Le joueur de flûte (RP terminé)

( Portique Est =>>)

En suivant l’Ode au Rire vers Hamelin les plaines qui entouraient l’Académie, Elera réfléchit à ce qui venait de se passer. Elle avait cru que Locktar aurait compris la leçon, mais visiblement, il ne comprenait toujours pas le talent du marchombre tellement représentatif des lupus… A son grand malheur, elle n’avait pas pu les prévenir de l’arrivée de Valen, ne l’ayant pas vu elle-même. Et maintenant… elle se demandait si elle n’aurait pas du intervenir, au lieu de simplement observer comme elle en avait l’habitude. Apprendre l’humilité au Corbac, oui ; le rabaisser comme venait de le faire le demi-faël ? Pas si sûr… Mais elle n’était qu’une élève, ce n’était pas à elle de décider de ses leçons. Il y avait le nouveau aussi, qui avait osé lever le ton sur Valen sans en subir les conséquences, à la grande surprise de la lotra. Il y avait quelque chose à propos de lui… Comme s’il n’avait pas de masques. Et Dame qu’elle avait appris que les humains avaient des masques ! Mais il en restait certains qui restaient naturels, quoiqu’il arrive… comme Arro. Alors elle continua à fredonner, le sourire aux lèvres, pensant à tout ceux qui avaient dû la chanter avant elle jusqu’à ce qu’Arro s’arrête.

- Comment peut-elle avoir été oubliée avec le temps, si tu joues encore sa chanson ?

Elera n’était pas sûre qu’Arro se souviendrait qu’elle parlait de la caste de guerriers du chant, vu qu’ils avaient passé pas mal de temps sans parler, l’un parce qu’il n’arrivait pas encore à discuter et jouer de la flûte en même temps (et oui, même le XDieu n’y arrive pas, mais ce n’est qu’une question de temps, il lui faut juste un peu d’entraînement =p), l’autre parce qu’elle préférait écouter.

- Cette mélodie effleure le ciel et s’infiltre au cœur de la terre… Ceux qui en ont fait leur philosophie ne seront jamais oubliés tant qu’il restera quelqu’un pour chanter leurs vies et comprendre leurs notes.

Elera fronça les sourcils. Comme quelqu’un d’attaché sous la mer en train de se battre pour remonter à la surface, il lui semblait qu’une vague s’apprêtait à rejeter un souvenir sur le rivage de sa conscience. Elle commença à fredonner à nouveau, une chanson différente, moins gaie que celle d’Arro, mais porteuse d’espoir.

- Des étoiles dans les yeux…

Un morceau de paroles lui revint avant de repartir vers les profondeurs. Où avait-elle entendu cet air ? N’arrivant pas à mettre le doigt dessus, sa voix mourut en un dernier tourbillon, puis elle leva les yeux vers Arro, se demandant ce qu’il pensait de ce qu’elle avait affirmé plus tôt.

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C’était une belle journée… après s’être retirée de la petite foule qui s’était amassé au portique, Julia était enfin allée rejoindre ses amis, le sourire au cœur, l’enthousiasme dans l’âme et le bonheur dans les veines. Elle s’était plongée dans le parc comme on se plonge dans un océan de merveille.
Durant plusieurs minutes il n’y eu qu’elle, la brise, son souffle, le vert d’une magnifique végétation décliné en une multitude de teintes et autre combinaison de couleurs. Les oiseaux piaillaient joyeusement au dessus de sa tête, nichés dans leurs nids douillés perché à plusieurs mètres du sol, en sécurité au creux de bras d’énorme et robuste conifère et autre espèces de géant des bois. Sur sa droite, une multitude de rayons de lumières avaient réussis à percer à divers endroit, l’épais feuillage des arbres, et s’abattaient harmonieusement sur le sol du bois, rideau de lumière incontesté de ce lieu rendu plus doux à leur présence. Moins nombreux sur sa gauche, ils n’en étaient pas moins présents.
Les yeux perdus dans toute cette somptuosité que Dame Nature avait bien voulu laissé aux être humain qui savait ressentir, Julia était rêveuse et calme comme jamais.
Ses doigts effleuraient presque distraitement mais avec beaucoup d’amour, de hautes herbes ou feuillage de buisson qui arrivait à leur hauteur. Son cœur battait paisiblement, sa respiration était légère, son visage détendu, ses yeux brillaient, son regard heureux. Une brise vint de nouveau caresser sa peau, suivit d’une seconde petite bourrasque plus forte qui souleva doucement les mèches de ses cheveux, échappé de sa longue tresse. Un sourire de bien être se dessina furtivement sur ses lèvres, elle s’arrêta quelque seconde en fermant les yeux pour gouter pleinement à la brise qui lui parlait. Celle-ci tourbillonna légèrement et s’en fut plus avant. Rouvrant doucement les yeux, Julia reprit calmement sa marche au hasard dans les bois, une très faible mélodie monta de ses lèvres, elle laissa le chant faire.

Elle se sentait si bien ici qu’elle en pleurerait ! Cette pensée lui fit sourire à nouveau, alors qu’elle prit l’initiative de cueillir quelque petit fruits dont elle raffolait.
Puis le vent tourna un instant, l’atmosphère changea sensiblement, à peine mais suffisamment pour qu’il communique à Julia de se retourner, sans affolement ni inquiétude, seulement se retourner. Ce qu’elle fit. Un large sourire cette fois illumina son visage. Blanche était là, belle et forte, magnifique et en somme tout à fait époustouflante ! Du regard Julia la salua tendrement, la louve s’approcha un peu plus en réponse, mais pas trop. C’était bien elle ça ! Un mouvement secoua des buissons à gauche, Lupus sortit du taillis et au contraire de Blanche, s’approcha sans restriction aucune, de Julia qui se courba légèrement en le traditionnel salut qu’ils se donnaient. Ses doigts caressèrent doucement le pelage, la jeune fille s’approcha de Blanche et s’assis paisiblement à même le sol. Un moment passé elle s décida à se lever à nouveau, et une envie coutumière de courir l’envahi. La jeune fille se lança à corps perdu dans le vert lumineux des bois, ses deux amis se calquant à sa hauteur, comme à leur habitude. Ils arrivèrent à une petite clairière et Julia se laissa choir dans l’herbe riant doucement, les bras en crois, le regard perdu dans l’étendu bleuté que le ciel formait au dessus d’elle. Elle soupira un instant et à l’arrivé de Lupus, elle entreprit de lui raconter tout ce qui venait de se passer, juste avant qu’elle n’arrive. Il ne comprendrait pas bien sûr ou peut-être seulement ce qu’il était capable de percevoir de ce qu’elle pouvait ressentir. Blanche s’allongea non loin les observant distraitement.

Julia leur raconta absolument tout ! Elera, ce qu’elles s’étaient dit, ce qu’elle pensait à son sujet, Arro quelqu’un de très spéciale, qu’il allait se marier, qu’il était maître marchombre maintenant, que Kushumaï et lui étaient merveilleux, qu’il était un peu fou et complètement ivre de joie. Elle parla de Locktar qui lui avait manqué de respect, de la bagarre qui avait suivit, de l’intervention très convaincante du maître Til’Lleldoryn, du fait qu’elle avait l’impression qu’en ce moment il avait besoin plus que jamais d’assoir son autorité, précisa que ce n’était que son avis.
Tout en parlant elle mimait, bougeait animait ce qu’elle disait, ria de bon cœur quand elle imita Locktar ombrageux en plein rixe contre Arro, et que Lupus s’était brusquement reculé, toute griffe dehors. Un peu déstabilisa par son éclat soudain de rire, Lupus sembla un instant indécis, mais s’assit finalement pour regarder la jeune fille s’agiter en tout sens. Julia raconta aussi avec quel précision plus qu’étonnante le maître d’arme avait fait ployé le grand gaillard de Locktar qu’elle venait d’imiter en prenant la voix la plus grave qu’elle pouvait. Elle leur répéta absolument tout ce que le maître avait bien put le faire, ajoutant de temps en temps à quel point c’était bien pensé et à quel point l’autre avait dû avoir mal dans son corps, dans sa fierté et peut-être même dans son âme si son égaux était trop présent. Elle dit qu’elle irait peut-être le voir à l’infirmerie, leur partagea ses doutes là-dessus et le fait qu’elle espérait qu’Elicia soit déjà au courant. La jeune fille insista ensuite sur toute la prestance du professeur. La vie qui se dégageait de lui, la sagesse qu’on pouvait voir déborder de ses yeux, le charisme entier et presque totalement fini et donc parfait de cet être d’exception. Elle leur communiqua aussi le fait qu’elle désespérait de pouvoir un jour ressembler à cet idéal. Et elle termina en leur disant qu’un nouvel élève était arrivé et qu’il avait était affecté à la maison Lupus.
Elle s’arrêta net dans sa gestuelle enthousiaste et regarda son auditoire entièrement focalisé sur elle, un peu étonné par cette avalanche de son qui venait de déferler de la bouche de la jeune fille, habituellement presque totalement muette, accompagné de geste nombreux et pour la plupart incongru.

Julia ria de nouveau et se laissa tomber assise sur l’herbe, regardant toujours ses deux amis qui ne cillaient toujours pas, bien que la crise semblait être passée. Elle était heureuse de leur avoir dit tout ça, ils étaient comme sa famille, comme quand elle rentrait d’une expédition plein de surprise et que comblée elle rentrait à l’auberge et s’activait à tout raconter à sa tante qui cuisinait et à son oncle qui l’écoutait attentivement avant de lui prodiguer mise en garde et tout un tas de paroles visant à réveiller chez elle, prudence et mesure.
Julia se leva et alla serrer Lupus dans ses bras, et se dirigea vers Blanche pour poser sa main sur la patte de la belle louve. Elle regarda de nouveau tout les deux ses yeux les caressant en un seul mot : merci.
Julia s’enfonça à nouveau dans les bois, flânant regardant, observant, se cachant, surprenant un lièvre qui pensait ne pas être vue et qui détalait en quatrième vitesse puis elle s’arrêta soudainement. Un bruit de voix s’était fait entendre non loin, une voix qu’elle connaissait.

Sans bruit, Julia s’approcha de la source et vit Elera et Arro. Elle eu une petite moue surprise et se rappela qu’ils devaient aller faire un tour. Julia réfléchi un instant et se décida un instant à ne pas se montrer. Elle devait encore allé voir les petits, plus si petits que ça d’ailleurs. Elle alla se retirer, mais Lupus ne l’entendit pas de cette manière. Il avait reconnut Elera et enthousiaste, avant même que Julia n’est put produire le moindre son de protestation, il avait jaillit du buisson pour aller saluer la jeune fille qui avait l’air de discuter assez sérieusement. Julia aplatie sa main en plein sur son visage, une déception assez claire dans son geste catastrophé. Elle n’avait même pas eu le temps de dire ouf, en observant que Lupus n’avait pas sauté sur Elera, que déjà l’animal était assis devant celle-ci, complètement heureux de la revoir. Il n’avait même pas fait attention à Arro qui avait était surpris par cette soudaine apparition.
Bien sûr Elera se douta bien du coup qu’elle était peut-être dans les parages et leva la tête pour la chercher du regard. Levant les yeux au ciel Julia se montra finalement et arbora un faux sourire en les saluant de la main.

_Saluut ! –fit-elle en serrant les dents. *Ils vont croire que j’écoute aux portes maintenant ! Ha ce bougre de Lupus, non je vous jure !*- Et bien… quel surprise…. –* tu parles d’une surprise ^^’’’*- Ben ça alors… -*tu ferais mieux de te taire ma vielle, tu as l’air idiote comme quatre pour pas changer*- silence- *finalement tu devrais combler ce vide affreux, c’est pas plus mal*- Je suis désolée Elera, je n’ai rien put faire, il est sortie aussi soudainement qu’une chute de pierre -*quelle comparaison - -‘ mais c’est vrai que la pierre symbolise bien Lupus là. Sur le coup il s’est montré un peu lourd quand même ^^’’’ faut dire que même si j’avais essayé de le dire de ne pas y aller, j’ai aucune autorité sur lui, et le connaissant, il aurait fallut que je lui saute dessus pour l’empêcher de foncer. Quoi que dans cette éventualité, il m’aurait certainement trainé. C’était pas si mal de ne pas avoir eu le temps de réagir finalement. ^^’’’’’’’ Je devrais enlever ce sourire stupide, on dirait que j’ai une crampe*- Je ne vous dérange pas plus –fit-elle en essayant de reprendre un visage normale, puis s’adressa à Elera- Je dois aller voir les autres… ne le déçois pas ça fait longtemps qu’il espère te voir on dirait. –clin d’œil- Un de ces jours passe les voir toi aussi !

Saluant Arro, Julia se détourna des deux jeune gens. Elle se demandait où les petits pouvaient bien être à cette heure de la journée.
Plusieurs mètres plus loin, Blanche sortit d’un taillis, partiellement cachée par le couvert des feuilles, visible que pour Julia. La jeune fille décida de la suivre. Enfin si Elera n’y voyait aucune objection. Elle se tourna furtivement la tête pour lui sourire mais surtout pour voir ce qu’il en était de Lupus. Il n’avait pas bougé d’un poil mais semblait légèrement partagé, Julia comprenait, le loup savait où elle et Blanche se rendait, mais en même temps il y avait la fille qui savait hurler comme eux… il resta pourtant et Julia décida d’avancer très lentement pour que le loup puisse les rejoindre plus rapidement si il changeait d’avis.
Julia porta à nouveau son regard devant elle, Blanche avait déjà disparut.

Elera sourit à la réponse d’Arro. Deux marchombres, deux interprétations entièrement différente du mot ‘disparu’, et pourtant ils avaient tous les deux raisons… A son explication de la chanson qu’elle avait instinctivement commencé à fredonner plus tôt, Elera fronça de nouveau les sourcils. Elle connaissait déjà cette histoire. Et pourtant, quelques secondes plus tôt, elle n’aurait pas pu l’expliquer. Comme une fleur qui s’ouvre, comme un souvenir qui revient. Où l’avait-elle déjà entendu ? Elle cherchait désespérément mais fut arrêtée dans ses recherches par l’apparition de Lupus. Dame qu’il avait grandi en un an… Oh, bien sûr, il était déjà grand lors de leur première rencontre. Mais près d’un an s’était écoulé depuis, et il lui semblait que Lupus était plus… confident. Il était déjà fier, à présent il avait aussi la force d’un loup mâle qui n’aurait aucun mal à devenir le dominant… Mais avant de lui répondre, elle chercha Julia des yeux. Et la trouva.

*Je savais bien qu’il n’y avait aucune raison de lui dire adieu sous le portique…*

Elle devait parler des louveteaux. Alors elle s’en était occupée, finalement. Tant mieux. Elera se retourna vers Lupus, bougeant à la manière de son espèce, sa voix prononçant des sons qui n’étaient pas des mots. Joie, retrouvaille, question, reconnaissance… Lorsqu’Arro parla et lui tendit la main, elle eut peur que Lupus ne réagisse mal. Il était beaucoup plus sauvage que Khan, mais comment Arro pourrait-il le savoir ? Beaucoup plus fier, aussi, à moins qu’un an ne l’est calmé. A son grand soulagement, tout se passa bien. Voyant Lupus partagé entre deux possibilités, elle lança un dernier gémissement à son intention. Il se leva et s’éloigna enfin pour suivre Julia… A la proposition d’Arro, elle faillit éclater de rire.

- Les loups, je les connais déjà… Si j’ai raison, ils devraient être dans une grotte près des montagnes.

Avaient-ils changé d’antre, ou étaient-ils encore dans cette fissure dans la roche dans laquelle elles avaient découvert les louveteaux ? Julia voudrait-elle bien d’eux ? Pas qu’elle est le choix, Lupus venait visiblement de comprendre qu’il pouvait être avec Julia ET Elera en même temps si elles étaient au même endroit. Il leurs montra le chemin. Elera commença à courir, comme un an auparavant, Marchombre au milieu des herbes, ses pieds dansant avec les vagues de verdure. Elle savait qu’Arro était lui aussi fondu dans la nature, mais suivant son propre chemin qui devait d’ailleurs être au dessus d’elle dans les arbres, quand on fait le singe il faut le faire jusqu’au bout . Ils rattrapèrent rapidement Julia qui marchait, et Lupus la rejoint.

- Passer les voir un de ces jours… Pourquoi pas aujourd’hui ?

A son tour de faire un clin d’œil. En espérant très fort que cette fois, Julia ne refuserait pas… Un peu de temps avec deux lupus, l’une amoureuse de loups, l’autre amoureux du rire, c’était dix fois mieux que de passer l’après-midi en cours… Sans mauvaises pensées pour les merveilleux professeurs de l’Académie, bien sûr

Arro regarda Julia s'énerver puis s'excuser... Il resta calme pendant son temps de parole, retenant sa colère pour la fin de son discours. Enfin elle termina et le regard du marchombre changea, devenant plus dure. Son ton était plus ferme, plus fort et plus coléreux.

-Dit moi Julia... Suis-je fou au point de ne pas savoir ce que sont les loups ? Mon père m'en a appris beaucoup... Et mon ancien maitre aussi... Je sais ce que je risquais ! Mais si je ne les approche pas... Comment veux tu qu’ils s’habituent à ma présence ? J'aime les loups. Et mon père a attendu un peu avant de s'amuser avec la meute... Et il ne faisait pas ça tous les jours ! Il leurs laissait la liberté !

Le jeune homme s'approcha de Lupus qui le regardait d'un air qui en voulait dire long.

-Je sais très bien que je ne devais pas toucher aux petits ! Je savais que Blanche allait réagir comme ça ! Seul Lupus m'a un peu étonné. Mais J'aurais aimé qu'ils voyant que je ne voulais absolument pas de mal. Ce n'est pas des chiens certes... Mais suis-je mieux que toi ? Ne leurs as-tu point donné un nom ? Je trouve que mon père était pareil que toi... Lui ne leurs donnait pas de nom, il ne faisait que leurs offrir un divertissement et de l'entrainement ! Et je n'aurais jamais approché les petits. Je n'aurais jamais tenté le diable... Jamais.

Arro se retourna, énerver. D'un coup de pied il tira dans un caillou qui trainait. C'est avec un ton calme et triste qu'il reprit.

-Crois tu que tu avais une chance de me tuer ? Non ! Pas pour l'instant... Je vous laisse... Je n'ai pas envi d'un autre combat !


D'un saut, il arriva dans les arbres qui surplombaient la scène, le marchombre partie en sautant de branche en branche.

Elera soupira ; elle ne pouvait rien faire pour Arro, et Julia, malgré ses paroles, n’avait visiblement aucun espoir pour Blanche. Peut-être devrait-elle suivre Arro. Mais elle l’avait déjà fait, et il n’avait fait que fuir plus loin, sans même l’écouter. Elle ne savait pas quoi faire pour lui rendre son sourire. Son échec envers Julia était comme un poison dans son sang, et Elera était incapable de faire quoi que ce soit pour le soulager. Il se calmerait seul… Julia. Elle aussi était triste et aurait besoin d’une présence amicale. Mais il n’y avait aucune chance que Blanche ne s’approche si elle cherchait la lupus. Et puis, il y avait ces mots qu’elle avait prononcé avant de partir, lames coupantes enfoncées dans sa chair...

C’est méfiante que j’ai accepté qu’Arro me suive, mais surtout par respect pour toi.

C’était un peu de sa faute… Elle connaissait Arro, sa bonne humeur sans limite, si ce n’était aujourd’hui. Elle aurait dû prévoir… C’était fait, c’était trop tard, elle ne devait pas regretter. Mais elle aurait tellement voulue que les choses ne se passent pas ainsi, pour l’une des rares fois de sa vie… Encore, elle pensait à Marlyn, sa main se posant instinctivement sur le collier noir. Sa vie avait été détruite par les actions et les erreurs d’un autre, tout comme celle de Julia venait de se déchirer, même si à moindre échelle. Echec, encore. Echec qu'elle s'etait promis de ne pas laisser arriver. De ne pas laisser arriver encore une fois... Pensant encore un peu en loup, c’est dans leur langage gestuel qu’elle montra sa soumission et sa tristesse. Mais personne n’était là pour la voir. Elle avait trahi Julia, d’une certaine façon, même si elle ne l’avait pas voulu…

Et pour l’histoire des pas, occupe-toi des tiens Elera avant toutes choses, et certaines histoires ne sont pas bonnes à conter à tort et à travers. Au revoir.

Elle ne lui raconterait pas, elle ne voulait pas la revoir, elle voulait qu’Elera s’occupe de ses affaires au lieu de toujours essayer d’aider les autres. Elle voulait être seule, elle n’avait que faire de sa sympathie… Se cassant les ongles sur l’écorce, Elera réussit tout de même à y graver superficiellement,

Goute solitère
Coulen sur le pasé
Larme

Après ce premier poème, elle ne put s’arrêter. Les mots continuèrent à couler, gouttes de résine sur l’écorce, et elle continua, continua, continua. Elle savait que c’était illisible, mais elle ne pouvait pas s’arrêter…

Flame anté
Keur isolé
Kulpablité

Regar profon
Océen louintin
Tristese

Puis elle leva la tête vers le ciel, et hurla au soleil à la manière des loups. Malheur mi humain, mi sauvage, elle resta longtemps ainsi, mais personne n'y répondit. Alors elle descendit de l’arbre et se perdit dans les bois pour qu’il n’existe plus que le vent…

Arro. Quand il posa sa main sur son épaule, elle se tendit perceptiblement, les sourcils froncés, les yeux durs. Une fois de plus, elle le revit comme elle l’avait vu le premier jour, homme berserk hors de contrôle, danger, danger, danger… et comme à l’époque, ses instincts de survie, d’habitude rares ou inexistants, revinrent en flèche. Alors quand il la prit dans ses bras, elle le repoussa, reculant de trois mètres avant de lui faire face, animale. Elle sursauta lorsqu’il brisa le silence ; Penser… permission… Julia… Duncan… Amie… Colère… Elle ne comprit d’abord pas ce bruit grinçant à ses oreilles, ces sons au concept incompréhensible, puis les mots s’imprégnèrent lentement en elle, réussissant à prendre leur sens.

*Humain. Reviens dans le monde des humains…
Mais c’est trop compliqué ; leurs objectifs contradictoires, leur tristesse, leurs liens. C’est plus simple de vivre au présent, d’oublier les attaches pour que rien ne puisse se déchirer…
Reviens, reviens…*

Par un effort flagrant elle détendit ses muscles, hochant la tête à la proposition d’Arro. Il pouvait venir avec elle… Ce n’était pas envers lui qu’elle ressentait autant d’amertume. Elle aurait voulu le lui dire, lui montrer ce qu’elle ressentait, pour qu’il sache qu’elle ne le rejetait pas, que ce n’était pas à cause de lui qu’elle agissait ainsi, mais à cause de cette incompréhension qui l’entourait inexorablement comme la tombée du soir. Elle fit un pas vers lui, un deuxième. Peut-être pourrait-il lire ces signes minimes. Ils avancèrent ensemble, puis finalement Elera réussit à chuchoter :

- Julia suivra sa voie sans s’occuper de la mienne, et je ne ferai rien pour l’arrêter. Elle est libre.

Elle fit une pause, puis elle le regarda :

- Mais tu as raison. Elle est importante pour moi... Mais je ne pense pas pouvoir l'aider aujourd'hui. Elle doit retrouver Blanche seule... Je vais rentrer. Est-ce que… est-ce que tu peux chercher Julia, toi ? Je sais que tu veux lui expliquer… Si tu la trouves, si tu la cherches, est-ce que tu pourras lui poser une question pour moi, aussi? Demandes-lui... "Qu'est-ce que c'est, l'amitie? Sinon... Tant pis."

Julia se souviendrait-elle du jour ou elle avait pose la question a Elera, dans les montagnes? Se souviendrait-elle de la reponse de la lotra, et de la sienne par la suite? Elera lanca un dernier regard a Arro, melange de confiance et de peine, puis disparut entre les herbes.