Le sabre de Sayana [Terminé]

Le demi-Faël avait brisé le sabre de Sayana, l'apprentie déchue. La mesure avait été dure et, même si elle avait été nécessaire, Valen la regrettait. Peut-être la jeune Frontalière s'était-elle tout simplement laissée emporter par l'envie de gagner ou par une montée d'adrénaline...
Dès lors, le Maître Chantelame avait pris sa décision : il lui laisserait une chance de regagner son sabre, mais elle devrait la mériter et s'en montrer digne.

Aussi, le demi-Faël se dirigeait vers la forge de l'Académie, les tronçons du sabre de Sayana soigneusement emballé dans de la soie.
Aussitôt qu'il vit le forgeron, Valen se dirigea vers lui :

- Je vous souhaite une bonne journée, Maître Fandrich! A vrai dire, je ne venais vous demander un service... voire même deux, en fait. J'aimerais vous demander si vous êtes capable de me faire un coffret en bois et en bronze suffisamment ample pour contenir un sabre de cette taille.

A ces mots, Valen montra Daelos, son propre sabre. Tous les sabres chantelames forgés par le demi-Faël présentaient la même forme que le sien, la même courbure, et la même taille.

- Ensuite, j'aimerais vous demander la permission d'utiliser votre forge et ses outils.

- Sayana n'était qu'une apprentie Chantelame, Maître Fandrich, une apprentie déchue... C'est moi-même qui ai forgé son sabre et nul autre ne saura en forger de pareils tant que je n'en revélerai pas le secret de fabrication. Quant à ma requête, j'ai effectivement besoin de ce coffret dans les plus brefs délais. Le temps en l'Académie m'est compté... bientôt, je devrai... faire ce que j'ai à faire.

Valen avait parlé sur un ton à peine plus audible qu'un murmure et il semblait avoir perdu son ancienne assurance et sa fierté. Il n'était plus qu'un Maître qui attend de partir en exil...

Sans perdre de temps, il déballa les tronçons du sabre de Sayana sur une table proche et les disposa de manière à reformer la lame par lui-même brisée. Tandis que Silind continuait à attiser les flammes, Valen dégrafa sa ceinture et enleva sa tunique, révélant un torse musclé en finesse et totalement imberbe. Sur son flanc, il y avait une longue cicatrice qu'il avait récolté en sauvant Alatariel et, de la blessure infligée par Sayana, il ne restait qu'une cicatrice que le Maître d'armes avait tenu à garder.

Alors, le demi-Faël commença à méditer pendant un certain temps avant de se relever pour empoigner la poignée du sabre de Sayana et un éclat qu'il plongea dans les flammes de l'âtre. Tandis que le métal entrait progressivement en fusion, Valen fit retentir un chant étrange... la mélodie du Chantelame. Tirant la poignée et l'éclat des flammes, il les plaça sur l'enclume, empoigna un marteau approprié à ce qu'il voulait faire, et commença sa tâche... sans s'arrêter de chanter.

Bientôt, Valen eut terminé son travail... c'est avec compétence qu'il avait reforgé le sabre de Sayana, mais il n'était cependant pas tout à fait le même. La garde, élégante et pratique, s'était ternie et le demi-Faël avait ajouté une inscription faëlle sur la lame :

" Sayana Elatan, l'Apprentie déchue "

Outre ces détails, le sabre de Sayana était resté fidèle à lui-même et Valen se tourna alors vers le Maître forgeron :

- Maître Frandrich, auriez-vous l'amabilité d'épreuver la soliditié de cette lame?

Quelques jours plus tard, à la date prévue, Valen revint à la forge, ne portant nul autre sabre que celui qu'il avait forgé pour Sayana. Contrairement à son habitude, il parla assez peu. Il s'inclina devant le forgeron en guise de remerciement avant de le payer pour son travail, même si Maître Frandrich n'avait rien demandé.

Emportant le coffret, il s'arrêta soudainement avant de se tourner vers le forgeron et déposa le coffret à ses pieds :

- Vous aviez raison, Maître Frandrich, mes sabres sont de conception très inhabituelle. Ils sont issus d'une technique de fabrication inédite, alliant des techniques faëlles à la technique perdue d'un grand maître de la forge... aucun autre sabre ne pourrait faire ceci.

A ces mots, Valen dégaina le sabre de Sayana et exécuta les mouvements de la Résonance. Alors, le sabre " chanta " et sa lame était secouée d'imperceptibles vibrations. Ensuite, le demi-Faël salua Silind Frandrich avec le sabre avant de le rengainer rapidement et de repartir vers ses appartements, le coffret sous le bras.