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 Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé]

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Miaelle Campbelle
Miaelle Campbelle

Assistante du Maître guérisseur
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http://www.voleusedencre.skyblog.com
MessageSujet: Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé]   Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé] Icon_minitimeMer 30 Juin 2010 - 19:15

[ je n'ai rien trouvé de plus crédible qu'une crise de somnambulisme pour que Miaelle se retrouve si loin de son Papa ^^ pardonne mon manque d'imagination, j'espère que ça te plaira ! ]


Il y avait des formes, des fantômes, des silhouettes, des rubans colorés qui glissaient autour d'elle, enlaçant ses poignets, ses membres, ses chevilles, et, poupée bariolée, elle ne pouvait que marcher, comme trainée, les consciences des couleurs guidant ses pas dans un labyrinthe d'incompréhension et de taches sanguines. De lourds pavés s'allumaient sous ses pieds, propres pour une fois, et le chemin dessiné prenait l'allure d'un palais des glaces, et chaque reflet lui renvoyait un sourire différent, figé, dramatique, insolent, affolé, tendre, amer, torve, décomposé. Les illusions prenaient le pouvoir, et le visage de son Papa, déformé par un rictus, souriait lui aussi d'une manière démoniaque, tout en dansant sur ses talons sans corps pour soutenir la tête en lévitation saccadées. Peu rassurée, Miaelle sentait inconsciemment le froid sur sa peau, et le frisson glacial qui lui descendait le long du dos. Franchement apeurée à présent, elle s'élança comme elle pu, entravée par les rubans devenus liens éclatant, et s'affala sur le sol brillant avec la lenteur que confère les cauchemars de fuite. Dans son rêve, une énorme gueule translucide aux yeux exorbités l'avala toute entière, enfonçant sa langue visqueuse jusque dans son coeur comme pour annihiler jusqu'au souvenir de battement. Dans un soubresaut vertigineux, alors qu'elle menaçait de se noyer, elle revint à elle et renversa la tête en arrière pour recracher l'eau de ses poumons, la poitrine en feu, et les ombres terrifiantes coagulés au coin de ses paupières.

Stupéfaite, elle découvrit, dans un état second, qu'elle se trouvait plongée jusqu'au cou dans une baignoire de granit, creusée dans la roche, et que quelques serviettes et savons trainaient dans un coin obscur. Une unique lueur diffusait une lumière blafarde et cireuse, invitant les ombres à danser autours des malheureux qui se seraient perdu dans la salle de bain. L'eau était froide. Avec un nouveau frisson, assez prononcé pour lui faire claquer des dents, elle se hissa maladroitement sur le rebord du bain. Son pied ripa et son genoux laissa échapper un mince filet de sang dans l'eau translucide, qui se délia en une farandole de moins en moins écarlate. Les larmes aux yeux sous la douleur vive, elle faillit retomber dans l'eau mais parvint à ses fins en se jetant à plat ventre devant elle. Le souffle rauque, elle ferma les yeux, trempée, les vêtements collés et la peur qui brûlait. Sous les battements de son coeur affolé, elle sentit la distance terrible qui la séparait de son Papa, cette distance qu'elle ne connaissait pas. Perdue au milieu du lieu inconnu, associale, et apeurée, elle laissait la détresse s'échapper de son corps en larmes lourdes et acides, des larmes qui traçaient de scintillants sillons sur ses joues couvertes de crasse suite à sa récente aventure.

La peur vitriolait la moindre de ses pensées et, malade, elle s'agenouilla au dessus d'une cuvette rocheuse pour vomir le peu qu'il y avait dans son estomac.

"Papa, j'ai peur, vient me sauver. Je t'en prie, Papa, vient, il n'y a personne, tu as dit que tu ne me laisserais pas, revient, est-ce que je rêve encore ? Je suis seule, et les ombres elles dansent autour de moi, c'est horrible, j'ai l'impression d'être une souris face à un tigre. La nuit, elle m'emprisonne et me refroidit, j'ai froid, je suis frigorifiée, revient Papa..."

Les genoux remontés contre la poitrine, elle ne pouvait dire depuis combien de temps elle était la, prostrée en une position fœtale, ses os fins pointant de tous les côtés de son corps rachitique. De lourds sanglots s'échappaient de ce petit amas de peau et de larmes, lorsque le bruit d'une porte grinçante la tira de sa léthargie. Passant de la position assise à debout en quelques secondes, elle se précipita avec un sourire rayonnant et mouillé sur la personne qui faisait irruption dans la pièce. Son Papa allait la réconforter, chasser les cauchemars et s'endormir près d'elle, ses bras musclés et tièdes la berçant jusqu'à ce que...

Alors le vertige la prit, le sang ne parvint pas à temps jusqu'à son cerveau et le noir s'abattit sur elle comme une chape de plomb. Alors qu'elle basculait en avant la tête la première, elle eu le temps de murmurer un soupir heureux :


- Papa...

Lorsqu'elle rouvrit les yeux, le monde dansait. Et la personne n'était pas son père. Une terreur nouvelle s'abattit sur ses frêles épaules, et elle vomit derechef sur les pieds de l'inconnu.

Marlyn Til' Asnil
Marlyn Til' Asnil

La Borgne
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MessageSujet: Re: Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé]   Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé] Icon_minitimeLun 2 Aoû 2010 - 16:20

Comme une aiguille.
C’était la meilleure comparaison trouvable en de telles circonstances de tête-sur-le-point-d’exploser. Le noir d’encre du plafond de ses appartements se piquetait d’étoiles de fièvre, un crochet semblait rivé à sa colonne vertébrale et s’évertuait à l’arracher par à-coups spasmodiques, les nerfs qui partaient de son œil étaient décidés à former les formes les plus complexes et douloureuses. Ce genre de crises hallucinogènes et débilitantes était relativement fréquent dans ce corps autrefois malmené. Comme toujours, tout passerait avec de la patience et des herbes à l’âcre amertume et aux effets secondaires plus handicapants que leurs vertus d’origine. Le murmure apaisé des Spires servait de refuge dans ces instants désagréables, l’Imagination offrait à Marlyn un monde dénué de corps et des ennuis collatéraux ; les murs ondulaient gracieusement au rythme de pulsations mentales réglées par sa seule volonté. D’ailleurs, il n’y avait plus de murs ni horizons dans un univers de pouvoir sans limite ni réalité visuelle. Seulement l’existence impalpable de possibles et leur négation de consistance.

Un filet de sueur glacé traçait une piste de sa tempe à son oreille au gré de la gravité – des autres ruisseaux fiévreux qu’il croisait sur son chemin. La chaleur se transvasait de son crâne à sa peau comme un sablier percé et faisait diminuer –un instant- les coups sourds frappés sur sa boîte crânienne. L’éblouissement encré sur ses paupières coula par son échine et prit place dans son estomac, provoquant du même coup une atmosphère nauséeuse qui, décidément, n’était pas nécessaire. L’intégrité mentale de la jeune femme se réfugia un peu plus profondément dans l’Imagination et les minutes se noyèrent dans un jus de cauchemar.

Etait-ce déjà l’aube, ou son œil nuance de nuit restait sensible à la lumière ? Les cils de Marlyn se crochetèrent : elle n’y voyait qu’à moitié d’ordinaire et n’allait certainement pas s’embarrasser de la vue pour la suite de la nuit. L’estomac stable comme une péniche sur les rives calmes du Pollimage, la jeune femme tenta la station debout ; puis la marche vers la porte. Sa frustration passa lorsqu’elle se rendit compte que ses muscles et ses nerfs répondaient relativement bien. Certes, si elle croisait une horde d’Ours élastiques ou un enseignant bourré dans le couloir, elle aurait un peu de mal à trouver sur lequel des cinq reflets taper, mais il n’y avait pas de raison pour croiser quelqu’un en pleine nuit, alors que la journée avait été belle et fatigante pour tout le monde.
Son intention était de marcher dans les couloirs frais et de se rendre dans la salle des eaux de l’Aile Ouest (la plus proche et la plus confortable), ôter le voile de sueur qui lui recouvrait l’épiderme et reprendre possession de tous ses sens dans l’eau glaciale et engourdissante.

Le simple fait de mettre un pied devant l’autre et de tenir le dos droit remettait en place son égo avec les morceaux arrachés à sa frustration. La crise maladive passait, que ce fût sous l’action du temps, des herbes ou d’une détermination farouche.
Restait à aller se laver. Et ça, c’était un luxe que la Mentaï n’avait pas pu s’offrir depuis quelques jours ; gérer la possession de l’Académie lui demandait trop de temps et d’énergie, surtout depuis que Beitiris faisait n’importe quoi et que l’emprise s’affaiblissait. Des dizaines de mains mentales lui agrippaient les Spires pour transmettre des messages, des demandes d’aide, des rapports, des ordres… Ces assauts de son pouvoir la rendaient distraite. Et malade. Entre autre. Qu’importait ? Bientôt, elle pourrait s’en aller d’ici, il suffisait que l’Académie retombe et que le Chaos soit dissous. Bientôt. Mais d’abord : un bain.
Bain qu’elle ne pouvait prendre en plein jour
Simplement vêtue de sa tunique d’homme collante de fièvre et de pantalons de simple facture, elle avançait sur les dalles aussi fraîches que l’air qui arrivait du Parc. Aucun contact métallique secret sous sa tunique, seul un accroc dans les Spires, prêt à servir en cas de besoin.

La porte salutaire grinça en guise de bienvenue, révélant une salle vide à part un tas de serviettes mouillées, en boule sur le carrelage. Mais la quiétude qui régnait dans le lieu se brisa lorsque le dit-tas de serviettes se mit à se mouvoir. Une fraction de seconde durant, la Mentaï aux neurones encore fragiles crut halluciner et s’apprêtait à plonger la tête dans un bassin clair tout proche.
Ce qu’elle prenait pour un tas de chiffons était en fait.. un bipède. Humanoïde. Enfant. Qui se dirigeait vers elle. En pleurant. En l’appelant Papa.
La jeune femme dont les traits s’étaient contractés à l’approche de la gamine n’eut pas le temps de faire le moindre pas en arrière, la moindre esquisse d’esquive que la petite lui tomba dessus. Lui vomit dessus.
Un grognement agacé précéda une amorce de gifle, que la Mentaï arrêta en pleine course lorsqu’elle posa son œil unique sur les pupilles luisantes de l’enfant.
Si elle n’avait pas les muscles faibles d’avoir été malade, si elle avait été de sa mauvaise humeur habituelle, si son opposant n’était pas une enfant aux grands yeux mouillés et si elle avait été cruelle jusqu'au bout des ongles, Marlyn n’aurait pas hésité à la traiter comme n’importe qui : gifle, jurons, regard noir, sentence létale pour les plus moches. L’ambiance moite de la salle des eaux, l’heure avancée et un adversaire si peu commun la perturbaient. La jeune femme avait toujours été confrontée à un monde d’adultes dans lequel elle virevoltait sans se ménager, auquel elle racontait les plus doux mensonges et blessait de la manière la plus subtile. Le cerveau encore malléable et pur des enfants excluait toute idée de bien, de mal, même de bon sens. Elle ne représentait pour le petit corps mouillé à ses pieds qu’un être sans attaches, qu’elle confondait avec son père.

Et qui, accessoirement, lui avait vomi dessus. Back to basics, le reste se réfléchirait plus tard. Les Spires lui donnèrent un tissu propre, avec lequel elle essuya une grande partie des immondices qui lui couvraient les pantalons. La gamine pleurait toujours à ses pieds, les vêtements collés à son corps frêle ; elle avait du tomber dans l’eau. Tant pis pour elle. Avec un regard de mépris pour la créature gémissante, Marlyn alla à un autre coin de la salle et commença d’ôter ses vêtements tâchés. Les cicatrices qui lui couraient sur la peau l’incitaient d’ordinaire à ne pas retirer les tissus qui les masquaient. Mais la gamine ne se rappellerait sûrement de rien dans quelques jours, surtout si elle ne faisait pas attention à elle.

Une hésitation l’arrêta dans sa mécanique d’ablutions. Elle ne pouvait pas laisser la gamine là. Déjà, c’était dérangeant, ça faisait du bruit, et puis elle n’était pas inhumaine. Un enfant aux vêtements glacés en pleine nuit était un enfant qui ne tiendrait pas l’hiver.
Après avoir passé des vêtements propre qui étaient disposés sur les étagères de la salle, Marlyn se saisit d’une grande chemise, et la lança à la petite fille, sans cérémonie, en disant d’un ton agacé :

- Tu es trempée, change-toi.

Massant ses tempes douloureuses, la Mentaï se rapprocha, sans toucher le petit corps : ces bêtes-là mordaient parfois quand on les touchait, et prenaient n’importe quel mouvement pour une attaque. Elle s’agenouilla près de la gamine, lui tendit la chemise qu’elle n’avait pas ramassée Dire les mots qu’elle allait formuler lui crevaient le cœur d’ennui et d’ironie, mais elle s’efforça de prendre une voix pas trop rude, un œil pas trop malveillant :

- Tu as perdu ton papa ? Je peux faire quelque chose pour toi ?


Miaelle Campbelle
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MessageSujet: Re: Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé]   Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé] Icon_minitimeDim 15 Aoû 2010 - 14:02

Tremblante et frigorifiée, elle n'entendait les gémissements qui sortaient de sa bouche que de très très loin. Un univers de coton et de liquide obscurcissait son ouïe, et sa vue brouillée par les larme n'étais pas de meilleurs qualité. L'autre n'étais pas son Papa adoré. Un instant, elle cru que tomber, tomber, et supplia de tout son cœur de n'être plus qu'un morceau de néant, rattaché au reste par ce qu'elle représentait, c'est à dire rien. Incertaine, elle faillit lever les yeux pour la découvrir, mais la peur l'en empêcha au dernier moment : les autres étaient méchants, les autres étaient mauvais. En réalisant qu'elle était seule, perdue au milieu d'une Académie qu'elle ne connaissait pas, en présence d'une individu louche sur les pieds de laquelle elle avait déverser le contenu de son estomac, ses dents se mirent à claquer. D'une terreur renouvelée. Elle attendit la sentence, un coup qui briserait sa nuque ou un fouet qui trancherait son dos. A genoux, elle n'avait pas la force de bouger. N'avait plus la force que d'accepter.

Mais les coups ne vinrent pas, pas plus que les insultes ou les hurlement qu'elle avait de tout temps entendus chez les autres. Alors seulement, elle osa lever un regard craintif et mouillé vers ce qu'elle pensait être une femme. Une femme qui n'était plus là. Désorientée, elle tourna la tête de tout côté et son regard ne tomba pas sur elle, mais sur hideuse cicatrice qui la déformait. Aussi soudainement qu'étrangement, à mesure que ses méninges s'agitaient pour concocter le meilleur remède à appliquer sur une blessure de ce genre, elle constata dans un coin de son esprit que la peur s'était retirée pour un moment. Oh, elle était toujours la, la gueuse, mais derrière les murailles de ses connaissances et de ce qui composait sa vie, elle ne pouvait exhaler qu'un souffle putride pour la punir de l'avoir enfermé là. Alors la petite Miaelle jeta toute sa tête dans un combat contre elle-même. Un combat qui fut réduit à néant lorsque l'oeil de l'autre se tourna vers elle et la fixa.

Laissant échapper un petit couinement plaintif, elle se détourna et chercha à se terrer dans le sol, pour n'offrir que le moins de présence possible à cette pupille qui brûlait de... De... De drogue ? Tout en la détaillant furtivement, elle réfléchissait aux symptomes, aux plantes qu'elle connaissait, une multitude, et à ce qui causait l'ingestion de telle ou telles plantes. Les, ou la pupille dilaté dans son cas, les spasmes qui agitaient les trapèzes et l'estomac creusé, allié à la démarche légèrement chaloupée, tandis que le regard se fixait légèrement à gauche de l'axe de la marche, tout cela résonnait en elle avec la force de son enseignement. Lorsque l'autre lui parla, brisant le silence des lieux, elle n'entendit pas le moindre de ses mots, toute entière concentrée sur les plantes qui causaient ses effets. De la datura, sans aucun doute, mais aussi et principalement du pieds de poulpe neurasthénique d'ardanne, dont on aurait extrait le suc. Mais même cette matière ne pouvait produire autant d'effet, il y avait encore autre chose, plusieurs végétaux en quantités réduite dont l'association produisait cette drogue qui entravait ses mouvements. Le léger décalage du regard par rapport aux mouvements du corps pouvaient être du aux racines d'un tubercule qui ne poussait que très loin, l'olicarne, qu'on faisait bouillir, oui, c'était probablement ça, ensuite il suffisait d'y ajouter le suc de l'ardanne, et une pincée de datura. Mais les effets tranquillisant de l'une, légèrement laxative de l'autre mais surtout à fort effet de dépendance, n'étaient pas un remède lorsque mélangés. L'olicarne était probablement le cataliseur de la solution, tout en servant de solvant. Ses effets étaient en outre très forts, et amenuisaient la sensation de douleur et de fatigue. C'était un mélange dangereux, aux effets violents. Pourquoi en avait-elle ingéré à répétition ? Oui, parce que les cernes qui marquaient ses yeux, habituelles pour tout autre oeil que le sien, avaient une légère teinte jaunâtre qui prouvait la récurrence de la prise de telles drogues.

Toute à ses spéculations, Miaelle ne prit pas garde à l'approche silencieuse de la femme, et lorsque elle-ci s'agenouilla face à elle, la fixant de son œil unique, elle eu un sursaut de terreur et essaya de s'éloigner, ne parvenant qu'à se râper les coudes sur la pierre rugueuse, y laissant un peu de peau et quelques gouttes de sang. Mais sa frayeur ne fut rien comparée à celle qui pris son cœur en étau lorsqu'elle lança son bras vers elle, dans l'évidente intention de la frapper et de lui faire mal ... Ah tiens, non, ce n'était pas pour la frapper. Une chemise froide mais sèche pendouillait au bout de l'appendice meurtrier et, interdite, Miaelle saisit le tissu, dans un état second. L'action l'avait désorienté, la laissant pantoise de ses déductions erronées. Constatant entre la brume de ses deux yeux que l'autre attendait quelque chose, elle leva le tissu et la frotta doucement sur son visage mouillé et sale. Apercevant une lueur d'approbation au delà du tourbillon bleu et noir, elle continua et se frictionna le corps de plus en plus fort pour le réchauffer. Ses claquements et frissons s'atténuèrent quelque peu, et elle apprécia le geste, tout en essayant de faire face à la peur que l'autre lui inspirait. Tenaillée entre elle et la curiosité du mélange qu'elle avait essayé d'analysé, elle restait ainsi, prostrée, les yeux brillants sous sa frange d'ében, incapable de la moindre initiative, de la moindre réaction.

La question la laissa plus ébahit encore, si c'était possible, et sa mâchoire se décrocha sous la surprise tandis que ses yeux s'écarquillaient comme des soucoupes. Elle voulait l'aidé ? Une autre voulait l'aider ? Il y avait donc des personnes gentilles parmi eux ? Comme elle restait ainsi, sans répondre, ou peut-être pour lui en laisser le temps, la jeune femme se releva avec grâce, les soupçons de drogue se diluant dans l'atmosphère à mesure que le poison se diluait dans ses veines. Son corps était marqué par les violences, par les tortures, tranchés de cicatrices boursouflées, tordu du poids d'une vie que la petite Mia ne pouvait pas imaginer. Soudain, un mal de tête atroce lui broya le crâne, et des images sanglantes et noirâtre surgirent dans son esprit, noyant le présent pour en faire une boue gluante ou le passé essayait de percer. Des éclats métalliques et souillés s'associaient aux rictus haineux et mauvais, dévoilant des dents salles et des mains broyeuses d'enfant. La réminiscence ne dura qu'une fraction de seconde, mais la laissa tremblante et silencieuse, au bord du noir que contenait son esprit. Essayant de se calmer, elle souffla par le nez, profondément, comme son Papa le lui avait apris. Un éclair de tristesse et d'envie la parcourut lorsqu'elle repensa à ses bras autour d'elle, à sa chaleur bienveillante. Mais pour l'instant, elle devait se débrouiller seule.

Constatant que la réflexion l'aidait à oublier ses peurs, elle scruta le corps de l'autre et de ses indices, tout en réfléchissant à une réponse appropriée. Sa voix couinante s'éleva, se répercuta contre les parois, pour aterrir dans les oreilles de l'autre qui releva la tête, un étrange éclat dans la prunelle, du mépris ? De la surprise ?


- Je... Je voudrais...

Rien à faire, les mots ne sortaient pas. Bien sur qu'elle voulait retrouver son Papa, mais à présent qu'elle était plus ou moins calmée, que son estomac était stable par le vide qui l'habitait, et qu'une nouvelle énigme s'offrait à elle, la curiosité semblait grandir en elle à chaque instant. Prenant son courage à deux mains, ou plutôt dans ses cordes vocales, elle laissa tomber les barières et demanda, d'une voix assurée qui la surpris et la remplis de fierté : c'était la voix de son père lorsqu'il s'occupait d'un malade.


- C'est quoi que tu as pris avant de venir ? Je sais qu'il y a de la datura, de l'ardanne et de l'olicarne, mais je ne connais pas le reste. Pourquoi tu prends ça ? C'est mauvais, tu sais, et c'est quoi toutes ses cicatrices ? Et pourquoi tu n'as qu'un oeil ? Pourquoi tu es gentille avec moi ?

Les questions s'enchainaient avec rapidité, mais plus elle parlait, plus sa voix perdait de sa stabilité et partait dans des aigus présageant d'une nouvelle crise de panique. Elle savait qu'elle était au bord du gouffre, mais ne voulait pas tomber, oh non. Et puis comment l'autre pourrait-elle la rattraper, puisqu'elle tombait déjà, elle aussi ?


Marlyn Til' Asnil
Marlyn Til' Asnil

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MessageSujet: Re: Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé]   Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé] Icon_minitimeLun 16 Aoû 2010 - 22:26

Sa peau trop sensible lui indiquait avec précision le parcours des gouttes de sueur qui parcouraient son dos, frôlaient les sillons mal cicatrisés et se perdaient dans les aspérités brûlées qui saillaient encore ; la chemise nouvellement enfilée commençait déjà à lui adhérer à la silhouette, pour son plus grand déplaisir. Pis encore ses tempes ne lassaient pas de lui faire connaître son rythme cardiaque erratique par grandes pulsions douloureuses ; par-dessus tout ça, la gamine prenait son temps pour s’essuyer avec le tissu propre au lieu de l’enfiler.
Marlyn s’était relevée dans l’intention d’aller chercher une autre tunique pour elle-même et pour la gosse, qu’elle lui mettrait sur le dos de force si nécessaire. L’amalgame d’étourdissement mêlé à la moiteur ambiante rendait ses mouvements gourds ; mais moins qu’avant. Elle aurait été incapable de faire la différence entre sa courte maladie, l’absorption de cette drogue amère et les conséquences à long terme des tortures et des accidents.
Le petit corps tremblotant et incapable de formuler une phrase correcte semblait sur le point de criser, comme seuls les enfants savaient le faire, d’une peur panique aux monstres innombrables ; c’est ce qui décida Marlyn à rester à son côté et abandonner ses réflexes de mépris d’autrui.

A quoi s’était-elle attendue ?
Certainement pas à un contact visuel aussi farouche que spontané. Qui contrastait avec la voix haut perchée des petites filles perdues, qui crachotait quelques mots. Vouloir.. c’était bien les enfants à utiliser ce verbe insensé dans toutes les situations. On pouvait vouloir tout un monde et n’en posséder que l’espoir, la vaine attente qu’un autre vienne exaucer ses souhaits. Un père, par exemple. Que réclamait sûrement la petite perdue…
Aussi loin qu’elle pouvait fouiller, Marlyn ne pouvait mettre la main sur ses souvenirs d’enfance, qu’elle avait consciencieusement effacés durant les années. Mais la certitude restait, que l’entité « père » lui était inconnue. Par-dessus tout indifférente.

C’était quoi, cet éclat nouveau dans les prunelles juvéniles ? Et la voix posée de l’adulte qui parlait à travers la voix de cette enfant ? Qui posait des questions qui, chacune, tirait à la jeune femme ou une inspiration dûe à la surprise, une crispation involontaire de mâchoire, un geste machinal vers ses bras découverts, un battement de paupière. C’était trop de questions d’un coup, trop d’informations et de secrets exhumés d’une seule respiration pour qu’elle y fasse face avec détachement.
Ce qui lui permit de rester concentrée sur le présent était l’intonation vacillante des derniers mots, une lueur de chandelle moribonde dans un ouragan d’anxiété. Par instinct de conservation Marlyn refoula les questions et les mots pour plus tard. Les mots pouvaient toujours attendre.
Les Spires tiraillées par sa récente migraine ne s’offraient pas aussi facilement à elle que d’ordinaire ; la jeune femme y sacrifia son équilibre et sa silhouette vacilla alors que de la lumière apparaissait dans les candélabres et chassait les remugles d’ombre de la pièce, la rendait moins onirique. Plus rassurante ; pour elles deux. La Mentaï se retourna rapidement et marcha en direction des étagères, autant pour chercher ce dont elle avait besoin que pour dissimuler à la petite alchimiste le fait que la soudaine lumière lui brûlait la rétine, imprimant des spirales et des tâches partout sur les murs de sa vision.
Ses mains choisirent une serviette de peau douce et fraichement repassée et une autre chemise de petite taille, qu’elle espérait être à la taille de sa petite frigorifiée. Qui, elle notait machinalement, était passée dans sa conscience de l’état de bête rampante à humain dangereusement intuitif.
Elle considérait pas encore la partie et la confiance de la gamine comme gagnées et revint vers elle avec prudence, évitant tout geste brusque. Plutôt que de la forcer à se sécher et se changer, ce qui provoquerait une crise infantile pénible pour elles deux, elle posa les deux tissus à son côté. La petite en ferait ce qu’elle voulait.
Que répondre à un enfant aux questions aussi directes que profondes ? Un enfant qui n’avait aucune notion d’allégeance, de bien et de mal, ou de manipulation orale ? C’était un défi inattendu.
Mais qui lui plaisait, définitivement. Ne plus avoir à se soucier des rumeurs, des possibles échos de la conversation, redevenir, des sous-entendus politiques de ses paroles.. ce serait jouissif. Ce terrain était inconnu de Marlyn, qui profita de se rasseoir avec précaution pour chercher ses mots. La gamine aux grands yeux avait un tel paradoxe de maturité et d’enfantillage que… Pouvait-on lui raconter des horreurs sans la traumatiser ?


- T’es douée, petite. Connaître les vices des plantes à ton âge… - elle inspira, détourna l’œil et finit par lâcher à contrecoeur – du vératre. Et de la menthe, pour le goût.

Si elle en connaissait les tenants et aboutissants ? Vaguement. Elle savait qu’il fallait faire extrêmement attention au dosage, que le vératre était toxique rapidement. Que ses vertus purgatives à dose infinitésimale étaient radicales, qu’il déréglait le système nerveux pour endormir les plus violentes douleurs plus rapidement que d’autres. Que mélangé aux autres plantes qui composaient la drogue, ça la tenait sur pieds.
Voyant les yeux agrandis de surprise –dégoût ?- de la petite fûtée, Marlyn tira machinalement sur le tissu de sa chemise pour masquer un peu les cicatrices qui fusaient, pâles sous la lumière.


- C’est… on m’a tuée. Avant.

Comment expliquer ça simplement et de manière neutre ? Ca relevait de l’impossible, elle n’avait pas la force de retenir les anciennes peurs, les anciens cauchemars.. en trahissait les crispements de ses doigts. A moins que ça ne soit la drogue ?

- On m’a.. torturée, parce que je pensais différemment. Et c’est jamais parti. On a voulu me rendre aveugle parce que je voyais le monde d’un autre point de vue. La drogue, j’ai pas le choix. Je serais folle sinon.

Elle l’était déjà, pensa-t-elle avec amertume. Proche du bassin, sa main anguleuse passa sur la surface de l’eau, y laissa des tourbillons croissants et des reflets de lumière. La dernière question lui restait en travers de la gorge. Gentille était le dernier adjectif dont elle se serait qualifiée. Ce qui avait sauvé la gamine de sa fureur et de son mépris, c’était la maladie et la lassitude du sang, la curiosité de l’étrange, le vaste inconnu qu’était pour Marlyn le monde de l’enfance.

- Pourquoi je serais méchante ? Tu ne m’as rien fait, tu ne peux rien me faire. Personne n’est gentil avec toi, pour que tu dises une chose pareille ?

Sareyn avait l’impression d’être quelqu’un d’autre. La pensée d’être avec une petite fille, d’esquisser un geste pour l’aider à se changer, de ne ressentir aucune animosité envers un autre être humain… c’était étrange. Trop perturbant. Modelée pour vivre de haine, elle ne concevait pas l’innocence vraie.


Miaelle Campbelle
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MessageSujet: Re: Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé]   Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé] Icon_minitimeMar 17 Aoû 2010 - 20:34

Ce fut bien cette lumière qui faillit tout faire basculer. La petite Miaelle reprenait seulement son souffle, la gorge irritée par les larmes, les gémissements et les questions brûlantes, lorsque la femme s'était levée, un éclat nouveau dans les yeux, qu'elle n'interpréta pas comme tel du reste. Elle, elle était passionnée par les plantes, par les maladies, par les effets corporels, mais les secrets comportementaux restaient pour elle ce qu'ils étaient, des secrets. Aussi, concentrée sur son analyse de l'autre, ce qui accessoirement lui permettait de ne pas perdre pieds, elle ne percuta pas tout de suite d'où provenait la lueur qui sembla trouer l'atmosphère, proprement, sans fioriture, mais avec l'efficacité d'un scalpel. Une seconde pour que ses yeux s'agrandissent, pour que son cœur rate un battement, pour que cette lumière soit plus effrayante que l'obscurité d'où elle venait. Tétanisée, elle sentit son esprit décrocher, avec une sorte de clac déroutant, ses sens anesthésiés par la peur, la nouveauté, l'absence, la curiosité, l'incompréhension.

Mais, étrangement, la terreur ne dominait pas, non. Ses pensées prirent une dirrection nouvelle, comme on change la disposition d'un circuit électrique, la même efficacitée, mais différente, adaptée à la situation. Cette adaptation était déroutante pour elle, fille de rien, perdue entre les bras de son sauveur et les ombres de ses cauchemars, entre les brides d'un passé sanglant et un présent beau, acide, nouveau. Bien qu'apeurée, elle pouvait réfléchir. Réfléchir à sa survie, à sa raison qui s'effilochait, comme on regarde un pantin se désarticuler, de haut, par dessus la tête même de celui qui trancherait les fils. Alors, tout bêtement, elle décida que l'autre était une amie, ou tout du moins qu'elle n'avait pas à en avoir peur. Pourquoi ? Soyons logique, elle avait remplacé l'obscurité par la lumière, à partir de rien, elle lui avait donné de la chaleur en tissu, elle avait chassé les ombres. Elle avait un pouvoir qui la dépassait, quelque chose qui créait de la lumière avec de l'obscurité. C'était magique.

Et la magie, dans quelque monde que se fut, fascinait toujours les enfants.

La réponse de l'autre l'étonna. Les questions qu'elle avait posé étaient sorties par elles-mêmes, liées au présent par la seule présence de la terreur qui la consumait, et si la jeune femme avait été gentille avec elle, Miaelle ne pensait sincèrement pas qu'elle lui répondrait en la tenant ne serait-ce qu'en l'estime d'un être humain doué d'intelligence. Ils avaient été rejetés, partout, et s'étaient enfuis lorsque l'on avait bien voulu d'eux. Son père avaient planté dans son esprit les graines qui maintenant la tenaient à l'écart des autres, la peur de la violence. Ce qu'elle avait dans la tête, c'était un amas de ronce enchevêtrées, repoussantes, et à l'intérieur, un petit coin ensoleillé par le sourire de son Papa. Lui absent, ne restait qu'une nuit obscure et éternelle, et les épines griffaient, mordaient, cherchaient à la garder un peu plus prisonnière à chaque seconde, à chaque battement de cœur. Mais la lumière était revenue, maintenant, et les aiguilles prenaient feu, tout doucement, produisant une douce chaleur. Il fallait juste faire attention à ne pas se brûler.

- Le vératre... ses rhizomes ont des effets sédatifs, non ? murmura t-elle, pour elle-même. Puis, à l'intention de la femme : Si tes cicatrices te font encore souffrir assez pour que tu doivent prendre des analgésiques, je te conseillerais plutôt la valériane, ou encore la...

Elle se tu soudain, les mots bloqués dans la gorge, en croisant le regard de l'autre fixé sur elle. Miaelle pouvait presque sentir physiquement l'intensité de la pupille, qui semblait brûler d'émotions qu'elle ne pouvait concevoir. Son discours n'avait absolument aucun intérêt, mais sa passion s'exprimait parfois sans détour, sans vraiment de rapport avec la situation. Encore une fois, elle avait agis instinctivement, pour se protéger, presque convaincue que ses connaissances pouvaient la sauver en toute circonstances. Elle oubliait cependant qu'en ces murs, les plantes ne poussaient pas et que, seule, elle n'avait absolument aucun moyen de défense. Mais l'enfance est un âge intrépide, et si elle avait conscience néanmoins du danger, sa pleine mesure lui restait encore obscure. Aussi reprit-elle, la curiosité reprenant le dessus :

- Je connais les effets de cette plante. Mais l'association de toutes, c'est vraiment de la drogue tout ça, si tu en prends de ton plein gré, tu dois arrêter. Si quelqu'un te demande d'en prendre, c'est qu'il est méchant.

C'était presque mot pour mot les recommandations que son Papa pouvait emmètre lorsqu'il était amené à soigné un drogué, malade de ses shoot. Alors elle regarda plus attentivement la personne assise en face d'elle, notant les détails avec cet esprit aiguisé qu'elle avait la chance d'avoir pu développer. Ses cicatrices, le trait le plus voyant de sa personne avec son oeil unique, tranchaient la peau, mais surtout le regard. Comme on lacère un trou noir, sa prunelle zébrée de noir étaient vive, fixe, dérangeante. Elle n'était pas comme tous les autres qu'elle avait rencontré, différentes jusque dans sa façon de marcher, mais le monde était si vaste qu'elle ne pourrait jamais en voir le bout, normal donc que des êtres étranges le parcours. Mais ce qui la déroutait le plus, c'était la sensation désagréable qui lui courrait sur les avants-bras lorsqu'elle la fixait de son oeil unique. Un frisson glacé qui hérissait ses poils et lui donnait envie de retrouver les bras de son Papa pour être en sécurité. La drogue malmenait ses sens, ses gestes, sans doute aussi ses pensées. Et son Papa avait fortement insisté sur le carractère lunatique et extrêmement dangereux des drogués. Enfin, pour l'instant, elle n'avait aucun moyen de se défendre, et l'autre possédait des pouvoirs magiques. Pourtant, quelles que fussent les excuses qu'elle se donnait, sa conscience la rattrapait toujours et lui susurrait doucement que c'était surtout la curiosité qui la maintenait là.

Les mots suivant bloquèrent sa respiration au creux de sa gorge et firent ressurgir de nouvelles images atroces sous son crâne en lambeau. Esquissant un gémissement, elle sentit soudain des trames invisibles et douloureuses l'empoigner, la brandir sous le cyclope comme un festin surgit du néant, les membres écartelés, le cœur ouvert, suintant d'une émotion nouvelle pour la petite fille traumatisée : la compassion. Elle ne se rappelait plus son enfance, mais savait ce qu'était la torture. Depuis qu'elle était en âge de penser. Elle se représenta l'autre différemment. Comme éclairée par une autre lumière que celle de la flamme magique, elle vit une femme martyr, qui aurait résisté aux pirs tourments et qui trouverait encore la force d'être gentille avec les petites filles perdues. Oublié la froideur dont elle avait fait preuve au début, oublié son statut de drogué, oublié la nuit qui l'environnait et la séparait de son Papa. Elle avait à présent face à elle une personne qui l'avait sauvé du noir et qui la comprendrait. Un instant, elle eu envie de se ruer sur l'autre et de la toucher pour voir si elle était bien réelle. Un instant seulement, pour le moment elle ne souhaitait pas se réveiller. Ne souhaitait pas se voir repousser. Oh non; ça ferait vraiment trop mal.

Animée d'une assurance nouvelle, elle croisa de nouveau le regard de l'autre, inconsciente du fait que son sentiment de sécurité ne découlait en fait que de son exilement des autres, inconsciente du fait que l'amour qu'elle avait envie d'éprouver n'était justement qu'une envie, et pas un sentiment que l'autre lui inspirait. Son esprit névrosé avait besoin d'une amie, et ferait tout pour s'en créer une. Elle remonta une mèche de ses cheveux pour dégager ses yeux. L'océan aérien de ses prunelles emplit la pièce et, les genoux remontés contre la poitrine, elle scruta l'autre avec une intensité renouvelée. Sa voix, plus grave et moins apeurée, s'éleva doucement :


- Tu ne peux pas être morte, puisque tu es là. Et puis je trouve moi que ton oeil il est très beau, on ne devrait pas interdire les gens de voir. On ne peut pas être dans leur tête, peut-être que ce qu'ils voient est plus beau que ce que nous voyons, ce serait dommage d'enlever de la beauté.

Elle se tu un instant, cherchant ses mots.

- C'est nul de tuer la beauté. Tu sais, avant toi on était pas gentil avec moi, sauf si on voulait que Papa les soigne. J'ai eu faim, j'ai eu froid, et personne ne voulait de nous.

Cette dernière phrase était fausse, mais par delà l'amour qu'elle portait à son Papa, elle ne pouvait même pas mettre sur son compte ce qui avait pu la faire souffrir, préférant en accabler les autres pour ne pas perdre confiance. Soudain, elle se leva, et s'approcha de la jeune femme. Elle vit le recul soudain qui avait fait tembler son corps, mais le mis sur le compte de la drogue qui bousculait encore ses veines, et ne vit pas le furtif mouvement de poignet qui amenait une lame au creux de son poignet. Les yeux dans l'oeil de l'autre, elle leva la main, et caressa la cicatrice macabre qui hachait son visage, la défigurant de manière horrible et tortueuse.

- Regarde, moi aussi j'ai des cicatrices...

Elle releva sa manche et exhiba les cercles cuivrés qui marbraient ses poignets et ses avants bras, cicatrices d'un autre temps que faisait ressurgir l'inconnue à l'oeil unique. Mais elle n'en avait cure, le sentiment de soulagement et de bien-être qui la soulevait en se confiant valait bien toutes les réminiscences du monde, même les plus atroces. Lorsqu'elle détestait, c'était de toute son âme. Lorsqu'elle appréciait, également. Elle avait besoin de l'étrangère, de toute manière, pour la hisser vers la surface. Elle retourna s'assoir, saisit la serviette douce et se frictionna doucement les cheveux détrempés, tout en adressant un sourire éblouissant à sa nouvelle grande sœur adoptive.

Marlyn Til' Asnil
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MessageSujet: Re: Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé]   Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé] Icon_minitimeLun 23 Aoû 2010 - 5:02

[<3]

Si ses cicatrices lui faisaient mal…
Elle aurait aimé. Que ce fut une douleur aussi ciblée, aisément identifiable à laquelle on pouvait remédier par des potions moins dangereuses que celle qu’elle était obligée de prendre. Non, les cicatrices étaient d’une douleur moindre, si on oubliait le fait qu’elles lui entravaient les mouvements aussi sûrement que des chaines sanglantes…
C’était le plus frustrant, ces pics de douleurs aux variétés infinies qui lui poussaient dans le corps comme des excroissances, qui dans un organe qui avait été irrémédiablement abîmé par les tortures, qui par une maladie engendrée par les infections, qui par une échine si souvent ballotée que le système nerveux en avait été déréglé ; l’imprévisible nourrissait l’angoisse, l’angoisse engendrait la douleur. Que pouvait-elle comprendre la gamine, à la crainte de chaque signal corporel, du moindre tremblement, de la moindre teinte jaune dans l’iris ? Elle et ses recommandations bienveillantes, comment pouvait-elle saisir toute l’étendue du dilemme déchirant, le choix de la drogue ou de la folie ? Comment saisir les heures entières passées à visionner son passé, à regretter ses paroles, ses gestes, ses erreurs irréversibles ?
Toutes ces questions, elles les auraient volontiers confiées aux murs d’une voix venimeuse, l’œil acéré comme un croc. Mais la raison l’emportait : la gamine ne pouvait pas comprendre, tout ça, elle n’avait à vue d’œil qu’une dizaine d’années… Du moins, Marlyn lui souhaitait de ne pas comprendre. Vraiment.

Et pourtant, bien des alarmes soulignaient le contraire. Le gémissement de l’enfance à qui on ravit des souvenirs sanglants, les membres serrés autour des genoux comme des ancres, des ammares ; un maëlstrom de sentiments sur la mer opalescente de ses grands yeux que zébraient, avides, des éclairs du passé. Ses mots avaient réveillé une bête dans la jeune tête, ou elle n’aurait pas gémi à leur écoute, comme des syllabes qu’on connaissait trop bien et qu’on craignait d’entendre de nouveau. Qu’est-ce qui pouvait arriver quand on n’avait que douze années ? Quels tourments pouvaient teinter le saphir de nuages ?
Et surtout, quel sentiment en éclairait les orages comme un soleil inondait une scène dévastée de pluie ? Cet éclat dans le regard entier de Miaelle lui brûlait la rétine, l’inquiétait. On lui avait parlé de la folie des enfants. On lui avait parlé de leurs mots plus vrais que la Dame, qui coulaient iridescents des lèvres innocentes, jusqu’à l’oreille d’une Marlyn interloquée, muette, aux sens détraqués.
Sens alertés, recul nerveux de membres cassés, raidissement des os à l’approche de l’autre, contrôle perdu. Présence rassurante, mordante de l’acier glacé sur ses tendons crispés, sécurité de la mort à offrir.
Ses yeux la brûlaient. Sa main sur son visage la glaçait. Sa cicatrice qui lui tordait les traits, que l’enfant parcourait innocemment des doigts comme on toucherait une curiosité.. Marlyn n’aurait pas pu être plus raide qu’à cet instant, de ce contact entre ses erreurs et l’innocence tâchée de cette petite fille. Deux personnes avaient déjà eu l’audace de mettre de la chaleur sur son visage.. L’une était ennemie à son cœur, l’autre possédait son âme. Qu’était cette fille ?

La vue des cicatrices de Miaelle paralysa Marlyn d’effroi. De surprise, d’incompréhension. Quelles étaient ces marques ? Qu’est-ce qui avait pu infliger les cercles brûlés sur la beau blanche des petits bras ? La Mentaï qui pourtant était une véritable encyclopédie ambulante des marques en tout genre, était surprise. Pas tant par leur forme. Non.
C’était leur existence. Avec un sentiment âcre (était-ce du regret, de la honte ?) contre les dents, Marlyn rangea le poignard qu’elle avait hâtivement dégainé dans sa crainte droguée. Sa crainte d’une petite fille. Qui lui souriait, comme si ces marques n’avaient pas d’importance, que ce temps était révolu, que la tempête était apaisée. La jeune femme à l’œil unique avait la prunelle rivée sur la petite, incrédule. Que voilaient ces deux yeux qui voyaient encore, cet océan de souvenirs derrière lequel il y avait une plage de cendres ? Qui pouvait avoir l’âme assez noire pour éclabousser l’innocence d’un enfant de ses vices ?
Un tressaillement secoua Marlyn. Son corps se leva à moitié, hagard de la pensée qui venait de le traverser. Les deux yeux curieux qui se fixaient sur elle la brûlaient, lui transperçaient les nerfs d’une vérité qu’elle avait oublié. La gamine, avec ses cercles sur les bras, son regard innocent, son espoir qui venait de crocheter la sensibilité de la Mentaï comme on s’accroche à un saveur ; la gamine venait de lui rappeler que.

Elle-même avait déjà tué des enfants.


- Je…

Disjonction. Des paroles joyeuses de Mialle qui coulaient à flot sur ses blessures jusqu’à ces grands yeux qui avaient déjà connu la torture, tout était invraisemblable. Marlyn aurait pu marquer ces cicatrices sur les bras de la petite fille, elle aurait pu planter des souvenirs si cauchemardesques du bout de son poignard, et provoquer par la violence les gémissements qu’elle avait éveillés par la compassion.
Et n’en ressentir aucun remords. Jusqu’à maintenant. Que les circonstances étaient réunies, comme si la Dame et le Dragon avaient catalysés les facteurs de la discussion. En d’autres circonstances, Marlyn aurait pensé aux petits corps qu’elle avait mutilés, auxquels elle avait ôté l’énergie vitale avec le détachement le plus profond. En d’autres circonstances, elle aurait pu masquer le gouffre qui se creusait dans sa conscience, mais la maladie et le poison lui diluaient les réflexes et noyaient son intégrité. Et quoi justifier à cet effroi qui lui faisait contracter les épaules et relire la liste de ses victimes juvéniles ?
Quoi dire à la petite fille qui lui avait donné sa confiance et son affection en lui montrant ses cicatrices comme on exhibait un trophée ?


- On ne devrait jamais faire de mal à des enfants. Il faut avoir l’âme plus pourrie qu’un marais pour être capable de blesser un enfant. Ceux qui t’ont marquée comme du bétail sont des monstres…

Sa voix blanche, hachée, contrastait trop. Elle n’y croyait pas. Pas complètement en tout cas. Depuis longtemps elle avait sacrifié la conscience morale à ses meurtres, oublié le remords pour détruire ce qui se trouverait dans son passage. Parce que c’était ce qu’on avait fait d’elle. Par les mots, les maux, les coups, la mort. Et que très probablement, rien n’y changerait, elle serait toujours la même le lendemain, avec sa liste de sang dans l’esprit comme un ver gluant, tâche parmi les tâches de son existance. Elle tuerait toujours, avec moins d’ardeur, sans le sourire, mais…
Pour justifier son demi-geste, Marlyn se leva complètement, l’échine tordue, pour aller rejoindre la gamine qui avait fini de se sécher les cheveux, le sourire blanc encadré par les fils noirs de ses cheveux. Le combat de ses convictions lui rendait le souffle inégal et le regard fuyant. Sa main gauche, aux phalanges ressoudées, sa main qui avait déjà ôté la vie d’une strangulation, volé l’éclat brillant des yeux des enfants, se tendit vers une mèche geai qui était retombée sur le nez de Miaelle, et l’écarta avec plus de raideur qu’elle n’aurait voulu. Marlyn était peu habituée à se mouvoir avec douceur, sans but de nuire, de blesser, de défendre chèrement sa vie rapiécée.


- Il n’y a rien de joli dans mon œil, n’est-ce pas ? Juste de la drogue, et des morts.

C’était une soirée étrange. Une ancienne personnalité qui s’extirpait de son tombeau du passé pour venir coller à ses cordes vocales, faire vaciller la fin de sa phrase. L’instant la dépouillait de tout motif, faisait tomber ses barrières à grand fracas, comme on ôte des pièces d’armure. Marlyn avait de nouveau quinze ans, qui se promettait d’être digne, d’être une grande Sentinelle pour que personne n’ait à souffrir. Non.
Marlyn n’avait plus d’âge, qui contemplait son existence tordue comme un tronc mort, cette existence qu’elle appréciait et dans laquelle elle s’était terrée pour ne pas mourir. Même la mort était plus noble que son état actuel. Etat auquel elle s’agrippait comme à une paroi glissante, jaloux de cette petite fille aux yeux céruléens qui avait encore toute la vie pour oublier ses cicatrices et son passé.

- Ces marques, sur tes bras... j'aurais pu te les faire. Et te tuer. Parce qu'on m'a ôté la beauté du monde, et que je vois que des cauchemars. J'ai l'âme pourrie. Comment tu fais pour ne pas avoir peur ?

Sa voix s'était élevée car la fatigue lui faisait perdre un peu de son calme et le poison se chargeait du reste. Elle avait envie de laisser aller, ce qu'elle s'empêchait tout le temps de faire, de sortir des larmes qu'elle avait asséché depuis longtemps. Son oeil luisait de pleurs, mais rien ne coulait sur sa joue brûlée. Sa main glacée tremblait, toujours frôlant les cheveux rebelles de Miaelle.
C'était fascinant, ces deux âmes que le destin avait amené dans la même salle, et qui s'entrechoquaient de leur innocence pour l'une, noirceur infinie pour l'autre, qui s'entremêlaient de points communs et de cauchemars, de paniques et d'angoisses que les mots réveillaient en elles deux.



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MessageSujet: Re: Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé]   Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé] Icon_minitimeSam 4 Sep 2010 - 11:47

[ pardon pour le retard Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé] Icon_redface j'espère que ça te plaira, je me suis bien amusée dessus ^^]


Il ne faisait pas si froid, finalement. Alors que ses cheveux dégoutaient encore dans l'âpre serviette, Miaelle, fascinée, se noyait pour ne pas avoir à respirer. Un sourire discontinu tendait ses fossettes et ses yeux, libérés de la barrière de ses cheveux, enfin, pas tout à fait. Elle voyait bien le trouble de l'autre, après tout, peu de personnes avaient du être gentils avec elle, ça se voyait dans son œil. Les mouvements instinctifs, les regards volés aux murs, enfouis parmi les délires de la drogue, elle voyait cet éclat animal, qu'elle finit d'identifier avec un frisson qui lui ôta le sourire. C'était l'éclat acéré de son Papa lorsqu'il avait combattu les bandits, il y avait toute une vie, semblait-il. Elle avait eu vraiment peur, à ce moment là. Peur que son Papa ne redevienne plus comme avant, peur d'être seule, à nouveau, à la merci des cauchemars et du sang qu'ils faisaient gicler sur ses pensées, peur de tomber dans l'abime qui s'était installé dans ses yeux. Miaelle trembla. C'était de sa faute. Cette vérité l'emprisonna, un instant, faisant peser tout le poids du monde sur ses frêles épaules, tandis qu'elle baissait les yeux sur le granit de la salle de bain.

De sa faute. Les intonations de la femme borgne étaient saccadées, violentes, écorchées, voilées par la drogue, par les sentiments que faisait naître Miaelle, cette nuit où ni l'une ni l'autre n'aurait du se rencontrer. Mais par dela la peur et la honte, elle était fascinée par cette femme qui ne l'avait pas repoussé. Elle buvait ses mots, et d'étranges histoires se mirent à onduler dans son esprit névroser, mettant en scène un ange déchu condamné par les humains, qui vivrait reclus en ne se montrant qu'aux enfant perdus. Ou alors c'était une femme comme les autres, l'âme façonnée par le mal mais qui restait gentille malgré tout, ou peut-être l'incarnation elle-même de la dame qui offrait la lumière aux ténèbres. En réfléchissant à cela, la petite fille détournait ses pensées du frisson glacé de la peur, le besoin de lui faire confiance était viscéral, primordial et compulsif, elle ne supportait pas d'avoir peur et, ainsi, tant qu'il ne se passait pas quelque chose de profondément bouleversant qui lui mettrait la réalité en face, elle pouvait jouir des hallucinations qu'elle se créait sur l'autre femme. Elle était gentille, et presque belle malgré ses cicatrices. C'était tout ce qui importait.

Aux paroles suivantes, un grand sourire vint dévoiler ses quelques quenottes. Voila bien la preuve qu'elle était une femme remarquable ! Elle ne lui ferait pas de mal, puisque c'était pas bien de faire souffrir les enfants. Mais de toute manière, cela importait peu. Elle ne voulait pas faire pitié à la jeune femme, ni la mettre en colère de quelque manière que se soit. Mais si la pitié lui permettait de rester auprès d'elle, alors elle n'hésiterait pas. Elle la voulait pour elle, pour son esprit névrosé. Oh bien sur, elle avait son Papa, mais son existence manquait cruellement d'ancrages, d'horizons fixes, alors que le sang et les cauchemars barbouillaient encore ses beaux yeux bleus. Elle avait besoin d'une présence rassurante, alors qu'il n'était pas là, c'était vital, pour son esprit comme pour son corps. Le temps diluait, écrasait, réduisait en poudre, tout ce qui avait de la matière. Elle mourrait avant que ses cauchemars disparaissent. Alors elle pencha la tête et, les larmes au coin des yeux, le sourire aux lèvres, elle pressa sa joue dans la paume qui lui caressait les cheveux. Tellement fragile...


"ne t'en va pas, s'il te plait, j'ai besoin de toi. J'ai peur toute seule, Papa n'est pas la, mais toi si, et je t'aime beaucoup. Viens avec moi, reste, je te présenterais mon Papa, tu l'aimeras bien, tu verras, c'est quelqu'un de merveilleux, lui aussi. Je suis à toi, dis, tu veux bien être à moi aussi ? Je connais plein de choses sur les plantes, et Papa encore plus, on pourras te soigner, tu n'auras plus à prendre la drogue qui t'empoisonne, moi j'pense que faut être aussi méchant que tu le dis pour donner ça à quelqu'un, ça fait plus de mal que de bien. Viens avec moi ou reste, s'il te plait, comme il te plait..."

Elle se balançait légèrement, doucement, tout en s'agrippant à cette main immatérielle, tout contre sa joue mouillée de larme, de détresse refoulée. Elle tenta de juguler son souffle, pour se calmer, et retint de crocheter las phalanges qui s'éloignaient, telle une possédée. Non, elle eu juste une grimace étrange, mais réussis à contenir les pulsions que lui dictaient son corps. Lorsque son sang cessa de bouillonner, elle releva les yeux vers les cicatrices du visage de Marlyn et dis, d'une voix douce :


- Tu sais quoi ? En fait ton visage n'est pas beau. C'est vrai, t'as plein de cicatrices, un oeil en moins tout ça, mais justement, ce qui lui donne encore un peu de charme, c'est ton oeil. Il a une belle couleur, tu as de longs cils noirs, et si on s'y fixe on pourrait presque y rester. Ton oeil il est beau, tu sais, c'est ce qui a autour qui est moche. Un peu comme ta vie, en fait, j'suis sure que ton coeur il est bon, mais c'est les gens autour qui sont moches et qui ont torturé le reste, le rendant affreux. Moi c'est ça que je pense. Il y a peut-être de la drogue et des morts, mais y a aussi du bleu et du noir, ça va bien ensemble.

Elle se tu, la tête légerement penchée sur le côté, inconsciente de la portée de ses paroles, ses pensées se traduisant instantanément en mots alors qu'elle contemplait sa prétendue grande soeur. Elle était persuadée que l'autre n'était pas mauvaise, et pas un instant l'idée qu'elle soit un mercenaire mentaï ne l'effleura. Après tout, eux étaient méchants, pas elle. Sa désilusion ne la sauva pas du reste de ses parole,cependant. Ne s'y attendant pas, ou ne voulant pas s'y attendre, elles lui firent d'autant plus mal, la frappant au creux du ventre comme un coup de botte souillé, écrasant sa poitrine pour en extraire le souffle, et salir ce qui restait. Non, elle ne pouvait pas avoir tué d'enfant, elle venait juste de dire que c'était mauvais, qu'il fallait avoir une âme pourrie, elle ne pouvait pas ainsi se dénigrer !

Miaelle secoua la tête, tout en se tordant les doigts dans la serviette. Ses cheveux tracèrent d'horribles cicatrices sur son visage d'albâtre, alors que ses yeux se fermaient, convulsivement serrés. De sa gorge s'échappa un sifflement plaintif alors que tous les muscles de son corps se contractaient. Elle ne pouvait accepter l'évidence, que cette femme ai l'âme souillée et c'était la nuit qui se refermerait sur elle, la noyant dans ses ombres tourmentés. Sa gorge s'ouvrit et un torrent de paroles se déversa dans la salle, tranchant le silence à grand coup de cutter et de détresse :


- Nan c'est pas vrai, tu peux pas dire ça ! Si t'as tué des enfant, pourquoi moi je suis toujours la ? T'es gentille, j'en suis sure, alors dis pas de bétises, dis moi que tu m'aime et que tu me sauveras des ténèbres, dis moi que tu me laisseras pas ! Pourquoi tu dis des choses affreuses comme ça, t'as dis qu'il fallait avoir l'âme pourrie, mais j'suis sure que toi ton âme elle est belle, un peu comme ton oeil, tortuée autour mais brillante, ça doit être de là que vient la lumière de tout à l'heure... S'il te plait, ne me laisse pas, ratrappe tes mots, et cache les, si vraiment t'es méchante, alors fait comme au début, cache la mauvaise partie et laisse moi la gentille, j'en prendrais soin, je te le promet...

Sa voix, de stridente s'adoucit, se fatigua et se voila, alors qu'une grosse boule montait dans sa gorge. Titubante, elle se leva, et s'effondra dans les bras d'une Marlyn interloquée. Elle s'agrippa avec la force des enfants, sans mesurer la force de ses ongles qui se plantères dans les vêtements et la peau de l'ombre de son amie. Elle pouvait être gentille, même si elle était méchante. Miaelle voulait juste regarder le bon côté, retrouver une confiance avzeuglée, mais une confiance quand même. Elle murmura :

- J'ai peur de toi. Tu sais pas a quel point. Mais je pense que tu te trompe sur cette peur. J'ai pas peur de la douleur écrite sur ton visage, j'ai pas peur des cicatrices, du sang, des entrailles ou de la violence, j'ai déja vu tout ça. J'a juste peur que tu me laisse et d'être encore toute seule. Moi j'men fiche des cicatrices, c'est que du physique. J'veux ton coeur, celui de la gentille, juste celui là. Le reste tu le gardes, j'en veux pas.

C'était des paroles hachées, hésitantes, alors que le manque de sommeil et le contrecoup de la peur se manifestaient dans son cerveau sous forme de discours, de mots insoupçonnés. Les bras de Marlyn tressautèrent, et Miaelle eu un instant la certitude qu'elle allait la repousser, pour s'en aller. Après tout, elle n'était qu'une enfant, et en plus elle lui avait vomi dessus. Peut-être que sa part de gentille avait été épuisée, et que maintenant elle allait la tuer, la noyer peut-être. Mais elle n'avait pas peur. Entre les brumes de son esprit déchiré,elle ne souhaitait que rester encore un petit peu là, ça ressemnlait presque à cet endroit où elle se blotissait sur son Papa. Tout près de son coeur, qui battait la chamade à présent. Elle leva les yeux et croisa un court instant le regard de Marlyn.


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MessageSujet: Re: Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé]   Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé] Icon_minitimeSam 9 Oct 2010 - 23:06

C’était étrange.
Cette tornade de syllabes à coins rapeux, une véritable tempête orale dont les accents tailladaient l’esprit plus sûrement que l’acier mordait la peau. Une incarnation des éléments déchainés, rebondissant en échos de désespoir sur le carrelage mat ; c’était presque beau. Aussi douloureux que fascinant. Un maelstrom de voix défaillante, de tons hérissés de pointes et de plaintes ensanglantées.. On risquait de s’y perdre en tendant les mains pour se raccrocher à la réalité, de disloquer son intégrité et l’impassibilité de sa pupille. Il y avait danger de délitement à repousser les accusations, à les tordre pour en faire une réalité moins violente, à s’arc-bouter pour les rejeter et les considérer comme des mensonges. L’œil bleu tempête de la Mentaï alla fixer une goutte d’eau qui descendait mollement d’une des mèches sombres de Miaelle, s’y noya et trouva le répit et la patience d’accepter la plainte, le long déchirement sentimental qui résonnait à ses tympans.
Elle accepta les mots les uns après les autres, comme on avale de la lave en fusion, sans regarder les deux yeux qui lui crachaient leur tristesse. Marlyn n’arrivait pas à comprendre les mécanismes qui animaient l’enfant. Et ne chercha plus à y trouver une autre signification qu’une colère informe déversée en cris, qu’un exutoire sonore destiné à renverser son image, son être maléfique. Le corps mort en attente d’une accalmie, la jeune femme souffrit les accents larmoyants, attendit le silence.
Il lui coutait de rester inactive à ce déversement de tristesse quand elle-même sentait son être fragmenté par le restant de drogue, la fatigue, le froid, la maladie, les blesures… les reproches. Les ordres donnés d’une voix stridente. L’ordre de prononcer des mots auxquels elle ne pourrait jamais sémantiquement croire, dans lesquels elle ne pourrait pas mettre la vraie intonation, les vrais sentiments. Elle ne l’aimait pas, cette fillette. En temps normal, elle l’aurait considérée comme un élément de décor nuisible auquel terminer la plainte par un couteau dans la chair. Cette nuit elle était juste trop fatiguée.
Se disait-elle.

Elle n’avait aucun moyen de connaître la vérité profonde de l’instant ou l’ancrage de son être ; autant laisser aller. Laisser échapper les souvenirs et la liste des morts par la sueur de ses tempes, laisser suinter la douleur par les pores de sa peau. Laisser couler sa colère / son potentiel remords par quelques larmes qui allaient se perdre dans la crevasse lisse de son visage, qu’elle oubliait rapidement.

Accueillir sans refuser l’enfant en pleurs. Quand bien même elle aurait voulu s’en défaire, il lui aurait été impossible. La gamine froissait ses vêtements dans ses poings fermement agrippés, et la Mentaï n’avait pas la force physique de l’en détacher ; parasite que l’on ne saurait extraire d’une blessure. Qui vous ponctionnerait votre volonté pour s’en nourrir. Et vous la rendrait en retour en retournant au silence, à l’immobilisme. La Mentaï n’eut pas le temps de retrouver sa stabilité mentale que d’autres mots balayaient encore son esprit, plus calmes, moins instinctifs.
Etait-ce cela l’enfance ? Une suite de demandes, d’ordres et de requêtes pour une partie du cœur des gens ? En ce cens, Marlyn pouvait tout aussi bien avoir commencé à exister adulte. Elle qui avait choisi de renier ses attaches au passé ne pouvait se refléter ni se projeter dans la conscience de la gamine. En revanche, elle pouvait, en soutenant son regard, passer une main dans ses cheveux courts qui avaient la même teinte suie que les siens, observer le reflet de son propre œil dans le bleu de l’enfant ; profiter de tout ça pour calmer sa respiration.
Retrouver l’équilibre. Marlyn prononça les mots mécaniques qui devaient lui permettre de crocheter le réel et d’apaiser les premiers tourments :


- Je t’aime. Je te sauverai des ténèbres. Je ne te laisserai pas.

La suite, elle aurait pu la continuer sans problème, si interruption intempestive de ses neurones irrités il n’y avait pas eu. La drogue ne faisait plus effet. Et avait choisi de donner sa démission dans un dernier spasme corporel, tandis que la migraine et le déchirement de la moelle reprenait sa place à la manière d’un félin tranquille, habitué de l’endroit. Instinctivement, Marlyn resserra son étreinte autour du petit corps qui l’entourait convulsivement : ses tremblements de surprise étaient masqués par un redressement de posture, un raclement de gorge, et le fait qu’elle déplie ses longues jambes pour qu’elles viennent entourer la gamine au lieu d’être coincées dessous.
Une respiration profonde. Une acceptation de la migraine en tant qu’élément du monde dont la destruction appartenait au futur. La douleur aigue l’empêchait de se concentrer sur autre chose que le présent, d’aller tordre l’instant sous des considérations chaotiques ou meurtrières : tant mieux.
L’œil fermé, Marlyn posa lentement sa tempe contre celle de la gamine. Elle sentait le cœur de la petite battre sous la violence de son désespoir au même rythme que le sien propre se saccadait de douleur ; elle entendait résonner leurs nerfs temporaux l’un contre l’autre sous des chimères et des angoisses différentes. Les doigts arachnéens gauches de la jeune femme allaient et venaient dans la chevelure désordonnée de la petite. Ce n’était pas vraiment de l’affection qui l’y poussait, plutôt un automatisme d’humanité, une attache civilisée pour résister à l’élan sauvage de son corps, de ses convictions, de ses réflexes bestiaux.


- Si je te donne mon cœur de gentille, je n’aurai plus rien en moi pour contrôler mon autre partie blessée -Un silence.- Oublie ce que je viens de dire.

On pouvait suivre à la décontraction des muscles de la petite le sommeil qui commençait surement à la gagner, nichée comme elle était contre la jeune femme ascétique. Elle-même commençait à céder du terrain à la fatigue, à l’engourdissement que la douleur provoquait dans ses muscles. Marlyn raffermit sa prise contre la gamine et changea de position pour soulager son dos supplicié, une jambe étendue devant elle, l’autre ramenée contre sa poitrine pour servir de dossier à l’être qu’elle tenait dans ses bras, qui laissait sur sa peau des traces rougeâtres où ses ongles avaient griffé.
La Mentaï pénétra les Spires avec prudence pour ne pas sacrifier son énergie, et les entoura toutes d’eux d’une aura de chaleur artificielle, qui acheva de sécher leurs vêtements et leurs yeux humides. La pièce en elle-même, couverte de marbre des murs au plafond, était glaciale. Mais transposer une impression de tiédeur agréable dans la réalité ne requérait que très peu d’énergie, puisqu’il n’y avait rien de visible à visualiser, puis faire basculer dans la réalité. Juste des impressions.
Cet oasis de paix après la tempête de leurs tourments respectif semblait difficile à croire. Mais il était pourtant bien là, et peu s’en fallait pour que Marlyn décide d’y rester toute une journée de plus. Mais l’aube n’allait sûrement pas tarder, et les lève-tôt qui se trouvaient dans cette maudite Académie iraient bientôt prendre leur bain. A l’instinct, la Mentaï jugeait qu’il restait encore une heure ou deux avant l’aube, mais si l’enfant tombait dans un sommeil vraiment profond, elle n’arriverait pas à l’en sortir avant des heures, et il serait problématique d’avoir à transporter quelqu’un d’endormi à travers tout l’Académie en étant soi-même vêtu d’un pantalon et d’une simple chemise, et revenant d’un trip drogué.


- Tu dors ?

Une petite partie d’elle-même lui suggérait de ne pas se soucier des soucis, de passer plus tard pour une élève étrange plutôt que d’avoir à se relever et retourner à ses tourments ordinaires. Mais dormir lui était interdit ;
Tant que le mal sonnerait à ses tempes en de longues ondes brûlantes, sourdes, retorses.


Miaelle Campbelle
Miaelle Campbelle

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MessageSujet: Re: Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé]   Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé] Icon_minitimeDim 24 Oct 2010 - 18:10

Elle vit bien la portée de ses mots sur le visage émacié et trouble, sous les larmes. L'impact des syllabes comme autant de caresses, de coups, de griffures, d'éclaboussure. Le froncement de sourcil était net, l'oeil plissé et les muscles contractés, la femme-lumière souffrait. Et c'était entièrement sa faute. Miaelle plissa les yeux, les ferma fort, pour s'extraire de ses doutes, de ses peurs d'être une petite chose fatigante dont on voudrait se débarrasser, elle ne voulais pas lire ces émotions la sur le visage torturé bien qu'elle ne sache si elle saurait les détecter. Dans le doute, elle se mura dans le silence et enfoui son visage contre la poitrine de Marlyn, écoutant avec attention ses battements cardiaques saccadés. Le débit du coeur, rapide, emporté, la renseignait beaucoup sur l'état de sa détentrice. Focalisée, la petite entendait la drogue se diluer, marteler la cage thoracique comme pour s'en échapper, elle entendait le sang pulser, emportant avec lui les douleurs et les tortures dans une danse arythmique et violente. Les mots que la jeune femme prononça firent presque sursauter la petite fille tant sa concentration était intense.


Elle retint de justesse une exclamation joyeuse, banda ses muscles pour ne pas bouger, pour rester immobile, dans ses bras, pour ne pas l'abreuver d'une nouvelle tornade de paroles. Désormais, elle ferait tout pour ne plus voir cette indifférence douloureuse que l'autre avait un temps laissé paraître. Aussi resta t-elle silencieuse,espérant, craignant d'entendre à nouveau d'autres mots d'amour, de stabilité, de tendresse, de promesse. Même si, au fond d'elle, elle percevait le timbre vide et noir de la phrase, sa valeur orale plus que morale et la douleur qui transpirait de leur séparation hachée. Elle ne dit rien, ne montra rien, les joues baignées de nouvelles larmes. Elle avait soif. Elle se mit à lécher doucement les minuscules rigoles que l'humidité de ses cheveux gonflait sur la peau marbrée de griffures.

C'est lorsque ses paupières se rouvrirent d'un coup au son de la voix de la femme, qu'elle sut qu'elle s'était assoupie. Enfin, plutôt que les paroles, c'était aux vibrations de la peau sur laquelle elle avait posé sa joue qu'elle devait son réveil. Tout comme précédemment, elle resta de marbre, les prunelles fixées sur le tissu qu'elle avait continué d'agripper dans son semi sommeil, redécouvrant à la faveur de la lumière magique l'entrelacs des veines sous la peau, l'incroyable délicatesse des os et des tendons, la finesse de l'attache et la puissance que ses doigts retenaient. Le sommeil menaçait de l'emporter, etelle n'arrivait plus à bien fixer son regard. Elle était heureuse d'être là, frigorifiée, l'âme en miette, l'esprit ravagé, la peur au ventre, heureuse de sentir autour d'elle les bras de la jeune femme, ses paroles envoutantes, son pouls saccadé et ses cicatrices contre sa tempe. Deux âmes damnées, détruites par la fureur des hommes, torturées de vices, de mensonges, de violences, internes mais aussi externes. Miaelle savait intuitivement tout cela, trouvant en Marlyn une âme sœur déjà plus avancée qu'elle sur le chemin de la souffrance et de la corruption du monde. Elle était un guide, une étoile tordue à suivre, l'éclat vitreux de la pupille de l'homme ivre mort qui fantasme sur le visage d'une épouse aimée et décédée. Lel ien était morbide, certes, mais si, comme elle avait entendu le dire, c'était dans la souffrance que l'on trouvait ses vrais amis, alors elles deux seraient l'une pour l'autre cet ilot, cet exil espéré pour se retirer du monde. En Miaelle, Marlyn trouverait une voie à enseigner, une âme à guider pour que, peut-être, les prunelles ne perdent pas complètement leur naïveté, leur émerveillement, au profit de la peur d'un lendemain qu'elle avait déjà vécu à outrance. Ou tout du moins, la petite essayait-elle de s'en convaincre par tous les moyens.


Des spasmes se mirent à parcourir son petit corps et, ensommeillée, ses résolutions vacillèrent. Sa conscience luttait contre l'ordre d'oublier la phrase précédente, avec l'inconscient et l'habitude de laisser le flot de ses pensées couler entre ses lèvres. Elle ne fut pas assez forte et, d'un murmure ensommeillé, elle troubla de nouveau le silence, l'esprit embrumé.



  • Pourquoi je devrais oublier ? Je... c'est sans doute les paroles les plus sincères que tu m'as dites, je crois. Et puis... Tu n'es pas obligée de tout me donner, si c'est juste un p'tit morceau ça m'suffira, comme un morceau de lumière. Et en échange je te donne un ptit bout de gentil de moi, même si je t'agace, même si tu me mens pour me faire taire, même si je t'ai vomi dessus, je t'aime et c'est le plus important il me semble. C'est ce que Papa dit toujours. Je t'aiderais, je... Les plantes... Comme des ellipses, ou plutôt l'avantage du... Des.. Des nuages, lisses, l'arc en ciel... Je...



Sa phrase mourut en douceur alorsqu'elle gisait, endormie, contre la jeune femme. La soudaine tiédeur bénie qui avait suivit sa tirade, comme une réponse sensorielle, acheva ce que les tensions avaient enclenchées. Harassée, elle laissait couler ses pensées comme autant de rêves bariolés de couleurs électriques prendre possession de son corps, oubliant pour un moment les douloureuses désillusions de sa conditions. Elle n'entendit pas la question de Marlyn alors que ses doigts stoppèrent leur valse douce dans ses cheveux mouillés, pas plus qu'elle ne sentit les soubresauts de la femme-lumière qui la déplaçait pour se relever. Eut-elle été consciente que l'hésitation qui marquait ses gestes lui aurait fait plaisir. Recroquevillée, elle ne sentit pas la jeune femme cesser de lutter contre son poids endormi et chaud, et les trainer toute deux vers le mur pour soulager son dos harassé. Plus rien de bouger alors, et le masque de cicatrice se relâcha, les muscles se désolidarisant un par un pour faire apparaître en filigrane la décontraction des gens endormis, la beauté de son visage plus serein qu'il ne le serait jamais éveillé.


***


Miaelle ouvrit les yeux sur le visage horrifié d'une probable élève à la peau boutonneuse. Cette dernière fixait sans la moindrere tenue les traits torturés d'une Marlyn encore plongée dans les abimes du sommeil. L'écœurement qu'elle lut sur la moue de ses lèvres fit bouillir son sang et elle se leva, chancelante, ses genoux écorchés lui criant leur douleur par vagues successives à son mal de gorge qui enflait. D'une voix éraillée, elle essaya de crier mais ne parvint à émettre qu'un son écorché et râpeux, comme une scie sur un morceau de bois.



  • Qu'est-ce que t'as toi, tu veux sa photo ? Si t'aime pas les cicatrices t'as qu'a t'en aller, de toute manière c'est toujours plus beau que les pustules qui te servent de visages !



Son visage haineux aurait pu être comique si son ton n'avait été aussi venimeux, les paroles pareillement crachées. La jeune fille rougit sous l'effet de la colère et s'avança, la main levée en l'air de manière menaçante :



  • Dis donc toi...



Au même moment, Miaelle sentit Marlyn se réveiller.




[ Bon, pour la fin j'ai fait un peu comme je voulais, ne sachant pas trop si ton personnage resterait ou pas ^^ Donc si tu veux changer quoi que se soit, si tu veux que le rp se termine par le départ de Marlyn, j'édite ^^ en espérant que ça te plaise !]

Marlyn Til' Asnil
Marlyn Til' Asnil

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MessageSujet: Re: Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé]   Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé] Icon_minitimeLun 29 Nov 2010 - 1:18

Délie mes sens, endors-toi et emmène dans ton sommeil les mille et une chimères qui nous ont traversées. Oublie les sons que tu viens d’émettre, laisse-moi nous contempler, toi dans mes bras comme une poupée brisée, moi déchirée en deux par la drogue et la volonté de disparaître, et de te laisser reposer sur le carrelage froid.

L’attention de Marlyn se relâchait, elle sentait ses griffes disparaître une à une des Spires, comme les attaches d’un pont qui cassent, avec cette majestueuse lenteur de l’irrémédiable. L’aura de chaleur qu’elle entourait autour d’elles s’estompa dans la continuité et sa propre énergie lui échappa par particules. Le carrelage sur lequel elle reposait perdait en température comme elle perdait en attention : elle se savait incapable de tenir debout, plus encore de porter une petite fille. Mais cette obstination à vaincre son corps mutilé la fit tenter plusieurs fois de redresser l’échine, de raidir les bras pour vaincre la pesanteur. Chaque échec amenait son lot d’amertume, et des milliers d’échardes dans la moelle. C’était impossible de combattre, de résister au sommeil.
Sommeil qui endormirait la douleur et les derniers déchirements dans le coin de l’œil, sommeil qui lui ferait oublier les petits bras qui entouraient son thorax et froissaient ses vêtements, sommeil qui la ferait s’échapper de cette prison en carrelage, où elle était au moins rivée jusqu’au matin.

Un dernier effort à fournir avant de laisser les ombres envahir les murs et disséquer sa conscience dans des tourbillons cauchemardesques. Un bras vint s’agripper au sol lisse, et par traction, elle glissa pour se rapprocher du mur. La masse inerte de la petite fille rendait la tâche difficile, compliquée plus encore par ses jambes gourdes et la très faible luminosité. Le froid uniforme qui rayonna dans son dos indiqua à la Mentaï qu’elle avait enfin atteint le mur, et qu’elle pouvait enfin relâcher toute attention.
C’était comme diluer du sang dans un baquet d’eau. Les contours de la pièce perdirent toute unité. La fatigue volait à Marlyn le contrôle de ses muscles : elle pouvait sentir son œil tressaillir par à-coups. Le monde disparaître sous sa paupière. Le silence de l’eau immobile se confondre avec celui des murs, la respiration profonde de la gamine distribuer les secondes jusqu’à ce que…




Des voix. Distantes, diluées. Des cris parfois, tordus et fatigués, de ceux qu’elle entendait presque toutes les nuits quand les cauchemars, ces juments de nuit à l’œil rouge, lui volaient sa tranquillité. Des couleurs explosées sur le mur de sa conscience, des mouvements très rapides, tournoyants à l’unisson, et des voix encore, deux voix distinctes qui se détachaient du maelstrom gluant, deux voix dont le propos semblait plus proche, plus…

Collés les uns aux autres par la sueur, ses cils s’ouvrirent sans aise sur un monde éblouissant de clarté. Le soleil avait du percer la vitre et inonder de lumière atroce la salle des eaux. Sur ce sol, des ombres. Un bras levé, un être recroquevillé. Que..
Une petite fille, aux grands yeux, encore toute proche d’elle et dont elle pouvait encore sentir la chaleur ; avait-elle dormi dans ses bras ? Les souvenirs s’amalgamaient et ne se clarifieraient que dans quelques minutes… Dans une série de claquements d’articulation écœurants, Marlyn redressa sa longue silhouette, endolorie par une position inconfortable et la convalescence d’un trip drogué. Elle faisait une tête de plus que l’inconnue. Semblait en faire deux, en voyant l’autre se ratatiner sur elle-même. Marlyn leva la main vers son propre visage ; la surprise l’immobilisa une fraction de seconde quand elle se rendit compte que sa figure était à nu, sa cicatrice visible et les déchirures de ses traits palpables sous ses doigts. Mais qu’avait-elle fait la nuit précédente ?

L’autre main vint saisir le poignet gras de l’élève craintive, qui avait menacé de gifler une petite fille. Une petite fille pour qui elle avait… non, pas de l’affection. Les images de la nuit précédentes revenaient petit à petit, les psychoses, les cris, les mots… L’instinct de combat de la Mentaï, écoeuré par toute cette mignardise et sa propre faiblesse de la nuit passée, reprenait le dessus. Un poing aussi dur que l’acier finit dans l’estomac de l’élève trop curieuse, qui l’avait regardée surement comme un animal de foire à qui on lançait des graines de rougoyeur. Un bruit sec quand les genoux en jupe cognèrent contre le sol ; un autre quand celui de Marlyn rencontra la machoire boutonneuse, alignant la fille sur le sol, en quelques secondes.
Des échardes qui lui clouaient le dos, ne restaient que des fantômes. De la faiblesse de cœur qui l’avait prise devant la gamine qui avait rejoint son côté et s’y était à nouveau agrippée, ne restait que la patience.

La Mentaï se détacha sans un regard du petit corps accroché au sien, dissimulant une à une les émotions qui ressurgissaient ; le chaos vainquait l’affection. Peut-être un combat gagné par la tendresse, quand elle tituba et posa sa paume contre le mur, près de la porte de sortie. Mais une guerre finalement remportée par le discipline et la noirceur de son âme, quand elle se tourna vers la gamine affligée :


- Je suis un être de violence, Miaelle. Pas une grande sœur.

Comment elle avait appris son nom ? Un mot surement murmuré dans les limbes du sommeil, une dernière touche d’humanité qui les avait liées avant de succomber au sommeil. Un souvenir qui s’échappait comme fumée au vent, qu’elle ne ferait rien pour ressaisir. Pas maintenant, en tout cas.

Cette discipline martiale et la détermination qui guindait sa silhouette ne durèrent que le temps d’atteindre le couloir de ses appartements.
Mais le reste, les tremblements moraux en entrant dans sa chambre, l’ambre coulant dans le cristal… ça ne regardait que Marlyn.


[merci <3]


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Tu ne résisteras qu'un temps, insolente [Terminé]
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