D’une main experte, Edel traça une courbe parfaite sur la carte posée sur son bureau. Penchée au dessus, son regard scrutait les moindres détaille du vieux parchemin. Distraitement ses doigt portèrent le crayon à ses lèvres alors qu’elle réfléchissait, puis se dicida enfin quand à la réponse qu’elle allait donner au sergent de la 5ème troupe, juste là prêt d’elle, toisant le plan lui aussi, enfin presque…
_Restez concentré soldat ! - La rappela –t-elle à l’ordre, alors qu’il lui semblait supportait des regards indiscrets. L’homme se redressa tel un piquet le visage contrarié d’avoir manqué à son devoir - C’est bien de cet endroit que je désir avoir un rapport détaillé sergent. – poursuivit-elle d’une voix égale en désignant le tracé qu’elle venait d’apposer sur la carte – Dorin ne s’est pas trompé et… ne m’interrompez pas ! – un regard implacable se ficha dans celui du soldat qui se figea d’avantage, la bouche encore entre ouverte par le désir d’une réplique qui ne vit jamais le jour – Par mes plus illustres ancêtres, votre chargé d’intégration aux troupes ne vous a t-il donc rien appris ? – silence tendu, alors qu’indignée Edel tentait de se reprendre. Elle posa son crayon et repris plus calmement – Ce sont mes ordres. Et tâchez de les faire appliquer monsieur Suynen, votre responsable ne m’a pas conseiller de vous affecter à l’élite de la garde sans raison je suppose. Je veux de l’excellence dans cette entreprise, pas moins. Ne le faite pas démentir sur vos capacités.
Quelqu’un frappa à la porte, sur sa droite le coéquipier du sergent inclina la tête et se dirigea vers la porte, mais Emy la femme qui s’occupait de ses appartemants fut plus rapide. De la main elle invita le garde à prendre place dans un siège non loin.
_Je disais donc, votre équipe explorera cette partie du plan. Je ne veux pas de bavure ou d’éléments manquants, soyez rapide et efficaces, ne prenez aucun risque inutile cela dit. Je veux le rapport dans trois jours, passé ce délai si je n'ai toujours rien, ne revenez même pas à l’Académie, c’est un conseil que je vous donne. – regard entendu, les deux hommes acquiescèrent et se tinrent de nouveau debout devant elle. La jeune femme enroula la carte et le tendit au chef d’opération – Ne me décevez pas monsieur Suynen.
Emy se présenta à elle et la première gardienne inclina la tête respectueusement à l’attention de ses hommes au garde à vous, les congédiant de ce même geste.
_Qui est-ce ? – demanda Edel à la servante tout sourire en face d’elle. _Une dame… semblant toute faite de porcelaine madame. – répondit la femme joyeuse – Elle m’a prise pour vous – la femme rougi soudain et porta sa main à sa bouche qui ne pouvait s’empêcher de sourire. _Et bien Emy, durant quelques secondes vous avez été Première Gardienne ! – répondit Edel amusée. Elle sourit à la femme – Alors ? Comment était-ce ? Le poste vous convient-il ? Ne riez pas ainsi enfin, c’est un poste de plus haute importance vous savez ? _Oh je ne rit pas madame – s’excusa la femme – Et puis ce poste ne demande que trop d’usages, me voilà toute retournée alors que je ne l’ai occupé qu’à peine une minute!
Edel rigola et invita la domestique à faire entrer la « dame de porcelaine », la remerciant au passage. Saisissant une pile de parchemin en désordre, elle le posa à côté d’une autre rangée, ne laissant aucun coin dépasser. Attrapant une plume, elle signa à différent endroits, accordant un paiement sur le matériel de ses hommes mis à mal durant la bataille, concluant l’une de ses nombreuses lettres à l’Intendant qu’elle devait informer le plus régulièrement possible, un accord de changement de groupe vigile, un rapport d’équipement…
_Asseyez-vous – invita aimablement Edel, la personne qui venait d’entrer dans la pièce. Elle rangeât les parchemins dans la pile impeccable et leva enfin le regard vers la personne qui venait se présenter à elle – Que puis-je pour vous ? Soyez brève et concise cependant, cette entrevue n’ayant pas été prévue, je n’ai que peu de temps à vous accorder.
Edel prit place derrière son bureau et observa la nouvelle venue. Une jeune fille à l’aspect surprenant, le visage fermé comme ceux que le temps avait fait taire. Des cheveux blancs, comme ceux que le temps aurait fait blanchir, un regard grenat et vif cela dit, où brillait l’intelligence et tout ce que ses traits ne disaient pas. La méfiance s’imposa à Edel, d’elle même. Aucune émotion sur le visage, une posture distinguée détachée de toute humanité presque… une pointe de dédain et un regard de marbre. Typiquement Meryndre… ou tous ceux comme lui qu’elle avait croisée. Mais elle semblait si jeune… elle l’était d’ailleurs. Que faisait-elle ici? N’avait-elle pas un cour quelconque ou un père à qui soutirer de l’argent ? Car elle était noble pour sûr. Elle se tenait aussi droite que Hélène lui avait de tout temps obligée à se tenir. Une droiture qui lui était resté un peu malgré elle et ses frères. Comme une emprunte qui ne s’effacerait jamais. Son regard détailla la tenue, poussé par la méfiance, il était ample, parfait pour dissimuler des armes. Puis elle se souvint enfin qu’elle l’avait déjà vu. Assise à la table des professeurs ? En compagnie d’un professeur ? Une assistante ? Donc pas une élève…
Edel se leva calmement en écoutant la réponse de la jeune fille, et rangea quelques documents dans sa bibliothèque. Elle devenait paranoïaque…mais maintenant tout le monde savait qui elle était… tout le monde savait pour son Gant et la Main Morte, il y avait peut-être encore des infiltrés, elle était en danger plus que jamais. Elle devait suivre son instinct. Prenant un ouvrage, elle retourna au bureau et le posa dessus en s’asseyant. Un livre de géographie avancée, elle en aurait besoin pour des coordonné plus tard, ça tombait bien.
_J’ai confiance en chacun de mes hommes. – répondit-elle après un long silence – En conséquence, on n’entre pas dans la garde comme ça, du jour au lendemain. Plus maintenant. – son regard saphir trouva le froid implacable du marbre parant le jeune regard – La plupart de ceux que je dirige sont de classe moyenne ou pauvre, rare sont ceux sachant lire et écrire et pourtant… - sont regard glissa vers une pile de parchemin soigneusement rangé dans la bibliothèque, avant de revenir à la jeune fille – tous, ont trouvé le moyen de me faire parvenir leur demande d’intégration par écrit. Signe premier d’une excellente motivation. Aucune de ces lettres ne fait mention d’une demande concernant l’intégration d’un élément de sexe féminin. Remettez-moi cette lettre. L’exercice de mes hommes n’est pas sans inconvénient et se révèle souvent pénible. Trois mots régissent leurs rangs, trois mots que tous doivent savoir par cœur « Respect, Discipline et Cohésion ». Je ne tolère pas l’indiscipline, l’irrespect d’autrui, des ordres, règles ou de sois, m’insupporte et enfin, il me semble plus que nécessaire, que des liens forts, durables et positifs se créer entre eux pour un travail collectif plus performent. J’attends l’excellence mais je sais cependant me montrer tolérante. Je n’hésite jamais à renvoyer pour incompétence, je n’engage jamais quand ma première impression est la méfiance.
Edel qui ne cillait pas, s’arrêta sur cette dernière phrase très explicite, du moins elle l’espérait. Elle ne savait pas si elle serait capable d’accorder une place à cette fille… avant comme après épreuves de sélection. Mais ne devait-elle pas non plus laisser sa chance à tout le monde ? Elle devait en parler à Locktar, il était là depuis plus longtemps qu’elle, il saurait lui en dire plus. Et puis un tour chez l’Intendant également, savoir ce qu’elle pourrait apprendre de plus sur cette fille mystérieuse.
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