Fantômes et ombres (RP inachevé)

Messages : 359 Inscription le : 08/05/2007 Age IRL : 33

Remettre ses livres à la bibliothécaire était devenu un geste machinal, bien que très artificiel. Aucun contact, juste ces sourires doux de la Dame, et Ambre, incapable de conserver un air neutre. Un accord tacite, de la politesse simple, pas de questions, en échange de l'accès. Pas plus qu'un respect pour l'acquisition des connaissances de chacune. A cause du "Til" ou de la réserve d'Ambre, certainement...

Et une fois cette formalité passée, il restait à l'itinérante une sensation particulière. La plénitude face aux murmures des pages tournées, aux parfums anciens des pages jaunies, aux perspectives de peut-être trouver, à défauts des réponses, une vision toujours plus précise des choses. Une ivresse dans les poésies marchombres, des recueils qu'elle relisait en douce, à la lumière d'une chandelle. Des bagatelles, partie intégrante de sa vie.
Aujourd'hui, la salle semblait vide, et c'était tant mieux. Ambre pourrait se laisser aller à sourire, ou caresser le cuir craquelé des couvertures, sans se sentir épiée ou diminuée par les regards... fait rarissime.
Elle se promena, dans les premiers rayonnages, ça commençait toujours comme ça: elle flânait, jusqu'à ce que ces yeux tombent sur un titre particulièrement intriguant, une couleur particulière, un ouvrage qu'on aurait voulu dissimuler, parce que trop subversif. Trop cru, par rapport aux années sombre ou à.. certains.
Se faufilant dans les rayons les moins fréquentés, Ambre saisit un volume, puis un second, laisse un sourire étirer ses lèvres,et se dirigea vers un des coins lecture... son préféré était un peu à l'écart des autres, proche d'une des grandes fenêtres qui donnait sur l'extérieur de l'Académie... sur les routes.

Au détour d'un rayonnage, elle s'arrêta net et parvint à contenir un sursaut. Il ressemblait à un fantômes, et se tenait dans la section réservée à la biologie. Etrange...
Le regard perdu dans les volumes les plus anciens, les plus décourageants par leur aspects encyclopédiques et élitistes. Et ça ne semblait pas le décourager... Tout en finesse et en albe. Atypique. Un air étrange, un peu rêveur, un peu... moins facilement déchiffrable que les autres.
Elle n'hésita qu'une seconde, puis avança, passa derrière lui.

-Celui de gauche est intéressant. Et mieux écrit que le bleu. Plus récent aussi. Le gris est celui qui parle des choses oubliées, ou, disons qu'on a jugé bon d'oublier. A bon entendeur..., murmura-t-elle, sans plus tourner la tête vers lui.

Elle avait hanté la bibliothèque depuis son arrivée. Les bibliothèques depuis qu'elle avait lu. Et lui, il ressemblait aux fantômes dont parlaient certains ouvrages de l'autre monde. Ca n'avait pas le moindre poids, mais l'idée l'amusait.
Elle quitta les rayonnages, s'assit à "sa" place, et ouvrit le second ouvrage, le plus fin, qu'elle espérait finir avant que la Dame Til'Revan n'ordonne la fermeture des portes...
C'était peut-être la seule chose qui comptait. Passer le temps et s'occuper l'esprit, en attendant de retrouver La voie qui s'était ébauchée. Le plus normalement du monde.

[édition à volonté Rolling Eyes

]

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La bibliothèque. Lieu de savoir absolu. L'endroit préféré de Nilad. Surtout depuis qu'il avait découvert celle de l'Académie de Merwyn. Lorsqu'il était jeune, déjà, il aimait les livres. Il était capable de retenir une quantité impressionnante d'information seulement en lisant quelques livres. Cela avait fait le bonheur de ses parents. Et c'était peut-être la seule chose qu'ils étaient fiers de leur fils. Ils devraient être heureux, il connaîtrait bientôt quelque chose que même eux ne savaient pas.

À l'adolescence, pourtant, il s'était lassé des livres de la bibliothèque normale. Tous fades, sans grands intérêts, limités. Il avait connu le bonheur quelques temps dans la section limitée, mais il avait été rapidement incapable d'y retourner. Il avait cessé de lire à ce moment. Plus rien d'intéressant, il savait presque tout. Et ce qu'il ne savait pas ne l'intéressait pas. La biologie en faisait parti. Aucun intérêt, pour quelqu'un qui va consacrer sa vie à l'étude de l'Imagination. Mais les temps avaient changés. Cet ancien dédain c'était transformé en curiosité. Le Rêve sert à rétablir le fonctionnement de l'organisme, alors ce serait fort stupide de ne pas connaître au moins les bases de la biologie et de l'anatomie. L'unique livre dont il avait lu sur le sujet était tellement incomplet et ennuyant qu'il n'avait plus le goût par la suite d'en lire d'autres. Mais la bibliothèque de l'Académie renfermait des livres beaucoup plus complets sur beaucoup plus de sujets. Sa passion pour la lecture se réveilla dès son premier passage dans la bibliothèque. Il s'était plutôt attardé sur des traités sur les rêveurs cette-fois là.

C'était la deuxième fois qu'il venait. Il avait demandé à la bibliothécaire, l'endroit où il pourrait trouver des écrit sur la biologie. Elle lui indiqua un endroit éloigné de la bibliothèque, et il s'y dirigea lentement, profitant de son amour renouvelé pour ce lieu. Ce qu'il avait toujours préféré, c'est l'odeur des livres. L'odeur d'encre fraîche pour les neufs et l'odeur de vieux papier pour les plus anciens. Comme certain aimaient s'enivrer avec de l'alcool ou des femmes, Nilad pouvait respirer cette odeur et être heureux pendant des heures. Mais il ne restait évidemment pas des heures à respirer les livres. Ce serait un gaspille de temps avec autant de tomes intéressants autour de lui.

Il arriva au rayonnage sur la biologie, situé juste à côté d'une aire de lecture. Il prit un livre au hasard, ne sachant pas trop par où commencer. C'était un gros ouvrage, complexe dans sa lecture et son organisation. Mais il contenait des informations très intéressantes, des choses qu'il n'avait jamais lu avant. Il était tellement fasciné qu'il ne prit même pas la peine d'aller s'asseoir.

Il n'était pas assez absorbé dans son livre pour ne pas remarquer du coin de l'oeil une personne arriver dans l'allée, mais l'était suffisamment pour ne pas s'en soucier. Il ne remarqua que sa légère hésitation et sa démarche souple, probablement une guerrière ou une marchombre. Il se demanda un instant qu'est-ce qu'elle pouvait faire là, mais s'en désintéressa presque immédiatement, retournant à sa lecture. Il fut légèrement surpris que la fille lui parle comme cela, mais personne n'aurait pu le remarquer à sa posture ou son expression. Au contraire, un sourire énigmatique se peignit sur son visage. Il semblerait que ce n'est pas toutes les personnes spécialisées dans le maniement de la lame ne soient des brutes sans cervelles. Il rangea son livre et prit ceux qu'elle avait indiquée. En effet, ils semblaient encore plus intéressants que le premier. Bien équipé, il alla s'asseoir en face de l'étrange fille. Ce faisant, il prit plus de temps pour la détailler. C'était évident qu'elle était du genre élancée et active physiquement. Mais la manière qu'elle avait d'être concentrée sur son livre était caractéristique de ceux qui montent la lecture au rang de passion. Ses cheveux, très courts pour une fille, ne faisaient que mettre en valeur son allure rebelle. Étrange mélange, en effet. Il prit la peine de survoler ses volumes avant d'engager la conversation:

- C'est rare que je vois des gens comme toi dans une bibliothèque, surtout la connaissant aussi bien. J'ai toujours pensé que vous étiez trop préoccupés à augmenter votre masse musculaire ou vos aptitudes à grimper dans des tours. Il semblerait que tu es une exception, et j'aime les exceptions.

Il finit en replaçant gracieusement une mèche des ses cheveux blancs comme neige qui s'était placée dans son visage, tout en gardant son sourire mystérieux. Il espérait qu'il n'y avait pas qu'une seule habitante de l'académie intéressante, sinon il allait sérieusement s'ennuyer.

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Lenne, sur son bureau, regardait le manège qui se présentait devant ses yeux. Deux jeunes gens s'étaient présentés successivement à elle. Un garçon et une fille. La jeune femme posa ses coudes sur le grand bureau de chêne et écouta distraitement la conversation des deux jeunes. Le silence presque rassurant de la bibliothèque était propice aux rencontres les plus innatendus. Mais la jeune femme était contente d'avoir des papivores, car c'était rare ,en ces temps reculés où la force et la bestialité pronaient l'intelligence et le savoir, de truver des gens assez cultivés pour aimer les vieux livres poussiéreux, que certains auraient trouver bien ennuyeux. Ces deux jeunes gens, sans rien faire, venait de monter dans l'estime de la jeune bibliothécaire, gardienne de quelques trésors innestimables. Se levant d'un geste gracieux, elle alla dans son atelier relier de vieux manuscrits qui ne demandaient qu'une seconde jeunesse. Tournant la porte de la pièce cachée au fond de la bibliothèque, Lenne prit la blouse qui était accrocher à un crochet près de la porte et l'enfila. Elle entra dans la pièce éclairé grâce à la lumière du jour qui émanait des grandes fenêtres construites pour. La porte s'entrebailla, afin de continuer à surveiller la bibliothèque tout en travaillant. Ce n'est pas qu'elle n'avait pas confiance en ces deux jeunes gens mais en c'est temps sombre, il pouvait arriver n'importe quoi.

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Une fois installée, Ambre ouvrit l'épais volume, se mordilla les lèvres en découvrant la première gravure.
La mer d'un bleu presque noir, déchaînées par un ciel de tempête, l'écume qui lêchait le corps élancé d'un navire de l'Empire...
Tout était fin et détaillé, les planches, la figure de proue, toute perlée d'embruns, légèrement verdie par le temps, par la lune... Les reflets blafards des vagues, les mêmes sur les visages des marins.
La lutte.
Titre subtilement choisi. De la mer pour empêcher sa conquête? Des marins pour leur vie? Du bateau pour la lumière du jour, le lendemain? D'une dame d'un autre genre, perdue dans l'immensité des profondeurs, qui choisissait d'attendre, ou d'intriguer dans les combats des mers?

Elle tourna la page, un peu à regret. Le calligraphe qui avait recopié le livre avait une écriture alambiquée et penchée sur la droite, toute en angles...
A l'image du contenu. Sans fioriture, compliqué, un peu trop appuyé sur certains détails, mais qu'importait... Seule comptait l'évasion, au grès des mots, des informations...
Un mélange d'angoisse, de liberté, de retenue, compressée en quelques phrases d'introduction. Le voyageur aurait pu être un marchombre...
Ou un autre idéaliste. Ses premiers témoignages parlaient de la houle, la direction des vents, et cette brume qui naissait à l'horizon, et noyait les îles, les marins, les navires, les nuées, les oiseaux...

L'ambiance devenait morose, morbide, le pont glissant, le vent glacé. Les cris d'animaux millénaires et inconnus résonnaient aux oreilles des marins, qui devenaient fous. Sur l'autre monde, on parlait de femmes nées des vagues, au visage scintillant comme la mer au soleil, aux longs cheveux, aux yeux d'aigue-marine, aux courbes ensorcelantes comme une promesse d'ailleurs. Un fantasme vivant, personnifié par des chants, d'invisibles caresse et des incertitudes qui poussaient les hommes à prendre la mer, à laisser leurs femmes ppour retrouver les chimères.
Nombreux étaient ceux qui n'en revenaient pas...

Ambre haussa un sourcil, amusée par le mysticisme où l'auteur se complaisait, vaguement enivrée par les parfums du livre.
La quête inaccessible des hommes de mer n'était pas sans ressemblance avec celles des marchombres, ou autres dessinateurs. Finalement, tout n'était que question de limites... Où s'arrêtait l'horizon? Y avait-il quelque chose, au bout des Spires que certains parcourraient des années? Y avait-il une saturation des sensations des gens du peuple, des érudits? Quel était l'endroit où chaque soir le soleil partait se coucher, y rencontrait-il les morts, d'autres vivants, les étoiles?
Nombreux étaient, selon l'auteur, ceux qui cherchaient des réponses.
Les marins avaient des femmes, il y avait aussi des femmes à marins, mais la pudeur semblait dicter à la plume de l'auteur de s'attarder sur les autres débauches des déçus des flots. Ainsi , les Alines défendaient l'accès à leur terre? Leurs navires étaient d'une forme inimitable, tellement différente des galères que l'Empire envoyait sur les mers.
L'emblème qui flottait sur leurs fanions ressemblait à un serpent de mer, à d'étranges vagues, à autre chose. Quelque chose qui encourageait l'auteur, durant les rixes, à évoquer les détails de ces êtres à peau mate, pour qui la danse de la mer semblait une seconde nature. Il se complaisait à regarder, aux loins, les adolescents bondir dans les cordages, comme des feu follets or des bois de Gwendalavir...
Comme son pirate dansant. Mais ce n'était pas.. ni important, et ça n'avait pas à le devenir.
Un léger bruit déconcentra la rêveuse, qui identifia le son comme provenant du siège le plus proche. Tiens donc...
Se refusant le droit de relever les yeux, Ambre tourna la page. Ici, tout devenait plus purement technique, nom de cordes, rang d'équipage, unité de mesures, infinité des profondeurs, ou énigme lorsqu'on voyait surgir des fonds, la nuit, des lueurs aussi vives que brèves. On parlait des rats, des créatures qui les chassaient, des senteurs. On analysait les maladies suscitées par l'air, l'humidité, ou le perpétuel mouvement de l'onde.
Une autre gravure, une vingtaine de page plus loin... elle releva un oeil, constata qu'il s'était plongé dans un des livres conseillés, sentit une sorte de fierté poindre en elle. Ici, au moins, on prenait le temps de l'écouter, et elle devenait capable.
Elle se replongea sur le volume, juste une seconde. Avant que le silence n'explose, et avec lui, le confort du moment.

Premier bémol. "Comme toi". Qu'avait-il vu? Ses origines? Il était noble, alors? Sa formation? Peu de chances, la voie n'était qu'inaccessible et désillusion. Elle n'était physiquement pas faite pour l'emprunter, à son grand damne, d'ailleurs. Pourtant il ne parlait pas de chemins, mais de tours et de... muscles? Elle releva la tête, cette fois complètement déstabilisée. C'était un drôle d'oiseau, qu'elle avait en face d'elle. Il l'aimait, maintenant! Le regard mauve croisa le regard bleu, balayé de mèches imaculées; se posa ensuite sur le sourire calculé. Il avait les mains fines, trop pâles, trop nettes pour... tout s'expliquait.
C'était un noble. Surement un dessinateur. Plein d'arrogance, de suffisance, comme tous les autres chiens de sang bleu qui composait sa caste. Au moins, avait-il le mérite de lire et d'écouter. Ce qui était définitivement absurde.
Aussi absurde que sa conclusion. Une suite de rabais était donc la clé d'un compliment, pour lui?

Le code d'honneur d'Ambre aurait exigé une réplique acerbe, pour répondre à cet interlocuteur... mais il aurait semblé étrange qu'à un compliment aussi ambigu que celui-là, elle réponde par des mots venimeux. Aussi osa-t-elle un sourire tout aussi mystérieux que le sien, et une fausse suite de civilité.

-Heureusement pour l'être humain, un échange de banalité peut être productif à chacun pour élargir son mode de pensée misérable, et ouvrir les yeux sur la réalité des autres. Je m'appelle Ambre, de la maison Corbac, et tu dois bien être la seule personne qui me voit comme exceptionnelle, murmura-t-elle, pour ne pas troubler davantage la quiétude de la bibliothèque.

Elle avait tourné une autre page de son livre, puis relevé les yeux, en se demandait si elle était parvenue à le vexer comme ça. Ou si ce fichu sourire qu'il affichait était signe qu'il s'attendait à une réaction semblable, pour quelqu'un... "comme elle". Sa façon de ne rien laisser transparaître aiguisa encore la curiosité de la jeune fille, qui dans un sourire moins ironique lâcha la phrase suivante, sans baisser les prunelles.

- Honorée de rencontrer quelqu'un qui ne craint ni les plumes des savants ni la franchise.

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