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| Nous sommes de la même race, la race des gens qui passent (8) [Terminé] | |
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Messages : 175 Inscription le : 08/12/2009
| Sujet: Nous sommes de la même race, la race des gens qui passent (8) [Terminé] Lun 8 Oct 2012 - 17:32 | | | - E-o-li-ane... E-o-liane... E-o-li-a-neuh ? Tu-tu-tuuuu... Raaa.
Ce mot était décidément une horreur - il avait beau avoir des sons doux, chantants, qui roulent comme la mer sur une langue mouvante, elle ne faisait qu'anticiper les problèmes. Déjà, les Alaviriens d'Al Far avaient tendance à hacher les mots, et à accentuer la dernière syllabe. Et puis, ceux du nord-ouest, eux, tranchaient les voyelles, ne les liaient jamais, lorsqu'elles étaient en mi-mots, et comment pourrait-elle écrire sa chanson, si personne ne prononçait pareil, si personne ne respectait ses rimes et ses pieds ? « Ya » et « I-a », ça n’a quand même rien à voir. Ils allaient lui briser son rythme et casser toute la danse, à force de taper du pied gauche au lieu d’alterner avec le droit ; et même en trouvant un mot semblable, un vers à 12 pieds n'avait quand même rien à voir, au niveau sonorité, avec un verres à (13) pied(s).
Tout ça pour dire, pas aussi facile que prévu, d’écrire une ballade pour la Guilde, et la condition qui lui avait paru la plus « simple » promettait bien des difficultés.
Et puis Shawna aimait, avant tout, le cluejan et le luth - se retrouver à composer sur une flûte à bec pas chère trouvée sur le marché avait quelque chose de dégradant. C'était impossible, de composer une ballade sur un instrument aussi limité. Vivement l’arrivée des Djee à Al Poll – elle s’était renseignée, et elle comptait les jours.
Enfin. Elle avait encore le temps de s'énerver sur ses compositions - pour le moment, elle cherchait plutôt de la matière pour ses textes.
La curiosité l'avait menée, tour à tour, dans un vieux magasin d'antiquités, sur la place du marché, au pied de la statue d'elle ne savait plus quel seigneur, dans la partie souterraine de la ville, et, à présent, c'était vers Eoliane qu'elle se dirigeait. Eoliane - l'une des Confréries des Rêveurs, avec Ondiane, Fériane, et toutes ces jolies compagnies qui riment avec Viviane ; pas de lien, pourtant, entre cette légende et cette autre, en tout cas pas à sa connaissance. Après tout, personne ne savait grand-chose de ces confréries, en somme, à part qu'elles étaient habitées de Rêveurs reclus de la société et réservant leur temps aux soins et à la méditation, ouvrant leur porte aux blessés, et qu'elles pouvaient servir d'asile, terres de neutralité... C'était quand même assez paradoxal, la facilité d'accès, l'hospitalité légendaire, mais, de l'autre côté, la société recluse, le conventicule, les secrets bien gardés.
Il était grand temps qu'elle aille fourrer son nez là-dedans ; après tout, si de légendes elle devait parler, leur confrérie en valait bien une autre, parmi les nombreuses Guildes qui peuplaient le continent. Elle voulait les rencontrer ; et peut-être refuseraient-ils de lui parler, mais elle comptait bien tenter plusieurs approches avant de s'avouer vaincue.
Elle ne comptait pas s'avouer vaincue du tout, d'ailleurs.
Restait à mettre en place sa première stratégie. Parler directement aux autorités de la Confrérie, plutôt à un nouvel apprenti, aux gens dans le coin ?
En fait, non. Stratégie, stratégie, c'était bon pour les soldats, ça, pour Locktar et ses semblables. Elle irait, et puis elle verrait bien sur qui elle tomberait.
Et puis elle avait autre chose à faire, avant.
Sortant une sorte d’attrape-rêve compliqué de son sac, Shawna jeta un œil aux différentes ficelles qu’y avait nouées Trys. Pas de continent, de frontières ; juste des lignes qui se croisent, en toile, sur toute la surface, de manière incompréhensible pour ceux qui ne connaissaient pas le secret des chemins itinérants. S’y accrochaient des plumes, des coquillages, des cailloux – symboles, eux aussi, d’autres choses. Ses ongles accrochèrent un fil rouge, le firent vibrer – Les Djee seraient bientôt là.
Il était temps, à présent, de se créer le sien, et d’y loger ses propres pas, si elle devait partir à la chasse aux légendes. Elle s’installa sur une pierre au bord du chemin, pas très loin de l’entrée de la Confrérie, posant sa flûte à ses côtés. Elan d’enthousiasme, qui traversa ses lèvres par un vieux chant des siens.
- « Ici on est tous des frères Dans la joie dans la misère… »
Elle avait choisi son bois avec prudence – du bois d’Ombreuse, sec, brun doré, branches du même type que du tronc dans lequel avait été creusé son luth. Juste quelques branches, fines ; et c’est de son couteau qu’elle lui avait rendue la couleur pure de son cœur pâle. Assise sur un rocher, elle y noua des fils rouges grossiers de piètre qualité. Ils lui avaient couté chers, ces fils de couleur, et elle tenait décidément beaucoup à finir avec un produit de qualité. Tracer les routes, d’abord ; mais penser, à l’avance, aux villes et aux espaces – les vides étaient peut-être plus importants, encore, que les pleins ou les lignes. Elle s’enleva une perle jaune de ses cheveux, et l’y ajouta, pour représenter sa terre natale.
- « Les filles de joie dansent avec les voleurs… Mendiants et brigands dansent la même danse… »
Le reste attendrait ; elle savait ce qu’elle voulait pour les Hil’ Meredrine, mais n’avait pas encore trouvé l’objet, qui allait lui coûter, lui aussi… Mais les cartes de fils étaient l’un des objets les plus précieux des Itinérants, et il en était toujours ainsi. Il y avait de telles merveilles, dans sa famille ; et elle ne prétendrait pas en créer un aussi beau que celui de Leyah, mais elle comptait bien en faire quelque chose de respectable. Il en serait de même de sa Chanson ; elle espérait pouvoir, de son souffle, réveiller les mêmes sentiments qui se soulevaient quand elle entendait ce Chant qui vibrait dans ses tripes.
Un dernier fil – brun – et elle accrocha sa carte à sa ceinture, la laissant lui battre la hanche droite. Récupérant sa flûte, elle se releva ; remarqua alors la brune qui montait le chemin vers la Confrérie, et l’apostropha.
- T'es rêveuse ? Nan, bon, ben tu m'intéresses pas.
Et elle reprit sa route vers la Confrérie elle aussi, quelques pas devant l’autre, sifflotant à nouveau entre ses dents la chanson qui ne s’était pas arrêtée dans son être.
- « La couleur de ma peau contre celle de ta peau… »
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| | Messages : 359 Inscription le : 08/05/2007 Age IRL : 33
| Sujet: Re: Nous sommes de la même race, la race des gens qui passent (8) [Terminé] Dim 14 Oct 2012 - 23:28 | | | Les paysage d’Al-Poll lui avaient presque manqué, réalisait-elle. Mais ce n’était pas le bon mot, pas le bon sens, rien dans les steppes ou les forêts sombres du nord n’avaient réellement d’échos dans son cœur. Et l’été adoucissait la beauté épineuse du givre ; les couleurs allaient mieux au faste du sud. Même les montagnes semblaient moins noires, moins vertigineuses. Ca avait été un défi d’en escalader certaines – mais que sont les défis, pour les marchombres ? Après certaines limites, il semble que les seuls qui restent soient imaginaires, très intérieurs. Et puis ces couleurs… A Al-Vor, Al-Jeit, et leurs sœurs, elles auraient encore semblé fades, froides. Mais dans le Nord, tout ça, ça avait des allures de caricatures. Ambre haussa les épaules, mal à l’aise. Le nuancier lui rappelait trop de choses. Quelque chose en elle aurait préféré retrouver la nudité ambiance, son ascète de pays à la fois sauvage et en ravages perpétuels. La guerre de ses paysans pour en extraire du sol les richesses. Les sèves un peu âcre qui végétaient dans les caves, qu’on reservait, comme des grands crus, au coin du feu. Cracher dessus pour tout allumer. Ambre savait où étaient une partie des mines d’extraction Naeëlios. Bien sûr. Ca aurait fait rire les Roche Grises, de le savoir, mais assez jaune. On trouve les plus belles pirres aux frontières du pays Raïs, là où la terre est dépouillée de tout ce qui n’est pas profondément pur. Pur et dissimulé précieusement dans les carapaces les plus dures. C’est ainsi qu’on est fait, c’est pour ça qu’on se taille. Elle avait son ombre, pour ternir le sol, un petit horizon tout à sa mesure- quelque chose de la croche, dans son pas de marcheurs, malgré les foulées longues, et l’expression marmoréenne. Le visage impassible des passeurs – leur silence.
Seule, à nouveau, la simple idée de revoir les murs d’enceinte de l’Académie lui avaient donné la nausée. « Il revient, le héros, il revient tandis que sur la vaste mer… »
Elle secoua la tête chassant au loin le sud. Le vent portait à son nz des odeurs de médecines, et de thé de grand-mère, arômes comme vieillis, jamais connus ailleurs, jamais connus, depuis les murs. Ambre n’aurait pas songé s’y attacher, assimiler aux odeurs des lauriers les bains de sangs des raï, et la glorieuse statue. A jamais figée, leur victoire étincelait. Ca aurait fait rire l’ermite- et quelque part, c’était en chasse de son fantôme qu’elle laissait aller sa carcasse de caverne en caverne ; de loin en loin. Quelque chose qui voulait croire qu’il était possible d’être éternellement étreinte par la déresponsabilité. Plaise aux dieux l’univers, pour elle, il semblait gigantesque, et ses pieds si petits. Rêvant, jeune fille, à courir après ce temps qui la séparait des terres encore inconnues, des mers qui l’étaient plus encore ; elle y confrontait aujourd’hui ses minuscules ambitions, ses points cardinaux visibles dans le noir seulement, sa boussole de femme laissée. Ais-je vingt, ou trente ans, déjà ? Elle repensait aux paroles du fils aîné, qui lui promettait de l’attendre, à Al-far, dans quelques mois, le temps qu’elle réfléchisse- et elle le faisait. Il avait fait chanter la seule corde qui lui allait à l’âme, celle qui en grinçait encore- plus sur le passé, non, sur l’avenir. Elle se taisait encore ; et les mots prenaient les odeurs sèches des aiguilles de pin, les résines et les boues saumâtres. L’écarlate, au bord du chemin, l’attirait comme le ferait une sirène, vieilles nuances de sang qui ne demandait qu’à battre, encore et encore, au cœur aux tempes. Ca devenait une obsession, ce besoin de sang, comme jadis, elle avait eu besoin des livres, des manuscrits d’anatomie. Elle en avait tant lu, mécompris une foule d’entre eux, au début, dû s’y reprendre à des dizaines de fois, à s’en abîmer les yeux. Il lui semblait quelques fois qu’elle ne pouvait plus voir clair aussi loin qu’autre fois.
Néanmoins, ses pas étaient plus sûrs que les meilleurs cartes dessinées- elle allait à la confrérie, demander l’asile, un temps, plus si affinité. Et s’il y avait du sang dans la boue du chemin, ma foi, elle savait se défendre.
L’apostrophe la surprit pourtant, elle eut un drôle de sourire, un peu perplexe, un peu blasée. Une rêveuse. Elle n’aurait pu accepter la définition, par fierté, par absurde nécessité de ne pas se cantonner à « rester sur place » à « ne se fréquenter qu’entre soi ». Le savoir rendait le rêveur trop sédentaire, trop croupi. Elle regarda ses bottes, se demandant s’il était possible de moins pourrir, en continuant sans cesse de marcher. Destan, encore, sous les paupières, qui disait « Réfléchis-y, je t’en prie. Pense, simplement, à ce que ça représenterait. ..». Cette fois, son sourcil se haussa, à la phrase suivante. Il n’était pas rare de croiser des voyageurs amateurs de grivoiseries, des femmes seules qui en faisaient montre, c’était plus rare. Et quelque chose en Ambre reniflait le déshonneur la dedans- il y a des habitudes qu’on ne perd pas. Et l’attrape-rêve qui lui battait la hanche- au rythme inimitable des pas de marcheurs.
-[olor=indigo]La musique ferait-elle de toi une rêveuse ?[/color]
Elle planta son bâton de marche au sol, dénudant son poignet gauche, qu’elle remua d’une secousse. Les fils entrecroisés en cage autour de la pierre mauve On peut y voir une spirale, ou un monde strié de marque, et les itinérants entre eux ne s’y trompent pas. Mais l’autre, comme le promettaient ses mots s’était détournée, et continuait sa route, et la chanson injuste et rauque- l’origine commune ne pesait qu’un fil de coton au rebond de ses fesses. Ce que ça représenterait ?
Tout à coup, Ambre était assoiffée de questions, d’intérêt pour cette ombre rouge. D’où venait-elle, pourquoi quitter son camp ? Qu’elle ne se laisse pas prendre, les marchombres portent bien leur noms, c’était sur leur propre ombre que leurs pas les menaient. Et l’odeur d’herbes dans l’air lui rappelait qu’elle n’était pas docteur, que chaque tentative d’aide, de faire ouvrir les yeux des êtres les avait davantage fermés- puis éloignés définitivement. Peut-être espérait-elle une drogue ? Quelque chose qui effacerait un don du dessin ? Ambre mordilla sa joue –non, les bâtards de Dame Noblesse et du Roture du coin ne doivent pas être si nombreux, même sur les routes. Lesquels d’entre eux danseraient sur les routes comme de jolies blessure. Le fait était que sa présence noyait le paysage. il y avait longtemps qu’elle n’avait pas croisé son propre regard. Ressemblait-elle toujours à un corbeau ?
-Et si u devais chanter sur autre chose que des insanités ?
Parce qu'au passage, ta voix grince affreusement.
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| Sujet: Re: Nous sommes de la même race, la race des gens qui passent (8) [Terminé] Lun 17 Déc 2012 - 19:03 | | | Ses bottes tapaient joyeusement la terre. Elles étaient dégueulasses, à force, mais bon sang qu’elle était bien dedans. Le cuir de siffleur avait bien des vertus. Plante – plante des pieds sur les semelles, en dessous les cailloux, plantes qui se battent pour un peu de lumière, hors de leurs graines. Deux questions, toutes deux aussi risibles l’une que l’autre. La musique, apanage des rêveurs ? Laissez-la rire. Depuis quand la musique appartenait-elle à quelqu’un ? Shawna jeta un regard vaguement moqueur au-dessus de son épaule. - T’es bourrée de préjugés, toi.Elle pouvait bien parler de préjugés – elle avait baigné dedans dès l’enfance. Préjugés envers toutes les classes sociales, toutes les guildes, sauf celles qu’elle adoptait, et dont elle ne tirait que fierté – elle avait un mépris pour les autres assez phénoménal. Envers ces Dessinateurs qui ne savaient pas se servir de leurs deux mains ; de ces soldats qui ne savaient qu’obéir ; de ces nobles qui voulaient faire semblant de ne pas être attachés aux besoins animaux de la vie ; envers ces gamins des rues qui se vautraient dans leur misère ; envers les mauviettes, les moutons, les amoureux, les sédentaires, les nordiques, envers, envers, envers. Et elle le vivait bien. Bon. Ça n’empêchait certes pas les individualités, mais le monde lui prouvait rarement tort sur la non-valeur des gens, alors… Et puis ses yeux tombèrent sur la Carte. La marcheuse avait noué son compas autour de son poignet, comme si, pour se montrer le chemin, il lui suffisait de tendre l’index dans la direction de son choix. Lueur soudaine, dans les yeux de Shawna. - Ah.Elle était des siens. Et ça changeait tout. Ceux des routes appellent ceux des routes. Peu importaient le passé et l’avenir. Si elle avait appris une chose, avec Trys, c’était bien que les Itinérants étaient de la même famille – avec tout ce que ça pouvait impliquer. La noiraude se décala, d’un pas sur le côté (littéral, bien sûr), et ralentit, pour laisser à l’autre la possibilité de marcher à ses côtés, si l’envie lui en prenait. - J’suis des Djee.Shawna se présentait rarement et demandait encore moins à ce qu’on se présente à elle ; elle se foutait assez vastement des noms. Ceux des compagnons de passage étaient rapidement avalés par l’oubli, de toute façon, et si la personne devait suivre un bout de chemin un peu plus long avec elle, les épithètes lui venaient rapidement à la bouche. Mais l’appartenance aux Familles d’Itinérants, pour ceux capables de les comprendre – c’était autre chose. Quelque part, elle retrouvait davantage l’identité dans les groupes que dans les individus. - Et je dois rien chanter du tout, mais par contre, j’en crève d’envie. Si ça te plait pas – t’as qu’à aller voir ailleurs si j’y suis pas, les chemins sont vastes.Il y avait tout plein de solutions, quand les autres nous cassaient les oreilles. Elle pouvait courir pour devancer la tapageuse, s’arrêter pour attendre qu’elle s’éloigne assez, bifurquer sur un autre chemin. Après tout – la voix de Shawna n’était pas dirigée contre elle, et il n’y a pas besoin de se défendre contre ce qui ne nous attaque pas. Elle, en tout cas, n’allait certainement pas choisir son répertoire en fonction de quelqu’un qu’elle n’avait pas choisi pour faire partie de son audience. Un rire secoua ses épaules, l’espace d’un instant, au passage d’un souvenir – le souvenir d’un midi où elle s’était mise à chanter, et que Keo avait largement protesté contre son choix ; « Nooon, pas encore celle-là, ça fait trois jours que t’arrêtes pas, tu peux pas te renouveler un peu ! » Il s’était immédiatement mis à chanter autre chose par-dessus. Ni l’un ni l’autre n’avaient voulus arrêter et laisser la place à l’autre, et bientôt, c’étaient Dwelan et Shëra qui les avaient rejoint dans leur cacophonie, l’un avec des paroles pour tenter de leurs faire trouver un terrain d’entente et balançant des titres sans logique aucune, l’autre avec une nouvelle chanson d’un registre com-plè-te-ment différent, simplement parce que ça l’amusait, chacun en train de chanter sa propre chanson, ou retombant dans celle des uns ou des autres au gré de leur concentration erratique, et de leurs rires irrépressibles. Ça lui arrivait de chanter pour les autres, et elle adorait, plus que tout, les moments où la musique était partagée avec d’autres. Mais aujourd’hui, elle chantait pour elle-même, et elle avait envie de chanter… Tiens, les chants du pirate Aline, là, Bran. Ouais, bon, sauf qu’elle avait oublié tout le début. Elle commença à tambouriner, en rythme, sur sa cuisse. Insanités ou non – elle ne se posait pas la question. - Pour nous refaire des combats, nous avions à nos repas, des gourganes et du lard rance, du vinaigre au lieu du vin, le biscuit pourri d’avance, et du camphre le matin… Nos prises au bout de six mois… nanana, nana, nana… Un navire plein de patates, plus qu’à moitié chaviré, un autre plein de savates un troisième de fumier… Pour finir ce triste sort, nous venons périr au port, dans cette affreuse misère quand tout l’monde s’est cru perdu, chacun selon sa manière s’est sauvé comme il a pu… |
| | Messages : 359 Inscription le : 08/05/2007 Age IRL : 33
| Sujet: Re: Nous sommes de la même race, la race des gens qui passent (8) [Terminé] Dim 13 Jan 2013 - 19:33 | | | Elle caressait du regard le sourire agacé, la désinvolture des courbes- même les étoffes qui dissimulaient les cheveux de l’autre traçaient les sangles de sourires indifférenciés. Et Ambre quêtait, comme une ermite, ce que l’autre avait gardé sur soi d’autres, ce que seraient les réactions de ce regard, ce qu’il avait à offrir.
La famille lui manquait, même si c’était pour le mieux, et les convois récents avaient encore affermis ses racines. Bien sûr, il y avait eu la déception, sur la fin, et le chantage du fils.. Mais le voyage ? Et les enfants qui courraient dans les jambes ? Le fait d’être jaugée froidement, au premier abord, même, la confortait à la sensation familière de « son peuple ».
Puisque les itinérants étaient les seuls à envisager d’emblée chaque faille d’un produit, d’une personne, puisque c’était la même chose, et creusaient tout au fond, mordaient dessus de toute la force de leurs dents pour voir. L’exclamation, enfin, un peu surprise – pas vraiment de douceur, mais déjà la rugosité d’une intimité que tout pouvait briser, mais que rien n’effacerait, qui avait existé avant le début de leur vie, qui se poursuivrait après. Au nord, le froid, au sud, les pas, à l’est, comprendre, à l’ouest, vendre. Se portant à sa hauteur, Ambre se sentait plus près de ses crevasses internes, plus près, aussi, de ses forces. Elle voyait s’ajouter son pas à celui de la chanteuse. Regarder l’horizon, le profil, du coin de l’œil, plutôt que le dos, ça vous réduisait l’indécence de deux fesses rondes qui se balancent nonchalamment. C’était comme ce nom, qu’elle balançait en première, c’était comme ça que sa voix sonnait le mieux, quand elle incarnait d’où venait la morgue, d’où on avait coupé la racine pour voir naître les orteils.
Bon, elle n’était pas de la caste des bijoutiers, constatait Ambre, qui faisait défiler dans sa mémoire les noms connus, les devises associées, les rancœurs ancestrales. Fallait pas trop espérer, jamais, plus jamais, et de personne.
Elle se demandait, en haussant les épaules, si l’appartenance aux routes était aussi criante dans sa personne, ou si son interlocutrice avait quitté son convoi depuis moins longtemps ? Pouvait-elle simplement être davantage fière ? Le vent souleva les foulards de l’une, les sourcils de l’autre : qui aurait survécu à d’avantage d’orgueil, allons ? On attendait pas son assentiment, alors, comme de juste, elle refusa de le céder, de ployer devant ces désirs qui crevaient l’autre, mais savourant au fond d’elle le poids de l’expression consacrer : en crever d’envie.
Elle était plus jeune, sans doute, beaucoup. Et autre. Mais elle avait la beauté du sang répandu dans une ornière, sur les pavés d’une jolie ville. Et un sourire trop grand, peut-être, que pour que ça plaise réellement à Ambre. L’ivoire qui chutait au sol était gaspillé à jamais. Et elles se sépareraient à volonté, bien sûr. Vastes et noires, les routes qui mènent aux confréries des rêveurs amplis de pénitence. Avec une robe aussi légère, la jeune fille aurait dû claquer des dents, se dit-elle encore.
Djee, ça ne lui évoquait qu’une confiance diffuse, pas les étoffes, pas le Grand Nord. La marchombre ne put retenir un crissement de dents, lorsque la voix reprit sa course folle aux ballades mentales. Ce n’était pourtant pas que les sons produits par la gorge de Shawna la dérangeaient, en soi. C’était un mensonge de prétendre qu’elle n’avait pas une jolie voix. A vrai dire, Ambre ne s’était pas rendu compte d’à quel point elle rattachait sa condition de marchombre-mercenaire au silence. Elle partageait avec Tifen cette solitude fruste dans les relations, cette absence de besoin de définir et se définir. Et quand bien même, se reprit-elle, Tifen était « la famille ». Si elles ne chantaient pas, elles partageaient leurs mélodies intérieures. Au moins un peu. La seule voix qu’elle suivait était la Voie. Les dernières personnes qui avaient osé mettre des paroles sur cette voie étaient Elera et surtout Ena Nel’Atan – et combien, tout alors avait sonné creux.
Elle chassa d’un mouvement de main agacé une abeille qui s’avançait, attirée par l’écarlate des jupes de Shawna, et les idées parasites qui lui étreignaient la tête. C’était étrange, comme elles revenaient systématiquement, lorsque ses pas la menaient au Nord. Comme si la tête essayait de s’éviter de commettre deux fois les mêmes erreurs. Ca avait été une erreur d’aller au nord, d’aller au-devant des maîtres, de forcer la chance plutôt que patiemment l’attendre. « Nous voilà pris dans la brume, Nous échappons aussitôt »
Et comme une malédiction qui se révélait plus claire que prévu, elle comprit que la chanson était un chant de marin. Pas de pirate, nonobstant que le lien se nouait dans sa tête avec étroitesse. La curiosité première sur le vécu de cette fille- sur la provenance de ces chants, si loin de ceux qu’on autorisait durant les voyages, dans son clan. Tout était plus solennel, semblait-il, dans sa famille qu’ailleurs. La gravité des tailleurs de pierres, la sagesse des mines, et l’humour du granit.
Les paroles la prirent, comme la houle se levait dans son cœur, et elle se prit à sourire en oblique de celles-ci, de leur légèreté, si peu compatibles avec le récit, avec le visage marmoréen de l’ermite. Mais pourquoi aurait-il correspondu à la masse informe de sa race, puisqu’ils s’étaient tous deux compris, et, Ambre voulaient le croire plus que tout, trouvés. Consciemment abandonnés, par idéal, pas ascète. Elle avait été au-devant des chemins obscurs du labyrinthe, à découvrir encore, pas au-devant du maître. Quelque fois elle bénissait ce choix, et quelques fois, au souvenir du regard vide et perpétuellement amusé de l’ermite, elle se sentait la volonté de les couper une bonne fois pour toute.
Puis, elle se rappela Lev Mil’Sha, et les promesses faite à ses pupilles avides de tout- et vides, elles aussi, de quoique ce soit. Elle avait su, comme ses prédécesseurs, allumer l’espoir dans cette âme désespérée. Capturable. Elle avait cessé de croire à celles qu’on lui avait fait en promettant elle-même.
Il n’y aurait jamais de fuite vers la mer. Jamais autre chose que l’éclat de compréhension du monde, de l’ironie du monde. Toujours le même refrain.
Ces années-là avaient chassé toutes les autres. Les routes, et les villes, même les plus lointaines n’avaient pas pu laisser à son âme des souvenirs plus forts. Il lui semblait parfois que c’était les seules qui avaient compté, qui avaient été vraies. Les autres, anciennes, s’étaient transformées en résidus, tâches sur le haut de ses bottes. Ca, et quelques cicatrices et habitudes tenaces. Elle fit l’effort de ne pas l’interrompre, quand bien même ça la rongeait. De toutes façons, les notes avaient tiré d’elle tous les fantômes qui dormaient depuis quelque temps – mais d’un sommeil si léger que le pas d’une souris aurait pu les éveiller.
-Pourquoi ?
Pourquoi chanter sur les routes, pourquoi une chanson de pirate, pourquoi la misère, si tu chantes réellement pour toi, pourquoi les chants du pays du Sel, alors que tes pas t’en éloignent ? Pourquoi parler de se sauver comme on peut, pourquoi un peuple de voyageurs avec des pieds en bois, plein de richesses et de grand-voile en passionneraient d’autres que moi ? Pourquoi justement, ça ne t’inquiète pas, de ressembler à un très bel épouvantail, d’amener à toi tout ce qui pourrait bondir, te dévorer la gorge ? Pourquoi tomber si précisément sur ce qui pourrait fâcher n’importe qui dans l’Empire- tout ce qu’en des circonstances autres, à la lecture, par exemple- m’aurait semblé beau, par-delà les règlements ?
-Pourquoi ne pas unir ta voix aux tiens ?
Et déjà ton tambourin me menace, et tes envies meurtrières te portent à taper trop fort une autre introduction – faut-il que ma propre voix également, soit insupportable, mais tu ne serais pas la première à le dire- nous ne sommes qu’à deux, pourtant, et le vent, s’il est vif, ne te fait pas concurrence. Qu’est-ce que tu espères chasser avec ton bruit ?
-Et qu’espérer attirer avec ça, si, lorsqu’un compagnon de route se présente, il t’indiffère, même étant, des tiens? Enfin. A peu de choses près. Je suis une Naeëlios.
Habituée à la taille des pierres brutes, mais plus encore à faire imploser leurs voisines sans valeur. Evidemment, à peine formulés, les mots lui semblaient déjà trop agressifs. Déjà trop incisifs. Déjà moins à propos.
-J’adorerais t’éviter. Mais ce serait faire des détours un peu idiots. J’ai toujours détesté les détours.
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| Sujet: Re: Nous sommes de la même race, la race des gens qui passent (8) [Terminé] Dim 20 Jan 2013 - 11:25 | | | Shawna termina son chant, et soupira d’aise. Ça vibrait dans sa gorge – les vibrations, ça réchauffe. Elle avait une folle envie de café – un café fumant, qui lui brûlerait la langue et noierait son œsophage, qui formerait comme une pierre chaude entre ses paumes glacées ; et puis pourquoi pas des pommes, aussi, des pommes fondues dans un foyer, avec de la cannelle, dessus. Peut-être qu’ils auraient quelque chose de bon à lui offrir, à la Confrérie. Qu’est-ce que ça pouvait bien boire, un rêveur ? Elle les imaginait bien mâcher leurs feuilles de thé. Ses pensées dérivaient – et après l’image de moines mâchant de la menthe comme un troupeau de vaches, dans sa tête, ils se roulaient de l’herbe. Et elle souriait en regardant droit devant elle, si ce n’était pour quelques regards vers le demi-visage de l’autre Itinérante. Les gens n’ont pas la même tête, de profil, et les traits lui semblaient plus clairs, plus faciles à discerner, lorsque le nez se détachait sur un autre décor, plutôt que de se noyer dans la peau. Elle n’était pas partie, et n’avait même pas tenté de la faire taire ; et ça donnait à Shawna un fort sentiment de satisfaction. Comme quoi, elle n’avait dû râler que pour le plaisir de râler. Commun.
Et la conversation qui s’engage, naturellement ; à grand renfort de questions.
- Faudra m’expliquer l’intérêt de suivre un chemin qui nous insupporte, et en quoi faire un détour est une sottise ; t’es si pressée que ça d’arriver, y a tellement à atteindre, au bout ? Ou alors t’es une froussarde qui a peur de te perdre, ou une flemmarde, à la limite.
C’était toujours plus simple de choisir le chemin qui courrait droit, toujours plus simple de choisir celui que l’on connaissait ; ça demandait un effort supplémentaire, de changer ses plans, de peser les risques que l’autre chemin ait autant, voire plus, d’inconvénients que le premier – peut-être un chant en moins, mais de la route en plus. Fallait choisir, boire ou partir. Ça demandait de la bougeotte – et plus elle voyageait, plus elle se rendait compte qu’il n’y avait pas tant de gens que ça pour en avoir, qu’ils étaient tellement à tomber dans la routine familière, dans les habitudes ancrées, des habitudes qui les fatiguaient d’avance mais qu’ils ne changeaient pas, parce que, ça aussi, c’était fatiguant, et qu’ils ne savaient plus se porter. La Djee avait tellement d’énergie, avait fait changer la direction de sa vie tellement de fois, comme une girouette, qu’elle ne comprenait pas. Les Itinérants avaient tendance à avoir moins peur du différent que les autres – mais remarque, elle avait aussi rencontré des marchands droits comme des statues qui ne savaient pas faire sortir leur roulotte des traces qu’elle avait faite précédemment, et qui passaient leur vie à tourner en rond. Cela dit – rien ne lui disait que la Naëelios était de cette trame-là, rien ne lui disait quoique ce soit, en fait. Elle était, pour le moment, comme un chemin dont la poussière n’avait pas encore été soulevée.
- Enfin bon – là ou pas là, moi, ça change rien. Pourquoi diable ne serais-je pas indifférente ? T’as fait quelque chose pour mériter mon attention, peut-être ? Oups, pardon, j’avais pas remarqué.
Et toujours son masque d’ironie dont elle ne se départait jamais ; on pourrait s’en vexer, mais elle n’avait que faire de l’égo des autres, et n’avait pas peur des coups.
- Mais si tu veux me raconter ton admirable vie, vas-y, j’t’en prie, on n’est pas arrivées encore. J’connais pas grand-chose des tiens, à part que mon oncle passe à la mine de je-sais-plus-quoi et qu’il ramène de vos cailloux à vendre tous les deux ou trois ans. Cela dit – t’as l’air bien curieuse de la mienne, pour quelqu’un qui préférerait que je me barre. Ça tombe bien, j’aime bien raconter, moi aussi. Fin, pourquoi, c’est un peu stérile, comme question. Parce que bon, tu peux blâmer le caillou dans ta chaussure ou remonter à la volonté de la Dame et au souffle du Dragon, mais qu’est-ce que ça change ? On s’en fout, quoi.
Et puis Naeëlios ne posait vraiment pas la bonne question ; elle avait vraiment l’air d’une solitaire, là, sur les routes ?
- Fin. Sans raison, donc. Un mélange d’envies et de circonstances, on fait ce qu’on peut avec ce que la vie nous balance. Les vrais miens sont en route pour Al Poll, j’les rejoins dès qu’ils arrivent ; et j’te promets que je continuerai à chanter tout mon soûl quand ils seront là, parce que je n’ai pas plus pitié de leurs oreilles que des tiennes. En même temps, eux non plus, alors c’est donnant-donnant. Mais comme j’ai pas l’intention de me tourner les pouces en attendant… Je suis en quête de légendes, en fait. Pour intégrer la Guilde des Bardes. Pas en tant que chanteuse, je te rassure, ajouta-t-elle d’un ton légèrement ironique.
Elle sauta sur un tronc de sapin tombé à terre, marcha en équilibre dessus, avant de resauter sur le chemin.
- Je vais te raconter une fable ; c’est Nahémi qui nous la racontait, elle voulait qu’on l’aide à planter son potager et Yeleen et moi n’arrêtions pas de rouspéter, normal, y a qu’elle pour aimer le jardinage, quoi. J’ai oublié les vers, parce que ce n’est pas moi la conteuse, c’est elle, mais, l’essentiel y est. C’était l’histoire d’un canard qui voulait faire de la brioche. Alors, il demanda aux autres animaux qui voulaient venir avec elle au moulin ; mais le siffleur avait mal à la patte, le cochon voulait faire la sieste et le cheval broutait. Les canetons l’accompagnèrent et l’aidèrent à porter la farine. Là, elle demanda si quelqu’un pouvait l’aider à tirer l’eau du puits ; mais le siffleur avait toujours mal à la patte, le cochon préféra rêvasser et le cheval était parti en cavale. Les canetons l’aidèrent et ils firent ensemble la brioche, avec des pépites de chocolat et tout. Le canard demanda ensuite si quelqu’un pouvait surveiller le four ; mais le siffleur se plaignit de la chaleur, le cochon d’une mauvaise vue, et le cheval que se pencher pour vérifier la cuisson du pain lui faisait mal au cou. Du coup, c’est encore les canetons qui s’y collent. Ça sent la brioche partout, elle est prête, alors le canard demande qui en veut ; et là, le siffleur accourt comme si ses pattes étaient comme neuves, le cochon est soudain beaucoup plus réveillé et le cheval crève la dalle. Ben le canard il est pas con, il donne de la brioche aux canetons, et les autres les regardent en bavant. Morale de l’histoire : tout ne nous tombe pas tout cuit dans le bec, et j’ai complètement oublié pourquoi je raconte ça.
Air de réflexion – pendant bien une demi-seconde, avant qu’elle ne hausse les épaules. De toute façon, elle avait déjà bien assez monopolisé la parole, et, sait-on jamais, les histoires que l’autre avait peut-être à raconter seraient peut-être intéressantes. Et puis sinon – elle continuerait à monologuer ; elle n’avait jamais eu le moindre complexe quant à faire entendre sa voix plus forte que celle des autres. |
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| Sujet: Re: Nous sommes de la même race, la race des gens qui passent (8) [Terminé] Sam 2 Fév 2013 - 20:50 | | | Le fait était qu’elles partageaient la voix cassante, coupante, les mêmes questions non formulées qui étaient censées piquer la curiosité et la colère de l’interlocuteur- qui avaient le don de vexer tous ceux qui, forcément, n’avaient pas été élevés à l’aide de cette langue-là, qui pousse à faire des choix directionnels d’emblée, à assumer la chute, à continuer d’avancer à pied, plutôt que dans les chariots, dès que les jambes humaines sont capable de supporter le poids de l’enfant.
Il semblait parfois à Ambre qu’elle se souvenait de ces moments où ses minuscules petits pieds peinaient à tenir l’allure des grands, et que des cousins ou cousines, plus vieux, la voyant se traîner plutôt qu’avancer suggéraient qu’elle aille s’asseoir, sur un des boeufs, ou un des chevaux de trait, voir le perron d’une des caravanes. Butées, elles l’étaient toutes deux. Sourdes, aussi, peut-être, réalisait l’Itinérante, en roulant des yeux, sans plus dévisager les courbes sombres du visage de son interlocutrice. Elle avait envie de sourire, plutôt que de râler, mais comme on sourirait à un noble dont on savait qu’il n’achèterait rien.
Les détours, elle en avait subi au travers des mots d’Ena, du silence de l’ermite, des aléas de ses propres spires impossibles à museler. Elle avait goûté les virages, la saveur des revirements, et l’impression qu’ils donnaient de prendre son temps, de retarder le futur en général, et plus sûrement encore, l’arrière-goût des terrains connus, justement. Mais c’était trop de temps à se distraire de l’essentiel. S’accorder le luxe d’une longue ballade d’agrément, c’était comme s’autoriser un long bain chaud, ou… Elle soupira.
Les mots de Destan se mêlèrent à ceux de Shawna, noya leur ironie enfantine sous le contrat qui l’attendrait à Al-Far. Contrat qu’elle pourrait choisir de ne signer jamais, mais dont la soumission seule avait brisé quelque chose. Ce n’était pas important, s’obligea-t-elle a penser, ça ne déterminerait pas tout. Rien ne le pouvait. Rien n’était perdu. Que le temps.
Quelque chose, par contre, retint son attention dans le babillage de Shawna. Les seules peut-être qui parvinrent à elle, qui parasitèrent la suite, encore. Le fait qu’un oncle des Djee vienne dans leurs mines familiales l’inquiétait. On ne dévoilait pas facilement un emplacement. Sauf quand un convoi entier venait à être décimé, et ou dans le cadre d’un mariage. Son cœur manqua un battement. Le mariage, ce n’était rien de grave, que du contraire… mais elle se souvenait de la perte de son poignard, disparu d’entre ses mains. De l’idée que peut-être, les siens s’en étaient allés de ce monde, qu’elle ne pouvait rien en savoir.
Était-ce possible ? S’ils étaient tombés sur une bande organisée, sur une meute de Raïs, oui, bien sûr, évidemment, peut-être avaient-ils même été portés disparus. Les itinérants n’ont pas le droit de disparaître longtemps.. leurs boussoles sont trop fiables pour ça. Elle secoua la tête, chassant l’image du sang, des entrailles des siens, sèchement, et tenta de se raccrocher au récit, comme à une bouée de sauvetage. Les dissonances se succédaient. Bien sûr, c’était trop improbable, la fille n’avait été séparée des siens que par la contrainte, et elle allait les retrouver. Et c’était vrai, l’errance se lisait en elle dans chaque pores. La rugosité, l’esprit, et aussi, Ambre continuait de le déplorer, en écoutant l’histoire, l’insoutenable légèreté de l’être qui croit penser, et ne l’a jamais vraiment fait.
La mémoire de l’oral, quoiqu’en plus, Shawna n’y mettait pas les formes. A vrai dire, la non- mise en forme devait être élevée chez elle au rang de religion. Peut-être l’avaient-ils envoyé au loin, les vrais siens, pour qu’elle apprenne à vouvoyer les nobles, à obéir aux ordres, à se la fermer, de temps à autres. Visiblement, c’était un échec total.
Ca l’amusa, une seconde, l’idée de cheminer avec l’échec d’une autre famille. Mais elle aurait préféré cet échec un peu plus similaire à ce qu’elle-même était. Un peu moins sanguin, un peu plus brillant. Elle ne se voyait pas lui parler de l’attrait qu’exerçait sur elle l’interdit de la bibliothèque d’Eoliane, l’art de guérir les corps, dans ses maigres moyens, dans les convois où elle irait.
Parce qu’elle prendrait la route ; il fallait voir le monde, s’éloigner de l’Académie, vivre, enfin. Sans légèreté, peut-être, c’était sa propre croix d’avoir su lire très jeune, d’avoir aimé l’intelligence, jusqu’à la rendre vicieuse, d’être en tout points bâtarde. Elle s’en voulut encore, d’oser se penser de la sorte, alors que ses parents s’aimaient de la manière la plus vraie qui soient, qu’ils avaient tenté de lui offrir le meilleur, le meilleur d’eux deux. Et qu’il n’en sortait qu’une ombre aux idées flétrissantes, toujours ressassée, malgré la quête de l’idéal, les moyens mis en place pour l’avoir. [/ii]
-Oui, effectivement, on s’en fout, coupa-t-elle.
[i]Elle serait un mauvais barde, sans forme, sans sensibilité à autre chose qu’elle-même, sans possibilité d’être atteinte au plus profond d’elle-même par les choses, ou les gens qui n’étaient pas siens depuis toujours. Savait-elle seulement lire? Qu’importe. Ambre ne pourrait pas plus lui apprendre qu’un autre. Elle se mordit les lèvres, à défaut de les pincer.
-Tu… tu dis que ton oncle …
Le bâton se planta dans la terre, malgré la très légère épaisseur de givre, en un petit craquement, que leurs pas répercutaient. Est-ce qu’elle tolérerait d’apprendre une mauvaise nouvelle de la bouche d’une fille qui serait sans émotion ? Est-ce que c’était pire qu’un regard apitoyé sincère ?
-Sais-tu les circonstances ? Je veux dire, s’est-il marié, ou a-t-il marié un fil ou une fille à ma famille ?
La question se voulait légère, et anodine, surtout, badine, presque. Mais Ambre ne pouvait se résoudre à quitter l’horison des yeux. Elle ne pria pas, elle ne le faisait jamais, voulut ne pas espérer, comme elle refusait toujours de le faire, sans succès. Elle avait dit, et pensé tant de fois, qu’elle ne les reverait jamais, que c’était un au revoir qui était un adieu, qu’elle avait eu sa boussole, et tout l’amour du monde. Que tout ça ne durait qu’un temps. Il FALLAIT simplement partir. Elle avait eu la confirmation, récemment, que même en restant, elle aurait été incomplète. Malheureuse. Elle n’aurait pu s’intégrer d’avantage, mais…
Ca ouvrait un abysse, un abysse de non retour, un effondrement de voie, un trou dans la carte, définitif, inexorable, et le vide qui succédait la question semblait encore plus terrible, donnait son vrai poids à la vraie question :
Est-ce qu’ils sont perdus pour toujours ?
Elle déglutit, le ventre noué par la peur, la peur du manque de mémoire de cette pseudo barde. Quoiqu’il en soit, elle le savait, cette question déterminerait non pas leur relation, mais la suite de cette conversation.
Elle n’était pas sûre de pouvoir la tolérer plus longtemps de toutes manières. Trop de fantômes, dans le nord, déjà, sans y ajouter ceux de ses pairs.
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| Sujet: Re: Nous sommes de la même race, la race des gens qui passent (8) [Terminé] Ven 15 Fév 2013 - 21:32 | | | La question étonna Shawna – elle lui demandait des nouvelles des siens comme si la Djee était plus proche que la Naeëlios de ceux dont elle partageait pourtant le sang. Comme si… Comme si elle ne partageait plus leur chemin. Qu’elle demandait des nouvelles d’une ancienne connaissance, perdue de vue depuis longtemps, mais dont le sort n’est pas tout à fait indifférent. Elle la fixa, interrogatrice, mais l’autre refusait de permettre à leurs yeux de se croiser, et se contentait de regarder droit devant elle, le visage de marbre.
Comment pouvait-elle ne pas savoir si l’un des siens était marié à un Djee ? C’était sa famille, quand même – et les mariages, ça fait quand même partie des grands événements qu’on ne loupe pas, même quand on est un peu en froid, c’était le genre d’information qui remontait toujours par un canal ou par un autre. Ce n’était pas comme si les Itinérants étaient particulièrement discrets et silencieux – quoique ça dépendait aussi des familles, la sienne était quand même un sacré mauvais exemple. Mais entre eux – le bouche à oreille, ils en connaissaient tous les secrets. Si elle se posait la question, c’est que ça faisait déjà un certain temps qu’elle avait largué les voiles – et pourtant elle s’était présentée comme Naeëlios, et pourtant il y avait la carte à son poignet. Peut-être qu’en demandant à Shawna ce qu’elle foutait sans les autres, elle avait simplement projeté sa propre situation sur celle de sa voisine.
C’était triste, quand même. D’avancer seul sur les routes, sans chanson parce qu’on ne sait pas chanter pour soi, et sans personne avec qui partager le bordel au bord des chemins.
Shawna fit la moue ; elle ne savait pas ce que valait l’information qu’elle détenait pour Naeëlios, mais elle ne valait rien pour elle.
Kael avait tenté mille fois de lui faire ingurgiter le principe des affaires – toute chose a un prix, vendre à celui auquel l’autre est prêt à acheter, marchander, marchander, toujours donner moins que ce que l’on reçoit, surtout jouer avec les expressions, faire croire que ce qui a de l’importance n’en a pas, faire croire que ce qui n’en a pas en a, et puis lire les autres, apprendre ce qu’ils veulent, parce qu’une fois que tu connais le cœur de leurs envies, c’est leur âme toute entière que tu détiens entre tes doigts. Plus qu’à serrer le poing, et ramasser la poussière d’or.
Ca fatiguait Shawna – ça demandait trop de réflexion et un trop bon sens de l’observation. Trop d’attention. Trop de tournage vers l’autre, alors qu’elle n’en avait pas assez à foutre, de ce qu’ils voulaient, et qu’elle ne voulait jamais rien d’eux, alors, ce n’était pas bien équitable. Elle était généreuse avec ceux qui lui donnaient envie d’être généreuse, et peste incroyable avec ceux qu’elle méprisait.
Cette fille qui marchait sur la route avec elle, avec ses volontés floues, son avenir insondable, et sa voix cassée et cassante – elle n’avait pas eu le temps, encore, de trouver de quoi la mépriser. Elle n’avait pas voulu lui raconter, finalement, pas voulu se rendre intéressante aux yeux de Shawna – tant mieux ; elle l’aurait trouvé bien prétentieuse, autrement, et son silence même avait de la valeur, comme une pierre précieuse gardée cachée sous la roche aux aspects rugueux. On s’en foutait. On s’en foutait des poules et des canetons, on s’en foutait de pourquoi peau-de-nuit était seule sur les routes en direction d’Eoliane, on s’en foutait de pourquoi peau-de-lune l’était aussi. Par contre, on ne s’en foutait pas, apparemment, que la famille de l’une connaisse celle de l’autre. Alors Shawna, après quelques brèves secondes à avancer sans rien dire, ramenée au silence par son étonnement interne – ou pas, d’ailleurs, elle ne s’en cachait pas non plus -, repris son babillage incessant. Elle aimait décidément bien s’entendre – s’entendre parler et s’entendre vivre. Il n’y avait peut-être pas besoin de brasser du vent pour exister, mais c’était quand même diablement agréable de remplir les vides.
- Mon oncle, se remarier ? T’sais, j’crois que mon cousin Mateo lui pardonnerait jamais s’il faisait ça, s’il remplaçait sa mère. Fin, il le f’ra peut-être un jour, c’est sa vie, hein, et j’l’espère même pour lui. Mais non, ta famille et la mienne ne sont pas liés par d’autres liens que les routes - puis Trys avait limite le couteau des tiens sous la gorge, quand même. Il était tombé sur les mines par hasard en cherchant une source d’eau, et les Naeëlios voulaient être sûr qu’il ne divulgerait, non, divu, divu.. bref, qu’il f’rait pas tourner l’information. Ils réfléchissaient à ce qu’ils allaient faire – puis y a eu une attaque de marcheurs, et Mateo s’est battu comme un taré et a sauvé l’un des tiens, d’un seul bras !
Elle aimait bien rajouter ce petit effet, quand elle contait cette histoire – ça en jetait, quand même, quand on ne savait pas que Mateo était manchot.
- Et puis, bah, ça s’est fini comme toute histoire d’Itinérants, hein, avec un peu de troc et beaucoup de bière. Bon, on est arrivé.
Elle poussa la grille sans une seconde d’hésitation – fit galamment une légère révérence à Ambre pour lui faire signe de passer devant, avant de mettre à son tour les pieds dans les jardins, de jeter un regard aux taillis, puis de jeter une phrase à son dos :
- Pourquoi t’as quitté les tiens ?
Et tu vas où, comme ça, tout droit, les yeux sur l’horizon, à poser les pieds l’un devant l’autre en refusant de dévier ta course d’un millimètre, comme si tu avançais sur une corde raide ? |
| | Messages : 359 Inscription le : 08/05/2007 Age IRL : 33
| Sujet: Re: Nous sommes de la même race, la race des gens qui passent (8) [Terminé] Sam 2 Mar 2013 - 0:42 | | | Quelques secondes, où les images défilèrent dans sa tête- tenter de retrouver l’exacte attitude des corps et des visages, ils étaient clairs, dans son esprits, mais flous à imprimer sur ses rétines. Manquaient les odeurs. Certes, les feux de bois lui évoquaient toujours les siens, de même, la viande de siffleur caramélisée dans le sucre et des épices sèches, l’odeur du vent, lorsqu’il s’engouffrait entre deux pierres, et le lichen, chargé de soleil.
Mais ce n’était pas leur odeur. Pas même un ersatz d’elle. Juste quelque chose que son cerveau connectait aux joies plus anciennes. Pour le reste, c’était quelques fois des silhouettes. Gord Egon partageait avec son père cette manière particulière de se gratter le menton, puis d’en raser la barbe, puisque ça l’avait frappé. D’autres, qui marchaient. A l’académie, elle aimait quelques fois observer les guerriers sans noms, se jouer de leur surveillance absurdes. Ambre n’avait jamais aimé se plier à l’autorité ou à la protection de quiconque. Les murs l’oppressaient assez, sans silhouette pour prétendre qu’on n’avait pas le droit d’y monter. Il n’y avait qu’une règle à laquelle on ne pouvait échapper. Un seul marché dont on n’avait rien en main. On ne pouvait que le délayer, et encore, dans une mesure souvent faible, souvent hasardeuse. Boire, pour l’oublier. Ambre fixait la ligne d’horizon, la bâtisse de la confrérie des rêveurs, qui se dessina brutalement, dans le paysage vallonné de leur marche. On atteignait toujours le bout du chemin un jour. Elle tenta de réprimer un frisson, avança, en sentant le regard scrutateur de l’autre. Pas subtile, mais pas franchement pesant non plus ; et de toutes façons, c’était sans importance. Seuls les faits en avaient. Elle reprit la parole. Avec un tas de noms sans poids pour elle. Ca ressemblait effectivement à du babillage de marchand, pour le coup, peut-être avait-elle sous-estimé la jeune femme. Puisqu’elle ne révélait rien d’abord. Ambre déglutit, sans savoir comment elle pourrait effectivement négocier l’annonce de la mort ou de la survie de ses parents. Quel prix elle pourrait y mettre. Un couteau sous la gorge, peut-être bien , oui.
Peut-être qu’elle le sentit. Comme Ambre se sentit devenir blême quand la sentence tomba. Puisqu’il n’y avait que les routes, entre elles. Dans sa gorge se noua quelque chose, qui l’empêcha de jurer, d’interrompre, de faire taire. Elle ne voulait pas savoir comment. Pas se demander si sa présence aurait pu l’empêcher. On avançait pas, avec ce genre de question, et aucun de ses parents n’aurait accepté qu’elle se torture, pour ce qui était l’issue forcée de tous. Mais Shawna continuait à parler –de cette voix qui se croyait agréable- et ses lèvres sombres comme les ailes d’un corbeau faisaient voler les mots avec tant de légèreté, tant d’inconscience, que ça devenait presque douloureux. Mais assez beau. La liberté glissait dans les syllabes, et effectivment, les voyelles chantaient quelque chose de très pur . Sans doute, ça pouvait plaire. Ou déranger. La liberté dérangeait toujours. Elle en oubliait presque le sens des mots, toute à son tourbillon de souvenirs-aiguilles. Mais sa respiration reprit avec l’évocation du hasard et de la source- en une lente expectoration profonde.
Ca ne voulait pas dire que les siens étaient en vie. Ca voulait simplement dire qu’ils n’étaient peut-être pas encore morts.
Et ça lui suffisait, pour le moment. Elle n’inspira doucement qu’au moment où le flot de paroles s’interrompit, inhalant par ses lèvres entre-ouvertes la saveur de l’air parfumé de plantes médicinales, du fer des grilles, très froid, toujours. Un soulagement intense, et incroyable, lorsque son pied se posa encore
Presqu’étonnée, à l’idée que les siens soient suffisamment adoucis que pour laisser la vie à un intrus- fut-il un grand buveur de bière. Elle songea qu’elle les avait quitté depuis longtemps, suffisamment que pour que son esprit leur prête à tous une inflexibilité qu’elle appréciait, et possédait elle-même. Le clan minier avait, dans son souvenir, un tempérament de pierres. Une force morale et physique terrible, et cette fierté toute particulière aux serviteurs du Dragon, qui extraient les diamants des sols, pour construire l’Arche de la légende, même après leur mort.
Les murs amassaient sur eux leurs ombres noires. Peut-être qu’ils s’étaient montré inflexibles devant leurs pairs vendeurs, simplement pour que la confiance reste ce qu’elle avait toujours été, entre eux. Peut-être festoieraient-ils ce soir avec eux ; avec sa mère qui rirait, en trinquant. Peut-être quelques fils argentés dans ses cheveux : signe de la plus grande richesse à laquelle peuvent prétendre les itinérants. La grimace du visage pâle s’acheva en un sourire. C’était le mieux à penser. Prendre la liberté, même sur les visages du passé, leur permettre, à eux aussi, d’avancer. Shawna lui ouvrit la porte, et s’effaça en parodie galante, sans doute pour rappeler à quel point elle n’était pas pressée, mais rien ne l’obligeait à céder sa priorité. C’était plutôt gentil. Comme d’avoir parlé sans prix. Le sourire s’effaça avec la question, pas vraiment de colère, mais les sourire n’avaient pas leurs places, quand on parlait de la voie, qu’Ambre aimait passionnément pourtant.
Elle hésita, ralentissant la cadence de ses pas, s’attendant à être rattrapée par l’autre. Pas encore, étrangement. Ses lèvres n’auraient pas sû transmettre la légèreté, et la beauté du mot « marchombre », elle le savait. Seulement le paradoxe.-Nous nous sommes quittés, corrigea-t-elle, très doucement, pour une fois. Ils pouvaient être mes parents, et le sont restés, mais je ne pouvais pas être seulement leur fille. Elle retint aussi le « Il fallait » qui lui venait toujours spontanément. Parce qu’à moins d’éprouver soi-même la voie, on ne devait pas comprendre la nécessité, seulement le devoir, au sens autoritaire du terme. -Nos routes divergeaient, c’était une évidence. Ils m’ont fait libre, c'était un cadeau, alors j’ai choisi la mienne. On n’a pas pu les recroiser depuis, nos voies. Ce n’est pas un sujet qui vaille qu’on le traite en chanson. Elle se retourna, les yeux brillants, pour une fois, faire dos au mur, et face à l’autre, à sa facilité d’être rouge et seule sans l’être. Djee n’avait pas de raison de savoir qu’ils ne seraient peut-être pas fiers d’elle. Pas plus qu’elle n’avait à savoir qu’elle était née de sang bâtard, et d’amour vrai, qu’elle sortait d’un convoi, ou espérait secrètement repartir à l’aventure, plutôt que de trouver la maître rêveuse.- Si toutefois tu devais rencontrer un des miens, dans tes prochains voyages… je sais que ce ne sera pas aussi délicieux que de lui chanter la sérénade, juste pour l’agacer, mais… Autour d’une bière, et après le troc. Après lui avoir cassé les oreilles, même, si tu veux. Et si ça ne te sort pas de la tête, bien sûr. Dis leur qu’Ambre…Les aime ? Un petit sourire, presque d’excuse. Puisque ça n’a pas d’importance, et que probablement, tu ne le feras pas, puisque nous sommes arrivées, et que déjà, je t’agace, à parler, plutôt que t’écouter. - Va bien. Les salue tous. De notre salut à nous. Et… tu touveras bien quelque chose à leur raconter, s’ils demandent, j’suis sûre. Tu as du talent pour ça.Sa main droite exécuta le geste du salut respectueux, quoique le regard, et le fait de continuer à reculer puisse rendre ça désinvolte. Des lèvres qui embrassent à la tête qui se souvient. Sur le moment elle le pensa : « Que ta route, Djee, soit longue et pleine de richesses. »- Bonne chance, Plaie des routes. Et à bientôt, peut-être?Avant de reprendre la route, de son pas ordinaire, et de se fondre dans les ombres. [Merci beaucoup pour tout ] |
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