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| Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] | |
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Messages : 1576 Inscription le : 12/08/2007
| Sujet: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Mar 22 Mai 2012 - 11:27 | | | Il était impossible de vivre de manière imperméable au reste du monde.
Quoiqu’elle fasse – le passé filait, comme des fuites d’eau ; il pleut dans les gouttières qui lui éclaboussent les bottes. Eau sale, morne, brune et vaseuse plutôt que claire. Elle a les pieds mouillés ; même ses semelles n’arrivent plus à se protéger des flaques. La pluie d’Al Poll est froide, gelée, et lacèrent les parcelles de peau qui lui sont accessibles ; plus tôt, c’était la grêle qui martelait les pavés glacés et les dos des – très – rares passants. Le « calme » retrouvé par la glace changée en pluie n’était qu’une piètre amélioration ; un vrai temps de goule, comme avait dit la vieille, un peu plus tôt, en trouvant refuge sous un porche. Elera avait été trempée en quelques instants, et l’eau qui imbibait sa capuche avait déjà commencé à humidifier ses cheveux pourtant protégés par le vêtement. Elle tremblait sans pouvoir se contrôler.
Peut-être avait-elle mal choisi son jour.
Et puis peut-être pas. Là, dans la forge, à se brûler les yeux au cœur ardent des flammes, à regarder voler la suie, elle avait vu, au travers du feu, un autre feu ; celui d’une autre antre, dans laquelle elle s’était réfugiée bien souvent. Et puis les feux avaient continué à surgir en parallèle, et c’était l’Académie, qui flambait ; étonnant spectacle de danse destructrice qu’elle avait pu observer aux premières loges, assise sur les toits avec un ange entre les bras. Les flammes d’un regard, ensuite ; et d’autres, et d’autres. Elle en était tombée à la renverse – figurativement. Assise sur sa chaise en bois, à hoqueter, soudain, bouleversée. Le forgeron lui avait jeté un regard du coin de l’œil, un regard qu’elle n’avait pas su déchiffrer ; il y avait comme de l’ennui, mais pas véritablement ; il était calme, il continuait à fumer sa pipe, à remplir l’air brûlant de l’odeur aromatique de son étrange tabac, il n’avait aucune intention ni de bouger, ni de lui demander ce qui avait strié son visage d’émotions qu’il n’avait pas l’habitude d’y voir ; il ne posait jamais de questions, et c’est bien pour ça qu’ils étaient si rapidement tombés dans une routine qui leurs convenait tous deux. Il y avait de l’intérêt, pourtant, dans son regard ; mais aucune curiosité quelle qu’elle soit. De la bienveillance somnolente. Un peu comme s’il souhaitait sa sérénité, et qu’il voulait la lui donner en le restant lui-même ; si, par contre, la lui rendre lui demandait le moindre effort, il ne bougerait pas de sa chaise. Elera fit basculer la sienne, un moment ; et puis elle se leva, frôla le bras de l’homme un instant, en se penchant vers lui pour lui embrasser le front, et elle sortit.
Cruel contraste que celui du cocon chaleureux de la forge et de la pluie glaçante portée par le vent mordant. Elle avait hésité, au pas de la porte, mais avait rapidement refermé le battant derrière elle pour ne pas que son forgeron n’attrape froid. Elle avait remonté sa capuche sur sa tête, et elle était partie, entre les flaques, dans la nuit. Remonter la rue, traverser Al Poll, en direction de ce lieu qui avait trop été pour elle, avec l’idée, persistante, qu’il était impossible de vivre de manière imperméable au reste du monde. Elle aurait voulu ne plus jamais recroiser ceux qui l’avaient blessée ; mais combien de fois, déjà, avait-elle retrouvé Marlyn, pour attaquer encore et toujours le même combat oiseux ? Combien de fois avait-elle croisé une silhouette connue, dans la rue marchande, avant de se dissimuler à l’ombre d’un mur, pour éviter leur regard ? Peu, très peu étaient ceux qui savaient que la Marchombre n’avait pas fui bien loin. Elle aurait pu suivre le chemin de Baraïl, retrouver sa sœur ; mais, malgré sa fuite, elle n’avait jamais été de ceux qui se terrent et était incapable de demander la protection d’un peuple si proche de celui qu’elle avait aimé. Sûrement l’auraient-ils accueillie ; mais le secret d’Elio elle devait emporter dans sa tombe, et face aux yeux perçants des Faëls, tels des flèches dont ils connaissaient si bien la trajectoire, elle n’aurait pas pu le protéger.
Renouer, alors ?
Puisqu’elle ne pouvait pas se couper de ceux qui l’avaient ravagée, elle retrouverait ceux qui l’avaient pansée. Les murs de l’Académie pulsaient d’une douleur qui resterait longtemps dans les pierres, et il lui serait douloureux de revenir ; mais, quelque part, c’était aussi là qu’elle avait vu fleurir les plus belles fleurs du nord. Elle garderait ses distances, intérieurement, pour ne pas se laisser atteindre à nouveau ; mais elle pourrait supporter la présence physique, fantomatique des lieux. Ses apprentis elle n’irait pas voir, à moins qu’ils ne viennent la chercher – elle n’avait plus aucun droit d’imposer sa présence à eux. Elle voulait trouver Julia, qui avait été si proche ; Einar, qui avait si bien soulevé le voile qui lui masquait les étoiles, au début de l’été ; Anaïel, qui l’avait si bien bercée de son chant ; Silind, qui avait été comme un père. Qui d’autre ? La présence silencieusement et paradoxalement réconfortante de Tinuviel n’y serait plus ; avec elle, pourtant, pas de questions, juste, échanges paranormaux. Elle disparaissait, réapparaissait, avec une constance qui avait rassuré Elera, quelque part, et penser qu’elle puisse ne plus être la plongeait dans des abysses de perplexité. Le monde était absurde. Pas de deuil, pourtant – elle s’était trop enfoncée dans son insensibilité pour réagir, sentir. Alors, les autres, elles verraient ensuite, voire pas du tout. Elle ne savait pas ce qu’elle cherchait – comme si les revoir pouvait changer quelque chose. Mais la pulsion l’avait saisie, et elle avait appris à suivre ses instincts. Si revenir était le mauvais choix – et bien, elle avait fui assez souvent pour savoir pouvoir repartir encore. Peut-être ne pourrait-elle pas tenir, ne pourrait-elle pas vivre en sachant avoir encore été lâche, encore avoir échoué ; elle ne savait pas. Quelque part, aucune importance. Elle n’écoutait plus.
Mais elle avait l’impression d’être un glaçon, et, plutôt que de continuer son chemin, elle se réfugia dans une taverne en passant. Elle resta un instant, dégoulinante, à l’entrée, retirant sa capuche en laissant la chaleur de l’intérieur lui chatouiller doucement les doigts. Bruyante. Blindée. C’était une bonne journée pour le patron ; le froid avait de manière prévisible poussé les clients chez lui, clients plus disparates qu’à l’habitude, et Elera observa la foule pendant un moment, hésitant à s’y joindre. Pas de bagarre, pourtant ; ambiance agréable, humeur légère, partage, pour les habitants d’Al Poll, d’une bonne choppe de quelque chose de chaud, réconfortant. Ils pestaient, un peu partout, contre les cieux si peu favorables ; ici un marchand qui ne pouvait pas partir, et qui décalait son départ aux premières traces de beau temps ; en face de lui, un autochtone qui lui disait que, s’il attendait du soleil, il allait rester encore trois mois dans cette taverne ; rires. Là-bas, un éleveur qui ne pouvait pas laisser ses bêtes dehors, et qui avait un mal fou à les calmer, obligées qu’elles étaient de rester en permanence à l’intérieur de leurs boxes. La nuit était tombée extraordinairement vite, dehors, et les boules des Dessinateurs pouvaient à peine éclairer les rues ; et pourtant, plutôt que d’attirer les fêtards, comme dans une soirée normale, c’était encore les travailleurs qui étaient installés aux tables – besoin, après une dure journée de travail, de se retrouver un peu, de voir des amis, après avoir regardé le temps déprimant couler sur les vitres. Oh, ils n’accaparaient pas toutes les tables, bien sûr ; et là-bas, des jeunes jouaient aux cartes en riant un peu trop fort, mais il était évident que le mauvais temps avait réduit la taille habituelle de leur groupe ; certains n’avaient pas eu le courage de sortir. Au fond, un autre groupe qui redemandait régulièrement des bières, et dans un coin, une bataille de bras de fer. Un jeu de dés sur la droite, et les pièces qui tintinnabulent ; et puis d’autres, qui parlent affaires, l’épée brillante à leur côté, la mine sombre. Il y avait des gardes d’Al Poll, aussi, qui prenaient une pause bien méritée. Toutes les tables étaient prises, les tabourets du bar aussi, et certains s’étaient installés, qui sur le rebord des fenêtres, qui par terre devant l’âtre, qui debout contre un mur. Elera se fraya un chemin jusqu’au bar, hésita ; pas d’alcool, sa petite taille ne lui permettait pas de garder conscience de son entourage et de ses actions au bout de deux verres. L’expérience des bouteilles de vins était encore fraîche dans sa mémoire. Elle voulait quelque chose de chaud.
- Qu’est-ce ‘sera pou’ vous, m’em ? - D-du lait de siffleur, avec du miel, s’il vous plait…
Elle éternua – décidément, sortir de la forge par un temps pareil avait été une mauvaise idée. |
| | Ultra BG Messages : 251 Inscription le : 27/06/2010 Age IRL : 31
| Sujet: Re: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Jeu 24 Mai 2012 - 2:22 | | | Temps de merde. Il avait plu, pleuvait et pleuvrait surement encore le reste de la journée. Tout du moins ce qu'il en restait. Kylian soupira. Quel temps de chien. Avachit sur un banc, face à l'une des larges fenêtres qui illuminait habituellement le hall, le garde observait l’extérieur d'un oeil morne. De la pluie, de la pluie, toujours de la pluie, le mauvais temps ne cesserait-il donc jamais ? Ce matin déjà, il s'était réveillé sous les nuages gris annonciateurs du fléau qui menaçait et des intempéries qu'ils peinaient à retenir. Et ca n'avait pas loupé. Quelques heures à peines après le levé du soleil dissimulés par le ciel gris, les nuages avaient déversés les trombes d'eau qu'ils contenaient sur les toits de l'Académie, sans s’arrêter depuis. Et il fallait dire qu'il y en avait de l'eau. Kylian avait eu l'impression de s'être pris l’équivalent du Lac Chen sur le dos quelques minutes à peine après avoir commencé son tour de garde. Tour de garde qu'il avait bien rechigné à faire, traînant des pieds et priant jusqu'au bout pour que le ciel lui accorde un répit ne serait-ce que pour le temps que durerait sa tournée. Trempé jusqu'aux os, il avait finalement été se réfugier sous le porche protecteur de la tour la plus proche de son lieu de surveillance. Il n'y faisait pas spécialement beaucoup plus chaud mais au moins il y était un peu plus protégé des averses.
Le mauvais temps donnait à l'académie un visage terne, lugubre. Les élèves ne sortaient que rarement, préférant le confort douillet de leur salle commune réchauffés par le feu des cheminées aux murs humides et froids des salles de cours. Les couloirs étaient vides, détrempés, déprimants et seuls ses pas résonnèrent en échos dans les couloirs de l'académie lorsqu'il quitta ses remparts pour rejoindre la pièce reversé aux gardes pour qu'il puisse y déposer ses affaires imprégnées d'eau. La salle des gardes était elle aussi d'un calme déprimant. Ce lieu d'habitude si prompt à la fête et à la franche camaraderie ne brillait plus ce soir-ci des milles et unes facéties qui le caractérisaient habituellement. Un groupe qui jouait calmement aux cartes un peu plus loin salua son arrivé, trois autres gardes une choppes à la main hochèrent la tête d'un air entendu en le voyant et ce fut tout. L'Académie était décidément bien déserte. Où diable allaient-ils donc tous se cacher ? C'était comme si un trou dans l'espace temps avait aspiré la majeur partie des académiciens et des intervenants d'un seul coup. Un pas sur le coté semblait plus envisageable, encore que. Après tout, l'académie grouillait de dessinateurs a qui il ne suffisait que d'une simple pensée pour se téléporter loin de l'enceinte du bâtiment, peut être même sous le soleil d'Al-jeit, cette bande de petits cons.
Kylian soupira, retira sa veste détrempée et l'essora quelque peu dans l'espoir qu'elle évacue une partie de toute l'eau qu'elle avait adsorbé. Le bruit de l'eau qui s'écoule attira à lui les regards compatissants et moqueurs des joueurs. Ils avaient tous connus ca, il n’empêche qu'il n'était jamais vraiment très agréable d'effectuer son tour de garde dans ces conditions, surtout dans ces conditions en fait. Le garde essuya ses mains trempées sur la nuque de celui qui avait souri un peu trop, qui grommela en retour puis, il posa sa veste sur le rebord de la chaise la plus proche dans l'espoir qu'elle sèche un peu. Les coudes sur la table, la tête entre les mains, le garde resta ainsi un petit moment. Il n'avait rien à faire et rien de ce qui ce passait entre ces murs ne l'attirait véritablement. Quel plaie qu'était l'hiver ! Marre, marre, marre de ce temps déprimant. La pluie, la neige la grêle, le froid, toutes ces conneries... Il avait vraiment hâte que tout cela se termine et puis l'été lui manquait. Sa chaleur, ses sieste au soleil, ses jolies filles court vêtu. Dame qu'il avait hâte de les retrouver. Mais le temps semblait résigné à rester pourri jusqu'au bout et rien dans l'état actuel des choses ne parvenaient à lui redonner espoir pour l'avenir. Fait chier.
Y'en avait marre. De toute cette inertie, de ce silence et de ce ciel noir qui ne cessait de faire pleuvoir. Les plus poètes disaient qu'il s'agissait des larmes de la Dame elle même qui pleurait son bien aimé Dragon. Quel connerie. Depuis le temps qu'elle était sensé exister, elle aurait du s'arrêter de pleurer depuis un moment déjà, son deuil ne pouvait être éternel. Kylian se releva, laissant racler sa chaise contre le sol ce qui tira les trois buveurs de leur rêverie collective. C'était décidément trop calme. Rester ici, avec eux l'ennuyait profondément. Ceux qu'il appréciait le plus n'étaient pas la et l'humeur général était un peu trop déprimante à ses yeux pour qu'il n'apprécie leur compagnie à sa juste valeur. Il n'avait pas non plus prévu de rencontrer qui que ce soit ce soir mais l'idée de passer la soirée seul lui semblait détestable et l'idée de chercher à rejoindre Elio était totalement proscrite. Pourtant il fallait qu'il bouge, qu'il fasse quelque chose, qu'il rencontre des gens, la solitude ne lui allait vraiment pas. Motivé par le maigre espoir de trouver en ville une quelconque occupation, le garde s'engouffra pour la seconde fois de la journée dans les ténèbres pluvieuses. Dehors il faisait déja presque nuit et les échoppes avaient déjà allumées les lanternes autour de leur porte, il n'était pourtant pas si tard, quel ironie. Poussée par le vent glacial dans son dos et la pluie battante sur ses épaules, Kylian se réfugia dans la première taverne qui croisa sa route. L'odeur d'humidité frappa ses narines lorsqu'il s'engouffra dans la bâtisse mais la chaleur qui s'en dégageait le poussa à aller s'asseoir à une table, rejoindre deux illustres inconnus jouant aux dés. Oh ils étaient sympathiques, il n'y avait pas à dire et les boissons que servaient le gérant glissaient sous le palais comme du petit lait mais l'ambiance était la encore loin d'être festive. Qu'importe, ca le distrayait.
La partie engagée terminée, le garde ramena là lui la mise dans un grand sourire. Il n'était habituellement pas si doué aux jeux de hasard, tout du moins pas à ceux dont l'issu dépendait entièrement du hasard, mais il semblait qu'aujourd'hui fut son jour de chance. Comme quoi. Ses camarades commandèrent une nouvelle tournée, entre temps, deux autres joueurs les avaient rejoinds et, lorsqu'ils se tournèrent vers lui dans l'attente de son acquiescement, Kylian la vit. Cette jeune femme au visage un peu trop pâle, aux cheveux un peu trop rouge et surtout au regard un peu trop perdu. Ses camarades durent suivre son regard puisqu'ils le charrièrent en riant et prirent commande sans lui. Trouver des jeunes femmes dans les tavernes n'étaient pas rare, les trouver seule l'était un peu plus et celle ci avait quelque chose dans le regard qui l'intriguait. Ce n'était pas grand chose, juste une impression, de la curiosité, le fait qu'elle ne corresponde pas vraiment à l'environnement qui l'entourait, ses instincts masculins aussi peut être, mais le fait est qu'elle l'intriguait. Les places à ses cotés étaient déjà occupées, tant pis, rester debout n'avait jamais tué un homme et puis, le marchand rondouillard à sa gauche ne cessait de bailler, sans doute ne tarderait-il pas à aller se reposer.
Kylian quitta le cercle des joueurs, laissant sa place à un nouveau venu et rejoignit le bar, accoudé aux cotés de la jeune fille aux cheveux de feu.
- A tes souhaits.
Elle se tourna vers lui et il lui sourit. Elle semblait tellement lointaine, dans ses pensés, ailleurs mais ici malgré tout. Elle reporta son attention sur le bar, les verres en face d'elle et le serveur qui s'affairait, silencieuse. Ces yeux étaient-ils bleus ? Ou bien gris ? Il n'en était pas certain mais ils abordaient une couleur particulière, vraiment singulière mais la rapidité de leur échange ne lui avait pas permis de déterminer laquelle, et puis il se voyait mal la détailler alors qu'elle lui avait déjà de nouveau échappé, happée par ses pensées. Tant de rêverie... Sa conscience devait avoir des choses à se raconter à elle même. Ils ne partagèrent mots jusqu'à ce que le serveur dépose devant elle une tasse fumante et s'aquitte de la commande du garde.
-Alors, commença le garde sans la regarder qu'est ce que tu as fait comme voeu ? Il tourna le regard dans sa direction.
La tasse qu'elle tenait emprisonnée entre ses doigts retrouva son socle. Elle avait du lait sur les lèvres.
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| Sujet: Re: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Ven 25 Mai 2012 - 13:54 | | | [Merci ] Elle hocha la tête, en remerciement, se tournant vaguement vers la voix sans même regarder à qui elle appartenait. La phrase de politesse fondit, comme du sucre, et elle l’oublia instantanément. Le tavernier posa sa tasse de lait devant elle, spécialité de la maison, et elle la porta, reconnaissante, jusqu’à ses lèvres. Tiède. Doux. Englobant sa langue, son palais, et réconfortant sa gorge, breuvage lénifiant qui ramena de suite un peu de chaleur dans son corps. Aussi chaud que le lait pouvait l’être sans lui brûler les papilles. Elle laissa le liquide lactescent se réfugier au creux de son ventre, tourbillon de chaleur, fermant les paupières, un instant ; ses mains, elles aussi, buvaient la tiédeur à travers la terre cuite. Et puis la voix à nouveau, et elle posa sa tasse. Il lui fallut un instant pour comprendre que c’était à elle qu’on s’adressait ; un autre encore pour comprendre à quoi il faisait référence. Elle tourna à nouveau la tête vers lui, et le regarda vraiment, cette fois-ci. – ses yeux glissèrent d’abord le long de ses cheveux.
Réflexe, alors, d’enfant curieux ou émerveillé, sans que son visage ne montre, pourtant, l’une de ces sensations – sa main se leva toute seule pour venir attraper l’une de ses mèches, l’emprisonna un instant entre son pouce et son index, avant de glisser, au ralenti, et de la lâcher. Elle n’avait pas croisé de cheveux aussi rouges que les siens depuis… depuis sa sœur jumelle. C’était un joli rouge – pas le même que le sien, plus profond, l’une des rares nuances à avoir l’air véritable, à ne pas mettre mal à l’aise par son trop de vibrance ou, au contraire, ses ombres sales. Le temps semblait tout ralentit, maintenant que le bruit de la pluie était assourdi derrière les carreaux. Elle était là, frêle jeune femme, assise sur un tabouret aux longues jambes lui permettant de voir au dessus du bar, et il était accoudé, à ses côtés, sa tête vaguement plus basse que la sienne, et elle avait juste.. tendu la main pour lui caresser les cheveux. Gêne, alors, timidité soudaine, complexe – pourquoi avoir fait ça ? Marque de proximité, soudaine, alors qu’elle ne savait même pas son nom. Avant – elle n’aurait même pas pensé à son geste, aurait souri, et aurait répondu à sa question. Maintenant… Non, ça ne se faisait pas. Elle détourna le regard.
- Pardon.
Jouer, un instant, avec l’anse de sa tasse. Le regarder à nouveau – mais pas son visage, elle ne voulait pas risquer croiser son regard. Il était bien bâti, en bonne santé – combattant, elle devina rapidement. Il avait la vigilance de ceux qui en font leur métier. Elle devinait les muscles, sous les vêtements. Laisser son regard glisser encore, vers le reste de la salle, cette fois-ci ; nouvelle image fantomatique des silhouettes qui se mouvaient dans la salle, par prudence, par habitude. Et puis, se perdre à nouveau dans ses pensées.
- Un vœu…
Un vœu. Elle n’avait pas fait de vœu, n’y avait même pas pensé. Mais elle le pouvait encore – la question tenait toujours. Vœu ou pas vœu – il demandait, plutôt, ce qu’elle aurait souhaité. Son regard se perdit dans le vague.
- On raconte que la Dame les exauce plus facilement les jours de pluies diluviennes, parce qu’elle est alors plus proche des joies et des peines humaines.
Elera secoua la tête, imperceptiblement, à ses pensées soudaines – la Dame, s’intéresser au sort des humains ? Elle était tellement au dessus de tout cela. Elle nageait, entre les astres, plongée dans son éternel amour pour son Chevalier, et pourquoi, alors, se pencherait-elle sur les fourmis que sont les hommes ? Pourquoi exaucer le vœu de l’un d’entre eux, puis d’un autre, et encore un autre, alors que chacun était ampli d’une ambition bien plus monumentale que leur petite personne, ambitions désoeuvrées, coupantes, différentes ; en aider une à se réaliser revenait à en piétiner une autre. Les hommes étaient trop rudes, leurs pensées trop souvent discordantes, et l’harmonie que recherchaient les marchombres ne pouvait se trouver qu’un infime instant, avant que la vague ne passe et que tout retombe à nouveau dans le déséquilibre. C’était un combat permanent, qui jamais ne pourrait trouver de fin. On ne pouvait pas accorder la race humaine ; on ne pouvait que s’accorder soi-même, et encore. Elle ne voulait plus souffler, ne voulait plus être flûte traversière dans l’orchestre ; chacun avait sa propre partition, sa propre mélodie, et la jouait sans écouter ce que chantaient les autres, de sorte qu’ils créaient un capharnaüm effroyable. Elle ne voulait plus jouer, ne voulait plus chercher des notes qui s’accorderaient aux autres mélodies – un peu de silence, pour reposer un peu ses pauvres oreilles. Mais elle était encore partie trop loin – le vœu, il demandait simplement son vœu. Oui, mais elle ne jouait plus ; elle ne jouait plus, ne voulait plus rien, et ne s’était pas, non plus, liée à une cause.
Trouve quelque chose quand même – n’importe quoi fera l’affaire. Tu n’es pas un cocon si creux que tu n’as plus la moindre envie, si ? Tu veux plein de choses, encore, n’est-ce pas ? Continuer à apprendre à forger. Trouver le Cœur de la Matière. Que ton retour à l’Académie se passe bien, tout simplement. Chevaucher la Brume ; rencontrer la Dame, pourquoi pas ?
Oh. C’était une belle idée, celle-là ; peut-être ne pas la laisser filer.
Arrête de t’enfuir – tu es dans une taverne, là, et tu n’as toujours pas répondu. Regarde-le. Concentre-toi.
Mais je n’ai pas de vœu ; tout ça, futilités, véhémences, vétilles. La Dame n’a pas à se pencher sur mon berceau – des vœux, j’en avais plein, qui volaient comme des lucioles, mais ils n’étaient que ça, des rêves, et ils ne peuvent pas se réaliser comme ça, pas comme cadeau de la Dame ; j’ai voulu les réaliser, de moi-même, j’ai échoué, souvent, et je ne veux plus rêver, je ne veux plus décider de ce qui est bien ou mal, je veux juste… Un pied devant l’autre.
Ben dis-le, alors.
…
Esquisse de sourire.
- Je pense que ce sont les vœux de ceux qui croient encore qui devraient être exaucés.
Et puis pourquoi il demande, exactement ?
Pour lancer la conversation – tu es devenue abêtie, en plus d’insensible ?
Oh, chut.
C’est qu’elle aimait de moins en moins tourner dans sa tête – et que, vu le peu de relations qu’elle entretenait ces derniers temps, il devenait de plus en plus difficile de s’échapper d’elle-même. Elle s’occupait – mais les pensées la reprenaient d’assaut à la moindre pause, et les remises en question se succédaient bien trop vite. Peut-être que ça lui ferait du bien, de parler à quelqu’un de nouveau, de se laisser aller un instant à la discussion qu’il lui offrait, sans qu’une histoire commune ne vienne noircir les moments qu’elle passerait avec lui.
Peut-être pas.
Peut-être, comme Marlyn, comme Elio, avait-il mis un voire deux pieds dans le Chaos ; peut-être était-il un assassin, qui fauchait des vies tous les trois matins ; peut-être était-il manipulateur, peut-être aimait-il se jouer des gens et de leurs sentiments.
Et peut-être est-il un garçon tout à fait normal, amical, ouvert, qui aime parler aux gens et n’a aucune intention malveillante. Tu vois des monstres partout, Elera – n’étais-tu pas censée laisser le passé derrière toi ?
De toute façon, elle ne le connaîtrait pas assez longtemps pour savoir s’il était intègre ou non ; et tant mieux. Alors, se laisser aller, mentir, peut-être, pour rester à la surface des choses, mais quoiqu’il en soit, penser à autre chose, penser à quelqu’un d’autre que sa piètre petite personne, pour une fois. Elle le regarda, dans les yeux cette fois ; calmement, sans défi. Le problème, c’est qu’elle n’avait jamais su avoir une relation qui ne voulait rien dire ; elle n’avait jamais su s’amuser. Elle voulait toujours connaître ceux à qui elle parlait – alors, elle posait des questions dont elle voulait vraiment connaître la réponse, elle écoutait véritablement, elle creusait. Elle demandait : si tu rencontrais la Dame, qu’est-ce que tu lui demanderais ? Ou : en quoi est-ce que tu crois ? Jusqu’où irais-tu ? Mais si elle partait du principe qu’elle ne voulait pas le connaître, juste passer quelques heures agréables – elle n’avait jamais joué à ce jeu, ne savait pas comment il marchait. Comment fait-on ? Parler de la pluie et du beau temps ? Surtout de la pluie, d’ailleurs. Poser des questions qui ne recèlent pas de danger. Elle ne savait pas comment faire, ne savait pas quoi demander. Le laisser guider, peut-être. Lui saurait mieux qu’elle. Parce qu’il jouait à ce jeu-là, n’est-ce pas ? Il n’était pas venu s’asseoir à côté pour apprendre à la connaître vraiment, si ?
Se poser des questions, se demander pourquoi une personne parle, pourquoi elle dit ce qu’elle dit, où ça mènera, comment elle perçoit nos réponses – voie trop dangereuse, trop rocailleuse, avalanche de questions qui ne pouvait mener qu’à la chute suivie d’un enterrement. Il ne fallait pas se poser de questions. Vivre les réponses, une par une, seconde par seconde. Il n’a certainement pas réfléchi, lui – alors arrête, toi aussi.
- Pourrais-je avoir ton nom ?
Voilà, c’est déjà mieux – un nom, ça ne se choisit pas, ça ne contient aucune valeur, ça ne dit pas si la personne qui le porte sera pour toi blessante ou lénifiante, s’il faut fuir ou rester. C’est parfait. Pas de contact, pas de raison d’avoir peur. Et puis c’est important quand même – pouvoir lier un son à une image, créer l’identité, le sortir de la masse. Il avait les plus beaux cheveux rouges de Gwendalavir, et il fallait mettre un nom sur ces cheveux-là. |
| | Ultra BG Messages : 251 Inscription le : 27/06/2010 Age IRL : 31
| Sujet: Re: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Lun 4 Juin 2012 - 20:27 | | | Elle avait posé sa tasse suite à sa question, mais il lui avait fallut quelques secondes de plus avant qu'elle ne se tourne dans sa direction. Pas envie de répondre ? Préférait-elle l'ignorer ? Ou bien prenait-elle simplement le temps de terminer sa dernière gorgée ? Bonne question. Toujours est-il qu'elle se tourna vers lui sans lui répondre, tout du moins pas dans l'instant. Habituellement lors d'une conversation, ou tout du moins d'un embryon de discution comme s'était le cas à présent, les deux protagonistes se regardaient mutuellement de façon plus ou moins prolongé, histoire de signaler un certain contact, une certaine connexion et non une totale indifférence. Pourtant il semblait que la jeune femme à ses cotés avait une vision totalement différente de la "conversation normale" comme il était commun de l'entendre. Une bien étrange jeune fille.
Sans vraiment s’arrêter sur son visage comme il était coutume de le faire, son regard glissa tout naturellement vers ses cheveux et ses doigts suivirent instantanément le mouvement, glissant le long de ses pointes rendues toutes douces par le Gwendop. L’inattendu et la rapidité pourtant toute naturelle avec lequel elle emmêla ses doigts à ses cheveux retint à Kylian un mouvement de recul. Le seul fait d'avoir déjà été l'objet d'une réaction semblable quelques temps auparavant le retint. Et puis, elle était jolie aussi et il ne se trouvait aucune raison valable à se retirer des prises d'une jolie fille. L'étonnement passé, le garde la laissa tout à son activité. A vraie dire, ca ne le dérangeait pas plus que ca et puis, elle avait l'air totalement captivée par ce qu'elle faisait, totalement hors du temps, comme si plus rien ne comptait autour d'elle. Elle était sur un nuage, loin, très loin de tout ce qui se passait autour d'elle et pourtant, c'était bien de ses cheveux dont il était question et qui glissait entre ses doigts. D'un petit sourire il la regarda revenir soudainement à elle et se détourner tout aussi rapidement, gênée.
C'était bizarre, étrange. Ils ne s'étaient toujours pas adressés un seul mot -enfin lui oui mais elle n'avait pas répondu alors c'était tout comme - et elle avait pourtant agit de cette façon qui pouvait sembler totalement déraisonnable et insensé. Il aurait pu s'agir d'une preuve d'audace, caractéristique de la fille entreprenante mais sa réaction lorsqu'elle se rendit compte de ce qu'elle avait fait et son expérience passé avec la petite Miaelle qu'il mettait bizarrement en parallèle éloignait cette hypothèse. Elle réagissait plutôt sans réfléchir, de manière presque inconsciente, comme par instinct. Sans doute cela était il caractéristique de son état un peu comateux, à coté de la plaque. Qu'importe, il aimait bien ce qui sortait de l'ordinaire.
Alors quoi, ses cheveux attiraient-ils à ce point la gente féminine ? Il pouvait toujours essayer d'en tirer partit maintenant qu'il en était pleinement conscient, quoi que... Il ne voyait pas trop comment faire. Il sourit. Elle s'était excusée sans le regarder et tentait d'éviter son regard tandis qu'il s'amusait de la situation en se bornant à la regarder. Et puis, sa réaction, en totale contradiction avec ce qu'elle venait de faire, il trouvait ça drôle, vraiment très mignon. Il se mit à rire.
- T’inquiète ! Si ca vient d'une jolie fille comme toi, je serais fou de demander des excuses.
Il la regarda d'un air amusé, cherchant à la taquiner et la draguer d'u même coup de manière plus ou moins subtile. C'était toujours ce qu'il faisait en premier. Attendre sa réaction pour réagir en conséquence. Il n'eut pourtant pas le résultat espéré.
Ses paroles glissèrent sur elle sans qu'elle ne les attrape. Pour le coup c'était un peu étrange, il avait vraiment l'impression de parler tout seul. Et puis, d'un air fantomatique, elle releva la tête et.. Ah ! Elle l'avait écouté finalement. Il n'y croyait plus tiens. Faisait-elle simplement semblant de ne pas s’intéresser pour récolter plus d'infos ? Ou était-elle juste dans la lune de temps en temps ? Tsss il était vraiment trop suspicieux parfois.
Une réponse dans le vague. Et une philosophique en plus. La réponse du poète, la réponse du savant... Tant qu'à faire une réponse simple lui convenait parfaitement . Les réflexion philosophique lui, ce n'était vraiment pas son truc. Non, vraiment pas. Et puis pourquoi s'en allait-elle s'emprisonner au fin fond de ses pensées dès qu'il lui posait une question ? Si elle le gênait tant que ca, elle aurait tout simplement pu lui faire remarquer et il l'aurait laissé tranquille- quoi qu'en réfléchissant ce n'était pas si sur- mais pourquoi diable lui fallait-il toujours s'enfuir dans son trouble et le laisser comme un con plutôt que d'oublier un instant que ses songes pouvaient attendre et que bha... Il était la lui.
Une esquisse de sourire. Et une réponse dans le vague. Encore une. Au moins il y avait eu du progrès d'un coté, elle avait presque sourit. De l'autre, sa réponse frôlait le dramatique psycho déprimant dépressif. -Il venait d'inventer le terme, mais ca collait plutôt bien à la situation non ?- Sous entendu qu'elle n'avait pas de rêves, aucun souhait à exaucer, rien en quoi elle voulait croire. Oh pitié... Il était venu ici pour s'amuser et se changer les idées surtout. Il ne manquait plus qu'elle le fasse déprimer à son tour en lui rappelant sa situation des plus déplorable. Il bu une gorgée de bière.
- Et ceux qui ne croient plus alors ? C'est pourtant eux qui en ont le plus besoin non ?
Se plier à sa volonté en suivant le fil de la conversation qu'elle voulait qu'ils prennent. Il n'avait pas tellement le choix de toute façon, elle semblait n'entendre que le moitié des mots qu'il prononçait ou ne s’intéressait qu'à la moitié qui l’intéressait, c'était le même résultat. Alors si elle voulait partir dans des débats de réflexion sur l'esprit soit. Même si ce n'était pas sa tasse de thé il allait la suivre. Pour le moment. Et dériver la conversation des qu'il serait possible de le faire, le plus tôt possible. Et si elle s’avérait être une toquée seulement accro à la cogitation et à la médiation intellectuel, la laisser terminer toute seule. Mais ce serait dommage, vraiment dommage. D'autant plus qu'il n'avait toujours pas réussit à cerner la véritable couleur de ses yeux -sa faute à elle aussi, a ne jamais vouloir tourner la tête dans sa direction grr- Mais il optait plus pour un gris-bleu. Quoi que. Ce n'était peut être qu'un reflet -dans sa tasse ?- mais il avait cru y voir une touche de rose ? Ou de violet ?
Sans crier gare elle se tourna vers lui et le regarda. Oui, elle le re-gar-da, avec ses yeux ! Sur le coup il se sentit con, 'pas qu'il était en train d'essayer de déterminer la couleur de ses yeux depuis qu'elle avait cessé de parler mais presque. Et puis, il reprit vite contenance, si elle venait juste d’émerger, il était hors de question de la laisser replonger dans l’abîme de ses pensées, ah ca non ! Alors il lui sourit, le regard avenant. "Welcome parmis-nouus & cie" Elle n'était pas une toquée de philosophie finalement -enfin il l’espérait encore- alors peut être, peut être y aurait-il une chance qu'ils arrivent à communiquer ? A se comprendre semblait un peu prématuré dans l'instant m'enfin... Il aviserait. Tous les êtres humains comprennent le langage du corps après tout, non ?
- Pourrais-je avoir ton nom ?
Tellement polie qu'il se mit à rire. Pas de façon méchante, ni de façon moqueuse comme il avait l'habitude de le faire -il valait mieux éviter dans ce genre de situation- mais sérieusement... Qui par la Dame, s’embêterait à utiliser une tournure aussi polie pour demander un simple nom ? Elle aurait pu être une noble mais étant donné sa tenue, la théorie de fonctionnait pas. Une noble en cavale alors ? Ses oreilles n'étaient pas percées, elle ne portait pas de bijoux et les nobles portent des bijoux, toujours pas validé. Et puis, elle était songeuse sur les bords aussi, à ne pas oublier. Une drôle de fille vraiment.
Il lui sourit et bu une gorgée avant de se tourner vers elle, joueur.
- Demandé si poliment, je vois mal comment je pourrais te le refuser.
Il lui sourit.
- Moi c'est Kylian.
Il avait hésité l'espace d'une seconde, avant de lui donner son véritable nom. L'habitude surtout, il faut dire que donner des noms empruntés ou inexactes lui sciait parfaitement. Mais pas ici, pas dans cette ville où il se rendait régulièrement. Le mensonge serait trop gros et il faut dire qu'il n'avait pas 36 000 sosies non plus alors... Et puis, donner son nom à une fille de plus ou de moins, quel importance ? De toute façon elle ne devait pas être d'ici et n'avait pas conséquent jamais du entendre parler de lui. Il avait le champ libre.
Il bu une nouvelle gorgée et se tourna vers elle, joueur.
- Mmh, et à moi ? Me permettais-tu de connaitre le tiens ? Ses yeux rieurs se fichèrent dans les siens, lui refusant de s'échapper. Maintenant qu'elle était éveillée, il était inutile qu'elle pense lui échapper de cette façon. Et puis, il l'avait sa réponse maintenant, elle avait les yeux pourpre.
[ & désolé du retard, j'aurais bien avancé un peu plus mais je n'étais pas trop sur de la réponse d'Elera -sait on jamais- ] |
| | Messages : 1576 Inscription le : 12/08/2007
| Sujet: Re: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Lun 4 Juin 2012 - 23:42 | | | ~ Elle n’avait pas entendu sa tentative de drague, parce que, de suite, elle s’était perdue dans ses pensées ; elle ne l’avait pas entendu, parce qu’elle n’avait jamais entendu ce genre de compliments, n’était jamais tombée dans les rituels de ses semblables ; n’avait pas entendu, non plus, parce que c’était son rire, détendu, qui résonnait à ses oreilles. ~
Elle effaça, du dos de sa main, le lait sur ses lèvres.
Sa question, elle la garda sur l’arrête de ses phalanges, là où perlait une goutte de lait, attendant, plutôt, son nom ; à la place, elle eut son rire encore, et elle sentit ses lèvres se courber à nouveau vers le haut. Elle aimait bien son rire ; il était confortable, léger, il entourait d’allégresse, d’intérêt aussi. Elle ne savait pas ce qu’il avait trouvé drôle, ne se connaissait pas de sens de l’humour, et avait très peu eu face à de pareilles réactions – mais c’était agréable, comme un champ de coton, et elle avait envie de l’entendre rire encore. Elle ne se souvenait plus du dernier rire qu’elle avait entendu – un rire inconnu, dans une rue, probablement, mais le rire de quelqu’un qui s’adressait à elle, quelqu’un dont elle connaissait le visage et le nom ? ..Cela remontait à bien trop longtemps. Donne-moi ton nom, feu follet rieur, que je puisse avoir un souvenir heureux.
Kylian.
Son sourire s'élargit, pour ce petit rien inutile.
Et puis il demanda son nom, et elle hésita, ses sourcils se mouvant très légèrement pour former un pli de réflexion sur son front. Elle avait toujours été Elera. Mais, quelque part, elle avait tellement changé, récemment, qu’il lui semblait qu’il ne lui convenait plus, comme une paire de bottine trop usée. Pouvait-elle, vraiment, se détacher de qui elle avait été ? Elle allait bien, avant d’entrer dans cette taverne, en direction de l’Académie, en direction de ceux qui connaissaient son ancien nom. Et pourtant – quand elle était apparue au seuil de la forge, elle ne s’était pas présentée. Elle avait montré son travail à l’homme, il avait acquiescé, elle s’était installée pour frapper de son marteau à ses côtés. « Passe-moi les tenailles. » « Recule ! » « Chauffe-le encore un peu. » Leurs échanges s’arrêtaient plus ou moins là – jamais il ne l’avait appelée. Les autres, ceux pour qui elle travaillait parfois, pour des missions éphémères – elle leurs donnait le nom d’Eli, pour ne pas risquer d’être bêtement retrouvée par ceux qu’elle souhaitait éviter. Mais elle divaguait à nouveau, et les yeux rieurs de Kylian perdirent soudain de leur éclat – Non ! Elle ne voulait pas qu’il s’arrête. Elle voulait son rire. Eclair de désespoir, un instant, sur son visage.
- ..Pourquoi suis-je même incapable de donner un simple nom sans réfléchir ?
Elle se détesta – ne pouvait-elle pas faire semblant d’être autre, comme elle faisait semblant d’être autre jusqu’ici ? Fallait-il vraiment qu’elle se laisse emporter par le passé au moindre instant ? Comment pouvait-elle seulement déclamer l’avoir laissé derrière elle, s’il la bloquait à chaque pas, qu’elle ne pouvait même pas avoir une conversation normale avec un jeune homme dans une taverne ?
- C’est pourtant facile. Dire son nom, ce qu’on fait, ce qu’on aime, mais non – je dois toujours.. tout compliquer, donner un sens à ce qui n’en a pas. Peu importe celui que je te donne, n’est-ce pas ?
Elle secoua la tête. Exprimer ses pensées. Se sentir moins… seule.
- J’aimerai pouvoir changer de nom – changer de nom comme on mue, suivre les aléas de l’être. Celui de ma naissance n’a jamais été le mien. Je ne veux pas porter l’ancien, pas ce soir – il est trop lourd, et je n’ai pas envie d’être lourde. Le dernier n’est qu’un mensonge, un diminutif sans cœur. Tu veux bien m’en donner un autre, juste pour ce soir ? Et si tu veux vraiment savoir – je te les donnerai avant que tu ne partes. Si.. ça te convient ?
Bonjour, comment tu t’appelles ? Je te dirai plus tard, invente-moi un nom, en attendant.
Pouvait-on faire plus pathétique ?
Comment est-ce que ça pourrait lui convenir ? Ce n’était pourtant pas compliqué : Je. M’appelle. El… Et non, parce qu’il fallait choisir, entre le i et le era. En donner plusieurs était tout aussi stupide que de ne pas en donner. Donner Elera, c’était choisir de lui donner tout ce qui allait avec, toute une histoire, une histoire pesante, qui n’avait pas sa place ici, mais dehors, sous la pluie – et puis non, pourquoi un nom serait-il porteur de tant de choses ? Elle mettait trop dans de simples syllabes ; et pourtant, c’était bien sous le nom d’Elera qu’elle s’était fait connaître dans les environs, le nom d’Elera qui était rattaché à la Marchombre qui, après avoir perdu son premier apprenti aux mains du Chaos, l’avait abandonné avec le second sans un mot d’explication. Celle qui avait aimé le violent Elio, celle qui fuyait constamment, celle qui refusait de lever la main sur ses ennemis, alors qu'ils tuaient ses amis qui tombaient autour d'elle. Elle ne voulait pas être Elera – n’avait-elle pas, pourtant, décidé de revenir à l’Académie, de retrouver Anaïel, Einar et Julia ? Mais ils ne rattachaient pas les mêmes souvenirs à son nom, et puis Einar l’appelait Lera, lui, et c’était tout autre chose. Eli, alors – Eli, c’était simple, c’était court, c’était sans connotation, c’était exactement ce qu’il fallait pour ce soir ; c’était l’échange sans relation, l’offre d’un nom sans aucune promesse attachée, discussion sans lendemain, aucun amour ni aucune haine. Et pourtant, elle n’avait pas envie de mentir au rouquin. C’était plus simple, quelque part, de le laisser choisir, lui. Plus rassurant. Ne pas choisir qui elle serait ce soir, le laisser guider la danse et choisir la musique. Mais pourquoi choisirait-il de guider une inepte sociale, une rêveuse, une torturée, alors qu’il pouvait avoir toutes les danseuses de la salle ?
Ses yeux glissèrent autour de la taverne, avant de s’arrêter sur deux filles, accoudées plus loin sur le comptoir, qui discutaient à voix basse, une bière à la main, en lançant des œillades alentours. Certainement chuchotaient-elles sur les figures présentes. Sans doute étaient-elles mignonnes – plus grandes, plus souriantes, plus dévergondées qu’elle ne le serait jamais, en tout cas. Le rire de Kylian recevrait bien davantage d’écho, s’il se décidait à passer ses mèches rousses entre leurs deux têtes.
- Je te dirai bien d’aller les rejoindre – mais j’aimerai que tu restes.
…A quoi elle jouait, maintenant ? Elle commençait par lui glisser la main dans les cheveux, sans aucune pudeur ; elle perdait le sens des conventions, était incapable de répondre à une question simple, de suivre un rythme de conversation normal, comme si, après avoir quitté l’Académie, elle avait oublié toutes les règles de civilisation qu’elle y avait apprises en six ans, et retombait dans son enfance sauvage, violente de désordres et d’incongruités ; et voilà, maintenant, qu’elle lui faisait part d’une envie qui ferait mieux de rester tue. J’aimerai que tu restes – et pourquoi, d’ailleurs, vouloir accaparer la soirée de l’inconnu ? Il y avait le rouge, et le rire, le rire rouge, le rouge rieur – et alors ? Elle n’avait pas recherché le moindre contact, avait évité les hommes comme la peste, depuis, depuis.. elle avait perdu la notion du temps. Mais aujourd’hui, à regarder les flammes, à écouter la pluie, elle avait voulu renouer, et, ce soir, elle avait envie d’être avec quelqu’un, plutôt que seule, envie de partager sans partager, du contact sans ses nombreuses nuisances, sans les blessures fatidiques. Quel égoïsme ; lui voler sa soirée pour en avoir elle-même une. Et pourtant, elle continuait, comme si sa bouche parlait toute seule, comme si elle ne contrôlait pas ; d’ailleurs, elle ne contrôlait rien, elle disait n’importe quoi, depuis tout à l’heure, elle faisait n’importe quoi, et ça lui apprendrait, au fond, à se couper de toute relation, et à tenter de réapprendre, c’était stupide, soit tu parles aux gens soit tu ne leurs parles pas, mais tu ne fais pas… ça.
- J’ai envie que tu exauces mon vœu, si tu penses vraiment que ceux qui ne croient plus méritent de se les voir exaucés ; j’aimerai que tu m’apprennes…
Elle ne savait même pas ce qu’elle allait dire avant de le dire – et, dans sa tête, un instinct résonnait, quelque part, lui disait de s’arrêter, tout de suite, maintenant, qu’elle allait dire des bêtises. Et puis non, pas envie – et comme sa main avait touché ses cheveux, ses lèvres remuaient pour dire, et il ne lui resterait, ensuite, que les excuses.
- Apprends-moi… Apprends-moi à rire. A ne pas réfléchir. A ne pas réfléchir aux conséquences – ce n’est pas important, qui nous sommes, nos histoires, n’est-ce pas ? Nous n’avons pas besoin de les connaître – juste, rire. Pas de questions, ou alors, des questions inutiles, pour ne pas vraiment savoir, et puis peu importe les réponses, c’est juste pour meubler le silence, et moi, je ne sais pas mentir, mais je dirai la première chose qui me passera par la tête. Tu aimes le lait de siffleur ?
Regarder, en oblique, les deux filles, sur la gauche – elles avaient fini par remarquer leurs chevelures rousses.
Puis baisser les cils, vers le lait.
Se faire fureur pour ne pas cacher son nez dans sa tasse, après y avoir noyé ses prunelles. |
| | Ultra BG Messages : 251 Inscription le : 27/06/2010 Age IRL : 31
| Sujet: Re: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Jeu 7 Juin 2012 - 23:57 | | | Elle ne l'avait pas regardé lorsqu'il lui avait répondu. Elle avait gardé les yeux baissés sur sa tasse et ne l'avait pas lâché du regard. Mais ce n'était pas le même silence que précédemment qui s'était installé, ce n'était pas le même regard perdu, songeur, que tout à l'heure. C'était plutôt le regard de celle qui hésite, doute, ne sait pas trop si elle doit se tourner vers lui et le regarder dans les yeux ou encore simplement jeter un coup d'oeil, comme ca, pour vérifier ou tout simplement l'assurer de son intérêt. Ce regard un peu embrassé peut être, peu sur de soi. Était-elle un peu timide ? Ce serait un peu surprenant, peu probable. Après tout, une personne timide n'aurait pas agit de façon si instinctive en glissant sa main dans les cheveux de l'illustre inconnu qui l'abordait, ni même ne l'aurait regardé dans les yeux avant de lui demander son prénom. Non, ce n'était pas de la timidité, ou alors pas à ce point la. Alors pourquoi ne pas le regarder ? Un trouble passager aurait flatté son orgueil mais rien dans son attitude ne trahissait un quelconque aspect d'une réaction pareil. Elle n'était peut être juste pas habituée.
Elle lui avait souri, encore une fois, lorsqu'il lui avait donné son prénom. Un petit rien, un petit geste mais qui lui faisait tout de même plaisir. Lorsqu'on sourit c'est qu'on est content non ? Qu'on se sent bien. Et puis elle avait souri, à son prénom, devait t-il en déduit que connaitre son prénom la rendait un tant soit peu plus heureuse ? Ou bien lui rappelait-elle un petit frère un peu casse-cou qui la faisait rire ? Peu importait en fait, le seul fait qu'elle ait réagit de cette façon lui allait.
Mais son élan d’allégresse et d'espoir sur sa toute nouvelle prise de réaction se vit mis à mal dès sa propre question posé. Froncement de sourcil, réflexion, tant de signes qui amorçaient son retour au pays des songes, de ses songes et elle allait finir happée de nouveau par ses sombres pensées et les chimères qui lui torturaient les méninges. Oh non pas maintenant ! Pas déjà ! Merde, il n'avait pourtant rien dit ou fait susceptible de la renvoyer s'emprisonner dans les méandres de ses pensées, il lui avait simplement demandé son nom... Eh quoi ? La question était-elle si étrange qu'elle nécessitait autant de réflexion ? C'était pourtant le plus simple qu'il puisse faire, si elle commençait des maintenant à devoir prendre du temps pour réfléchir, alors il avait peur pour la suite. Il était sur le point d'abandonner lorsque Celle-qui-ne-voulait-pas-lui-donner-son nom réagit.
Kylian fut légèrement étonné de sa réponse, et puis la regarda. Il y avait quelque chose qui bloquait chez elle pour qu'elle réfléchisse autant et elle en était bien consciente. Il y avait quelque chose qui n'allait pas, qui clochait et qui du coup, devait aussi expliquer sa capacité à être autant dans le vague. Il voulu hausser les épaules à sa question qui n'en était pas une. Peu importe le nom. C'était assez surprenant, elle avait toujours l'air d'être dans ses rêveries mais à coté... Elle avait cette totale conscience du monde qui l'entourait. Peut importe le nom. Elle n'était pas si naïve qu'elle semblait l'être, pas si à coté de plaque qu'elle pouvait le laisser paraître. Mais tant qu'à faire, il aurait bien voulu le connaitre, son nom.
Et puis il y eu ce qu'il redoutait tant: Le déballage de ses pensées. D'un coté ce n'était pas plus mal, au moins elle ne restait pas silencieuse et il se sentait un peu moins seul et puis, il savait ce qu'elle ruminait interieurement, mais de l'autre... Qu'attendait-elle veritablement de lui en faisant ca ? Il n'était pas venu la trouver pour la guérir, encore moins la consoler et il était hors de question qu'il soit son psychologue. Heureusement pour eux ce n'était pas non plus ce qu'elle avait en tête.
Lui donner un nom...
Kylian avala une nouvelle gorgée.
Lui donner un nom...
C'était décidément une drôle de fille. Il la regarda un brin étonné, le coude sur le bar et le menton dans sa main.
- Tu veux que je te donne un nom ?
Inutile de répéter, il avait juste besoin de prononcer lui même ses paroles pour prendre totalement conscience de ce qu'elle lui demandait.
- Mmmh je peux choisir n'importe lequel ?
Il la regarda, le sourire malicieux.
L'appeler Gertrude ou l'affubler du nom de sa dernière conquête - parce qu’il s'en rappelait de celui-ci pour une fois- serait un bon moyen de l'ennuyer ou encore de la pousser à lui révéler son nom véritable mais ce serait choisir la facilité et puis il n'était pas persuadé qu'elle le lui donne, sans doute préférerait-elle conserver un nom ridicule le reste de la soirée plutôt que d'avouer le sien. Et vérité, ca ne le dérangeait pas non plus, ca avait même un petit coté excitant bien que cela se révèle être un exercice difficile. Oh et puis il avait envie de la taquiner et de la faire réagir un peu, sourire peut être ? Parceque flirter avec une Gertrude...
Bon J'vais quand même essayer de te trouver quelque chose de pas trop ridicule, mais tu prend des risques la ! T'es un peu à ma merci.
Il la regarda d'un air malicieux.
[i]Des idées de noms, des idées de noms... Si idées il n'avait absolument pas dans l'instant, il était toujours près à improviser un nom totalement inventé, et c'est un "Nettoie ca !" campagnard prononcé dans son dos qui décida du nom de la belle inconnu aux idées étranges.
- Ce soir, tu seras donc...Nessa.
Il lui sourit. Ce n'était pas très recherché mais pour un prénom totalement sortit de son imagination il s'était plutôt bien débrouillé, elle avait échappée au pire. Le prénom eu l'air de lui convenir ou tout du moins elle ne s'en formalisa pas. Elle s'était tournée vers la salle derrière eux tandis qu'il réfléchissait à un prénom -tient les rôles s'étaient inversés, c'était elle qui s'occupait et lui qui faisait fonctionner ses méninges- et instinctivement le garde suivit son regard qui s'était porté sur deux filles, accoudées au bar, dans son dos. Grandes et sveltes, elles étaient plutôt mignonnes à vrai dire. L'une des deux lui disait quelque chose, sans doute l'avait-il deja croisé, quant à l'autre, une découverte. Elles devaient être entrés il y a peu de temps, dans le cas contraire il les aurait remarqué depuis un moment. La voix de Nessa le fit revenir à sa position initiale.
Elle l'avait une nouvelle fois surprise. A avoir pleinement conscience que les deux filles derrières lui l'attiraient davantage que les batailles inter-esprit mais c'était mal le connaitre que de penser qu'il puisse la laisser en plan la, totu de suite, maintenant. Elle n'en avait certainement pas conscience mais à ses yeux, elle se révélait plus intriguant, plus mystérieuse que les deux filles non loin d'eux dont on ne pouvait douter des intentions. Et puis, son espèce de sens du sacrifice " Je te dirai bien d’aller les rejoindre" suivit de sa demande et de sa volonté à elle lui laissait entrevoir une certaine forme de caractère qu'il n'avait pas l'habitude de rencontrer. Soyons égoïste, pour ne pas nous faire écraser par la masse.
Et elle reprit, et ses paroles attisèrent sa curiosité.
En vérité et depuis le début, elle n'avait pas fuit la conversation, elle lui répondait malgré son indifférence rêverie de surface, retenait même les questions qu'il aurait cru qu'elle n'aurait pas entendu tant et si bien qu'il lui était impossible de savoir différencier ce à quoi elle ne souhaitait pas répondre de ce à quoi elle n'avait pas entendue. Sa demande était à son image, inattendue et originale, un peu vague aussi. Ordinairement il aurait sans doute rechigné et grommelé face à un tel souhait mais le fait est que c'était cette drôle de fille qui en avait fait la demande, alors bien qu'il n'ait absolument aucune idée de ce qu'il ait à faire, il haussa les sourcils et lui sourit. Ca marche, faisons comme ca. Ce n'était pas tous les jours qu'il lui était donné de rencontrer pareil phénomène.
Du coup, elle avait replongé son regard au fond de sa tasse. Il sourit de plus bel devant sa réaction. Encore ce même schéma. Agir, parler sans réfléchir, et puis tout à coup se reprendre et se dire que ce qu'on à fait était totalement irréfléchi. L'aider à ne pas réfléchir ne serait peut être pas si difficile finalement, 'suffisait juste de supprimer la dernière phase... Sans prévenir, il se redressa sur son coude.
- J'sais pas, tu m'fais goûter ?
Grand sourire innocent.
Il attendit un geste de sa part pour porter les lèvres à son breuvage. Parcequ'il ne s'était pas trompé hein ? C'était bien du lait qu'elle buvait à l'instant ? Et si ce n'était pas du lait de siffleur... Bha, simple détails, il n'y avait pas à s'en formaliser.
-Mmh, c'est pas mal. Il y a quoi dedans, du miel ?
Il reposa la tasse sur son socle en avalant une dernière gorgée.
-Mais ca ne vaut pas une bonne bière.
Et, sur ces bonnes paroles, il fit glisser du doigt son propre verre devant une jolie rousse hésitante. Il pencha legerement la tête dans sa direction. Elle ne buvait pas ? Il sourit devant sa perplexité.
- Hey ! C'est pas avec ca que tu vas finir à danser sur le bar rassure toi !
Il rapprocha son visage du sien, l'obligeant à la regarder, les yeux pétillant de malice.
-Et puis, ce n'est pas toi qui vient de me demander de t'apprendre ne pas réfléchir ?
Sourire.
Cul sec ! Cul sec ! Cul sec !
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| | Messages : 1576 Inscription le : 12/08/2007
| Sujet: Re: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Ven 8 Juin 2012 - 23:27 | | | A sa merci ?
Elle n’y avait même pas pensé.
Pas un instant elle n’avait pensé qu’il puisse abuser du pouvoir qu’elle lui avait donné. Abuser du pouvoir de nommer – non, elle n’aurait jamais eu l’idée, dans la situation inverse, à le ridiculiser par les sons. Et pourtant – quelque part, c’était drôle, enfantin, futile. Quelle importance, puisque le nom n’était qu’éphémère ? Vétille sans importance, elle le perdrait demain. Il aurait pu – elle aurait pu s’appeler Ursule, pour une soirée. En rire, ensuite. Quelque part, c’était rassurant, d’être à sa merci, justement ; même sans lui faire confiance, même en sachant qu’il pourrait choisir quelque chose d’absolument risible, qu’elle pourrait s’appeler Chiffon pour un soir – c’était mignon aussi, Chiffon. Etre à sa merci, le laisser choisir, c’était lui reléguer la responsabilité, c’était ne pas payer elle-même les conséquences de son choix. Et même si elle regrettait, ensuite, même s’il en abusait – elle ne serait pas responsable, et c’était tout ce qui importait. Le risible, l’abus ne pèserait pas sur ses épaules, comme aurait pesé le choix de lui répondre Eli ou Elera. Elle ne voulait plus choisir, ne voulait plus réfléchir aux conséquences de chacune de ses actions, ni devoir vivre avec ensuite. Elle fuyait, comme toujours. Alors qu’elle soit Ursule ou Chiffon, qu’elle soit piétinée, tant que ce n’était pas de son fait. Quelque part, elle avait encore confiance, confiance en cet étranger flamboyant, confiance au fait que, même s’il avait le pouvoir d’être cruel, il ne le serait pas.
Ce fut Nessa. Ce fut Nessa comme ça aurait pu être n’importe quoi d’autre, et c’était justement là que résidait ce qu’elle cherchait. Peu importait sa source d’inspiration, c’était son nom, à présent, et il lui convenait comme n’importe quel autre – après tout, où donc était le lien entre les sonorités et l’âme, autre que celui créé de toute pièce ? C’était une manière d’identifier, autant que le regard, un signe, une marque. Mais la manière d’identifier en elle-même – qu’importait-elle, tant qu’il y en avait une ?
La seule chose qui comptait n’était pas son rapport au nom, mais ce qu’il signifiait pour Kylian ; finalement, il avait opté pour la gentillesse, et ça avait un sens, pour elle. Oui, bien sûr, le pire des assassins pouvait très bien avoir l’amabilité de donner un joli nom à quelqu’un qui le lui demanderait, oui, bien sûr, les manipulateurs jouaient toujours d’hypocrisie, et ceux-là étaient les pires ; mais au moins n’avait-il pas opté pour la méchanceté gratuite ou le ridicule sans le rire, celui qui n’est créé que pour enfoncer. Ca voulait dire quelque chose ; peut-être donnait-elle trop d’importance aux détails, mais, quelque part, c’était comme un test réussi, comme une marque de confiance qu’il n’avait pas jeté bêtement, qu’il avait saisi, et elle se sentait rassurée. Elle avait demandé à n’importe qui – parce qu’un jeune homme inconnu qui vient vous parler dans une taverne est bien n’importe qui – de lui apprendre à rire, et il lui semblait que, quelque part, elle n’était pas si mal tombée.
Il fallait sérieusement qu’elle arrête de réfléchir.
Elle poussa la tasse vers lui, puis hocha la tête.
- Oui, du miel.
Il ne partait pas, alors – elle ne l’avait pas fait fuir avec ses hésitations pusillanimes et son inaptitude sociale. Sa présence ne lui était pas tout à fait désagréable, ou, en tout cas, l’était plus qu’il ne pensait que le serait celle des deux filles. Il était joueur – elle le voyait à ses sourires taquins, ses regards pétillants, ses phrases au bord de la provocation. Mais peut-être pas si voluptueux que ça. Il savait simplement s’amuser – ne pas réfléchir, profiter du temps présent. Se laisser aller. Allez savoir ce qui le retenait ici – mais, à nouveau, elle y mettait du sens. Ils allaient s’amuser, et il n’y aurait pas de conséquences ; elle se laisserait aller, se lâcherait, parce que son rire la mettait en confiance, qu’il l’avait appelée Nessa et qu’il n’arrêtait pas de sourire gentiment. Peu importait le reste.
Elle fixa la bière.
La dernière fois qu’elle avait ingurgité de l’alcool – elle avait sombré, ne savait même pas ce qu’elle faisait. Les bouteilles de vin, et d’autres substances moins traditionnelles a fortiori, s’étaient enchaînées, tant et si bien qu’elle ne comptait plus, que ses souvenirs étaient hachés, fugaces, incomplets, images violentes suivies de vides, pirouettes et mal de mer – ça tournait et elle avait mal au crâne. Elle s’était sentie tellement malade, le lendemain, et la mer rouge s’étalait sur le parquet. Mais peut-être que, de manière plus.. raisonnable… Elle sourit.
- La dernière fois que j’ai bu, je me suis réveillée avec la nuque dégagée et les cheveux courts alors que je les avais jusqu’aux hanches la veille.
Semblant de rire – pas un vrai, mais un soupir fit trembler ses narines, au dessus de son sourire, et un rapide spasme souleva sa poitrine. Ils avaient bien repoussés, depuis. Nessa attrapa le verre, et bu à grandes gorgées. Cul-sec. Pas tout, cependant – c’était la chope de Kylian, pas la sienne, et elle ne comptait pas le léser de sa boisson. Grimace. Sincèrement, elle préférait le lait. Mais le lait ne l’empêcherait pas de réfléchir – l’alcool déliterait ses pensées, les rendrait incompréhensibles même pour elle-même, et elle pourrait rire, sans retenue, en les laissant tomber en lambeaux dans les limbes de sa mémoire. Carpe Diem. Elle fixa Kylian, lui qui cherchait tellement son regard, comme s’il voulait happer toute son attention, ou faire preuve de sincérité.
- Tu sais… Tu me surestimes peut-être, ou bien tu sous-estimes la bière – ou alors, assise que je suis sur ce grand tabouret, tu n’as pas pris conscience d’à quel point je suis petite, et la vitesse à laquelle ça.. coule en moi.
Il avait raison, cependant ; une bière ne devrait pas suffire à la faire danser sur le comptoir. C’était suffisant, cependant, pour lui donner une bouffée de courage – et qui avait dit qu’il fallait être bourré pour se mettre à danser ? Ca manquait de place et de musique – et puis qu’importe. Ne pas réfléchir. Une impulsion, et elle fit remonter ses pieds sur le tabouret, poussa, avala la distance entre le tabouret et le comptoir, et se retrouva debout à surplomber le monde, entre une tasse de lait et une chope de bière. Ne pas faire attention aux regards, ne même pas vérifier si qui que ce soit portait attention à son manège. S’accroupir, pour tendre la main à Kylian. C’était lui qui devait la guider – mais peut-être pouvait-elle, elle aussi, faire un effort.
- ..Tu viens ?
Pointe de peur, dans sa question – peur encore du ridicule, peur de prendre des initiatives qu’elle ferait mieux d’éviter, peur des conséquences, comme toujours. Elle aurait dû rester assise, et continuer à le suivre. Mais si elle l’avait fait – ça ne l’aurait pas empêché de regretter. Parce que, quoiqu’elle fasse, elle se sentait toujours à côté de la plaque. S’il ne la suivait pas – elle sentait déjà le rouge lui monter aux joues, la gêne que la situation occasionnerait. Avant, elle aurait dansé parce qu’elle avait envie de danser, sans s’inquiéter ni de lui ni des autres ; ils auraient vu qu’elle se moquait des regards, et elle serait partie en souriant. Mais pas là. Là, elle faisait un effort, elle tentait de. De quoi ? Difficile à dire. De sortir de son bourbier, de se laisser aller. Et, à deux, à trois, à quatre, c’est facile, il suffit de se laisser emporter par l’emportement des autres ; mais, seul ? Après le premier élan, qu’elle venait d’amorcer, il n’y aurait plus rien pour continuer à la pousser. Alors attendre – tendre la main, et tenter de ne pas lui montrer à quel point elle tremblait de sa réponse. |
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| Sujet: Re: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Mar 12 Juin 2012 - 22:20 | | | Elle hésitait. Un peu, en apparence seulement. Parce qu’elle allait la boire il le sentait. Elle lui avait demandé de lui apprendre à rire sans se préoccuper de rien, de rire comme ca, comme si elle était seule au monde, de rire pour elle et pour montrer au monde qu'elle était la, bien vivante et qu'elle était heureuse. Elle voulait rire et il lui offrait ce qu'elle voulait. Du rire, de la joie en liquide. Au gout legerement amer et un brin fruité, glacé et qui pourtant réchauffait la gorge lorsqu'elle coulait le long de l'oesophage. Boit et tu riras.
Il ne savait pas vraiment pourquoi il avait accepté sa requête à vrai dire, il n'avait absolument aucune idée de quoi faire pour qu'elle parvienne à son but. Ce devait être le coté "réaliser son rêve" qui l'avait décidé. Ca faisait bien dit comme ca et puis au moins il aurait plus ou moins l'impression d'avoir fait quelque chose de bien dans sa vie. "J'ai aidé à réaliser un rêve" Ca en jettait non ? A première vue ca n'avait rien de très folichon. Rire. C'était à la portée de tout le monde. N'importe quand, n'importe comment, n'importe qui, il suffisait juste d'en avoir l'envie. Mais apprendre à rire... La ca prenait une dimension deja plus compliquée. On n'apprenait pas à rire, on ne pouvait pas apprendre à rire à quelqu'un. Les bébés riaient eux aussi, sans pour autant que cela ait nécessité un apprentissage. Il ne pouvait pas lui apprendre à rire, seulement l'aider a retrouver l'envie de rire. Etirer ses lèvres dans un sourire et se sentir bien, ce n'était pas plus compliqué que ca.
- La dernière fois que j’ai bu, je me suis réveillée avec la nuque dégagée et les cheveux courts alors que je les avais jusqu’aux hanches la veille.
Elle avait ri -rectification, presque rit. C'était un bon début. En tout cas lui, cette petite confession le fit bien rigoler et il imagina bien le trouble et l'horreur qu'elle avait du ressentir le lendemain matin en voyant ses cheveux étalés au sol et en frissonnant de sentir le vent sur sa nuque découverte. Un matin, après une soirée bien arrosée avec d'autres membres chargés de surveiller un convoi tout comme lui, le chef de convoi était sorti en hurlant de sa tente, la moitié de sa tignasse envolé et les poils des jambes rasés de manière très aléatoires. Tous les membres du convoi avaient explosés de rire avant de se retrouver convoqués par ledit chef pour trouver le coupable de cet horrible attentat. On n'avait jamais vraiment su qui avait été le coordinateur de cette investigation -alcool quand tu nous tient- et ils avaient passés le reste du voyage surveillés de très près et interdit d'alcool. N’empêche, sur le coup, ça avait vraiment été très drôle.
En riant, il lui répondit.
- Promis, j'ferais attention à pas te couper les cheveux !
Si c'était elle par contre qui se les était coupée d'elle même... Il eut du mal à calmer son fou rire.
Elle porta finalement la choppe à ses lèvres et elle bu, et bu et re bu s’arrêtant seulement avant de terminer complètement sa bierre. Il lui donnait le remède, elle le prenait sans rechigner. Il sourit. Voila qui était mieux. Et elle tourna le regard vers lui et planta ses yeux dans les siens. Violet, pourpre, mauve, il n'avait jamais vu des yeux pareils et avec tant de nuances, ils étaient fascinants. Re-rire. Qu'elle ne tienne pas l'alcool était une chose, mais à ce point ? Un gamin de 12 ans ne finirait pas bourré avec ca ! Alala, il n'allait pas devoir la faire trop boire dans ce cas ! 'manquerait plus qu'elle ait l'alcool triste ou une subite envie de lui révéler ses problèmes, mieux encore, une envie de régurgiter sur ses chaussures. Ah ca non, il n'en voulait pas ! Mais c'était mignon quand même de sa part de s’inquiéter comme ca. Elle n'avait peut être pas confiance en son foi mais lui en revanche, savait que deux ou trois bières ne pouvaient pas lui faire de mal ! Plus en revanche...Il n'irait pas s'y tester jusqu'à dire qu'elle serait encore dans de bonne condition, étant donné ce qu'elle venait de lui reveler au sujet de son rapport à l'alcool. -Bha ! Tu te sous estimes peut être aussi et le seul moyen de le savoir c'est d'essayer !
Et puis il n'y comprit plus rien. D'un coup, comme ca, sans prevenir elle se retrouva debout sur son tabouret. Il ne l'avait même pas vu grimper dessus, avait à peine eu le temps de cligner des yeux qu'elle était déja passé de la position assise à la position debout. C'étit étonnant, vraiment et un doute vint froler son esprit, un doute qui avait un nom: Marchombre. Il ne laissa pourtant pas l'idée germer et l'oublia très vite en la voyant se rapprocher du bar.
- Déja ?
Il prit un air intrigué en la voyant effectuer sa manoeuvre pour grimper sur le bar. Elle ne pouvait pas avoir déjà trop bu avec les quelques gorgées qu’elle venait d'ingurgiter ! Alors qu'est ce que... ? Elle n'allait quand même pas... ? Eh bha ! S'il s'était attendu à ca ! Il la regarda debout devant lui se pencher et lui tendre la main. Mélange d'étonnement et d'estime au fond de ses yeux. Alors la. Elle le surprenait plus qu'elle ne l'imaginait. Qui aurait cru que la petite rousse rêveuse, un peu à la ramasse et un brin timide en vienne tout à coup à finir les deux pieds sur le bar ? Inimaginable, et pourtant. Il l'avait peut être sous estimé finalement, elle avait encore de belle réserves insoupçonnées. Il avait bien fait de rester avec elle, elle lui apportait bien plus de compagnie que les deux autres un peu plus loin, et bien plus de divertissement que les hommes avec qui il avait joué aux dés. C'était completement stupide, fou et sans aucun but, c'était génial.
Dans un sourire, il prit sa main et se retrouva à ses cotés. Kylian tourna la tête dans sa direction, elle faisait au moins une tête de moins que lui. Il sourit.
-Ah oui, en effet, t'es pas très grande.
Ca faisait un peu bizarre. Ils étaient la, debout, sur le bar de la taverne et tous les yeux braqués sur leurs petites personnes. Un instant il se sentit mal à l'aise d'être le centre de l'intention de cette façon et puis il se rappela qu'il aimait bien ca et que c'était son truc d'attirer l'attention, alors il sourit et se tourna vers elle. Ils étaient juste à coté si bien qu'ils se retrouvèrent complètement nez à nez et qu'il put lui souffler discretement.
- Je sais pas vraiment danser mais j'suppose qu'on s'en fiche.
Et sur ces belles paroles, il lui prit les mains et l’entraîna dans une danse de son invention et totalement improvisé il va de soit. Il n'y avait pas de musique dans la salle et rien que cette constatation aurait totalement freiner Kylian de se mettre à danser -le fait qu'il ne sache pas le faire s'y rajoutant. Mais sa Nessa en avait décidé autrement et sa façon de faire, sans réfléchir, ce brin de folie qui l'animait lui plaisait décidément. Alors certes, il n'y avait pas de musique, certes il ne savait pas danser et certes il se retrouvait sur le bar un peu con avec ses bottes pas très propres -encore heureux qu'il n'ait pas eu à marcher dans la boue- mais tant pis ! Parce-que tout ce qu'il avait recherché en entrant dans ce bar en cette soirée pluvieuse c'était ca, l’inattendu, l'imprévu et la distraction. Et il n'aurait pas pu trouver mieux qu'elle. Elle le surprenait, vraiment. Et il adorait ca.
Une chanson était venu tout naturellement se greffer à leur geste. Un truc connu et familier à la plupart des alaviriens. Un truc qui bougeait et qu'il fredonnait en même temps qu'il l'attirait à lui, pour l'écarter et la faire tourner sur elle même. Ils faillirent faire tomber la tasse ainsi que la choppe par un geste malencontreux du garde. Heureusement pour eux le gérant les rattrapa in extremis avant de les fusillers du regard. Un petit sourire d'excuse plus tard et il l’entraîna de nouveau. Les clients s'étaient écartés avec leur boissons et certains mêmes avaient délaissés leur chaises. Ca leur faisait de la place en plus.
Ils auraient pu se faire huer, hurlés dessus par le patron et les clients mécontents mais ils avaient eu de la chance ce soir. De la chance que Nessa ait un si beau sourire lorsqu'elle tourbillonnait, de la chance que l’exceptionnel de la situation ait plus enjoué les gens que les aient ennuyés, de la chance aussi, que le vieil habitué du coin et toute sa troupe à sa table se soient mis à rire à en taper du poing et à chanter avec lui cet air qu'ils connaissaient, de la chance aussi, que les gens avec qui il avait joué aux dés les aient suivis, peut être parcequ'ils avaient sympathisé avec celui qui dansait sur le bar à l'instant même. De la chance oui, beaucoup de chance, car si les circonstances avaient été autres, ils se seraient très certainement retrouvés dehors dans la boue avec un coup de pied au derrière.
La chanson s’accéléra et Kylian n'avait même plus besoin de fredonner tant les autres s'y étaient mis à sa place, à coup de "lalala" campagnard et de claquement de main en rythme. C'était génial, phénoménal et il ne pouvait s’empêcher de sourire comme un gamin. Ce qui leur arrivait était magique, jamais il ne se serait attendu à ca, jamais il n'aurait esperé qu'il lui arrive un truc comme ca. Parce que ca n'arrivait que lors de soirées particulièrement alcoolisés, avec un barman absent et des convives tout aussi bourrés, pas... Comme ca ! Pas par un soir pluvieux dans un bar pleins à craquer de travailleurs déprimés, pas juste en... Acceptant la main tendu d'une inconnue à qui il avait donné un nom. Il n'y avait pas assez de mot pour décrire ce qu'il ressentait.
Ils trébuchèrent quelques fois, se rattrapèrent toujours, accélérant l'allure toujours un peu plus aux sons des claquements de mains et des hymnes qui les entraînaient dans une danse endiablée. Jusqu'au final. Kylian attrapa la main de la jolie rousse et la leva au ciel. Tout les hommes de la taverne l'applaudir en sifflant, braillant et cognant leur choppes contre la table. Il se tourna vers elle, le sourire aux lèvres. Elle souriait également et il ne s'agissait pas ici d'un sourire contrefait, c'était un vrai sourire, un vrai de vrai.
Elle savait sourire, elle était heureuse, il n'aurait plus besoins de lui apprendre à rire finalement.
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| Sujet: Re: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Mer 13 Juin 2012 - 15:47 | | | Nessa leva la tête, au maximum, le derrière de son crâne sur le haut de son dos, déployant sa gorge, pour lever les yeux vers lui, un sourire sur les lèvres ; pas très grande – quel euphémisme. Elle avait toujours eu un corps d’enfant, jusqu’à ce que des courbes féminines soient venues démentir sa constitution quelques années plus tôt. Elle souriait, la réserve lui serrant toujours la gorge, alors que, se concentrant en apparence sur Kylian, son esprit inventait les regards dans la salle, posés sur eux sans aucun doute. Ce n’était pas grave ; ils n’étaient pas dangereux, et elle n’en avait pas peur, parce qu’il était monté avec elle sur le comptoir, et que, si elle n’était pas seule, il n’y avait aucune honte à avoir. Il avait pris sa main. Il ne savait pas danser, et il l’emporta pourtant sans la moindre hésitation.
Pour danser, il suffit de se laisser emporter ; il suffit d’écouter son corps, de le laisser guider, emplir l’espace, et oublier, oublier les regards, oublier les jugements, oublier les conventions, oublier l’endroit où devait être un bras, ou une jambe, pour les laisser sortir de cet espace délimité, justement. Pour danser, il suffisait d’être bien dans sa peau, de se laisser aller, d’oser faire ce qu’on ne fait jamais.
Kylian savait danser.
Il avait beau dire que non, et ses gestes avaient beau avoir une certaine maladresse, une disparité au rythme imaginaire parce qu’il changeait d’avis en milieu de mouvement, il savait danser.
Elle aussi, après la gêne passagère qu’occasionna le début de cet imprévu, elle sut gonfler les voiles et ne pas se retenir. Elle suivait son mouvement, en entraînait un autre, et bientôt le fredonnement vint les accompagner, celui de la voix de Kylian, d’abord, puis de toute la taverne qui reprenait en chœur. Elle, elle déposait ses doigts au creux de sa paume, s’éloignait, tournait, répondait à chacun de ses mouvements par une torsion inverse de son corps, et elle tournoyait, se rapprochait, l’effleurait.
Elle se sentit proche de lui comme elle ne s’était pas sentie proche de qui que ce soit depuis longtemps.
Oh, pas psychologiquement – elle ne le connaissait pas, il ne la connaissait pas.
Mais il y avait une alchimie, une alchimie des corps créée par la danse, par les gestes qui répondaient aux gestes, comme s’ils étaient, le temps d’une mesure, sur la même vague, la même onde, à créer la même écume, sous le grondement de la mer que devenaient les autres clients, et elle avait envie de tourner, tourner, tourner, de ne jamais s’arrêter, de sourire, sourire, sourire, jusqu’à ce que les commissures de ses lèvres ne quittent son visage pour atteindre l’infini de chaque côté de Gwendalavir, alors elle accélérait, sa respiration aussi, ses muscles criaient de bonheur à l’effort bénéfique, heureux de la fatigue tonique qui suivrait. Kylian lui marcha sur le pied ; elle faillit glisser, il la rattrapa, et ils repartirent comme si le mouvement n’était que le suivi naturel d’une chorégraphie qui ne laissait la place à aucune improvisation, ou, s’il y en avait, parfaitement fusionnée par deux corps qui n’étaient plus qu’un seul et même mouvement.
Harmonie.
Elle avait oublié.
Elle avait oublié ce que l’on pouvait ressentir, l’harmonie de deux corps vibrants de vie.
Elle ne croyait plus, récemment, qu’en l’harmonie des choses ; et c’est dans les coups sourds du marteau sur l’enclume, dans l’harmonie du feu, de l’eau et du métal, dans celle de la vapeur et de la fumée, qu’elle avait trouvé encore un peu de beauté. C’était plus simple, d’harmoniser les objets – eux restaient fidèles à eux-mêmes, ne changeaient pas de nature, n’avaient pas ce gigotement imprévisible qu’avaient les hommes, et elle leurs faisait encore confiance. Elle réparait – elle aimait soigner les brisures des objets, là où elle n’osait plus même regarder les âmes. Ses yeux descendirent vers les lèvres de Kylian, un instant, puis sur une mèche qui lui caressait négligemment le cou ; plus simple, moins d’effort que de lever les yeux plus haut. Pas besoin de regarder, puisqu’elle sentait son corps, devinait dans quel sens il la ferait tourner avant qu’il ne le fasse, et savait que ses yeux pétillaient de joie. Elle avait oublié avec quelle force se ressentait l'harmonie de deux êtres plutôt que de deux choses.
Applaudissements.
Elle lui sourit, avant d’accrocher sa main sur sa tunique, au niveau de son torse, et de se pencher à son oreille.
- Merci.
Le lâchant, s’éloignant, elle se pencha ensuite vers le tavernier, en un geste, lui aussi, de remerciement. Puis elle sauta sur le tabouret, avant de s’y asseoir à nouveau, pendant que Kylian descendait à son tour. Le tavernier se rapprocha, avec un chiffon sale, et commença à nettoyer le bois martyrisé par leurs petits pieds joyeux.
Leurs spectateurs improvisés, après quelques commentaires bon vivants et des regards emplis de bienveillance, retournèrent à leurs tours, petit à petit, à leurs activités précédentes, et les discussions reprirent, comme s’il ne s’était rien passé, si l’on excluait le fait que l’ambiance générale semblait s’être allégée, et que les sourires étaient plus rapides à fuser sur les visages des uns et des autres… Elera aussi souriait ; il lui semblait que ce qu’ils venaient de faire était auréolé de quelque chose d’indescriptible. Etait-ce si facile, d’apporter la joie ? Il suffisait de sauter sur un bar, de suivre l’impulsion, pour emporter les autres après soi, et de faire valser les rires dans tous les verres ?
Tout comme il suffisait d’une touche de cynisme, d’une larme, de menaces et de grimaces, pour emporter les autres dans une ballade macabre, dans la noirceur des violoncelles ?
Peut-être, pour gagner son combat, aurait-il simplement suffit de sourire ; communiquer la joie plutôt que de se laisser emporter dans la chute des douleurs sinueuses. La perfidie avait trop de visage, et il était trop facile de se laisser miner par la pluie. Mais Kylian – Kylian, en une danse, un regard, un sourire, avait réussi à faire fuir les nuages, tous les nuages qui traînaient dans tous les chapeaux de tous les hommes présents dans cette salle. Il devait être un magicien, un porteur de torches aux reflets cuivre, un feu de joie plutôt que l’incendie à la base du sinistre. C’était le souvenir du feu qui l’avait fait sortir de la forge, et rechercher le contact humain ; c’était le feu qui brûlait sur sa tête, et coulait sur ses épaules. Elle avait envie de les toucher encore.
Elle se retint.
- Je ne sais pas… si tu as conscience du poids de ce que tu viens de faire. Tu es merveilleux.
Oui – il était merveilleux, de pouvoir envoûter une salle toute entière, et d’arriver à la sortir d’une léthargie si longue et si confortable. Il était merveilleux, de pouvoir embraser tous les flambeaux de la joie, et d’avoir su animer une Nessa heureuse. Elle n’oublierait pas ce moment ; comme un trésor, comme la flamme mouvante d’une bougie. Un de plus, pour se donner une raison de ne pas sombrer. Il y a les souvenirs qui te tirent de l’avant, et ceux qui te tirent de l’arrière ; elle se débarrasserait des toiles de poussières, des araignées cauchemardesques, mettrait un verrou sur ceux qui la tiraient vers le fond de tombes creusées pour pouvoir mieux l’enterrer ; et elle s’accrocherait, de toute la force de ses petits poings, aux rayons de soleil, aux ailes angéliques, au miel des abeilles, aux rires et aux tendresses. Elle s’était enfermée en elle-même – avait tout mis sous clef, pour ne pas se noyer – et Kylian venait d’ouvrir la porte, de lui rappeler l’existence des bons souvenirs, de la simplicité. Einar lui manquait. Anaïel aussi. Peut-être, finalement, la Dame écoutait-elle, à moins que ce ne soit le Dragon qui ait envoyé ce jeune homme enjoué sur sa route. Elle avait envie, maintenant, de prendre une palette de couleurs, où s’étaleraient le rougeoiement d’un soleil matinal, le mouvement herbeux des algues dans les fonds, une touche de bleu blanchi par les nuages, les framboises des bois, les vives tentacules des brûleurs, et peut-être le jaune d’un sable ensoleillé, et d’en mettre sur le nez de ce monsieur rondouillard, là-bas, dans les cheveux de cette fade brune, sur la cape sombre de cet étranger. Elle voulait les éclairer, tous, physiquement, comme les cheveux de Kylian, maintenant qu’il avait éclairé, par son fredonnement, chacun de leurs esprits.
Le tavernier repassa devant eux ; ils prirent deux bières, et Nessa posa simplement sa main dessus, buvant des gorgées plus calmes, l’esprit moins volatile. Plus posée, mais toujours souriante et enjouée, elle leva à nouveau les yeux vers Kylian.
- Dis-moi, est-ce que tu as un vœu, toi aussi ? [Dis, ils sont de quelle couleur, les yeux de Kylian ? ] |
| | Ultra BG Messages : 251 Inscription le : 27/06/2010 Age IRL : 31
| Sujet: Re: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Mer 13 Juin 2012 - 23:59 | | | L’allégresse lui soulevait sa poitrine à chacune de ses respirations et la gaieté étiraient tous les muscles de son visages dans un sourire sans fin. Ils l'avaient fait. Il avait pris la main qu'elle lui avait tendu, avait bravé les regards d’incompréhensions et d'étonnement des clients du bar et ils s'étaient mis à danser. Sans jamais regarder où ils mettaient les pieds, sans jamais faire attention aux regards qui s'étaient illuminés au fur et à mesure de leur pas, sans même se soucier vraiment des voix derrière eux qui créaient la musique qui les entraînaient toujours un peu plus. Ils n'étaient que tout les deux et plus rien ne comptait. Ni la pluie sur les carreaux, ni les gens tout autour d'eux, ni les rires et les chants qui les accompagnaient, ni même le bar sur lequel ils se tenaient. Ils n'était que tout les deux, rien que tout les deux jusqu'à ce que la chanson se termine et que les applaudissements et les cris de joies explosent à leur oreilles comme témoins de la réalité qui les entouraient . Ils étaient bien la, vivants, heureux, sur ce bar et le monde ne s'était pas figé. Il avait bougé, en même temps qu'eux, avec eux, partageant leur euphorie par leur gestes, leurs chants et leurs rires. En harmonie. Ils l'avaient fait, et ce serait sans doute l'un des moments les plus forts de sa toute sa vie, unique tout comme l'était cette inconnue un peu étrange, Nessa.
Presque sur la pointe des pieds, elle se dressa jusqu'à lui pour lui murmurer un mot. Un seul petit mot par lequel il pouvait pourtant ressentir toute sa sincérité et sa joie. Merci. Elle n'avait pas besoin de le remercier, son sourire le faisait déjà pour elle et puis, ce n'était pas lui qui avait mis le premier un pied sur le bar, il n'avait pas été celui qui avait osé faire ce que personne ne faisait jamais alors si elle tenait vraiment à remercier quelqu’un, ce devait être elle même. Elle avait voulu qu'il lui apprenne, qu'il la guide, mais c'était elle qui l'avait guidé, c'était sa main à elle qui s'était tendu à lui. Ce n'était pas véritablement de l'aide qu'elle recherchait, c'était de la compagnie, une présence, simplement quelqu'un pour prendre cette main qu'elle tendait.
Il lui sourit en retour.
Nessa ne l'attendit pas pour bondir de nouveau sur le premier tabouret face à elle -dans le sens inverse cette fois ci, et la drôle d'impression revint comme un doute qui subsiste. Encore sous le coup de l’allégresse et de la joie qui battait ses tempes il l'oublia une nouvelle fois très vite et descendit à son tour d'une façon certes moins rocambolesque que la sienne, mais bien plus certains de se retrouver en un seul morceau et les deux pieds au sol. Profitant que les tabourets aient été momentanément abandonnés par les clients trop effrayés de voir leur tomber dessus deux drôles d'oiseaux qui ne regardaient même pas où ils mettaient les pieds, Kylian tendit le bras pour en attraper un, le ramena jusqu'à eux et s'assit à coté d'elle dans un soupir heureux.
Il croisa le regard complice d'un marchand venu commander quelques choses au bar, et le sourire d'un autre qui, les fesses bien ancrées dans sa chaise, se tractait jusqu'au bar que le tavernien avait entreprit de nettoyer. Le calme était revenu mais ce n'était pas le même que celui qu'il avait rencontré en entrant dans la batisse, c'était un calme plus joyeux, plus... Leger. Et c'était tout ce qu'il restait de leur folle cavalcade, perché, surplombant toutes ces têtes qui les avaient regardé avec un air un peu ahuris. Une atmosphère, plus joviale et plus guilleret que d'ordinaire, une ambiance simplement, mais ca suffisait.
- Je ne sais pas… si tu as conscience du poids de ce que tu viens de faire. Tu es merveilleux.
Il haussa un sourcil à la phrase qu'elle prononça. Conscience de quoi ? Du poids de ce qu'il venait de faire ? En riant il lui répondit.
- On dirait que je viens de faire un truc super grave la tu vas m'faire flipper !
C'est vrai quoi ! Du poids de quoi ? De ce que danser sur une table impliquait ? N'étai-elle pas la première à n'en avoir rien à faire ? Il avait eu - pendant un court instant seulement- conscience des conséquences que grimper avec elle sur ce bar engendrerait et puis... Il les avait bien vite oublié et c'était tant mieux. L'aurait-il rejoint dans le cas contraire ? Parfois il suffisait juste de se laisser aller et de ne penser à rien, simplement à l'instant présent pour en profiter pleinement, à fond, en profiter comme surement jamais il n'en profiterait plus.
A moins qu'elle ne parle d'elle et de ce que danser sur le bar signifiait à ses yeux. ... Bah, de toute manière ils ne se connaissaient pas vraiment, juste suffisamment et elle avait été la première à faire ce choix alors ca ne le concernait surement pas.
- Et puis rectification ce que nous venons de faire, ne t'oublie pas dans l'histoire chère cavalière.
Dans un regard entendu il pencha sa choppe et trinqua avec la sienne. Il n'avait pas été tout seul à danser, ils avaient été deux. Deux assez fous ou assez stupide pour le faire. Elle en grimpant sur le bar pour y danser sans prévenir et lui en acceptant de la suivre sans plus se poser de question. Et ca avait fonctionné. C'était drôle la vie parfois.
" Tu es merveilleux."
-Wahou, fit-il en riant tu reboost mon égo' la ! 'Me flatte pas trop ou je risque de ne plus rentrer dans mes bottes !
Il en rigolait mais ca avait quelque chose de gênant quand même. Parcequ'elle avait été tellement sincère lorsqu'elle avait dit ca et qu'elle y avait tellement cu. Bien sur il avait toujours aimé voir cette admiration dans les yeux de celles qu'il se plaisait à séduire, ce ravissement qu'elles avaient lorsqu'il s'occupait d'elles comme le parfait gentleman qu'il n'était pas. Mais jamais, oh grand jamais on ne lui avait dit ça. Pas si sérieusement, pas si sincèrement et ca le gênait terriblement. Parce-qu’il ne l'était pas lui, "merveilleux" et ne se considérait pas comme tel, loin de la même si c'était ce qu'elle semblait croire. Parce-qu’il était un mercenaire, parce qu’il était embrigadé pour terroriser et menacer des familles qui n'avaient pas payés leur dettes à temps, trahir des alliés plus indispensables et supprimer les gêneurs et merveilleux ne pouvait aller de paire avec tout ca. Il oublia bien vite son embarras puisque le barman visiblement peu rancunier vint reprendre leur commande. Deux bières. Il se félicita de l'initiative de la jolie rousse. Elle savait ce qu'elle voulait maintenant. Une pensée le fit rire. Si tout les alcooliques de Gwendalavir prenaient des bières pour cette même raison, le monde en serait surement plus joyeux ! Il bu à grande gorgée le verre à sa disposition -mine de rien ca donnait soif tout ca !, puis il se tourna vers elle à sa question.
-Un voeu hein ?
Il leva les yeux au ciel, la choppe emprisonnée entre ses paumes.
-Mmmh...
Un voeu. Il en avait tellement, et tellement peu à la fois. La plupart ne concernaient que de petits souhaits, des petits trucs qui faute d’améliorer sa vie, lui allégeraient le coeur, le feraient sourire aussi peut être un peu. Des petits riens, comme le retour du soleil, que ca veste laissée à la salle de garde ait séché lorsqu'il en aurait de nouveau besoin, un ciel dégagé lorsque viendrait le temps de la pleine lune, ne plus être en froid avec Elio... Ca non, il n'en manquait pas. Mais des voeux des vrais, en avait-il vraiment ? Que pouvait-il réellement espérer, que pouvait-il se permettre d’espérer ? Que le Chaos n'ait besoin de ses services que dans trèèèès longtemps ? Qu'ils le laissent encore un peu sous couverture à l'Académie ? Mieux encore, sa liberté ? Des voeux ridicules tout autant qu'impossible. Il était vain d’espérer les voir se réaliser ceux la. Mais des souhaits véritables, même un peu fantasque il en avait. Parce-qu’il avait vraiment envie de se réconcilier avec Elio, ca lui tenait vraiment à coeur même s'il aurait préféré mourir plutôt que de venir le trouver pour qu'ils se réconcilient. Parceque mine de rien il tenait à lui plus qu'il n'osait se l'avouer, ce petit con.
- J'aimerais...
Il commença, observant maintenant les rayures sur sa choppe Puis ils se tourna vers elle l'air réfléchit.
- Non, je sais pas.
Il lui sourit tout à coup.
- En fait si, tout une armada de jolie filles rien que pour moi et de la bière à volonté ! Ce serait pas le pied ca ?
Il se mit à rire. Assurément -et c'était le cas de le dire, ce serait le pied. Après tout c'était le rêve de tout homme non ? Enfin de tout homme...Normal... Il frissonna. Ne pas y penser. Il était en présence d'une jeune fille plus que délicieuse et il fallait qu'il pense à lui. Fuck. Et puis il la regarda, espiègle.
- Tu veux bien m'aider à le réaliser celui la ?
On pouvait reprendre le jeu de la drague subtile maintenant qu'elle était véritablement avec lui et non plus scotchée à ses pensées hasardeuses. En réalité il la taquinait plus qu'autre chose mais qui sait, elle ne cessait de le surprendre.
Je t'ai aidé à réalisé ton rêve, tu m'aides à réaliser le mien ?
[ Un espèce de jaune, orange doré je suppose ]
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| Sujet: Re: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Lun 9 Juil 2012 - 21:30 | | | [Bon sang >< Je suis vraiment vraiment désolée pour le retard, je fais du mieux que je peux pour trouver le temps d'écrire ><]
Et il riait, il envoyait valser, d’un raclement de gorge, ses remerciements trop lourds de conséquences. Il était tout léger, rejetait les symboles et le poids des choses, léger, léger comme une bulle de savon, qui vole, vole, vole, toujours plus haut, hors d’atteinte, virevolte, tourbillonne, danse, légère, légère, légère ! On aurait dit un cerf-volant, les voiles d’un bateau qui se gonflent de joies et de vents, une plume, non, c’est trop lourd, une plume, alors, un filament de plume, un filament écarlate qui serpentait de bonheur.
Il ne comprenait pas ce qu’il venait de faire, l’allégresse qu’il avait mis dans les cœurs ; il ne comprenait pas le poids de cette image, pour elle, combien un simple rire pouvait changer le monde, son monde, le tourner sans dessus dessous et lui redonner l’envie de vivre, au lieu de faire semblant. L’envie de se peindre dessus, de se donner des couleurs, de s’abreuver de soleil, et puis d’aimer. Il était comme le battement d’aile d’un papillon, et, plutôt que de créer un ouragan sur les flots, il avait fait naître un cyclone de gaité. Il ne comprenait pas ; mais elle mettait beaucoup trop de poids dans tout, dans chaque geste, chaque parole, chaque mouvement de l’air et de la terre, et elle en oubliait que, parfois, un geste ne coûte rien, et qu’il ne veut rien dire pour celui qui l’a fait. Elle en oubliait de ne pas donner de l’importance aux choses, en oubliait de se dire que, peu importait, au fond, en oubliait d’accepter les choses telles qu’elles étaient plutôt que de les comparer à un univers fictif, qui n’existait que dans ses yeux intérieurs, inexistant, subjectif, faux, tordu. Le monde était extérieur, il n’était pas le sien, et ce n’était pas son vouloir qui le façonnait ; la seule chose qu’elle pouvait changer, c’était elle, sa manière de remplir l’espace, sa manière de voir, sa manière de s’y mouvoir – et c’est ce qu’elle allait faire.
Il était merveilleux pour ce qu’il venait de faire, il ne voulait pas le croire, il rigolait, comme s’il se croyait infiniment plus bas que ce qu’elle peignait de lui par ses mots, et elle, elle le mettait sur un piédestal, un piédestal en or, et beaucoup trop haut pour lui. Non ; non, non, non. Peu importe qui il était, peu importe ce qu’il avait bien pu faire – il restait qu’il avait dansé sur le comptoir, aussi, il restait son sourire, il restait cette action infiniment précieuse, bien plus que la plus belle des perles de nacre trouvée dans la plus grosse des huîtres des Alines.
Et puis, un morceau de vérité qui était camouflé par le tomber d’un drapé, rideau de velours qu’il venait de soulever lestement de ses doigts de magicien ; elle aussi, elle avait participé à donner naissance à tant de jolis sourires, sur les minois dépareillés – elle aussi.
Elle lui adressa le plus grand sourire qu’elle ait eu de la soirée, alors ; ce n’était plus un sourire les lèvres étirées, accrochés à ses oreilles, qu’avait fait naître l’ivresse de la danse, sur le moment, et qui ne voulait plus s’effacer ; c’était le sourire moins long mais plus profond, qui fait remonter les pommettes, de ceux qui ont de l’assurance, de ceux qui ont confiance en eux, et en les autres. De ceux qui sont profondément reconnaissants.
C’était fou ce que quelques mots pouvaient faire, en bien comme en mal ; combien ils pouvaient influencer un état d’esprit, combien ils pouvaient toucher les cœurs.
Il l’avait soignée sans la connaître et sans le vouloir.
Elle rit à son tour, à la blague qui devait dédramatiser la situation, et les remettre à leur propre niveau, à celui de gens normaux, et non pas à des faiseurs de miracles ; c’est tendrement qu’elle le regarda, en répondant, un peu plus joueuse :
- Tu en rachèteras d’autres.
(De bottes, hein, pas de miracles, ça ça se vend pas trop dans le commerce.)
Elle attendit son vœu avec une curiosité non feinte, sans plus s’inquiéter du danger que sa question pouvait représenter – il pourrait, d’une phrase, les rattacher à une réalité obscure dont elle n’arrivait pas à se dépêtrer. Elle n’y pensait plus ; elle savait bien qu’il n’en ferait rien, lui le feu follet dont les yeux reflétaient autant de lumières, et c’est paisible et enjouée qu’elle attendait.
Il lui arracha un nouvel éclat, à sa réponse – aucun sérieux, comme elle s’y attendait, mais juste encore un peu de plaisir. Elle ne jugea pas son vœu, n’aurait pas pu se le permettre ; ce n’était pas le sien, mais celui de Kylian, et elle n’en fit aucun jugement de valeurs. Elle réfléchit à sa question, sérieusement – mais pas pour savoir si elle voulait l’aider à le réaliser, plutôt pour savoir comment. Peu importait le vœu qu’il aurait fait ; il lui semblait qu’elle aurait voulu l’aider quel qu’il puisse être. Il avait fait naître en elle une envie de réaliser, de s’investir, de créer, qu’elle n’avait plus ressenti depuis longtemps. Même le travail de la forge avait quelque chose de mécanique, à côté de ce qu’elle se sentait prête à faire à ce moment donné. Elle fit un signe de main au tavernier, et fit discrètement couler les espèces trébuchantes de sa bourse à sa paume.
- Bière à volonté pour le jeune homme à mes côtés jusqu’à son départ.
Travailler pour le vieux forgeron, vendre les objets qu’elle créait, voilà qui lui avait rapporté quelques piécettes triangulaires, et elle était trop peu attachée aux biens matériels pour hésiter un seul instant à se départir de ses gains. Voilà une moitié de souhait réalisée ; restait la seconde…
Ses yeux cherchèrent, dans la salle, celles qui pourraient faire l’affaire ; mais c’est que les filles de bonne famille ne couraient pas les tavernes, et que les autres, les habituées, avaient des allures quelque peu obscènes. A une table, à gauche, une fille de paysan, aux cheveux de paille, sage, les mains sur les genoux et un fichu entourant son visage triangulaire ; la brune et la blonde de toute à l’heure, qui lorgnaient maintenant un étranger de passage ; une servante grassouillette aux manières amples ; et ce devait être tout, parmi les jeunesses.
Pour l’aider à s’entourer de jolies filles, encore faudrait-il savoir lesquelles approcher. Elle ne connaissait pas ses goûts ; ne connaissait pas la forme des corps qui pouvaient l’attirer ; alors elle demanda, simplement :
- Lesquelles trouves-tu jolies ?
Les convaincre – telle serait sa tâche la plus difficile, mais elle puiserait de tous les moyens ludiques que lui présenterait son imagination. |
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| Sujet: Re: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Jeu 16 Aoû 2012 - 15:41 | | | Elle lui avait sourit et avait même rit à sa suite. Quelque part c'était rassurant qu'elle n'insiste pas dans ses compliments car si tel avait été le cas, sur que ca l'aurait mis drôlement mal à l'aise. Il n'aimait pas trop le congratulations trop sérieuses, trop honnêtes comme elle venait de le faire, surtout lorsqu'elles étaient aux antipodes de la réalité. Mais le fait est qu'elle l'avait regardé, les yeux pétillant et avait rit doucement sans plus chercher à le féliciter. Mieux encore ! Elle lui avait répondu sur le même ton, amusée, d'une façon joviale et naturelle, bien loin de l'air tourmenté et absent qu'elle avaitlorsqu'il l'avait abordé. Il lui jeta un regard en coin le regard rieur et leur deux sourires se répondirent dans le même sentiment d'une gaieté partagée.
Ca pouvait paraître idiot, après tout, ils ne se connaissaient pas vraiment, pour ne pas dire as du tout - A vrai dire il ne connaissait même pas son véritable prénom à cette jolie rousse- mais il avait l'impression qu'un certain lien les rapprochait. C'était comme si depuis qu'ils avaient posé le pied sur le bar tout les deux, une certaine complicité les liait, comme si faire ce qu'ils avaient fait les unissait et faisait d'eux une sorte de... Partenaires ? C'était assez drôle, il n'aurait jamais vraiment imaginé pouvoir imaginer une femme comme étant une sorte de... Camarade, c'était vraiment trop inhabituel et encore moins la jolie Nessa sur laquelle il avait jeté son dévolu ce soir. Bien sur ce n'était qu'une impression et ce n'était pas spécialement vraie, il avait beau avoir cette sensation la, il n'en oubliait pas pour autant la raison première pour laquelle il était venu à se rencontre, ca n’empêche que ca avait quand même quelque chose de marrant. Elle avait de la chance en fait. Car quoi qu'il arrive il se souviendrait toujours d'elle, ce qui n'était pas le cas de la plupart des filles qu' il avait côtoyé, bien peu d'entre elles pouvaient se vanter d'avoir suffisamment attiré son attention et sa curiosité pour qu'il se souvienne encore d'elle aujourd'hui. Pour avoir ses yeux extraordinaires, pensé comme elle l'avait fait, agit sans réfléchir et l'avoir entraîné avec lui envers et contre tout il se souviendrait d'elle. Parcequ'elle était décidément une drôle de fille, et qu'il ne l'oublierait pas de si tôt.
Lorsqu'il lui divulgua son voeu elle rit une nouvelle fois. Il aimait bien la voir sourire. Il aimait bien la voir heureuse. Parce qu’en fait, c'était son voeu à elle d'être heureuse non ? Et il ne pouvait s’empêcher de ressentir une certaine fierté à savoir que si elle l'était ce soir, en ce moment même, c'était un peu grâce à lui et qu'il pouvait se féliciter d'avoir au moins une fois dans sa vie réalisé le rêve de quelqu'un. Le sien à lui n'était pas très original, pas aussi poétique et métaphorique que l'était le sien, c'était en rélalité le rêve de tout homme. Tout du moins de tout homme normal. Un truc simple et efficace et qui le rendrait à coup sur heureux. La bière c'était bon, c'était pas trop cher et c'était frais en un mot: Top ! Et puis, pour ce qui étaient des filles, ils ne pouvait rêver meilleure compagnie que la gente féminine. Quoi de mieux pour l'accompagner que de grands yeux aux longs cils, des poignets fins, une taille gracile et un décolté volontaire ? Non vraiment, c'était le rêve de tout homme. Un truc de base mais à l'efficacité prouvé. Alors il se serait attendu à ce qu'elle le charie un peu à ce sujet, qu'elle se moque un peu de son manque d'originalité ou encore de sa demande trop peu poétique, pourtant elle n'en fit rien ou plutot ce qu'elle fit l'étonna fortement.
Les pièces tintèrent joyeusement en tombant dans la paume du tavernier. L'homme contempla un instant les piécettes, comptabilisant rapidement leur nombre avant de finalement refermer son poing, scellant leur accord. Nul doute qu'il n'y avait pas qu'une petite somme vu le prix de la bière en ce moment :arro:
Hein ?
Ce n'était pas vraiment à ce genre d'aide qu'il avait pensé lorsqu'il lui avait demandé un coup de main à vrai dire. Lui il aurait plutôt pensé qu'elle puisse l'aider pour la seconde la seconde partie, celle qui concernait les femmes et non pas la première. Du coup son geste l'étonna un peu. Enfin pas plus que l'échange qui avait été convenu juste sous ses yeux, c'était une véritable petite fortune qu'il y avait la ! Malgré tout son étonnement passager se transforma très vite en un petit sourire épaté.
- Ma parole mais t'as dévalisé le palais des 'Hil Muran avant d'arriver ou quoi ?
Parceque pour pouvoir claquer autant d'argent d'un seul coup sur la simple idée de maintenir remplit la gorge d'un inconnu, il fallait être sacrément barré ! Ou avoir un sacré paquet de fric ! Finalement il allait peut être reconsiderer l'idée de la noble en fuite après ca.
Kylian en était encore rendu au stade du Je-sais-pas-ce-qui-m'arrive-j'y-comprend-rien-mais-c'est-trop-cool, les yeux posés sur la nouvelle bière que le tavernier venait de poser face à lui quand, sans prevenir, Nessa se tourna vers lui, sa question aux lèvres et l'air le plus serieux du monde.
Il bugua un instant, cherchant la moindre trace d'humour dans ses mots tellement inattendus. Il y trouva un regard mauve déterminé dans ses paroles.
Et il se mit à rire, mais à rire ! Oh Nessa ! Elle n'avait vraiment pas comprit que c'était d'elle dont il parlait lorsqu'il mentionnait la compagnie féminine hein ? A moins d'être effectivement doté d'une naiveté sans pareil, le message était plutôt clair non ? Pas pour elle semblait-il ou alors elle l'avait délibérément ignoré. Qu'importe, il ne lui en tint pas rigueur. Il aurait du s'en douter, c'était une fille spéciale, elle ne pouvait pas être comme toute les autres, à quoi s'attendait-il ! Non vraiment, elle comptait vraiment s'ateller à réaliser son voeu à lui ? C'était pourtant sans sérieux qu'il lui avait répondu, elle avait du s'en douter non ? Avait-elle vraiment l'intention de lui trouver de la compagnie pour ce soir ? Elle avait prit trop au serieux cette histoire de voeu en vérités, mais ses intentions étaient nobles et ca ne rendait son geste que plus adorable encore. Le garde se calma et se tourna vers sa cavalière du soir.
- Tu comptes vraiment m'aider à le réaliser ce rêve hein ?
Il rit de nouveau et avala une gorgée de bière, avant de tendre sa choppe vers Nessa tout en reprenant.
- Tu sais, je devrais pouvoir me débrouiller pour ca t'en fait pas.
Il reporta la choppe à ses lèvres et jeta néanmoins un coup d'oeil à la salle avant de se retourner vers elle dans un sourire malicieux.
- En plus c'est toi la plus jolie ici.
Il lui fit un clin d'oeil et sans lui laisser le temps de répliquer ou de se sentir gênée, il héla le tavernier d'un geste de la main.
- Je crois que quand on offre sa tournée à quelqu'un, on se doit de l'accompagner non ?
Et, pour faire taire à son potentiel refus, il continua.
- De toute manière t'as pas le choix, t'as dit que tu m'aiderais à réaliser mon rêve non ?
Il lui sourit malicieusement et placa la choppe que le tavernier venait de remplir entre les mains de sa partenaire. Il était hors de question qu'elle perde son temps à essayer je ne sais quel stratagème pour réaliser un souhait qui n'était en plus même pas serieux. Ils étaient la tout les deux pour en profiter, alors ils allaient s'amuser et s'il devait se retrouver responsable d'une coupe de cheveux à la Mulan le lendemain qu'importe, parceque ce soir ils ne feraient que profiter de l'instant présent, la réalité du monde les rattraperait bien assez tôt.
[De même je suis vraiment, vraiment, vraiment désolé pour ce retard, je suis inexcusable ] |
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| Sujet: Re: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Jeu 16 Aoû 2012 - 20:32 | | | Elle jeta un bref regard vers lui lorsqu’il parut abasourdi par la somme qu’elle versait, sans réflexion, entre les mains du tavernier. Gêne, un instant – il pensait, peut-être, qu’elle faisait beaucoup pour réaliser un rêve qui n’était pas grand-chose. Mais elle y donnait si peu d’importance, malgré la valeur que pouvaient avoir ces pièces, et puis, c’était si rare, de pouvoir acheter un rêve, qu’elle n’hésitait pas un instant à y mettre le prix.
Quant à l’autre partie de son vœu…
Elle leva les yeux, surprise, au compliment inattendu. Chercha ses prunelles de feu, mais ne les trouva pas – elles étaient déjà reparties se noyer dans la bière. Et puis elle avait une nouvelle choppe entre les mains, et ce fut son regard à elle, qui vint caresser l’écume qui surplombait les flots. La compréhension se fraya lentement un chemin jusqu’à son cerveau, flottant comme un lambeau de brume. Il n’aurait aucun mal à se trouver quelqu’un, qu’il disait – comme s’il faisait ça souvent, comme s’il avait l’habitude. Et puis – il s’était installée à côté d’elle, appuyé sur le bar malgré l’absence de siège ; lui avait déjà dit qu’il la trouvait jolie, dès le début, même, à la réflexion, et avait enchaîné politesses et attentions ; et puis ses yeux qui cherchaient les siens en permanence.
Il fallait être vraiment aveugle, ou flotter dans un autre monde, sur ses nuages – n’importe quelle autre aurait deviné qu’il parlait d’elle, non ? Il avait refusé de rejoindre les deux autres, tout à l’heure.
Alors ce ne serait pas les autres, qu’elle devrait convaincre de répondre aux attentes de son cavalier, mais elle-même – et elle réalisait, maintenant, que ce n’était pas une armada, son véritable vœu, mais juste une bonne soirée en sa compagnie. Parce que, comme il l’avait si bien dit… Pour le reste, il n’avait pas besoin d’elle. Elle sourit. Etrangement, cette conscience nouvelle ne la pressura pas du tout – l’idée qu’il puisse avoir d’autres intentions, en restant avec elle. Il y avait, toujours, la certitude que la soirée ne pouvait que bien se dérouler ; que, si elle voulait partir, il lèverait son chapeau – enfin, non, puisqu’il n’en avait pas, mais un chapeau imaginaire, tout du moins – et la raccompagnerait à la porte, avant de la laisser filer dans un dernier sourire ; que, si elle voulait boire, il l’empêcherait de se couper les cheveux, ou de faire d’autres bêtises bien pires que celle-ci pouvait l’être ; et que, si elle voulait bien se laisser aller dans ses bras, elle y serait bien, et qu’il n’y aurait aucune conséquence néfaste non plus. Peu importait comment se déroulait la soirée, parce que, quoiqu’il advienne, elle ne serait que ce qu’ils avaient décidé, ensemble, qu’elle soit – et s’ils voulaient danser sur le bar, ils dansaient sur le bar, et s’ils voulaient faire l’équilibre contre un mur, ils faisaient l’équilibre contre un mur, et tout était possible, tout était empreint d’une traînée de magie. C’était elle, elle qui décidait, et lui qui la suivait ; et il la suivrait n’importe où avec joie et bonne humeur, et rien ne pouvait mal tourner, parce que c’était lui qui lui avait rendu le sourire.
Et, en même temps que cette conscience des événements, et que cette confiance violine – l’idée, aussi, tout aussi étrange, que ça ne la dérangeait pas, que son regard sur elle ne la dérangeait pas, que l’idée qu’elle puisse être désirée ne la dérangeait pas. Aucune gêne – aucune velléité de fuite, de bafouillages, aucune peur, aucune barrière. La bière, la joie de la danse – peut-être, un peu, mais pas seulement. Il la mettait à l’aise, tout simplement, et elle se moquait bien du reste.
Elle entendait, comme une grosse voix sourde et grondante aux échos déformés par les montagnes et la distance, les discours de moral qu’avaient maintes personnes qu’elle avait pu entendre, ces cinq dernières années ; elle entendait parler de ses dépravés, qui allumait des étoiles dans les yeux des jeunes filles, avant de partir avec leur cœur le lendemain, et de les abandonner sur un coin du chemin. Elle entendait les discours – ceux des nobles qui tenaient tant aux convenances, aux rituels, aux apparences, qui s’outraient d’un geste déplacé, d’un simple regard ou d’un mot murmuré sur un ton trop doux ; mais ils n’avaient jamais fait que l’effleurer, ces discours, comme des feuilles d’automne, ronflement lointain d’un monde à qui elle n’appartenait pas, parce qu’elle n’y donnait aucune importance, dans un sens ni dans un autre ; elle ne condamnait ni les uns ni les autres, se contentait d’elle-même.
Elle-même.
Elle-même qui était tombée amoureuse d’un esprit fier et fougueux, d’un guerrier protecteur et farouche, en bas, dans les cachots, là-haut, sur la vaste étendue d’herbe, là, dans la Cabane de Toujours, un combattant aux yeux bouleversants et aux origines confuses, et avec qui… Avec qui trop de choses pour que ses pensées soient claires, trop de choses pour que les souvenirs ne se bousculent pas, comme des figures dans la foule, si nombreuses qu’il devient impossible de retenir le moindre trait, parce qu’elles bougent trop vite, et s’esquivent entre deux nouveaux passants.
Et qui l’avait quitté. Lui et ses mains badigeonnées de sang, lui et ses yeux remplis de haine, lui et son rictus de colère et ses élans de violence.
Elle n’avait pas vu l’approche de Kylian parce qu’elle n’y pensait pas.
Et c’était comme des événements sans connexion aucune, comme si son passé était une autre vie – comme si les blessures d’Elera ne pouvaient en aucun cas influencer la joie de Nessa, malgré le fait qu’elles partagent et leurs âmes et leurs corps. Nessa n’avait pas peur d’être blessée, Nessa n’avait pas de lendemain. Et puis il y avait quelque chose de réconfortant, aussi, à savoir qu’il ne cherchait rien de plus, dans cette soirée, que cette soirée. Kylian non plus n’avait pas de lendemain. Et puis, surtout – dans l’idée de liberté si chère à ceux de son espèce, il y avait l’idée de ne jamais appartenir à personne.
Elle fit résonner sa choppe contre celle du rouquin.
- J’ai une myriade de choix – il y a bien des façons de réaliser un rêve. Mais boire en ta compagnie est loin d’être la plus déplaisante.
Il dit une autre stupidité, elle l’interrogea de son regard violet, et il lui inventa une anecdote de toutes pièces. Eclats de rire, éclats de joie, éclats de verre de la tasse de lait qui, sous un mouvement un peu brusque, termina sur le plancher ; et le tavernier qui, toujours, face à leurs yeux brillants et leurs pommettes rosies, ne trouvait pas le courage de les réprimander. Elle but, encore, quelques gorgées ; et puis elle se pencha à son oreille. Plutôt que d’y glisser des mots, elle resta là, penchée vers lui, immobile pendant quelques secondes, trop longues, trop courtes. Et puis elle effleura le lobe du bout de son nez, hésita, encore une fraction de seconde ; avant de le laisser glisser, au ralenti, le long de sa joue. |
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| Sujet: Re: Flammes rousses et glaçons bleus [Terminé] Lun 27 Aoû 2012 - 2:56 | | | Il crut intercepter un élan de surprise en réaction à son compliment mais ses yeux s'étaient portés trop rapidement sur le contenu de sa choppe pour que leurs regards ne puissent se croiser. Surprise du compliment ? Surprise qu'il soit si direct ? Ce n'était pourtant pas la première fois qu'il la complimentait de la sorte. A peine arrivé, déjà, il avait entreprit de faire son éloge, rapidement et avec légèreté, séducteur. Sauf, que ca n'avait pas eu l'effet escompté, ses compliment n'avaient pas vraiment fonctionné à ce moment la et avaient glissés sur elle comme sur une carapace invisible. Elle était encore trop dans la lune, trop éloignée de ce qui se passait autour d'elle pour avoir fait le rapprochement entre sa présence et ses mots, et sa tentative était tombée à l'eau. Pourtant il aurait pu croire qu'elle y avait quand même porté ne serait-ce qu'une maigre attention. Après tout, elle s'était souvenu de tout ce qu'il lui avait dit jusqu'à présent, même si en apparence elle avait semblé complètement détachée, alors pourquoi ça moins qu'autre chose ?
Peut être était ce trop habituel à son quotidien pour qu'elle ne prenne la peine d'y faire attention, trop courant, banal comme une formule de politesse pouvait l'être. Ou peut être qu'elle n'avait simplement pas relevé. Oui voila, tout simplement. En tout cas elle ne l'avait pas gardé à l'esprit, ou alors n' avait pas pesé suffisamment le poids de leur réelle signification. Parce qu’il n'était pas venu la voir par simple bonté de coeur. Pas que.
Et c'était maintenant comme si elle prenait enfin conscience de cela, comme si toutes ses petites attentions et taquineries prenaient enfin un sens à ses yeux. Un sens qu'elle avait omis au départ, un sens différent de la simple sympathie accordé à autrui, un sens caché et pourtant évident.
Il lui jeta un regard en coin tout en terminant sa gorgée. Elle avait le regard plongé au fond de sa choppe.
Mordrait-elle, mordrait-elle pas ?
Elle releva finalement la tête et ce fut son sourire qui l’accueillit, sourire auquel il ne put que répondre par un semblable. Il était rassuré dans un sens, parceque sa -possible ?- prise de conscience ne l'avait semblait-il pas chamboulé plus que cela. Elle le prenait bien, tout du moins en apparence et ca lui faisait plaisir. Non seulement parce-que Nessa ne lui était pas indifférent, -après tout, il l'avait immédiatement remarqué- et qu'il aurait été un peu déçu que l'inverse ne soit pas vrai, mais aussi parcequ'il n'aurait pas voulu que ça gâche la soirée, pas alors qu'il l'appréciait plutôt bien -bien que ce fusse inévitable, il n'allait pas s'amuser à jouer les gentils gentleman jusqu'au bout de la nuit et force est de constater qu'elle s'en serait rendu compte tôt tard.
Sans prévenir, elle frappa sa choppe avec la sienne comme le ferait deux bons amis. C'était ce que l'on pouvait voir au premier coup d'oeil. Kylian y vu un autre signe, plus discret, plus ambiguë aussi. Comme un geste pour sceller un accord qu'ils auraient conclu. Un "Okay, passons une bonne soirée ensemble sans se soucier d'autre chose et laissons nous porter par les évènements". Quant à ce qui se passerait par la suite... Il n'avait pas à envisager, ils vivaient au jour le jour et seul la tournure que prendrait cette soirée, leur soirée, viendrait confirmer ou non ce regard pétillant. Et elle lui souriait encore et il lui sourit.
- Haha, tu m'en vois ravis !
Il trinqua avec elle de bon coeur et bu de nouveau une gorgée en même temps qu'elle. C'était si simple. De parler avec elle, plaisanter et puis la charrier un peu. Si simple, sans soucis, sans problème, sans engueulade ni jalousie. Une relation toute simple, basée sur l'envie commune de profiter de l'instant sans se prendre la tête, sans réfléchir. Sans avoir à peser ses mots ou ses gestes, ni faire attention à ses regards, s'amuser. En profiter simplement. Ils burent encore une gorgée, plaisantèrent de nouveau et le bol de lait foula le sol, nouvelle source de taquinerie. Ils rirent, une nouvelle fois, et leur choppes respectives se vidèrent encore un peu plus. Et puis, en reposant son verre sur le bar, il la sentit se rapprocher et sans bouger il la laissa venir.
Un souffle, régulier. Son visage tout près de de son oreille, ses lèvres tout près de sa peau. Hésitante, aguicheuse. Il la laissa glisser ses lèvres le long de son visage sans pourtant le toucher, frôler son oreille, puis se dérober sur sa joue. Leur yeux se croisèrent. Une seconde ? Non, plus rapide. Et dans cette même harmonie qui avait guidé leur pas sur le bar, leur têtes basculèrent dans un même ensemble et leur lèvres se joignirent, s'écartèrent, s'embrassèrent. Et sa main vint agripper sa nuque, tandis que leur échange devint plus prononcé, capturant avec elle quelques mèches du même rouge que lui.
Et tout à coup, un coup de coude, un coup de bras ou qu'importe et la choppe de Nessa vacilla. Ils s'écartèrent alors d'un même élan, les yeux rivés sur le verre qui tanguait sans pourtant chercher à le stabiliser. Tombera ? tombera pas ? Elle chancela encore un instant, tournant sur elle même sans se décider à chuter ni à s'équilibrer. Et eux, continuaient de la fixer, chancelante, comme si la seule force de leur volonté suffirait à épargner une seconde chute. Elle se stoppa. Kylian jeta un coup d'oeil à sa comparse et puis pouffa.
- Un peu plus et on était à deux verres brisés ! Pour l'autre truc j'dis pas mais pour la bière.. !
Il lui sourit, moqueur et puis rapprocha son visage du sien une fois de plus.
- Mais comme c'est alcool à volonté...
Il lui fit un clin d'oeil puis, le sourire aux lèvres il heurta sa choppe contre la sienne presque vide. S'en étonna et s'en réjouit en même temps. Tout en se redressant il la regarda, taquin, montrant du regard son gobelet.
- Elle est trop vide, ce devait être pour ça. 'Va falloir la terminer pour pouvoir la remplir.
Nessa reporta la choppe à ses lèvres suivant ses indications et en but une gorgée. Il haussa un sourcil, la mit au défis.
Entièrement qu'est ce que tu crois.
Et elle ne se démonta pas. Elle reposa sa choppe, vide, sur le bar et il était déjà près d'elle, légèrement surélevé, deux doigts glissant tout contre sa mâchoire. Et, le sourire aux lèvres il glissa à son oreille, comme elle l'avait fait un peu plus tôt avec lui.
- Quelle bonne descente, je suis impressionné.
Il la sentit sourire.
Elle était joueuse, tout comme il l'était. Vient, amusons nous ensemble encore un peu, avant que la nuit ne nous recouvre. Sans lendemain.
Dehors il avait arrêté de pleuvoir et bien que les nuages cachaient toujours le ciel, menaçants, on pouvait apercevoir en regardant bien, une ou deux étoiles scintiller. |
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