Fuite, rage et déchéance (RP terminé)

Dire que Valen était d'humeur exécrable était bien peu de choses. Il parlait à peine, mais son regard et son expression en disaient long... devoir fuir face aux Raïs et aux mercenaires du Chaos était une profonde humiliation, même si ce n'était qu'un repli stratégique nécessaire pour mieux revenir. Le demi-Faël faisait partie de ces personnes qui considèrent qu'elles n'ont pas le droit de se sacrifier en vain... s'il devait mourir les armes à la main, ce serait par nécessité.

Des heures durant, lui et Enoriel se déplacèrent rapidement et aussi furtivement que possible. Valen et sa soeur étaient parvenus à semer leurs poursuivants et à en tuer quelques uns, mais il était à prévoir que la traque reprendrait dès que le Chaos aurait eu connaissance de leur fuite. Arrivés aux pieds des montagnes, les deux Chantelames s'installèrent dans une grotte qu'ils connaissaient bien : ils y étaient déjà venus avec leurs élèves lors d'entraînements. Ils ne pourraient pas y séjourner bien longtemps, mais cela ferait l'affaire pour quelques heures, le temps de se reposer et de soigner Enoriel. Et qui sait, peut-être que des élèves de l'Académie ou des professeurs en fuites auraient le réflexe de venir y trouver refuge pour le reste de la nuit. La Guilde du Chaos devrait d'abord achever la prise de l'Académie, ou sa mise à sac selon leurs objectifs, avant de poursuivre les fuyards et les achever.

Dans l'obscurité, parce que faire un feu était une folie, Valen était occupé à soigner sommairement les blessures de sa soeur. La blessure à la tête était superficielle et nécessitait seulement d'être nettoyée correctement. En revanche, sa blessure à l'épaule était nettement plus grave... il faudrait avoir recours à un guérisseur plus compétent que Valen pour la soigner adéquatement. Le Chantelame n'avait pas le matériel adéquat pour soigner une telle blessure et, s'il était rompu à donner les premiers soins sur un champ de bataille, il n'était pas aussi versé qu'un véritable guérisseur ou qu'un rêveur dans l'art de soigner. Après avoir appliqué un onguent de son invention sur la blessure, il la banda et attacha le bras en bandoulière. Au vu des traits tirés d'Enoriel, la perte de sang l'avait affaiblie...

- Je t'ai sommairement soignée, Enoriel, mais il faudra trouver un guérisseur... je redoute que la blessure ne s'infecte et je n'ai pas le matériel suffisant pour te soigner correctement. Tu as perdu pas mal de sang, mange le peu que nous avons et ensuite repose-toi. Je monterai la garde.

Enoriel n'eut pas le temps de répondre qu'un bruit suspect se fit entendre, provenant vraisemblablement de l'extérieur. Dégainant silencieusement sa dague, Valen s'avança dans les recoins les plus obscurs, traquant la source de ce bruit. Un silhouette se dessina dans la pénombre... trop bruyant pour être un mercenaire du Chaos en chasse. Toutefois, ne prenant aucun risque, le demi-Faël s'assura que la personne était seule et se précipita dessus. Ayant jeté l'inconnu au sol, plaqué face contre terre avec sa longue-dague sur la gorge, Valen lui murmura à l'oreille :

- Qui es-tu? Réponds à voix basse ou je te tranche la gorge!

Ra quel goût amer celui de la défaite ! Enoriel et son frère avait fuit dans le plus grand silence et la plus grande discrétion, tuant quelques mercenaires sur leur passage, histoire de manifester leurs présences. Elle ravalait ses cris et ses pleurs, son épaule gauche était en sang, encore heureux que ce n’était pas le droit ! Même si elle arrivait à se battre avec les deux mains, elle avait bien sûr une préférence pour le bras droit. Ils s’étaient réfugiés momentanément dans la grotte dont-ils se servaient pour certains entraînements.
Ce n’était que provisoire mais peut être que certains élèves ayant fuis les retrouvent là. Pour l’instant, ils étaient seuls et trempés. Une se ces pluies d’orage qui ne prévient pas et vous trempe en moins de deux. Au moins la pluie effacera les marques au sol…La jeune femme pesta, protesta à maintes reprises. Non elle ne voulait pas de soins. Elle allait très bien répéta-t-elle en réprimant un vertige.

Elle ne supportait pas de recevoir de l’aide, même pour des soins car elle se sentait vulnérable. Son sale caractère avait déjà failli lui couter la vie lors de l’attaque des cochons guerriers. Son frère était d’une sale humeur lui aussi, il s’empara de son épaule et lorsqu’elle voulut se débattre, l’agrippa fermement, arrachant une grimace à la blessée. Elle détourna le regard, furieuse tandis que son aîné la soignait du moins qu’il put, avec le pauvre matériel à disposition.
Ils ne voyaient pas grand-chose dans l’obscurité et ils ne pouvaient pas faire de feu pour se sécher. Il était très complexe de se soigner dans ce genre de conditions. La blessure sur sa tête était déjà à moitié nettoyée vu l’eau qu’elle s’est prise sur la tête lors de sa fuite mais son épaule, c’était une autre histoire. Elle était assez grave, profonde et elle avait perdu beaucoup de sang, se qui la rendait fébrile.

Elle n’arrivait pas à calmer ses tremblements et son teint était aussi pâle que la neige alors que d’habitude, elle avait le beau teint hâlé des faëls. Son frère lui tendit de la nourriture qu’elle n’eut le temps de refuser, un bruit dehors, elle s’immobilisa en ramenant une dague contre elle tandis que son frère se précipita quérir le venant.
Elle pouvait entendre leurs paroles alors même qu’elle était à l’entrée. En grimaçant, elle se releva et se traîna dehors, sous la pluie. Elle discerna dans l’obscurité les contours de l’élève. Un élève de sa maison, elle se rapprocha et posa une main sur l’épaule de son frère.

-Je le reconnais, c’est un élève de ma maison. Viens.

Elle rengaina sa dague et tendis son bras valide pour l’aider à se relever. Dès qu’il fut debout, elle eut la présence d’esprit de s’emparer de son arme.
Certes il était élève mais il fallait néanmoins rester méfiant et ne pas reproduire l’erreur de Marlyn, une élève qui avait trahis l’Académie et la confiance d’Enoriel.
Ils entrèrent tous dans la grotte et la jeune femme déposa l’arme de l’élève avec le reste des affaires et le fit asseoir.

-Et maintenant ?

Elle se tourna vers son frère. C’était lui, le plus amène, à diriger le petit groupe. Elle s’en remettait à lui.
Elle vint s’asseoir aux côtés de l’élève et s’enquiert de sa santé.
Voyant qu’il n’avait rien de bien sérieux, elle réussit à faire un faible sourire et écouta avec attention son frère, retenant son bras blessé avec son autre main, réprimant un nouveau vertige. Ses tremblements reprirent mais elle n’y fit pas attention.

- Et maintenant? Je monte la garde, vous dormez. Tu as besoin de repos, Enoriel, et l'ami Einar ne semble pas en condition de monter la garde sans finir par s'endormir.

Rengainant sa longue-dague, Valen avait escorté le jeune Lupus jusqu'à la grotte. Il le reconnaissait à présent : meilleur archer qu'épéiste d'après les souvenirs du Maître d'armes, mais ce n'est pas un problème, ses talents, quels qu'ils soient seraient rapidement mis à contribution. Examinant le jeune homme sans lui en demander la permission, le Chantelame avait constaté avec soulagement que les blessures d'Einar étaient superficielles et les avait aussitôt soignées. Se relevant, il avisa l'arme d'Einar et l'examina, commentant sombrement :

- Un cimeterre raïs... tu ne feras rien de bon avec une arme pareille, Einar Soham. On te trouvera une autre arme... peut-être la seconde épée de ma soeur si elle y consent, elle ne pourra pas la manier.

Se saisissant de l'épée bâtarde de Slynn, le demi-Faël se dirigea vers l'entrée de la grotte, mais se ravisa. Dégrafant sa cape, il la lança à Einar :

- Utilise donc ma cape en guise de couverture, tu sembles en avoir plus besoin que moi. Demain, nous quitterons cette grotte. Une fois l'Académie détruite, ou prise, ils vont probablement dépêcher des pisteurs pour achever les fuyards et les survivants et ils trouveront cette grotte sans difficultés. Vu la gravité de ta blessure, Enoriel, je pense qu'il va falloir prendre le risque de gagner Eoliane, mais j'irai seul quérir un rêveur. Je vais d'abord te conduire à notre refuge et Einar y restera pour veiller sur toi.

La nuit s'était écoulée paisiblement. Comme il l'avait annoncé, Valen avait monté la garde pendant qu'Enoriel et Einar dormaient à poings fermés. Au petit matin, le soleil était à peine levé que le demi-Faël réveillait ses compagnons et, sans manger, ils se mirent en route : Valen avait donné le peu de nourriture qu'il avait à sa soeur la veille.

La marche se fit sans la moindre discussion, sens aux aguets. Le Chantelame redoutait un éventuel piège, aucun pisteur ne semble encore s'être lancé à leur recherche, ce qui était passablement étonnant. Peut-être Einar Soham était-il un traître alors? Mais c'était peu probable, les mercenaires du Chaos les auraient justement traqué pour ne pas démasquer la couverture de leur mouchard. A moins qu'ils ne comptent sur Valen pour tenir ce raisonnement? Il en doutait, mais il ne baisserait pas sa garde pour autant. Une vigilance omniprésente était nécessaire pour survivre et parvenir à ses fins. Sans consulter Enoriel, le demi-Faël annonça sans autre forme de procès à Einar qu'il lui banderait les yeux : ils étaient à moitié chemin à présent.

Faisant tourner le malheureux élève sur lui-même pour lui faire perdre son sens de l'orientation, ils reprirent leur marche jusqu'à la grotte Chantelame. Une fois, à l'intérieur, Valen ôta le bandeau des yeux d'Einar et vaqua rapidement à ses occupations. S'assurant ne pas être observé, il en profita pour mettre ses manuscrits remplis du savoir Chantelame en sureté, dans une cache secrète située près de l'autel. Si nécessaire, Enoriel en connaissait l'existence ; de même que Slynn. Décrochant le fourreau de Daelos de sa ceinture, Valen posa avec délicatesse son arme légendaire sur l'autel... il utiliserait l'épée bâtarde de Slynn jusqu'à ce qu'il soit en mesure de lui rendre.

Entendant alors la question d'Einar, Valen se détourna de l'autel et lança sur un ton ironique :

- Dormais-tu déjà pendant mes explications d'hier? Tu resteras dans ce refuge avec Enoriel et tu veilleras sur elle. Chanceux que tu es, tu ne mourras pas de faim, des rations y sont entreposées. Ce ne sera pas un repas de grand luxe, mais tu auras l'estomac rempli et vous pourrez faire un feu si vous le désirez... la grotte a subi quelques aménagements particuliers et vous ne serez pas démasqués.

S'emparant d'un lien de cuir, le demi-Faël improvisa alors un système pour fixer l'épée bâtarde de Slynn à sa ceinture d'épée et pouvoir la dégainer aisément. Une fois satisfait de son travail, il ceint la ceinture en bandoulière et y fixa l'épée. Le système n'était pas parfait et l'arme balloterait quelque peu dans son dos, mais cela ferait l'affaire pour le moment. Il réalisera un nouveau fourreau pour l'épée une fois revenu, soigner les blessures d'Enoriel était prioritaire. Prenant une besace, il y mit diverses choses utiles à sa mission, reprit sa cape à Einar, et se dirigea vers la sortie de la grotte :

- Je vais aller à Eoliane et ramènerai Amarylis Luinïl si je le puis. Einar, veille sur ma soeur et, surtout, ne sortez en aucun cas de cette grotte!

A ces mots, il s'en fut.


==> Appartements d'Amarylis Luinïl