A la découverte de la Voie (RP terminé)

[Si quelqu’un veut s’incruster, pas de problème ]

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- Tu verras bien, avait répondu Elera lorsque Kirfdéin lui avait demandé leur destination. Elle avait sourit vaguement à son humour, pas certaine qu’il ait compris ce dont elle parlait plus tôt sur la liberté. Elle verrait bien. Ils étaient ensuite allés à l’écurie, où Elera avait appris que Kirfdéin ne savait pas monter à cheval ; tant mieux, parce que malgré les cours d’équitation qu’elle avait suivi, elle n’était toujours pas à l’aise sur le dos de Komala. Et ce n’est pas qu’elle ait peur du ridicule ou qu’elle n’accepte pas ces défauts, mais elle préférait éviter de chuter tous les trois pas devant son élève, si possible. Ca pourrait attendre ; elle continuerait à suivre les cours de Dame Tova après leur retour, et il apprendrait bien assez tôt quel était son niveau en la matière… Ils partirent à pied. Ce qui, il faut l’avouer, n’était pas très prudent… mais Elera n’avait jamais été connue pour son sens du risque. Ils partirent donc, et traversèrent le ‘parc’ formé par la plaine de Shaal en courant. Le rythme d’Elera n’était pas excessivement rapide ; pour le moment, elle voulait simplement savoir combien de temps Kirfdéin pouvait tenir. Et combien de temps encore après il continuerait. Pour le pousser à ce que beaucoup appelait limites, jusqu’au bout, et qu’il découvre la vérité…

Ils devraient camper dans la plaine, mais elle comptait au moins atteindre les plateaux d’Astariul avant de revenir à l’Académie. Elle ne s’y était rendue que deux fois, la première dans une expédition dirigée par Valen, la deuxième lors de sa fuite, et ne les avait pas du tout aimés, mais elle voulait s’éloigner. Découvrir les coins de Gwendalavir dont elle avait été obligé de rester à distance depuis trois ans. Et puis, comment pourrait-elle enseigner quoi que ce soit à son élève s’ils restaient enfermés au même endroit ? Les plateaux d’Astariul, donc. Mais ils n’arriveraient pas avant le lendemain au soir, si ce n’était le jour d’après. Tout le temps d’en découvrir plus sur Kirfdéin et de trouver de quoi il était capable… Alors pendant que les bâtiments qui formaient l’Académie disparaissaient petit à petit derrière eux, elle décida de corser leur course et commença à parler.

- Qui t’a appris à tirer à l’arc ? Est-ce que tu sais utiliser d’autres armes, aussi ?

Trouver les forces et les faiblesses. Transformer les faiblesses en forces, les forces en temps marchombre. Inspirer, expirer. Continuer à avancer.

Kirfdéin avait paniqué en voyant Elera se dirigé vers les écuries. Il n'avait jamais monté à cheval. Son père en possédait un pour tirer sa charette et rapporter des vivres de la ville la plus proche. Aujourd'hui, le cheval et la charette était à Al-Jeit. Sa mère l'avait amené pour transporter ses affaires. Kirfdéin n'avait jamais trop apporché le cheval, il en avait un peu peur. Le Lotra trouvait ces bêtes-là trop capricieuses. Bizarrement, il réagissait de la même façon qu'avec les bêtes sauvages. Il n'y avait que les oiseaux avec qui il réagissait sans peur. Il espérait vivement que la professeur d'équitation lui fasse oublier cette peur maladive mais il ne voulait surtout pas tenter pour la première fois l'expérience de la montée d'un cheval en présence de celle qui lui enseignait désormais comment arpenter la Voie. En plus, il ne savait même si le voyage serait long alors c'était pas une bonne idée d'envisager de se déplacer à l'aide d'un cheval.

Elera se mit en marche et Kirfdéin la suivit. La première partie fut silencieuse et relativemment lente. Au bout d'un moment, la Lotra accéléra le pas. Kirfdéin la suivit. Il ne savait pas s'il était aussi endurant qu'elle. Il était même presque sûr qu'elle était plus doué que lui.

- Qui t’a appris à tirer à l’arc ? Est-ce que tu sais utiliser d’autres armes, aussi ?

- Mon père m'a enseigné les bases. Il m'a construit mon premier arc, mes premières flèches. Il m'a accompagné dans mes premières parties de chasses pour ensuite, me laisser seul pour que je vole de mes propres ailes. J'ai donc appris beaucoup sur le tas. Apprenant de mes erreurs pour me perfectionner. Petit à petit, je loupais de moins en moins mes cibles et les animaux que je ramenais de plus en plus de proie à la maison. Sans me vanter, un arc à la main, je suis dangereux.

Il marqua une pause pour ne pas perdre son souffle pendant sa course et il reprit:

- Pour les autres armes, c'est très différent. Je garde toujours un poignard sur moi mais je sais tout juste m'en servir. Il ne faut même pas que je tente de le lancer, sinon, je perdrais une arme pour me protéger. Pour tout le reste, c'est même pas la peine d'en parler. J'ai commencé les cours avec Hisae Til'Illan pour apprendre à me servir d'un sabre.

Nouveau silence.

- En fait, avant d'arriver à l'académie, je n'avais appris que les choses dite de "la vie" grâce à mes parents. Ma mère m'a apprit à parler, à lire, à écrire. Mon père m'a apprit à chasser, à soigner les bêtes, à reconnaître celle qui sont dangereuses. On vivait tellement reculé du monde qu'ils ont pas jugé nécessaire d'apprendre à me battre, et je compte rattrapé le temps perdu grâce à l'académie. Et toi, je suppose qu'aucune arme a de secrets pour toi?

Il continua sa course en petite foulée en attendant qu'elle réponde, légèremment en arrière par rapport à Elera.

- Tu peux suivre les cours d’Hisae, mais garde à l’esprit que le marchombre se bat différemment du guerrier. Elle t’apprendra à t’en servir, mais lorsque viendra l’heure de choisir un style, le tien sera bien différent…

Kirfdéin ne répondit rien. Il ne suivait pas les cours de sabre pour devenir un guerrier. Il n'aimait pas cette idée de donner la mort sans véritable raison. Il suivait les cours d'Hisae Til'Illan pour pouvoir se défendre si jamais on l'attaquait de trop près. A portée, il était capable de donner la mort avec ses flèches mais au corps-à-corps, il était incapable de survivre. Le Lotra peinait en suivant Elera. Il n'arrivait pas à parler sous peine de perdre son souffle. Il entendit sa maître parler en réponse de ce qu'il avait dit sur les armes. Il n'arrivait pas à ajouter quelque chose. Il ne tiendrait plus longtemps mais Elera, elle, semblait encore bien et en forme. Lui, il avait plus d'air et ses jambles commençaient à lui faire mal. Il ne savait pas depuis combien de temps ils étaient partit. Il n'avait pas calculé et il ne pouvait se retourner pour voir si l'académie était encore en vue. Il se faisait violence pour continuer sa course encore. Sans qu'il y pense vraiment, il avait ralentit, d'ailleurs il ne courrait plus, il marchait. Elera le regardait. Il avait honte d'avoir faillit à la tâche. Il était certain que la marchombre l'avait testé mais, lui, il avait échoué. Au début de sa course, il ne sentait pas son arc et son carquois mais là, désormais, ils étaient trop lourd pour lui. Il les posa par terre. Les mains sur les genoux, la tête baissée vers le sol, il dit:

- Désolé....... Moi j'en peux plus.......

Il respirait difficilement. Il avait beaucoup de mal à s'exprimer.

- Encore désolé de te ralentir....... Mais si tu m'accordes un temps de repos, je pourrais peut être repartir.... plus lentement cette fois-ci.

Il respirait déjà mieux, il releva la tête et il regarda Elera. Voulait-elle qu'ils repartent immédiatement? Il ne savait pas et surtout, il ne l'espérait pas. Ses muscles étaient encore douloureux. Elle voulait d'ailleurs peut être qu'il fasse autre chose en attendait qu'il retrouve une meilleure forme.

Elera lui tendit une gourde d'eau. Il en bu une gorgée et il remarqua que la marchombre continua encore à courir. Elle revint vers lui en ralentissant.

- Repose-toi.

Il avait déjà commencé à se reposer sans attendre la permission de la Lotra. Son rythme cardiaque revenait tranquillement à la normale. Il allait déjà mieux maintenant. Il n'avait jamais couru si longtemps de toute sa vie. Il s'étira un peu et il remarqua qu'Elera s'était emparée de son arc. Elle se dirigea vers un bosquet d'arbres. Il la suivit. Il se doutait que la marchombre voulait chasser. Depuis qu'il était arrivé à l'académie, il n'avait plus eu besoin de chasser car les cuisines étaient toujours pleines. Grâce à Elera, il allait pouvoir recommencer à traquer une proie.

- As-tu déjà chassé la crissane ? Si ce n’est pas le cas, c’est le moment de commencer…

Chasser la crissane? Et bien, Elera ne visait pas une petite proie. La crissane était réputée pour sa rapidité. Kirfdéin n'avait jamais vraiment tenté de la chasser. D'ailleurs, il n'avait jamais essayé de tuer des oiseaux. Non pas que ça le dégoutait mais il n'avait jamais cherché à les chasser. Il avait toujours préféré les proies à quatres pattes. Au moins, son voyage serait l'occasion de voir ce qu'il était capable. Pendant qu'il réfléchissait, Elera avait disparu. Allez, assez de temps perdu. La chasse est ouverte. Il s'enfonça dans le bosquet d'arbres. Il tentait de faire le moins de bruit possible. Il passa de longues minutes à chercher une crissane, une flèche posée sur son arc bleu. Soudain, il aperçut une proie sur une branche. Calmement et sans bruit, il arma son bras, visa et lâcha la corde. La flèche toucha la crissane sans la tuer. Il avait râté son coup mais il était certain d'avoir blesé l'oiseau. La branche sur laquelle la proie se trouvait n'était pas très haute, il fit une petite escalade pour récupérer sa flèche qui était plantée dans l'arbre. Sur la branche, il remarqua quelques gouttes de sang frais. Il avait en effet blessé l'oiseau. La crissane ne devait pas être très loin désormais, à moins que la blessure ne soit pas grave. Il descendit de l'arbre et il continua ses recherches. Une dizaine de minutes plus tard, il retrouva la crissane. Elle avait le plumage couvert de sang. Kirfdéin avait touché l'aile, l'oiseau n'avait donc pas pu faire une longue distance. Le marchombre arma son bras une nouvelle fois. Il se concentra longuement. Le vent n'influait pas trop sur son tir, les arbres le protégeait. Avec les branches par contre, le trait pouvait aisément être dévié. Il lâcha la corde une nouvelle fois et ce coup-ci, la flèche tua la crissane. La proie était trop blessé pour que la flèche la rate. Il avait eu beaucoup de chance dans son précédent échec. S'il ne l'avait pas blessé, il aurait été contraint de chercher une autre proie. Kirfdéin alla chercher l'oiseau et il sortit du bosquet en récupérant du bois pour le feu. Si Elera avait elle aussi tué une crissane, ils auraient un bon repas pour le soir. La marchombre n'était toujours pas arrivée quand Kirfdéin sortit du couvert des arbres. Il entrposa du bois par terre et il prit deux cailloux. Il ne savait pas si Elera possédait le don mais il voulait tenté de faire un feu par ses propres moyens. Il commença à frotter énergiquement les deux cailloux en attendant le retour d'Elera.

- Dors. Je te réveillerai au milieu de la nuit, alors autant prendre du sommeil maintenant…

Encore une épreuve? Bon sang, elle ne faisait jamais de pause? Kirfdéin n'en revenait pas. Il était l'élève d'Elera depuis moins d'une demie journée et il n'allait pas tarder à passer sa troisième épreuve. Une escalade, une course et mystère. Le Lotra se dit que les trois ans à suivre l'enseignement d'Elera n'allaient pas être de tout repos, loin de là. De toute manière, il fallait passer par là pour devenir un marchombre de renom. Il termina son repas et il se coucha après avoir souhaité une bonne nuit à Elera. A ce moment-là, il s'attendait à dormir plusieurs heures. Il se trompait.

Peu de temps après avoir plongé dans le sommeil, il sentit trois coups violents: épaule, flanc et genou furent touché. En sursaut, il se releva et attrapa son couteau, croyant qu'ils étaient attaqués. Quand il remarqua qu'Elera tenait un bâton, il comprit que c'était la nouvelle épreuve. Il rangea son couteau.

- Défends-toi !

Une petite bagarre nocturne? Pourquoi pas. Il se trouva un bâton ressemblant à celui d'Elera et il passa machinalement la main dans ses cheveux. Ce geste, il le faisait souvent avant de se battre pour sentir ses mèches et se sentir plus fort. Cette fois-ci, ce fut différent. A la place de ses mèches, il y avait......... rien. Il ne sentit pas ses mèches, il regarda Elera, affolé.

- Tu es folle, tu as coupé mes mèches! Mais pourquoi?

Il ne reçu aucune réponse. Elera engagea le combat et Kirfdéin encaissa le premier coup sur son flanc. La marchombre était rapide, trop rapide. Le Lotra se sentait comme un mollusque incapable de se déplacer. Ses mèches, ses précieuses mèches avaient été coupées et désormais, il avait perdu ce qui le rendait fort. Il n'arrivait même plus à esquiver les coups d'Elera. Rapidement, Il sentit des douleurs sur son corps. Sa peau allait rapidement viré au bleu un vrai schtroumpf. Il se défendait comme il pouvait, il touchait parfois le bâton d'Elera, il évitait ainsi des coups mais il en recevait encore plus. Au début, il encaissait sans broncher mais il commença à souffrir et ses réflexes, déjà solidement ralentit par l'absence de ses mèches, étaient encore plus lents. Se sentant faiblir, il se jeta en avant pour tenter de toucher Elera dans une dernière attaque quasiment suicidaire. Il la toucha à la cuisse mais lui, il se prit un coup dans les côtes et il s'effondra. Il jura et à quatre pattes, la tête baissée, il dit:

- Stop, j'en peux plus.

Il marqua une pause et il se releva difficilement, se massant le côté.

- Pourquoi tu as coupé mes mèches? Tu avais peur que je gagne? Même avec, tu m'aurais écrasé alors pourquoi?

Il ne comprenait vraiment pas. Il lui avait avoué que ses mèches le rendaient fort et quelques heures plus tard, il se retrouvait obligé de se battre sans elles. Dire qu'il l'avait dit en pensant pouvoir lui faire confiance...... Il attendait avec impatience ce qu'Elera dirait. Elle avait intérêt d'avoir une bonne raison sinon, il retournerait à l'académie en demandant à Ena de faire en sorte qu'il ne soit plus l'élève de la jeune femme.

[j'espère que mon post te convient]

[Yep^^]

Elera sentit un long soupir interne faire trembler ses membres. Elle avait espéré qu’il ne le remarquerait pas, pour pouvoir lui prouver qu’il n’avait pas besoin de ses mèches pour être fort… mais il avait touché ses cheveux avant même qu’elle ne puisse l’en empêcher d’un nouveau coup. Elle aurait dû se douter qu’il le ferait, pourtant, elle avait bien remarqué qu’il les touchait souvent… Sans lui donner le temps de penser, elle continua à attaquer, pas trop rapide pour qu’il ait une chance de l’arrêter, mais pas trop lente non plus pour que cela reste un défi. Pourtant, au lieu de répondre à ses coups, il semblait se replier sur lui-même, devenant mou, une brindille qu’un simple coup de vent pourrait briser… Elle s’arrêta. Pas parce qu’il l’avait demandé, pas parce qu’il était par terre à quatre pattes, mais parce qu’il l’avait touchée. Serait-ce assez pour prouver son point ?

- Un maître n’essaie pas d’écraser son apprenti, mais de l’aider à avancer.

D’abord, être certaine qu’il comprenait cela. Elera avait l’impression que Kirfdéin voyait beaucoup trop les choses en tant que forces… Celui-ci est fort, alors il est libre, celui-là est faible, il restera toujours un esclave des autres. Et pour le moment, il se voyait faible alors qu’elle était forte, il la voyait libre de le battre alors qu’il ne pouvait rien faire contre elle. Mais elle n’essayait pas d’être plus forte que lui, de le battre, de l’écraser, de se comparer à lui… Tout ce qu’elle voulait, c’est qu’il puisse avancer sur la Voie… Alors elle continua. Le regardant dans les yeux, et de la même voix calme mais autoritaire.

- Tu ne pourras pas avancer si tu as peur. Ce n’est pas à tes mèches que j’enseigne, mais à toi. Tu veux être libre ? Alors libère-toi de tes mèches.

Elle se tut, laissant les mots s’imprégner autour d’elle. Et en son élève, elle l’espérait… Une expression plus douce, plus proche de celle de la jeune adolescente que de celle du maître, s’installa sur ses traits. Elle se baissa pour s’installer à ses côtés, posant une main sur son épaule.

- Tu as réussi à me toucher, non ? Cela prouve bien que tu n’en as pas besoin…

Elle laissa encore le silence s’installer, le son de leur combat qui avait réveillé la nuit s’évaporant doucement dans la brise, ne laissant que les bruits habituels. Doucement, elle se leva ensuite, faisant bruisser un instant les herbes qui l’entouraient. Pas comme une humaine. Plutôt comme une autre habitante de la forêt…

- Attrape ton bâton. On recommence.

Plus lentement, cette fois. Son attaque surprise, sensée lui apprendre quels étaient les réflexes de Kirfdéin, n’avait pas très bien fonctionnée. A présent, elle allait aller beaucoup plus lentement, pour pouvoir lui apprendre à se positionner, à bloquer, à esquiver, à découvrir les points d’ouverture qu’il pourrait voler pour attaquer, mais surtout, pour le moment, à sentir son centre et celui de son adversaire. Elle n’allait pas l’attaquer beaucoup, juste lui faire perdre l’équilibre, pour qu’il trouve la position qui lui permettrait d’utiliser son poids à son avantage, et pas à celui de son adversaire. Mais Kirfdéin était toujours par terre…

- Alors ? Tu veux apprendre, ou tu laisses tomber ?

Tous les maîtres devaient pousser leurs élèves à leur limite, découvrir où ils craqueraient, pour pouvoir se défaire des possibles et des impossibles. Kirfdéin était-il déjà arrivé au point où il n’était plus capable de continuer ? Cela ne faisait qu’une demi-journée…

Kirfdéin se releva en souriant. Il avait écouté Elera sans trop croire à ce qu'elle disait mais quand elle lui avait proposé de continuer, il avait eu une envie folle de poursuivre. Il n'était donc pas peureux face aux coups. Même sans ses mèches, il était courageux. Alors peut-être qu'il était toujours aussi fort avec ses mèches coupées. Il prendrait sûrement un peu de temps à réagir à l'identique avec ou sans ses mèches mais au moins, il avait fait un grand pas en avant. Il se tourna vers Elera.

- On continue, c'est évident. Si on s'arrête tout le temps, je resterais beaucoup plus que trois ans sous ton enseignement, dit-il en souriant encore.

Il tendit le bâton vers Elera mais cette dernière fut encore la plus rapide. Elle l'effleura et elle le frappa dans le dos. La suite du combat fut un enchaînement de coups portés par Elera que Kirfdéin reçut en majorité sur le corps. Le reste, il avait réussit à les arrêter tant bien que mal avec son bâton. Il n'avait rien dit, encaisser les coups sans se plaindre mais quand Elera frappa sa jambe et le fit s'agenouiller, il cria grâce.

- J'ai le droit à une pause ou le combat doit continuer? J'aimerais bien me reposer mais je continuerais à me battre si tu le veux.

En attendant la réponse d'Elera, il regarda les endroits où le bâton de sa maître marchombre avait frappé le plus souvent. La plupart des endroits commençait doucement à bleuir. S'il continuait à recevoir des coups, son corps prendrait la couleur de sa maison: le bleu un vrai schtroumpf Il se releva une nouvelle fois en fixant Elera. La jeune femme ne semblait pas l'avoir quitté des yeux pendant tout l'examen de son corps.

Soulagement.
S’il avait répondu non, elle aurait dû refuser de continuer à lui enseigner. Ca aurait été un très mauvais départ. Elle était assez étonnée de la facilité avec laquelle il avait accepté son explication, mais s’il était capable de reprendre sa bonne humeur si facilement, tant mieux… Il n’était pas brisé, malgré le fait qu’elle avait coupé ses mèches, et il avait accepté le fait qu’il n’était pas enchaîné par ses cheveux. C’était déjà un bon pas en avant.

Mouvement.
Elle reprit le combat, plus lentement, comme elle l’avait décidé plus tôt. Mais elle avait entrepris de commencer à lui parler en même temps, de lui dire ce qu’il faisait mal, mais avait changé d’avis en commençant- il se battait entièrement différemment, maintenant qu’il avait changé d’attitude. Elle arrivait pourtant à le toucher sans mal, alors qu’elle allait à un rythme sensé être à son niveau… Elle trouva bien vite la source du problème : Kirfdéin passait son temps à essayer d’attaquer, et ne faisait absolument pas attention au bâton d’Elera, regardant le sien ou cherchant une ouverture à la place. Force brute. Comme lors de leur petite escapade sur les toits de la volière, lorsqu’il avait arrêté le combat entre les deux élèves par la force…

Irritation.
Elle s’apprêtait à commenter maintenant, mais il parla avant elle, demandant un arrêt, encore. Pour toute réponse, Elera écrasa son arme sur son épaule.

- Tu crois qu’un ennemi s’arrêtera quand tu le lui demanderas gentiment ? Non, au contraire, il prendra avantage de ta fatigue. Tu pourras te battre, tu pourras t’enfuir, mais en aucun cas - coup sur le flan - tu ne pourras demander - Kirfdéin arrêta le suivant – une – esquive, saut en arrière- pause.

Elle recula un instant, les yeux fixés dans ceux de son apprenti.

- Si tu as encore assez de souffle pour demander un arrêt, tu as encore assez de souffle pour continuer. Et si tu en as marre de te prendre des coups, regarde mon bâton. Tu te tiens bien, tu as de l’équilibre, tu ne manques pas de force… mais si tu ne regardes pas l’arme de ton adversaire, tout ca ne te servira à rien.

La danse recommença sous les injonctives d’Elera. Regarde mon bâton, ne te retourne pas, ne tourne pas la tête, remonte ton arme elle est trop basse, écarte tes pieds, ne quitte pas ton adversaire des yeux, concentration… Un sourire s’étira sur ses lèvres. Elle entendait presque la voix d’Ena derrière elle, et instinctivement, elle baissa sa main droite, installée trop haute une fois de plus. Elle manquait de précision, Kirfdéin manquait de concentration, leurs points faibles étaient complètement différents et pourtant ils apprenaient de la même façon. Maître et Apprenti… Bonheur. Elle s’arrêta peu de temps après, pourtant. Kirfdéin était fatigué, après tout, et elle commençait à l’être aussi, même si c’était une fatigue qu’elle aimait, un second temps dans lequel elle se jetait entièrement. Elle pourrait continuer encore longtemps, comme ca… mais elle mit fin au combat d’un simple pas, quittant sa position et baissant sa garde. Sourire.

- C’est un bon début.

Elle lui demanda ensuite de l’imiter alors qu’elle expirait, inspirait, expirait encore au rythme de la gestuelle marchombre. Elle lui montra les gestes, sachant qu’ils dénoueraient ses muscles et éviteraient que son apprenti ne ressemble plus à rien au matin. Et elle aussi, d’ailleurs, en avait bien besoin. C’est seulement lorsqu’ils eurent terminé qu’elle se laissa tomber au sol, levant les yeux vers la cime des arbres. Sa voix douce emplit l’air de la forêt, sans le réveiller cette fois comme le combat l’avait fait…

- Tu disais que tu voulais être Marchombre parce que tu voulais être libre… Alors dis-moi, qu’est-ce que la liberté ? Et faut-il absolument être marchombre pour être libre ?

Les coups pleuvaient sur le corps de Kirfdéin. Elera donnait ses instructions en même temps qu'ils se battaient. C'était un apprentissage à la dur. Au départ, Kirfdéin aurait aimé qu'Elera soit plus tendre mais il comprit vite que c'était nécessaire. Au fur et à mesure du combat et sous les directives d'Elera, son style s'améliorait. Il commençait à bloquer de plus en plus de coups mais il arrivait toujours pas à atteindre Elera. Il la vit faire un pas en arrière et baisser sa garde. Le combat était finit. Ouf! Il reposa son bâton et il se mit à respirer bruyamment. Elera lui demanda de l'imiter et il se mit à respirer calmement. Expiration, Inspiration et encore Expiration. Selon Elera, ce rythme correspondait à la gestuelle marchombre.

- Tu disais que tu voulais être Marchombre parce que tu voulais être libre… Alors dis-moi, qu’est-ce que la liberté ? Et faut-il absolument être marchombre pour être libre ?

Kirfdéin ne répondit pas immédiatement. Il n'avait pas encore bien reprit son souffle pour faire des phrases complètes.

- Pour moi, la liberté, c'est quand on a aucune barrière, quand rien ne nous arrête. Je pense sincèrement que seuls les marchombres sont vraiment libre. Les soldats et les guerriers sont contraints de suivre les ordres de l'empereur ou de leur chef de troupe. C'est pas vraiment ce que j'appelle la liberté. Les dessinateurs, c'est certainement pareil. Vu que je posséde pas le Don, j'ai pas vraiment réfléchit.

Il marqua une pause, croyant avoir finit avant qu'une autre idée lui vienne à l'esprit:

- J'ai oublié les mercenaires du chaos. Ils sont peut-être libre après tout, je les connais pas du tout. Mais, ne t'inquiète pas, la voie du Chaos, c'est pas pour moi. Si j'ai la permission de te poser des questions, j'aimerais connaître ton avis.

- Est libre celui qui se le pense, répondit-elle lorsque Kirfdéin lui demanda son avis.

C’était ainsi qu’elle voyait les choses. Celui qui était en harmonie avec lui-même, qui aimait ce qu’il faisait et s’y mettait corps et âme était libre, alors que celui qui agissait selon les besoins et devoirs qu’il avait ne l’était pas… Le métier ou la voie n’avait pas d’importance ; c’était l’attitude qui comptait. La liberté était un choix fondé sur les envies, et non sur le reste du monde, à ses yeux en tout cas… Marchombre, elle avait appris à écouter les forces qui composaient l’univers, et à jouer avec elles. Marchombre, elle pouvait traverser un torrent sans que le courant ne la transporte contre son gré. Un autre n’aurait pas eu le choix, et qu’il le veuille ou non, il se serait laissé emporter… et dans ce cas là, il ne se penserait sûrement pas libre. Tellement de différences avec la vision du jeune homme. Le regard en biais, elle laissa les mots de son apprenti la traverser comme la brise, de nouvelles questions trébuchant déjà sur ses lèvres ; sa réponse posait tellement d’autres problèmes, tellement d’autres concepts sur lesquels elle aimerait avoir son avis… Elle le laisserait les trouver seul, se forger lui-même les réponses pour ne pas qu’il se sente obligé d’être d’accord avec elle, mais s’il ne voyait pas les questions, il ne le pourrait pas. C’est pourquoi elle continua son interrogatoire, espérant qu’il y réfléchirait bien :

- Est-il possible de n’avoir aucune barrière ? Tu dois boire, tu dois respirer. Il existe tellement de choses que tu dois faire, et tellement d’autres que tu ne peux pas faire. Penses-tu que devenir Marchombre te permettra de tout faire, de te dégager de ces barrières ?

Elle était incapable de faire bien des choses. Et pourtant, elle se considérait libre. Parce que tout ce qu’elle voulait faire, elle le faisait. Que rien ni personne ne la forçait jamais à rien, et qu’elle les suivait de son plein gré. Valen l’avait appris à ses dépends… et le vent, le comprenait-il aussi ? Comprenait-il qu’elle respirait parce qu’elle voulait respirer, qu’il la poussait parce qu’elle voulait qu’il la pousse, et non parce qu’il était plus puissant qu’elle ? La pensée volatile se perdit dans l’espace, et Elera se concentra sur les suivantes, posant de nouveau ses questions ; beaucoup de questions qui seraient peut-être difficiles à répondre, et que Kirfdéin n’aimerait peut-être pas, mais s’il se lançait sur la voie sur des idées fausses, il n’irait pas bien loin. Autant le laisser questionner ses bases pour être certain qu’il y croyait, pour ne pas qu’un autre détruise de fausses illusions plus tard, pour ne pas que la chute se fasse de trop haut…

- Le guerrier qui se bat pour une cause à laquelle il tient plus que tout, qui se bat pour cette cause et non pour son chef est-il libre ? Pourquoi les Dessinateurs ne seraient pas libres, alors que l’Imagination leur permet de briser des limites que les marchombres sont incapables de discerner ? L’itinérant qui va où bon lui semble connaît-il la liberté ? Et l’Empereur ? Le forgeron qui vit tranquillement dans sa forge, le villageois, l’aubergiste qui vit au jour le jour ? Et comment sais-tu que tu ne pourrais pas te tourner vers le Chaos, si tu ne le connais pas ?

Elera fit une pause, et Kirfdein ne lui repondit pas. Levant les yeux vers la lune et regardant l'etat dans lequel il etait, elle prit sa decision. Il n'etait pas pret a sortir de l'Academie, a etre libre de voyager. Peut-etre qu'en restant la-bas, il apprendrait ce que voulait vraiment dire ce mot qu'il recherchait tant...

- Viens, nous rentrons a l'Academie. Tu peux reflechir a toutes ses questions pendant le trajet...