudre à y croire. Parce que ce qu'elle voyait dans les yeux d'Amarylis, ça ne pouvait être qu'une couleur. Une couleur pleine de nuances. Parce que, dans ces yeux, c'était des millions de choses qui brillaient et pas qu'une nuance.
D'ailleurs, dans tous les yeux, il y avait des choses qui brillaient. Et Gwëll avait lu, une fois que si on savait lire les gens, on pouvait y voir tout ce qu'ils pensaient, dans leurs yeux et leurs idées, leurs espoirs et leurs joies. On ne lui avait jamais appris à lire dans les yeux, mais, depuis qu'elle était petite, elle était persuadée qu'elle le savait. Et quand elle regardait ces yeux là, ces grands yeux là, elle y voyait des millions de choses.

Certains disent que le gris est triste, morne, morose. Certains disent que tous les gris sont ceux des nuages d'orage et des cendres de la cheminée. Il disent que c'est triste parce que c'est le mauvais temps et la poussière de ce qui n'est plus.
Mais Gwëll pensait que le gris, ce n'était pas que ça. Parce que le gris, c'était une forme de blanc un peu indécis et de noir pas trop engagé. Que le gris, c'était entre la tempête et le beau temps. Que c'était la poussière des choses mortes qui devient une chose nouvelle. Parce que le gris, c'était aussi la couleur du métal et que le métal, il naissait du feu. Parce que le métal, c'était l'avenir, aussi comme disait le forgeron d'Al-Poll.
Et le gris qui brillait dans les yeux d'Amarylis, c'était un gris d'avenir, c'était le métal et les nuages et la cendre, c'était tout en même temps et à la fois pas trop non plus. C'était porteur d'avenir, et en même temps miroir du passé. Et à la croisée des deux ères, l'instant présent qui piquaient la trame nuancée de petites étoiles d'émotion.

Un être n'est pas une chose, c'est un tout. Et Amarylis était un tout et ses yeux étaient des tout. Absorbée par son regard, Gwëll plongeait en elle et elle tombait longtemps et pourtant, elle avait pas peur. Parce que des yeux, quand on y regarde bien, c'est comme des spires à l'envers, c'est pas grand, mais on y voit loin. Et quand on s'y promène, on y rencontre bien des voies et toutes ne mènent pas quelque part, mais toutes sont dignes d'intérêt.

Une main glissa dans la sienne et ses yeux se détournèrent de ce regard.
Toutes deux se relevèrent et sa main resta bien serrée dans celle d'Amarylis. La rêveuse fit quelques pas et Gwëll aussi et puis elle ouvrit la porte et elles sortirent. Dans le couloir, il y avait moins de lumière et même, c'était juste la lune par les vitres qui éclairait le chemin. D'ailleurs, c'était un peu féerique parce que la poussière dansait dans la lumière et que ça dessinait des arabesques.
Elles tournèrent plusieurs fois, descendirent un escalier et puis elle débouchèrent dans une petite cour fleurie. L'atmosphère était tranquille et on se serait cru un de ces soirs d'été où rien ne bouge comme si l'air était suspendu.

Le gravier crissa sur leur passage et elle atteignirent une sorte de tente assez grande et toute transparente. Amarylis ouvrit une petite porte et elles rentrèrent. À l'intérieur, ça sentait terriblement bon et certainement que si elle avait été une abeille, elle serait morte de bonheur. Tout autour d'elle n'était que fleurs et plantes grasses en cascades. Les murs étaient recouverts de tapis végétaux et il y avait de grands bacs en bois où s'épanouissaient des collines de verdure.
Elle serra un peu fort la main d'Amarylis, elle n'avait jamais rien vu d'aussi fleuri, même dans ses rêves.

La fée bleue la guida à travers le dédale des jardinières et sa main était la seule chose à laquelle Gwëll pouvait se raccrocher dans ce paradis. Parce que ça ne pouvait pas être vrai, tout ça, sûrement qu'elle s'était endormie et qu'elle rêvait, là, maintenant.
Sa guide lui montra des fleurs qui étaient du jasmin et ça sentait tellement bon que même les gâteaux de la cuisine sentaient pas comme ça. Pourtant, c'était pas des grosses fleurs et elle avaient pas beaucoup de couleurs alors c'était étonnant, quand même, qu'elles sentent aussi fort. Amarylis ajouta que c'était pour soigner la tête et même si elle savait que ça marchait certainement pas comme ça, Gwëll s'imaginait bien avec une couronne de Jasmin sur le front parce que ce serait superbe à coup sûr.
Puis elle vit les chrysanthèmes et les amarantes, mais elles étaient pas aussi jolies et elles sentaient pas aussi bon, d'ailleurs, ça devait être impossible, de sentir meilleurs que le jasmin. Et encore quelques autres mais elle se souvint pas de leurs noms à part peut être le lotus qu'elle connaissait parce qu'elles ressemblaient aux fleurs qu'Attalys avait dessiné, une fois.

Et puis, un retrait de tout ça, elles trouvèrent les amaryllis qui étaient blanches et bleues. La rêveuse lui expliqua que c'était elle qui leur avait donné leur couleur et que c'était le bleu qu'elle avait choisi parce qu'il allait bien avec le blanc. D'ailleurs, c'était très vrai parce que dans le vase, ça faisait particulièrement beau, un peu comme les lacs gelés en hiver avec la neige à coté.
Elle lui dit qu'elle les colorait sans utiliser le dessin et Gwëll avait un peu de mal à imaginer comme on pouvait faire, mais elle pensait qu'avec le dessin ça devait pas non plus être trop évident si on voulait une couleur qui soit pas uniforme conne sur un vêtement.
Amarylis lui expliqua que c'était un poison, ces fleurs là et Gwëll ne s'en étonna pas outre mesure. Parce qu'en fait, c'était un peu visible, tant elles étaient majestueuses et grandes et qu'on aurait dit qu'elles étaient dangereuses. C'était comme si elles inspiraient le respect, comme si elles faisaient peu et que c'était pour l'avertir de pas y toucher.

La rêveuse soupira et avoua qu'elle aurait préféré ne pas avoir un nom de fleur mortelle et Gwëll la comprit. La mort, c'était jamais drôle. Mais, après, après la mort, elle voulait croire qu'il y avait quelque chose, parce que c'était dur de s'imaginer qu'on mourait et puis c'est tout. Mais à savoir quoi, elle n'avait aucune idée. Certains disaient qu'on devenait autre chose et qu'on avait une autre vie, mais elle elle préférait croire plutôt qu'on allait voir les autres qui étaient plus là dans un grand jardin fleuri et avec des cascades de ciel partout qui étaient magnifique, qu'on avait plus jamais froid et jamais sommeil.


Peut être que tes parents pensaient à ce qu'il y a après la mort ? Quand on part, à l'endroit où on arrive ? Parce que ça doit être très joli et, alors, l'amaryllis, elle est beaucoup plus gentille, si elle aide à aller dans un jardin merveilleux qui sent le jasmin ?

Puis elle ajouta que cette fleur là, elle fleurissait à la fin de l'hiver et là, Gwëll comprenait pas du tout, parce que à la fin de l'hiver, c'était le printemps et que toutes les fleurs fleurissaient au printemps. Peut être juste qu'elle fleurissait avant les autres, celle là et qu'elle fanait avant, aussi.
Alors qu'elle pensait à tout ça, le bras d'Amarylis se posa sur ses épaules. Elle lui demanda sa fleur et Gwëll savait pas trop parce qu'elle en connaissait plein, des fleurs mais qu'elle s'était jamais posé la question de savoir à laquelle elle ressemblait le plus.

La plus fragile, certainement, qui perd ses pétales à la première gelée et qui ploie sous le vent. La plus petite, sans aucun doute, parce qu'elle ne prenait pas beaucoup de place et qu'elle ne s'imposait pas. La plus tendre, peut être, parce qu'elle était douce et tranquille, pas un de ces épineux toujours sur la défensive. La plus colorée, sûrement, parce qu'elle aimait l'arc en ciel.
Il lui en venait de toutes sortes, en fait, de la passiflore très extravagante au discret muguet et passant par la belle de nuit vivace et persistante.

Si j'étais une fleur, je voudrais être le camélia parce qu'il a un cœur énorme et que dans le mien, tout rentre et il reste toujours de la place.

Les camélias, c'était les fleurs qui poussaient en dessous de sa fenêtre, dans son ancienne maison, c'était elle même qui les avait plantés sans trop savoir ce qui pousserait puisqu'on lui avait juste donné des petites graines noires dans un mouchoir blanc.

Et toi, tu voudrais être quelle plante ?

Elle ne la connaissait pas tant que ça, au fond, Amarylis, juste de ses passages à la confrérie.

Si tu étais un oiseau, tu serais le pinson parce qu'il a un chant mélodieux.


[Joyeux anniversaire huglov]

Amarylis Luinïl
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MessageSujet: Re: Twinkle, twinkle, little star [Terminé]   Twinkle, twinkle, little star [Terminé] Icon_minitimeVen 10 Mai 2013 - 15:27

Je serai un nénuphar. Un tout petit nénuphar, insignifiant dans la multitude de mes semblables. Et voguant sur les eaux du monde. Le vent me ralentirait, et je devrai plier les pétales de ma fleur pour continuer mon chemin. Quelques fois, en rencontrant un endroit agréable, je stopperai ma course pour rester, immobile, sur l’eau calme, appréciant les levers de soleil qui me rosiront. La pluie ne sera pas un ennemi, mais un allié qui m’abreuve lors de trop grandes sécheresse. Et je serais plus belle encore parsemée de gouttes d’eau. Je pourrais bien faner, je saurai que toujours je fleurirai à nouveau.
Il me suffirait de regarder en dessous de ma feuille pour contempler les créatures aquatiques se faire la sérénade ou encore jouer avec les algues. Un coup d’œil en l’air et ce sont les oiseaux que j’envierai de temps à autre, car tout est plus beau là où on ne peut mettre les racines. Les grenouilles se percheront sur ma grande feuille pour chasser et chanter, et je chanterai silencieusement avec elles, les emmenant à bon port.
Mais surtout. Surtout. Je verrai du pays. Je testerai toutes les eaux douces et les paysages associés. On pourra dire que je suis celle qui ne reste jamais en place. Mais qui ne risque rien. Pas plus que les autres. Quel danger pourrait bien donc m’inquiéter ? Un nénuhar c’est insignifiant. Personne n’y fait attention, personne ne le mange ou ne l’arrache de son élément.

Amarylis sortit de ses pensées pour revenir au moment précieux qu’elle partageait avec Gwëll. Ce moment qu’elle espérait devienne habitude. Sitôt Gwëll en lieux sûrs, sitôt qu’elle serait certaine qu’elle ne manque de rien, elle irait trouver les autorités compétentes aux adoptions. Le cas risquait d’être compliqué, la jeune fille avait encore des parents, et vu son âge, les juges pourraient la considérer déjà comme une « adulte », comme prête à vivre par ses propres moyens. Alors que c’était complètement faux ! On n’est pas prête à vivre seule à dix-sept ans, c’est absurde ! On le croit, mais ce n’est qu’une erreur de jugement. Et encore. Même elle ne le croyait pas. Mais aurait-elle son mot à dire dans tout cela ? La rêveuse l’espérait de tout cœur.

-J’aime bien les nénuphars. J’aimerai en être un, je pense.

Elle échangea un sourire complice avec sa protégée, lui taisant toutes ses craintes de la justice et de l’avis trop présomptueux des gens à son goût.

-Je n’aimerai pas trop être un oiseau, par contre. J’ai le vertige, alors…je préfère la terre ferme !

Clin d’œil dans ces tentatives de se connaitre, petit à petit. Elles sortirent de la serre tout en discutant, et s’assirent naturellement dans l’herbe, comme si leur ballade était un élément naturel de leurs quotidiens.


-On pourrait faire un jeu, comme ça, pour apprendre l’une de l’autre !

Qui je suis. Qui je serais. Qui tu es. Qui tu seras. Et nous serons. A deux. Toujours à deux, mère et fille.


-Chacune notre tour, on va émettre une question sur nous même. Et l’autre tentera de deviner. Ça te dit ? Je commence si tu veux, pour te montrer.

Repliant ses jambes sur le côté, et rajustant sa robe sur ses chevilles, elle réfléchit à une question.

-Tiens, quel âge ais-je ? Tu as le droit de me vieillir, ne t’inquiète pas !

Elle se foutait bien d’être vieille, à présent. Parce qu’elle ne se voyait plus seule. Parce qu’elle se voyait maman. Elle répondit donc un chiffre timidement, et pas si éloigné du sien, finalement.

-Perdu ! Sourit-elle. J’ai trente-six ans. Mais tu y étais presque ! A toi !

De loin, on aurait cru à deux enfants discutant tranquillement pendant que les parents parlent de choses sérieuses. Et il ne faisait aucun doute qu’à travers une fenêtre Jùn les épiait, se demandant ce qu’Amarylis lui réservait encore.
Jùn ! La directrice se retint de grimacer. Il allait forcément devoir prendre un rôle dans cette adoption. Que ce soit père ou absent. Car même l’absent est un rôle dans un tel cas, parfois plus important que le rôle de père. Et cette implication allait jouer sur le procès. Ce qui incluait donc une conversation sérieuse avec son amant. Oh joie ! Elle qui n’était déjà pas à l’aise à parler de tout avec lui.
Elle ne s’attarda toutefois pas sur cette entrevue inévitable et écouta avec attention la question de Gwëll, réfléchissant à quoi répondre. Le jeu était intéressant. Elle détaillait sa future fille avec attention, se demandant si l’instinct de mère lui ferait trouver les bonnes réponses, ou du moins s’en approcher.
Elle avait eu rencontré des mères sans instinct. Qui de fait, faisait de piètres mères. Laborieuses et sans cesse énervées. Elle espérait de tout cœur qu’elle ne serait pas ainsi. En fait, il n’y avait pas à espérer. Elle ne serait pas cette mère fade et insipide. Un prémisse d’instinct le lui susurrait déjà.


-De quelle couleur sont mes cheveux ?

Les paupières de la rêveuse clignèrent un instant, se demandant si la petite était réellement sérieuse dans sa question. Apparemment oui, vu son air innocent et angélique. Aussi prit-elle son air le plus sérieux pour réfléchir, main sur son menton.

-Hummm…je dirais…je dirais…rose, ou vert…non bleu ! Non attends, couleur…noisette ? Ou amande !

Elle guetta la réaction.


-Alors, alors ?! J’ai juste ?

La réponse de Gwëll la fit rire aux éclats et elle bascula sa tête en arrière pour admirer le ciel bleu et la beauté de la vie, à cet instant-ci.
Elles passèrent ainsi la matinée à se poser mille et une questions, assimilant à chaque fois de nouvelles choses sur l’une et l’autre. De cette façon, l’aequor put apprendre qu’Amarylis aimait par-dessus tout les litchis, qu’elle préférait la neige au beau temps et était quasiment insensible au froid. Également qu’elle rêvait de voir un jour un renard des neiges, qu’elle a vécu sa petite enfance dans les convois de caravane, qu’elle était particulièrement nulle pour l’orientation et la géographie, et bien d’autres futilités encore.


-A moi ! Mhm…Si…Si j’étais un verre, de quoi me remplirais-tu ?

Il n’y avait pas vraiment de réponse juste ou fausse, mais elle savourait déjà le goût sucré qu’elle donnerait à cette nouvelle vie avec Gwëll.

Gwëll Yil'Sleil
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MessageSujet: Re: Twinkle, twinkle, little star [Terminé]   Twinkle, twinkle, little star [Terminé] Icon_minitimeDim 26 Mai 2013 - 18:31

Amarylis aurait voulu être un nénuphar et Gwëll l'imaginait bien flotter sur l'eau sans trop bouger et se laisser porter et descendre et remonter au gré des vagues qui n'en étaient pas. Et elle aurait une belle fleur. Avec un grande corolle, des pétales brillants et puis des paillettes au cœur. Blanche et pure, comme la neige qu'elle aimait tant.
Oui, Amarylis serait un très bon nénuphar. Même si, en soi, c'était un peu triste, parce que les nénuphars n'avaient pas d'attaches, aucune fixité. Ce devait être terrible, quand même, parce que ça voulait dire pas de famille, jamais revenir au même endroit, puisque c'est le monde qui te pousse et qu'il pousse pas en arrière, le courant, l'eau remonte jamais les cascades. D'ailleurs, le monde poussait pas toujours en avant et, des fois, il poussait sur les cotés et quand on était bloqué dans une branche de bois flotté, fallait juste attendre que ça passe. Longtemps ou pas, de toutes manières, y avait rien de mieux à faire.

Et malgré ça, elle aurait pas voulu être un oiseau, même si c'était comme un nénuphar mais qui se laisser porter par l'air au lieu de l'eau. Après, bien sûr, c'était différent parce que le nénuphar il était toujours à la surface de l'eau alors que l'oiseau il choisissait un peu plus si il voulait monter, descendre, planer ou accélérer. Ça devait être plus dur, aussi, parce que ça devait tirer dans les ailes, de voler, comme ça tirait dans les jambes de courir.
Fallait juste trouver la bonne mesure, en quelque sorte.

Amarylis avança un peu et Gwëll la suivit doucement. Elle avait l'impression de flotter sur un nuage et c'était peut être parce que c'était la nuit et qu'elle avait pas beaucoup dormi, mais elle était pas fatiguée, c'était juste ses yeux qui s'endormaient sans son accord.
Elle attrapa la main de la rêveuse et elle se laissa guider. Elle avait un peu l'impression d'être une grenouille sur un nénuphar, mais en moins gluant.
Elles s'assirent sur l'herbe et Gwëll appuya sa tête sur l'épaule d'Amarylis. Elle avait ses cheveux qui lui chatouillaient la joue et ça faisait comme un rideau bleu devant ses yeux. Elle attrapa une mèche qu'elle fit boucler doucement entre ses doigts. Amarylis proposa un jeu et Gwëll secoua doucement la tête.


Oui, commence, parce que j'ai pas tout bien compris comment faire, je crois...

Amarylis bougea et Gwëll enleva sa tête pour pas la gêner et puis, comme elle était quand même lourde, elle la reposa sur le sol. Il était encore un peu chaud de toute l'énergie du soleil qu'il avait captée pendant la journée et l'herbe était moelleuse parce que les rêveurs en prenaient grand soin et lui donnaient plein d'eau, quand elle en avait besoin.

Je pense que tu as trente ans.

Elle n'était sûre de rien, mais ce n'était jamais son cas. Elle n'avançait pas une idée parce qu'elle pensait que c'était cela, mais parce qu'elle aimait les mots, les sonorités et que c'était esthétique. Elle ne marchait pas à la certitude, mais à l'intuition, elle était comme ça.
Elle était pas trop loin et elle était contente de l'âge qu'Amarylis lui avait annoncé. Trente six ans, c'était très bien, pour un nénuphar et même pour une personne normale qui aurait pas voulu être un oiseau parce qu'elle avait peur du vide. C'était rond et doux, ça tournait comme une spirale.

Elle réfléchit à sa question et, même sans commencer, ce jeu était particulièrement difficile. Elle avait de l'imagination pour beaucoup de questions, mais pas sur elle. Elle même se connaissait peu, enfin juste de ce qu'elle pouvait en voir. Et elle en voyait bien peu, mis à part ce corps qui lui était étranger. Elle ne se voyait pas comme elle voyait les autres. Les autres, elle pouvait leur parler et ils lui répondait. Jamais elle ne s'était répondu, son reflet restait fixe. Elle ne devait pas être quelqu'un de très drôle ou vivant.


De quelle couleur sont mes cheveux ?

Jouer à ce jeu, c'était aussi poser les premières questions, celles qui sautent de la bouche et pas aller les chercher tout au fond, c'était un peu comme le dessin, il fallait que ce soit naturel, elle n'aimait pas pousser les choses, amener les événements à se produire. Les choses étaient toujours plus belles comme elles se faisaient.
La rêveuse eut un étrange regard comme si elle avait pas compris et pourtant la question était simple. Elle venait du fond d'elle et certainement que la réponse en viendrait aussi. Elle semblait réfléchir et Gwëll se demanda si elle pensait elle aussi que la réponse devait venir seule, que c'était en ouvrant son cœur qu'elle s'imposerait, parce que les bonnes choses s'imposent d'elles même si on prend la peine de les appeler gentiment.


Ils sont blonds, je crois. Un peu dorés comme les blés. Mais t'étais pas loin non plus, tu es forte.

Amarylis rit et Gwëll se demanda si c'était parce qu'elle avait dit quelque chose de travers ou juste parce qu'elle était contente. Des fois, les gens rient quand ils sont heureux parce qu'on est jamais trop heureux et que le rire rend heureux. Peut être que si les gens tristes riaient, ils ne le seraient plus, mais c'était dur de rire en étant triste. Ou alors c'était qu'on était triste de joie, mais c'était pas les même larmes et les mêmes émotions.

C'est le soleil, qui donne aux choses leurs couleurs, quand il est plus là, c'est la nuit et il fait tout noir parce que le soleil a besoin de ses couleurs pour rêver. C'est à toi.

Elle sourit à la rêveuse parce que l'histoire était belle et que sourire, c'était comme rire mais en un peu moins, d'ailleurs, le sourire devait être juste en dessous du rire, c'était pour ça qu'on l'appelait comme ça. Souvent, les mots voulaient dire plus de choses que leur sens, mais c'était dur de le savoir parce qu'ils ne parlaient pas avec des mots, les mots.

Je te remplirais de lumière du soleil comme ça tu m'éclairerais, dans la nuit et je pourrais te regarder tout le temps sans jamais t'user. En tous cas, je te remplirais complètement comme ça personne me demanderait si tu es à moitié vide. Et puis parce que c'est triste d'être à moitié quelque chose et pas complètement. Tu me remplirais de quoi, toi ?

Elle pourrait remplir un verre d'un peu n'importe quoi, en fait. Il y avait tellement de chose si bien qu'on pouvait mettre dans un verre.

Pourquoi est ce que j'aime le printemps ?

Le printemps et ses pousses vertes, ses bourgeons, ses pétales et ses sépales. Le printemps et ses belles fleurs. Oui, vraiment, elle aimait les fleurs.


[Bonne fête I love you]

Amarylis Luinïl
Amarylis Luinïl

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MessageSujet: Re: Twinkle, twinkle, little star [Terminé]   Twinkle, twinkle, little star [Terminé] Icon_minitimeDim 2 Juin 2013 - 10:41

Elle parlait du soleil comme s’il était l’unique astre source de lumière. Comme si lui seul pouvait donner de la beauté à la vie. Et Amarylis sourit. Il y avait du vrai dans sa voix. Elle aimait le printemps et le défendait assez bien. Tandis qu’elle, rêveuse, aimait par-dessus tout l’hiver et aimait à penser que la neige et sa clarté rendait aux paysages leurs véritables beautés dénudées. Peut-être, aussi, que Gwëll n’avait jamais vu Ondiane sous la neige. C’était sans aucun doute le plus beau spectacle auquel l’Amarylis d’antan avait jamais assisté. A ses souvenirs, elle en avait même pleuré, sous le sourire doux d’Ewen.
Ewen. Elle en riait à penser qu’elle l’avait détesté et méprisé, avant de finir par l’admirer et l’aimer. Elle en riait surtout pour ne plus en pleurer. Les jours passaient, mais le manque demeurait intact. Et elle avait cette mission. Cette mission de devenir plus forte pour sa Confrérie. De devenir les épaules de tous. Alors il fallait rire. Et entreprendre. Elle savait toutefois qu’elle ne pourrait sans doute jamais retourner à Ondiane. Trop de souvenirs étaient enfouis là-bas et elle pourrait trop facilement s’y perdre.

Un sourire ému se dessina sur le visage de la rêveuse face à la réponse de sa protégée. Remplie de lumière, pour rester à jamais la lueur dans ses nuits. C’était exactement ce qu’elle voulait devenir. Sa lueur. Sa mère. C’était à peu près la même chose, non ? Peut-être pas chez tout le monde. Amarylis elle-même n’avait pas grand souvenir de sa propre lueur. Mais elle voulait être la lueur de Gwëll et sa mère par la même occasion. Alors pourquoi ne pas allier les deux ? Chacun pouvait décider de ce que voulait dire mère à ses yeux. Et les deux filles venaient de choisir ce qui leur convenait le mieux.
Alors la directrice d’Eoliane réfléchit à son tour de quoi elle voudrait bien remplir le verre de la petite. Elle désirait quelque chose de sucré, et coloré. D’amour.

-Moi ? Je te remplirais de sirop de pomme d’amour. Tu sais ce que c’est une pomme d’amour ? C’est une pomme rouge, enveloppé de caramel. C’est délicieux, je te ferais goûter ça un jour, lors d’une des foires d’Al Vor.

Elle passa une main maternelle sur la joue de sa future fille.


-Et bien évidemment que ton verre sera toujours plein. Plein de cet amour !

Jamais elle ne l’abandonnerait. Jamais. Une mère c’était à vie. Que ça nous plaise ou non. Et elle ne répèterait sûrement pas le schéma de sa propre famille. La fautive était sa mère. C’était elle, la première, qui avait souhaité abandonner sa famille pour vivre une vie plus paisible. Désirant de surcroit n’emmener que l’une de ses filles, scindant de fait la famille en deux. C’était sans compter le départ d’Amarylis avec Ewen.

Une nouvelle question ramena la rêveuse dans le jeu, tandis qu’elle sentait la fraicheur de la nuit la saisir. Elle jeta un coup d’œil à Gwëll qui n’était pas plus vêtue qu’elle. Il leur faudrait rentrer si elles ne voulaient pas finir malades. Elle prit toutefois le temps de répondre à la devinette.

-Je dirais parce que le printemps annonce la venue du soleil. Et qu’à partir du printemps ce soleil reste plus longtemps dans le ciel. Il fait donc plus longtemps jour, et les choses en sont d’autant plus belles et colorées.

L’amour c’était de comprendre l’autre. De comprendre ses passions et ses idéaux. Pas forcément d’y adhérer, mais de comprendre, de se mettre l’espace de quelques minutes à sa place.

-Et puis aussi parce que le printemps apporte l’éclosion de toutes les fleurs. Pas vrai ?

Toutes ces fleurs que tu dessineras sur les murs blancs de ta chambre. Toutes ces fleurs que nous cueillerons ensembles et que nous concocterons pour guérir nos patients. On pourrait même recueillir des petits animaux. Les écureuils des prairies aimaient bien les jardins d’Eoliane, il n’était donc pas rare d’en croiser.
Mais là, il faisait nuit. Et froid. Les fleurs ne développaient pas encore leurs couleurs et le soleil ne chauffait plus l’herbe.


-Que dirais-tu de rentrer ? On risque de tomber malade, sinon.

Elle se leva, et tendit la main pour aider Gwëll à se lever. Elle vit alors aussitôt que son enfant mourait de fatigue. Les larmes, le chagrin et les écorchures de ses genoux l’avaient épuisé. Et il était tard. Trop tard.
Naturellement, elle lui prit l’épaule, la soutenant. Tout en discutant elles retournèrent au point de départ, le hall. Puis elles grimpèrent calmement les escaliers, en haut desquels les attendait Jùn.

-Gwëll ? Où veux-tu dormir ? Dans ta future chambre, ou avec moi ? C’est comme tu veux, si tu ne veux pas être seule, ça ne me dérange pas de dormir avec toi !

Elle jeta un rapide coup d’œil à son amant qui acquiesça, nullement vexé de devoir passer une nuit sans sa rêveuse. Les inquiétudes du début de soirée s’étaient envolées pour laisser place à la joie de voir la jeune femme devenir mère. Et femme accomplie. Que pourrait-il bien lui manquer d’autre à présent ? Elle avait des projets, un amant, des élèves avides d’apprendre, le septième cercle et à présent une fille.
Il le voyait dans ses petits yeux gris fatigués, mais brillant de joie. Elle n’avait jamais été aussi heureuse. Et prête à partager ce bonheur.




[On peut clôturer là, si ça te convient ? Ou après ta réponse Very Happy Et reprendre au procès o/]

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