Partir ou rester? Telle est la question [Terminé]

Locktar avait trouvé le temps long devant la porte et il avait faillit repartir. Quand la porte s'était ouverte, il fut surpris de ne pas entendre la voix de son Primat. Il entra et il vit une jeune fille accoudée à la fenêtre. Bien malgré lui, il ne pu détacher son regard de la gamine. Il ne savait pas que la maître marchombre avait une fille, car il était sur en la voyant que la gamine était la fille du Primat des Corbac. Quand Ena prit la parole, il sursauta à moitié. Depuis qu'il était entré, il n'y avait eu aucun bruit et Locktar ne s'attendait plus à en entendre. Il tourna la tête vers son Primat et il comprit tout de suite en lisant dans les yeux d'Ena qu'il fallait mieux qu'il ne regarde plus la jeune fille. Regardant la marchombre dans les yeux, il lui répondit:

- Oui, vous pouvez faire quelque chose pour moi. Je suis arrivé avec la certitude d'être un puissant guerrier. Aujourd'hui, je ne compte plus les défaites que j'ai eu à l'académie. J'ai donc compris que l'art guerrier ne suffirait pas à faire de moi un grand combattant. Il faut que je combine la force des guerriers à la rapidité des marchombres. C'est donc pour cela que je suis venu vous voir. Je souhaiterais suivre l'enseignement marchombre en plus de l'enseignement guerrier. Evidemment, je serais très assidu et je ne louperais aucun de vos cours.

Malgré son envie de ne pas décevoir son Primat, il ne pu s'empecher de tourner le regard vers la jeune fille qui regardait toujours vers l'extérieur.

- Je serais présent à vos cours même s'ils se passent en pleine nuit. Je ne suis pas un gros dormeur alors je pourrais supporter la masse de travail.

Il avait tout dit. Maintenant, c'était à son Primat de répondre. Il espérait vivement qu'elle allait accepter.

Pour un peu, elle aurait sourit. La présence d'Anael dans son dos, pourtant, l'en empêcha. Elle fixa longuement le jeune homme à la carure droite. Il était musclé, sans aucun doute, son regard droit et son port lourd laissait deviner un guerrier sans doute pas mauvais. Elle l'écoutait sans trop aproffondir ses paroles, incapable de se concentrer réellement sur la demande. Pourtant, l'imbécilité d'une telle question l'attirait, et lorsqu'il eut terminé sa tirade malhabile et son plaidoyer claudiquant, elle le regarda durement, comme le questionnant sur le sérieux de sa demande. A ceci près que son visage restait froid et las, et ses yeux ternes. Il jeta un regard à Anael et elle dut se retenir de le gifler. N'avait-elle pas été assez claire? Indécise, elle s'approcha de la fillette, qu'elle saisit doucement par la taille. Anael s'accrocha d'abord au rebord de la fenêtre, puis le lâcha et se laissa installer à la taille d'Ena. Fixant Locktar, elle adopta une position d'enfant fatiguée, et posa sa tête sur l'épaule de sa mère, un petit sourire aux lèvres. La perfection de ce geste dans son hyppocrisie serra le coeur d'Ena, qui se hâta de rejoindre la pièce voisine, dans laquelle elle déposa Anael, qui lui lança un regard peiné, cette fois réellement, avant de retourner auprès du Corbac. Elle lui lança un nouveau regard d'acier, et laconique, répondit:

- Ma réponse est non.

Elle resta plantée là, droite.

Deux fois! Locktar avait été obligé de supporter deux fois le regard d'acier d'Ena Nel'Atan. A chaque fois, il n'avait pas su où se mettre ni quoi faire. Il avait bien tenté de soutenir le regard mais il n'a pas réussit à la fixer bien longtemps.

- Ma réponse est non.

Locktar tomba des nues. Il s'était bien sûr attendu à un refus mais Ena avait été tellement rapide dans sa réponse qu'il n'arrivait pas à y croire.

- C'est rapide comme réponse. Pourriez-vous au moins m'expliquer un tel refus?

Locktar était en train d'envisager les possibilités qui s'offraient à lui. Il pouvait rester à l'académie. Allait-il supporter d'autres échecs? Il en avait tellement eu peu avant de venir à Al-Poll qu'il ne savait pas comment il réagirait. Il pouvait évidemment partir pour mettre un terme à tout cela mais il s'était fait de bons amis ici. Il ne savait vraiment pas ce qu'il allait faire. Le guerrier regarda sa Primat. Il pouvait peut être la faire changer d'avis. Elle avait l'air tellement sûre d'elle que Locktar en doutait fortement.

Elle s'en était doutée. Il allait lui falloir une explication, une raison au refus, puisque cela ne lui semblait pas évident, à lui. Elle se sentait lassée par avance. Comment aurait-elle pu savoir qu'il allait revenir dans son bureau, et qu'elle pourrait le punir tout à loisir à ce moment là? Elle se déplaça vers la fenêtre, et laissa ses yeux se perdre au dehors, avant de prendre la parole d'une voix froide et nette.

-Parce que l'Art Marchombre ne s'ouvre pas au premier venu, parce que tes motivations sont viciées et sales, parce que tes promesses d'assiduitées et de travail ne sont pas suffisante.

Elle s'arrêta. Etait-il parfaitement idiot qu'il croyait pouvoir accéder à l'enseignement marchombre par simple plaisir? Elle se retourna vers lui, et lança:

- Je n'accepte ni les prétentieux, ni les modestes. Je n'accepte pas ceux dont le seul but et d'être le plus fort. Si tu n'es pas le plus fort, jeune homme, alors apprends à être vaincus et sache te relever, sans chercher à devenir meilleur.

Un silence un peu gênant suivit ses paroles, et elle planta ses yeux dans les siens avant de terminer:

- Tu ne seras jamais le meilleur. Tu trouveras toujours quelqu'un pour te surplomber, même si tu suit mon enseignement. Alors contente-toi de ce que tu as.

Locktar s'était vivement relevé. Elle n'acceptait pas ceux qui voulait devenir le plus fort? Donc Locktar n'avait pas sa place chez les Corbac et sûrement pas dans l'académie.

- Très bien, puisqu'il en est ainsi, je vous quitte.

Il se dirigea vers la porte du bureau de la maître marchombre.

- Il faut tout de même que je vous dise que je ne quitte pas seulement votre bureau. Je vais très certainement quitté l'académie. Je n'ai apparemment pas ma place parmi vous.

Il claqua la porte vivement. Maintenant, il savait qu'il n'avait plus qu'une seule chose à faire. Il ne lui restait plus qu'à quitter l'académie. Il n'arrivait pas à y croire. Pour être accepté dans cette académie, il fallait se ranger dans le droit chemin, suivre les directives des professeurs sans rien dire. Locktar n'était pas de ceux-là. Il faisait ce qu'il voulait. Dans cette académie, on frappait pour enseigner. Locktar n'avait jamais vu ça avant. Il préférait quitter l'académie avant de devenir un simple mouton à la solde de l'un des professeurs.