- Aethor ? Aether. Aelnor, Aequor, Aelum… Ilum? Ylther. Non non, ça ne va pas du tout. Nebo ? Okyean et Zemlya. Mph.
Jehan continua à murmurer dans sa barbe des sons étranges, debout dans son bureau à regarder par la fenêtre les gens qui s’affairaient dans la Cour. Il avait abandonné la direction des travaux à Silind Frandlich et Edel Hil’ Meredrine pour le moment, arrêtant un instant de coordonner les travaux et de courir partout pour vérifier que tout allait bien, que les maitres d’œuvre faisaient bien ce qui était prévu, et que personne ne se blessait dans toute cette confusion. Cela faisait longtemps qu’il n’était pas entré dans ce bureau – depuis la bataille, il courrait partout, dressait la liste des dégâts, des morts, des blessés et des vivants, créait des groupes à qui il donnait des tâches quelconque, répartissait les élèves pour que tout le monde ait un lit, cherchait frénétiquement à faire tenir l’Académie debout malgré la disparition de la moitié du personnel maintenant que le chaos était parti. Trouver un cuisinier pour remplacer le défunt Osaki dans ces circonstances avait été délicat, personne ne souhaitant travailler dans un établissement où le danger était si près, mais Maitre Loan avait accepté de remettre ses services à la disposition de l’Académie, au moins temporairement – à condition d’être payé grassement. Jehan n’avait pas fait d’histoires, bien conscient qu’il n’avait pas le choix, et était passé au problème suivant maintenant que les élèves pouvaient avoir le ventre plein – les émissaires de l’Empereur. Avaient suivies grand nombre de réunions, avec la première gardienne, la maître marchombre parfois, et Jehan avait défendu sa position tant bien que mal. On avait finalement accepté de lui laisser gérer la crise ; après tout, l’Académie était indépendante de l’Empire. Mais l’Empereur voulait des explications, des informations sur le Chaos, et il perdit un temps fou à les lui exposer.
Puis ça avait été les parents, surtout les parents nobles, hurlant parce que leur enfant était mort, ou parce qu’ils étaient outrés, partant avec leur progéniture en promettant de ne plus jamais remettre les pieds ici. C’était bien la tâche la plus difficile qu’il avait eu jusque là, se sortir d’entre leurs griffes, et il avait ressenti un plaisir coupable de savoir que la majorité des apprentis étaient orphelins ou n’avaient plus de contact avec leurs ascendants. Et à présent, il cherchait des noms pour les trois nouvelles maisons de l’Académie ; les dortoirs de lotra avaient cramés, et s’il comptait bien les faire reconstruire, ce n’était absolument pas pour en faire un nouveau dortoir – il rêvait depuis longtemps d’installer quelque part à l’Académie un certain club dont il serait le maître. Et puis de toute façon, ils ne seraient pas reconstruits avant un moment, et vu le coup que la réputation de l’Académie venait de prendre, il n’y aurait pas assez d’élèves pour remplir à nouveau 4 dortoirs. Trouver des noms pour 3 d’entre eux, alors, et repartir de pied ferme…
C’est à ce moment là que les coups à la porte vinrent le sortir de ses marmonnements mystiques et, craignant le pire, il opta pour un ‘entrez’ neutre.
- Ouééééé !
Il ne put s’empêcher de laisser ce petit cri lui échapper en voyant Varsgorn, et non pas un parent coléreux, entrer dans son bureau. Puis il toussa pour se rattraper, et écouta le trésorier d’une oreille attentive. Quoiiii, il voulait partir ? Mais mais mais ! Jehan se battait déjà pour remplacer les postes existants, il n’y avait plus de maître d’armes, plus de maître Dessinateur, un cuisinier embêtant, presque plus de domestiques, et son trésorier s’attendait en plus à ce qu’il le mette à la porte ? Fils du Chaos ou pas, Jehan devait avouer qu’il avait trop besoin d’un trésorier pour être difficile sur la marchandise. Varsgorn avait prouvé tenir correctement les comptes, et si ceux-ci étaient en grande partie versée au Chaos, il fallait s’y attendre et cela ne démontrait aucunement l’incompétence du commerçant. S'il voulait partir, il lui faudrait passer au travers de lui, et il n'allait pas se laisser faire !
- Tant que les fonds de l’Académie ne disparaissent pas dans votre poche, vous pouvez rester, Sir Ril’ Enflazio. Le Chaos est tombé, nous reconstruisons, une nouvelle ère commence, et garder rancune ne fera que créer une chasse et un climat de peur dans l’Académie. Tabula rasa ! Votre passé n’a plus d’importance. Vous êtes loin d’être le seul à avoir un passé noir ici, et ce ne sera pas la première fois qu’un mercenaire du Chaos renégat réside entre ces murs…
Jehan pensait bien évidemment à Zéthid Zac, professeur d’alchimie dont la disparition avait menée à la malédiction du poste d’alchimiste. Aucun des professeurs lui ayant succédés n’étaient restés bien longtemps…
- Maintenant, si vous voulez bien m’excuser… Tabula ? Tabula rasa ! Lumos, Oblivias et Expelliarmus ? Non, trop long, trop long..
|