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| | En silence, on s'observe [Inachevé] | |
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Messages : 5 Inscription le : 10/10/2012 Age IRL : 29
| Sujet: En silence, on s'observe [Inachevé] Dim 9 Déc 2012 - 22:41 | | | [Désolé pour les paragraphes deux et trois… j’voulais juste faire un p’tit résumé de sa situation]
Iolan triturait du bout des doigts le coin du parchemin posé sur son bureau. Nerveusement, il le tordait, le roulait et le déchirait, morceau par morceau minuscule, tout en évitant soigneusement d’approcher de trop près le message qu’il contenait. Message écrit d’une écriture méticuleuse, légèrement courbée, au grandes boucles gracieuses qui terminaient les G, les J et les Y, englobant par leur taille et leur nombre la moitié de la page. Court donc, ce message que Iolan triturait pourtant du bout de ses ongles droits et limés.
Il savait ce qu’il avait à faire, pourtant. Comme à chaque fois que le seigneur d’Al-Poll recevait une missive semblable à celle-ci : en avertir l’intendant, tout en s’arrangeant pour qu’il ne lise jamais le message. D’ailleurs, dès son arrivée, le jeune homme s’était débrouillé pour que le vieillard sénile qui servait encore d’intendant à Lodice Zil’Aufone lui fasse une entière confiance et lui laisse la plupart des responsabilités qui lui incombaient. Iolan se chargeait donc des missives, de leur arrivée à la volière, et leur lecture, réponse et départ. De la même manière, il gérait les différents invités qui rendaient régulièrement visite au seigneur, octroyant tel appartement à ce monsieur et tel autre à cette demoiselle. Il choisissait les menus au quotidien comme lors des bals ou autres soirées, les places de chacun à table, gérait l’administratif à tel point qu’il piétinait parfois sur le territoire du trésorier qui lui en tenait souvent rigueur et allait se plaindre à son supérieur. En quelques mots, Iolan s’était rapidement fait sa place, de par son travail, et se débrouillait pour que rien ne soit à redire sur ce qu’il décidait. Cela rendait d’ailleurs Cyrien Hil’Fébeau, l’intendant et vieillard sénile dont on parle quelques lignes plus haut, très heureux du travail du mercenaire, qui lui permettait d’en faire lui-même beaucoup moins. Et de son côté, Iolan avait accès a presque tous les documents importants qui permettaient de gérer Al-Poll, tout en supplantant petit à petit son supérieur, avec la confiance de tous, ou presque.
Presque, car Iolan n’était pas le seul second de l’intendant. En effet, ils étaient deux. L’autre se nommait Juliane Mil’Itèr. C’était une jeune noble à peine plus âgée qu’Iolan, mais arrivée à ce poste par son propre travail contrairement à lui, insensible à son charme et ne lui faisant absolument pas confiance. Cela n’aurait pas était bien embêtant si la jeune femme en question ne passait pas son temps à le surveiller sans en avoir l’air et à lui mettre les bâtons dans les roues, considérant par le fait que son nom ne porte pas la particule de la noblesse le lui permettait. Le jeune second faisait donc tout son possible pour éviter la demoiselle, sans pour autant que l’intendant ne s’en rende compte.
Arrachant le parchemin de son bureau, Iolan la fourra d’un geste brusque dans un tiroir. Il décida de ne parler du contenu de la missive ni à Lodice, ni même à sire Hil’Fébeau tant qu’il n’aurait pas trouvé la manière d’annoncer la chose à son propre avantage. D’ailleurs, il avait bien d’autres choses à faire pour le moment et se triturerait l’esprit avec cela plus tard.
Le mercenaire referma le tiroir et sortit de ses petits appartements. Une noble arrivait d’Al-Jeit aujourd’hui, rendre une visite de courtoise à Cyrien Hil’Fébeau, et il avait pour mission de la recevoir dignement. Iolan traversa quelques couloirs pour se rendre à la chambre des Gardénias, où logerait la visiteuse le temps de son séjour. Il croisa quelques domestiques en chemin auxquels il n’adressa pas la parole. A quoi bon faire cet effort ? La chambre était en ordre et Iolan constata avec satisfaction qu’il commençait enfin à être obéit par la bande de larbins qui nettoyaient les couloirs à longueur de journée. Au début, ceux-ci réfutaient tous ces ordres, habitués à n’en recevoir presque aucun de l’intendant. Et les rares choses qu’ils avaient à effectuer n’étaient jamais vérifiées. L’autorité du second était donc très mal passées sur les premiers jours, jusqu’à que les domestiques apprennent à lui obéir. Plus ou moins sans menaces, selon les circonstances.
La chambre était parfaitement en ordre donc. Le lit fait, les draps parfumés, de l’encre et des parchemins sur le bureau, une corbeille d’orange diffusant un agréable parfum dans la pièce, les rideaux ouverts et dépoussiérés, et la pièce aérée. Rien ne manquait, à la grande satisfaction de Iolan. Il quitta la salle, un rare sourire sur le visage. Il ne lui restait qu’à aller chercher la jeune femme aux portes de la ville, comme il le faisait pour chaque noble qui venait en visite seul. Marque de politesse forte appréciée par ces derniers, qui le faisait souvent entrer dans leurs bonnes faveurs. Il détestait cela par le simple fait qu’il lui fallait monter sur le dos d’un canasson pour respecter les convenances, mais le faisait pour la même raison, sans se poser de questions, parce que son éducation avec Meena le lui avait appris ainsi.
Iolan traversa à nouveau la demeure jusqu’aux écuries. Il croisa Juliane, de loin, et tout deux firent semblant de ne pas se voir. Le palefrenier lui avait préparé un animal qu’il avait attaché à l’extérieur de la bâtisse. Etrangement, le mercenaire aimait bien cet homme. Peut-être était-ce parce qu’il était muet et qu’il ne l’obligeait donc pas à faire la conversation. C’est sur cette réflexion qu’il quitta la demeure du seigneur d’Al-Poll, sur le dos de la bête qui renâclait déjà. Il traversa rapidement la ville, ignorant les mendiants, les marchands et les passants, adressant simplement un sourire à une ravissante paysanne qui croisa son regard. Il finit par arriver aux portes de la ville et attendit, comme il attendait à chaque fois, dans cette routine qu’était devenue sa vie.
Le carrosse de Sareyn Til’Lisan, puisque c’était le nom de la visiteuse, arriva près d’une heure plus tard. Iolan adressa un signe de tête au cocher et fit le chemin en sens inverse, guidant les nouveaux venus à travers la ville, avec tout l’art de la chose. Lorsqu’ils arrivèrent à destination, le second laissa son animal à un domestique qui les attendait, conventionnellement aux règles qu’il avait lui-même données, et le jeune homme se chargea d’ouvrir la porte du carrosse pour accueillir la demoiselle. Il lui fit un baisemain et s’inclina alors qu’elle descendait les quelques marches, tout en l’observant du coin de l’œil. -Madame, ravi de vous accueillir dans cette demeure. Si vous voulez bien me suivre jusqu’à vos appartements, le seigneur ne peut vous accueillir personnellement, il est en ce moment même fort occupé par une réunion administrative. Vos bagages vous seront apportés rapidement, soyez-en sûre. Plutôt occupé avec la dernière jouvencelle qu’il avait trouvé, mais Iolan ne pouvait se permettre de l’avouer à la demoiselle, évidement. Peut-être s’en doutait-elle d’ailleurs, au vu du demi-sourire qu’elle esquissa. L’honneur de la maison qu’il dirigerait prochainement était en jeu. Et puis, il fallait suivre les convenances. Il lui adressa un sourire charmeur, malgré son œil unique et son corps presque squelettique, à l’inverse de ce qu’il aimait, et la dirigea vers la maison. Alors qu’ils entraient, il demanda pour meubler : -Avez-vous fait bon voyage ?Tellement conventionnel. |
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| Sujet: Re: En silence, on s'observe [Inachevé] Lun 10 Déc 2012 - 1:35 | | | A vrai dire, le carosse tombait à point nommé. Aliénor avait insisté pour lui en faire affréter un quand Sareyn avait manifesté sa volonté de se déplacer d’Al-Chen vers Al-Poll, et toutes les politesses du monde n’avaient pas suffi à l’en faire démordre. En temps ordinaire, elle aurait refusé corps et âme d’être déplacée comme un sac de farine le long des routes, à un rythme très lent, alors qu’il lui suffisait de faire un pas sur le côté pour être instantanément à l’autre bout du grand Empire de Gwendalavir, mais les circonstances étaient telles qu’elle avait accepté, et plutôt deux fois qu’une. Un voyage d’Al-Jeit à Al-Poll en carrosse aurait été hors de question, le trajet était beaucoup trop long, mais elle se trouvait déjà à Al-Chen par un pas sur le côté pour rendre visite aux Sil’ Dokart, il ne lui restait plus qu’une semaine de trajet.
Après l’incident lors de la réception du Seigneur d’Al-Vor, Marlyn avait passé quelques jours entre la demeure des Til’ Lisan et le manoir de son maître, à attendre que les scandales, et surtout sa propre rage, retombent. Tout l’énervait, tout lui semblait trop grand, trop difficile, jusqu’à la présence de son amant, qu’elle avait fui les premiers temps, autant pour ne pas assumer la responsabilité de ses Spires que parce qu’elle ne supportait pas ce silence qu’il lui astreignait dans l’Imagination, qu’elle s’y sentait seule, incontrôlable, et fragile. Le petit l’énervait, à crier quand elle tentait d’aller le voir, comme si rien n’avait changé alors qu’il avait un père, un toit, du lait, des chansons de nourrice. Le reste du temps, elle s’occupait de Papa Til’ Lisan, que l’incident avait rendu inconscient et fragile, et parce qu’elle s’était rendue compte qu’elle avait perdu le contrôle des pensées du vieil homme. Tout était à refaire, tout présentait des risques immenses, qu’il se rende compte de la supercherie, qu’il la dénonce, que tout s’écroule à cause de ce Lev Mil’ Sha, ce dangereux dessinateur. Elle commençait à songer à sa mort, mais elle viendrait trop tôt, trop.. « pratique ». Et ça aussi, ça l’énervait. Elle avait besoin de changer d’air, de mettre de la distance entre tout ce monde et sa tête. De penser un peu moins Sareyn, un peu plus chaos, meurtres simples et basiques, réseaux francs. Ces réseaux qui remuaient encore trop vite, trop souvent, et ces derniers temps semblaient plus dangereux qu’avant, comme si le contrôle lui échappait. Mais ça ne venait pas d’elle, elle avait maintenu le contact avec tout, menacé ici, soudoyé là, et tué les inutiles. Du coup, elle doutait. Et surtout, elle avait besoin de temps pour comprendre les implications. L’absence si farouche de Dolohov dans les Spires…
Une semaine de carrosse était parfaite pour méditer tout ça. Et surtout. Pour DORMIR. Par toutes les dames, dormir. Le temps avait juste fui par tous les côtés, activités chaos et activités nobles s’entremêlant si bien qu’elle revenait souvent de mission au petit jour pour se glisser dans les habits de Sareyn, et les rares heures qu’elle arrivait à sauvegarder, les cauchemars ravivés par les abus de Lev, l’enfant ou le maître les faisaient disparaître. Le rythme du carrosse la berçait, les banquettes étaient suffisamment confortables, et les différents hôtels d’étape où ils passaient complétaient agréablement cette petite bulle de repos qu’elle avait réussi à créer. Le reste du temps, elle communiquait par les Spires, souvent avec Elio, qui avait besoin de ses conseils ou voulait juste lui parler de son Tallion, ou parce qu’elle avait elle-même besoin de renseignements. Sur ce que pensait le réseau de l’ombre des silences de Dolohov, sur l’existence même de ces silences, sur un moyen de communiquer avec les mercenaires du Poll. Al-Poll, incroyablement, avait beaucoup à lui offrir, elle qui se jurait d’y remettre le moins possibles les pieds. Elio avait réussi à lui fournir les détails d’un indic’ merco que Dolohov avait mis au service du Seigneur d’Al-Poll, et il était le meilleur choix pour ses investigations. Elle voulait également voir son élève, sa nouvelle vie, éventuellement passer chez cet herboriste receleur, dont les stocks avaient baissé de manière inattendue ces derniers jours. Quelque chose n’allait pas dans le réseau. Il fallait qu’elle supplée. Iolan Olhuïn. Elle ne le connaissait pas. La veille de l’arrivée à Al-Poll, par spires, elle avait réussi à apprendre de lui suffisamment. Et notamment qu’il attendait depuis trois semaines que Dolohov le contacte comme il avait l’habitude de le faire, et qu’il ne l’avait pas fait, et commencé à remuer. Elle se rendait compte petit à petit de l’immensité des détails qui semblaient échapper à tout contrôle, ces derniers temps. Qu’elle s’était trompée, peut-être, sur les intentions du Mentaï, sur ses silences. Qu’il faudrait qu’elle supplée. Puisqu’elle en avait le pouvoir.
Al-Poll était en vue depuis les fenêtres givrées du carrosse. Le Nord était tellement froid. Elle s’était habituée à la chaleur du climat du sud, à ses senteurs toujours estivales, au point d’oublier l’aridité glaciale du Nord, à l’Académie, quand les températures lui semblaient négligeables. Elle s’enfonça dans son foulard, remit ses gants, dessina des courants d’air chaud dans le petit carrosse.
Elle put observer Olhuïn de loin lorsqu’il les escorta. Son faciès lui disait quelque chose, comme un visage croisé il y a des années, peut-être, une fois, à une réunion du Chaos, mais elle n’était pas sûre. Il semblait parfaitement intégré dans le rôle qu’il jouait, de ce qu’elle put observer lorsqu’ils arrivèrent à la propriété du Seigneur du Poll, et lorsqu’il l’accueillit avec les convenances d’usage. L’allusion Hil’ Fébeau la firent sourire. Ses frasques étaient connues dans le monde du Chaos, elle savait que Dolohov faisait chanter le seigneur d’Al-Poll à ce sujet, et il lui avait raconté certaines histoires des plus.. étranges, pour la faire rire.
Elle le suivit dans les couloirs, l’œil observant, détaillant, relevant la discipline des serviteurs, leur aptitude à baisser le regard en sa présence, comme devant toute jeune femme de la noblesse, les murmures sur leur passage. Un domestique la débarrassa de son manteau et de son foulard , le temps qu’elle relève le col de sa veste d’intérieur, Iolan avait eu le temps de poser les yeux sur les tatouages qui lui remontaient la nuque, et en avait souri subrepticement. Sareyn Til’ Lisan était connue pour ces frasques, mais ces temps-ci, elle aurait bien donné n’importe quoi, à commencer par Astre, pour être débarrassée de ces regards-là.
- Un très bon voyage, merci, très reposant, le seul désagrément que nous avons eu à subir étant un arbre tombé sur la route, ce qui explique mon déplaisant retard. Elle poursuivit d’une voix légère. J’espère ne pas vous avoir trop faire attendre dans ce froid glacial !
Iolan l’introduisit alors dans les appartements qu’elle occuperait pour l’autre semaine qu’elle resterait ; l’odeur d’orange amère assaillit son odorat sensible, mais elle ne lui fit pas remarquer. L’orange était un fruit trop noble pour qu’un noble y répugne. Ses bagages les suivaient presqu’immédiatement. Une chose était sûre, ce mercenaire du Chaos avait un certain don pour redresser une maison tombée en décrépitude.
- Puisque mon hôte, retenu par ses lourdes charges, ne peut me faire le plaisir de sa compagnie, peut-être me ferez-vous la votre, monsieur Olhuïn, le temps qu’il se libère ?
Elle congédia les domestiques en train d’installer ses affaires d’un geste de la main, et ôta ses gants. A nouveau, elle tira sur le bout de sa manche pour dissimuler les éventuels bouts de tatouages qui fusaient sur son poignet droit. Quand plus aucune oreille indiscrète ne fut plus à portée, elle reprit, d’un ton moins volage, plus direct :
- Nous avons un ami commun, un ami dont on dit que vous n’avez pas eu l’honneur de la visite depuis un moment, et que cela vous inquiète. Vous pouvez me parler comme à lui, je suis ici par sa vo...
Une jeune domestique entra dans la pièce et le visage de Marlyn se recomposa en celui de Sareyn : « .. merveilleuse tenue que vous avez de la demeure de votre Maître, monsieur Olhuin, je serai sûre de lui passer le compliment lorsque nous dînerons ensemble. Quand pensez-vous que votre Seigneur sera libre ? J’ai fait ce voyage pour avoir le plaisir de sa compagnie, après tout. »
Que cherchait Dolohov en prenant contact avec ce mercenaire ? Devait-il seulement s’assurer de sa bonne intégration et de la véracité des renseignements qu’il fournissait, ou bien prodiguait-il des conseils, des documents, des aides peut-être ? Il faudrait qu’elle improvise sur le moment. Ce jeu était complexe, trop pour elle encore, et il faudrait qu’elle s’y immerge pleinement pour pallier à l’absence du Mentaï. La petite domestique renversa le pot d’eau qu’elle venait apporter, les joues rouges vif. Marlyn l’avait sentie zieuter discrètement l’emplacement de son visage, où l’œil manquait, ses airs nobles et à la fois si différents des hôtes habituels, ses habits. Elle avait perturbé la petite. Corps, tu es mon plus formidable instrument et mon plus redoutable ennemi ; espérons que dans le cas de Iolan, tu sauras le convaincre, ou sinon, le menacer.
[Posté sous la pression de ta soeurette :'D]
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| | Messages : 5 Inscription le : 10/10/2012 Age IRL : 29
| Sujet: Re: En silence, on s'observe [Inachevé] Dim 16 Déc 2012 - 22:27 | | | -Madame, rassurez-vous. Le froid n’était pas si glacial que cela et le temps pas si long qu’il n’y parait. Et d’ailleurs, je l’admets, j’étais moi-même en retard si bien que je vous attendais depuis seulement quelques minutes à peine.Mensonge, évidement. Mais Iolan ne pouvait se permettre de faire remarquer à la demoiselle un retard pour lequel elle n’y était elle-même pour rien. Ils arrivèrent au bout du couloir qu’ils venaient d’emprunter et Iolan poussa la porte des appartements dont il avait veillé à la préparation avec tant de soins, laissant passer la jeune femme, suivie de près par ses bagages qu’amenaient quelques domestiques. Iolan entra à son tour dans la pièce, tout en restant suffisamment proche de la porte. Il attendait que les domestiques terminent d’apporter les bagages, s’apprêtant à repartir avec eux, mais la visiteuse en décida autrement. De quelques mots et d’un geste de la main, et le retint auprès d’elle et congédia les domestiques.
La situation était assez inhabituelle. S’il était peu courant qu’une jeune noble aima à se retrouver seule, il était assez rare en revanche qu’elle demande la compagnie d’un des employés de la maison. Sur tout ce qu’il avait appris, Iolan ne savait comment réagir à une telle situation, aussi se contenta-t-il d’hocher la tête suite à la demande de Til’Lisan, sans pour autant bouger de l’endroit où il se trouvait. Au moment où le dernier domestique franchi la porte pour quitter la pièce, Iolan nota que la dame connaissait son nom sans qu’il le lui ait donné. Elle savait donc que malgré sa place dans la maisonnée, il n’était pas noble. Il s’arma alors de défenses, s’attendant à un long discours sur le fait qu’il était inacceptable qu’un homme sans particule occupe un poste aussi important que le sien et qu’elle ferait veiller par des amis haut-placés à ce qu’il ne monte pas en grade. Le mercenaire avait déjà eu droit à deux discours de la sorte, le premier par Juliane, qui ne supportait pas sa condition, et le second par un visiteur du seigneur, en présence du seigneur lui-même. Iolan avait dû par la suite redoubler d’efforts pour prouver sa valeur, mais il avait fini par se rendre compte que sir Zil’Aufone avait accordé aussi peu d’importance à la diatribe du visiteur qu’au travail du jeune homme.
La porte se referma dans son dos, et la jeune femme changea immédiatement d’attitude. Moins noble, moins niaise, plus…vraie ? Elle-même peut-être. Iolan n’aurait trop su dire ce qui avait vraiment changé, mais le changement se répercuta dans son ton et ses mots. La discussion venait de perdre toute sa mondanité, jusqu’à ce qu’une domestique récemment employée entre dans la pièce. Sareyn reprit cette apparence que Iolan percevait désormais comme plus fausse, et changea de conversation en un temps record. Le jeune homme tentait de réfléchir au sens de sa dernière phrase, avant qu’ils ne soient coupés, a ce fameux ami qu’ils avaient en commun.-Je vous en remercie. Soyez sûre que le seigneur ne tar…Un fracas de porcelaine brisée et d’eau renversée interrompit sa phrase. La gamine, pourtant à peine plus jeune que lui, venait de lâcher le vase qu’elle avait apporté. D’une voix froide, Iolan ordonna :-Nettoie-ça. Ta maladresse fait honte cette maison et à son seigneur. Le prix de ce vase sera retenu sur ta paye, bien que je doute que cela puisse t’en guérir. Et prends garde à ce que cela n’arrive plus ou je veillerais personnellement à ce que tu ne travailles plus ici.Les larmes aux yeux, la jeune femme s’exécuta sous les regards sévères des deux autres. Ils l’observaient en silence, alors qu’elle épongeait l’eau à l’aide de son tablier et se coupa sur un morceau de porcelaine. Elle poussa un petit cri aigu, sans pourtant oser lever les yeux pour implorer la pitié du regard. Trois gouttelettes de sang éclaboussèrent son tablier et les larmes roulèrent le long de ses joues. Imperturbable, Iolan se détourna d’elle :-Ma dame, je vous prie d’excuser la maladresse de cette jeune femme. Elle vient tout juste d’arrivée, et il semble qu’elle n’ait pas encore appris qu’il faut ramasser le verre avant de nettoyer l’eau. J’espère désormais qu’elle aura au moins retenu cela, bien qu’il ait fallu que ce soit à ses dépens. Honteuse, la domestique termina rapidement son travail et quitta la pièce en précipitation. Iolan referma doucement la porte derrière-elle, avant de se tourner à nouveau vers Sareyn. -J’espère que nous ne serons plus importunés. Vous comprenez que je ne puisse pas fermer à clé, et je m’en excuse. Courte pause, juste le temps qu’elle comprenne toute les conséquences qui s’abattraient sur lui si on le savait avoir été enfermé en compagnie d’une demoiselle, même quelques instants seulement. Pour revenir à ce que vous me disiez, j’avoue ne pas comprendre de qui vous parlez. Peut-être pourriez-vous être un peu plus… explicite ?Dolohov Zil’Urain. Au moment où il prononçait ses mots, Iolan comprit qui l’avait envoyé ici. En revanche, il était curieux de savoir pourquoi elle, qui elle était pour son maître, et que voulait celui-ci en le mettant en face d’elle. Pourquoi ne s’était-il déplacé lui-même ? Pourquoi ne pas lui avoir envoyé un message par les Spires, comme il le faisait habituellement, bien que Iolan mette des heures à le décrypter tant son Don était faible. Il ne comprenait pas pourquoi, alors il demanda en prenant soin de ne pas se dévoiler :-Peut-être pourriez-vous m’expliquer qui vous êtes, sous votre masque ? Je jugerais alors si vous êtes digne que nous poursuivions cette conversation. Garder le contrôle des choses. D’elle. Et de soi, surtout. Il ne savait d’elle que le fait qu’elle n’était pas la personne qu’elle prétendait être. A elle de se dévoiler. Lui passerait ensuite, seulement s’il le voulait. [édition à volonté si ça ne te conviens pas ]
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| | Messages : 2181 Inscription le : 30/05/2007 Age IRL : 30
| Sujet: Re: En silence, on s'observe [Inachevé] Mer 26 Déc 2012 - 1:08 | | | La petite souillon lui rappelait cette… comment s’appelait-elle, déjà ? Ah, oui, Charlize. La jeune domestique qui s’était amourachée d’Elio lors de leur dernière mission à Al-Vor, et que le jeune homme avait libéré ensuite des geôles d’Al-Vor pour la prendre à son service. Il aurait mieux valu pour tout le monde qu’elle finisse la gorge ouverte dans un caniveau celle-là,d’ailleurs… Mais elle ne pouvait pas reprocher à Elio d’avoir envie d’une chaufferette facile. Il était jeune, et elle lui était complètement soumise. Sans nul doute, cette petite imbécile là allait finir dans les rues également, à vendre son corps, les joues mouillées de larme et de poussière. A moins que le sieur Olhuïn décide de gagner ses faveurs en faisant preuve de clémence également. Il fallait savoir être strict avec son personnel mais savoir tout de même entretenir l’illusion qu’on pouvait obtenir ses faveurs. Quelque chose qu’elle n’était jamais parvenue à faire avec la valetaille de Dolohov, contre qui elle entretenait un mépris doublement rendu.
Pleurer pour si peu de sang. Marlyn manqua de se trahir en riant. Mais le rire se bloqua contre ses dents et elle se força à le ravaler, conservant simplement la moue dédaigneuse qui sied aux femmes de la noblesse dès qu’elles croisent de la roture en mauvaise posture.
- Elle est toute pardonnée, répondit-t-elle d’un ton condescendant. Si jeune, elle doit être seulement entrée en service, je me trompe ?
Explicite ? A l’instar de Iolan, Marlyn fronça les sourcils. Il ne pouvait pas être passé complètement à côté de ses sous-entendus, de ses intonations, il devait forcément savoir de quoi elle parlait, s’il attendait des nouvelles du maître avec autant d’impatience. La lueur de compréhension dans ses yeux renseigna Marlyn à ce sujet ; il était en train de jouer et de tenter de la duper. La phrase suivante raidit sa posture. Un tic nerveux agita sa lèvre supérieure. Il se foutait de sa gueule. Il la prenait pour une putain de demeurée. Lui expliquer qui elle était, comme si elle avait quoi que ce soit à lui dire, à lui livrer, alors qu’il était un sous-membre de l’Ordre, aux ordres d’un homme dont il ne devinait qu’à peine la puissance ? Il était hors de question qu’elle lui dise quoi que ce soit, encore moins son nom, et sa relation au Maître. Tu veux jouer à ça, hein ? Note qu’il avait du mérite de rester méfiante, elle pouvait au moins lui concéder ça. Il évitait ainsi de livrer les plans du Mentaï à n’importe qui. Beaucoup d’ennemis profiteraient sans doute de la … faiblesse temporaire de Dolohov pour tenter de leurrer ses intermédiaires et se faire passer pour un de ses émissaires. C’était une des raisons qui la poussaient à tenter d’accomplir ce travail elle-même. Sans quoi le Mentaï pourrait très bien se trouver dans des impasses sans s’en rendre compte. Comment arriver à persuader Iolan de partager ses informations avec elle sans lui donner l’impression qu’il était dans un piège… ni divulguer d’informations qui pourraient la trahir elle-même ? Elle n’avait pas encore la réponse. Il fallait gagner du temps. D’un ton hautain et dur, elle reprit, à moitié dans le masque, à moitié dans la menace :
- Qui êtes vous, monsieur Olhuïn, pour juger que je puisse être digne de quoi que ce soit ? Nous en reparlerons, soyez en sûr, mais pour le moment, veuillez retourner à vos occupations d’Intendance. Il serait en effet… dérangeant, que l’on vous croie prêt à mal envers ma personne en restant seul dans la même pièce que moi.
Elle le renvoya d’un geste de la main particulièrement dédaigneux de la main, et il ne se fit pas prier pour retourner dans son rôle d’Intendant obséquieux et de quitter la pièce avec toutes les politesses requises. Lasse, elle s’enfonça dans un des fauteuils confortables de la pièce, et se prit les tempes entre les doigts pour mieux réfléchir. Elle savait que ça serait une opération complexe. L’abattement la prit, comme à chaque fois que cette vie de noblesse la prenait de court et rendait ses réflexions laborieuses. Elle jouait un jeu beaucoup trop grand pour elle. Mais si elle ne commençait pas à affronter de meilleurs joueurs qu’elle, elle ne s’en sortirait jamais à la cour sans le soutien et sans les conseils permanents de son amant. Mais il ne serait pas toujours là pour redresser ses erreurs. Et il était cruellement absent, loin des Spires. Les serviteurs finirent d’installer ses affaires, de défroisser les habits de ses malles et d’extraire tout le nécessaire, et la jeune femme retourna à son rôle, tenant entre les mains un livre qu’elle fit semblant de parcourir, songeant en réalité à comment manœuvrer pour arriver à obtenir la confience de Iolan et son silence tout à la fois.
L’heure de descendre diner arriva, et la solution ne s’était toujours pas présentée.
*
Elle dînait à une des tables basses, tandis que certains invités d’honneur étaient directement aux côtés du Seigneur du Poll. Bien sûr, elle avait eu droit aux salutations d’usage au moment d’entrer dans la grande salle à manger, et au sempiternel « Tous mes vœux vont vers la Dame pour le bon rétablissement de votre père » qui lui donnait envie d’achever le vieux une bonne fois pour toutes. Olhuïn était absent. Ca ne l’étonnait pas. Il supervisait la bonne ordonnance des cuisines, des plats, en bas, comme tout bon second intendant devrait le faire. Elle ne savait pas ce que Dolohov cherchait quand il contactait cet agent. Aussi notait-elle dans un coin de sa tête tout ce qu’elle pouvait observer à son sujet. Depuis l’obéissance de la valetaille, le bon placement des couverts, jusqu’aux rumeurs de laquets qu’elle perçut, une fois la nuit tombée, lorsque libérée de ses atours sareyniens, elle s’était faufilée dans les couloirs sombres pour espionner les domestiques dans leurs quartiers. Il y avait clairement deux camps. Ceux qui appréciaient le nouvel arrivé au-delà du vieux bouc qui servait de premier Intendant, et ceux qui restaient fidèles à leur ancien supérieur, malgré ses nombreux défauts. On reprochait beaucoup de choses aux deux, mais c’était indiscernable.
*
Le lendemain, elle n’eut pas l’occasion de croiser le Mercenaire. Peu d’occasions amenaient une jeune femme de la noblesse et un Intendant de second ordre à se croiser loin des oreilles indiscrètes, et aucune ne s’était présentée pour l’instant. Marlyn ruminait, l’apercevant parfois de loin, ils s’échangeaient parfois une œillade, mais rien de discernable. Sous l’allure de Sareyn, elle ne parviendrait jamais à l’approcher de nouveau, en dehors du moment du départ. Et alors, il serait trop tard.
*
- Le service laisse un peu à désirer, vous ne trouvez-pas ? Naophel, un jeune noble d’Al-Chen dont elle venait de faire la connaissance, se promenait à ses côtés dans les jardins d’hiver du Seigneur d’Al-Poll. Le givre crissait sous leurs pas, mais Sareyn n’avait pas réussi à le convaincre de rentrer au chaud. Sans doute attendait-il l’occasion de jouer les galants en lui proposant son manteau, mais Marlyn n’avait pas l’intention d’accepter. Plutôt crever de froid. - Je n’ai pas à me plaindre, je trouve le service plus que diligent. Père me parlait du temps où il venait en visite, il parlait de l’ancien Intendant, sieur Hil’Fébeau, en de bien mauvais termes. - Oui, il est vrai qu’un peu de sang neuf ne peut que redorer un peu l’image de notre Seigneur Zil’ Aufone. Mais tout de même, un roturier… Père a failli annuler notre visite lorsqu’il a appris. - C’est regrettable. Mais à choisir, lequel garderiez-vous, si vous étiez Seigneur des contrées du nord, Naophel ? - Le jeune, sans aucun doute ! Mère dit toujours que les roturiers ont souvent des qualités qu’on ne soupçonne pas, et qu’ils sont durs à la tâche. *Plus que toute ta race de nobles pourris jusqu’à la moëlle, en tout cas.*
*
Elle avait fait mander l’intendant sous couvert de lettres à faire cacheter et envoyer. Hil’ Fébeau avait accouru de toute la force de ses varices, et était devenu de leur couleur quand elle l’avait envoyé chercher « l’autre Intendant, vous savez, votre successeur, il siéra mieux à la tâche que j’ai à confier ». Iolan arriva quelques minutes plus tard, l’air indifférent de l’homme habitué à ce genre de tâches quotidiennes. Marlyn se leva à son arrivée.
- J’ai quelques lettres qu’il faudra apporter à un relais afin qu’elles soient envoyées séance tenante. Je peux vous confier cette lourde tâche en toute confiance, j’espère ? Elle lui mit dans la main quelques lettres à différents nobles d’Al-Jeit sans grand intérêt, parmi lesquelles était glissé un billet à demi-plié destiné à l’intention du jeune homme.
Il contenait une liste de noms. Des noms qui ne diraient absolument rien à quiconque d’autre lirait ce qu’elle avait écrit. Néanmoins, pour quelqu’un comme Iolan qui faisait partie de la guilde du Chaos, elle listait toutes les personnes à qui il avait eu à faire, ceux qui lui donnaient ses ordres, ceux à qui il rendait des rapports, ceux qui lui fournissaient ses nécessaires. Parmi eux, en haut, Dolohov. Des noms dont ils partageaient tous les deux la connaissance. Crois-moi, je suis de ton côté, Olhuïn. Je ne fais plus partie de ta guilde, mais nous partageons les mêmes intérêts, et le même maître. En dessous du nom de Dolohov, elle avait marqué non pas son propre nom, mais ce pseudonyme de « La Borgne », sous laquelle les réseaux occultes la connaissaient.
Elle enchaina rapidement, à demi-mot, afin de n’être entendue que de lui, en faisant mine de refaire un lacet de ses gants :
- Y-a-t-il un endroit où nous pouvons parler sans être vus ni entendus ? C’est votre travail de connaitre ce genre d’endroits. Notre ami commun s’impatiente, termina-t-elle sur un léger ton de menace.
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| | Messages : 5 Inscription le : 10/10/2012 Age IRL : 29
| Sujet: Re: En silence, on s'observe [Inachevé] Lun 31 Déc 2012 - 16:09 | | | [N'hésite pas si quoi que se soit ne va pas. Bonne lecture ]
La réponse fusa, cinglante et hautaine, frappant Iolan comme l’aurait fait un fouet et le remettant à sa place comme il se devait de l’être. Sa petite place d’apprenti, sa petite place de second qui lui prenait pourtant tellement de temps, mais qui ne le plaçait pas, Ô non surement pas, au-dessus d’une noble d’Al-Jeit, qu’elle soit jeune, ou femme. Iolan comprit son erreur alors même que Sareyn n’avait pas achevé sa phrase. Sareyn qui était, il le savait puisqu’ayant observé son masque se fissurer quelques minutes plus tôt, bien plus qu’une simple noble d’Al-Jeit. Pour que son maître l’ait envoyé le surveiller, c’est qu’elle était forcément sa supérieure. Déjà, elle le renvoyait d’un geste de la main condescendant, et Iolan s’inclinait avec respect, conservant sur son visage son propre masque de soldat, indéchiffrable. Il quitta la pièce à reculons, en prenant soin de refermer correctement la porte. Une fois dans le couloir, il ordonna à quelques domestiques d’aller s’occuper des affaires de leur visiteuse. Alors qu’ils passaient devant lui en courant presque, un doute assailli le jeune homme. Il par le bras la fille qui avait renversé le vase quelques instants plus tôt et lui glissa :
-Sèche tes larmes, je te donne une chance de te racheter. Tu me feras un rapport de tous ses faits et gestes. Face à l’air étonné et suspicieux de la femme, il ajouta : Ne le dis à personne, mais mademoiselle est souffrante et refuse de le montrer. Elle souhaiterait encore moins que cela se sache, tu comprends? Je compte sur toi pour m’avertir si tu détectes un quelconque symptôme d’un aggravement de sa maladie. Observe-la bien et rapporte-moi tout. J’espère que tu comprends à quel point c’est important. Il serait regrettable que notre invitée vienne à périr sous notre toit. Et surtout n’en parles à personne.
La domestique acquiesça, apparemment pleine de gratitude de se voir confier une telle mission, puis s’éloigna rapidement pour rejoindre les autres domestiques qui ne l’avaient pas attendus. Iolan quand à lui, souriait, heureux d’être parvenu à avoir un regard constant sur cette étrange visiteuse.
La journée passa à une vitesse folle, semblable à toutes les autres. Iolan géra le déjeuner, servit respectivement dans les appartements de chacun, la moitié des convives et le seigneur lui-même étant encore au lit en ce début d’après-midi. Et la tâche n’était pas simple, malgré l’armée de domestiques à leurs ordres. Monsieur souhaitait du sel, madame plus d’œufs, cette demoiselle avait pour habitude de toujours commencer son repas par une pomme épluchée, gage de vitalité, et pour ce dernier, rien ne convenait et il ne souhaitait s’en plaindre qu’au seigneur lui-même, si bien que Iolan fut contraint d’intervenir. Cependant, son statut lui proférait une bien trop faible autorité pour raisonner le jeune homme qui braillait à tout vent que « cette maison n’était rien d’autre qu’un nid de termites bonnes à rien » et « que l’empereur en personne en serait averti, car j’ai des amis haut-placés, moi, monsieur ». Avertie de l’affaire, Juliane finit par intervenir à son tour, et conjuguant pour une fois leurs efforts, les deux seconds parvinrent à calmer le jeune noble, qui, finissant surement par avoir faim, mangea ce qui lui avait été servi. Cette lourde tâche achevée, les deux seconds se quittèrent sans s’accorder un regard, comme à leur habitude, retournant chacun à leurs affaires respectives. L’après-midi se déroula en de discrets passages, d’une chambre à l’autre, pour dépoussiérer, ranger, re-fleurir et re-parfumer chaque pièce. Iolan avait beau la détester, il devait bien admettre que Juliane accomplissait sa part du travail aussi bien que lui. Et bien que cela lui allège quelques peu la tâche, cela la rendait paradoxalement plus ardue. Le diner arriva et se déroula sans que Iolan n’ait pu recroiser Sareyn. D’ailleurs, il avait eu tellement à faire qu’il n’avait ni trouver le temps de repenser à ses mots, et encore moi de trouver une solution pour faire disparaitre définitivement cette lettre et éviter par la même occasion que d’autres n’arrivent ou que son auteur ne se manifeste d’une quelconque autre manière.
Il regagna ses appartements à minuit passée. Il savait qu’il serait l’un des premiers de la demeure à devoir se réveiller, le lendemain, mais prit cependant son temps pour faire une toilette relaxante. Dans son bain, il ne put s’empêcher de repenser à Sareyn, tellement arrogante, tellement dure, tellement noble, et pourtant tellement autre chose qui semblait avoir un lien avec son maître. Il ne savait s’il pouvait la croire ou pas, ne savait s’il devait la considérer comme sa supérieure, ne savait comment réagir face à elle, que faire ou ne pas faire. Des questions plein la tête, n’étant toujours pas parvenu à prendre une décision quant à ce qu’il devait faire avec Sareyn, le jeune homme fini par sortir de son bain devenu tiède. Il se sécha rapidement et se coucha enfin, sans parvenir à fermer les yeux. Cette lettre, si terrifiante, si menaçante pour lui, et pour tous ses projets qu’elle mettait en péril, le hantait. Et si, pendant toute la journée, il n’avait eu un instant pour y penser, son esprit semblait désormais ne pouvoir se concentrer que sur celle-ci. N’y tenant plus, il se leva brusquement, rejetant ses couvertures par terre, alla jusqu’à son bureau et ouvrit le tiroir. La lettre n’y était plus. Iolan ne dormit pas de la nuit, ou très peu. Il fouilla ses appartements de fond en comble, retournant toutes ses affaires, finissant par se rendre à l’évidence. Quelqu’un était entré et lui avait pris la précieuse missive. Il se coucha alors que le jour pointait déjà et s’endormit d’un sommeil de plomb, sans rêves ni cauchemars. Ce furent les pas discrets de Juliane, dans les appartements voisins, qui le tirèrent de son sommeil. Et ce fut sa fierté qui lui permit de se lever, trop importante pour accepter ne serait-ce que l’idée que sa rivale arriverait avant lui chez l’intendant supérieur pour recevoir les ordres du jour. Au moyen d’un immense effort de volonté, le jeune homme parvint à se présenter à sieur Hil’Fébeau en même temps que la jeune femme, fraîche et parfaitement disposée. Elle semblait d’ailleurs de bien bonne humeur, et alla même jusqu’à lui adresser un sourire auquel il ne répondit pas. Il était lui-même bien trop épuisé pour s’interroger sur ce comportement. Après avoir reçu les superficielles instructions de l’intendant, les deux seconds sortirent de la pièce. C’est l’instant que choisit Juliane pour lui barrer le chemin et lui demander :
-Alors ? On a pas bien dormi cette nuit ? Qu’est ce qui se passe Iolan ? Aurait-t-on… perdu quelque chose, peut-être ? Quelque chose d’important, surement, pour te mettre dans un tel état. Voyons, laisse-moi deviner ce que ça…
Elle ne peut terminer sa phrase. Iolan venait de la plaquer au mur avec toute la force dont il était capable, sans pour autant laisser la rage fissurer le masque qu’était le sien. Il lança en détachant chaque mot :
-Rend. La. Moi. -Mais de quoi tu parles, fit-elle, haletant sous la pression qu’il exerçait, sans pour autant perdre sa morgue. Il se mit à la fouiller, presque frénétiquement. Le placide Iolan perd son calme ! Etonnant, mais ne te fatigue pas plus que tu ne l’es déjà. Elle n’est pas sur moi. -Rend la moi ! Immédiatement.
Des pas dans le couloir s’approchant, Iolan fut contraint de lâcher la fille. Elle épousseta sa robe d’un revers de main avant de s’éloigner et d’ajouter :
-Pas la peine d’aller voir dans mes appartements, je ne suis pas assez idiote pour faire la même erreur que toi. Je te donne deux jours pour quitter cette demeure, ou je montre cette lettre au seigneur.
Et dans ce cas, il serait fichu dehors en compagnie d’un macabre couple : la honte, et l’échec. Option inenvisageable, qui signerait la fin de la vie telle qu’il l’avait connue, voir, plus simplement, la fin de sa vie tout court. Iolan devait trouver une solution, autre que de s’abaisser à céder au chantage de sa rivale. Si elle parvenait à l’expulser de la demeure, elle serait certaine d’obtenir le poste que, tous en était conscient, l’actuel intendant ne tiendrait plus longtemps. Il lui fallait retrouver cette lettre à tout prix. Ou qu’elle soit. Il ne pouvait s’en occuper lui-même. Il avait bien trop de choses à faire dans la journée, et Juliane serait dans ses appartements le soir. Bien qu’elle ait affirmé que la lettre ne s’y trouve pas, rien n’était moins sûr, surtout provenant de la bouche de cette vipère. En pleine réflexion, Iolan rejoignit le local ou il retrouvait les domestiques pour leur donner à son tour les ordres de la journée et répartir les tâches. Après s’être exécuté, s’apprêtant à rejoindre la volière comme il le faisait chaque matin pour récupérer les lettres arrivées pendant la nuit, il remarqua qu’une servante se trouvait encore dans la pièce et le regardait presque avec crainte.
-Qu’est-ce que tu fais encore ici, toi ? -Monsieur, je… sans vouloir vous offenser, je… Mon rapport monsieur, sur demoiselle Til’Lisan. -Et bien, je t’écoute ! -Je… Rien monsieur. Mademoiselle semble se porter à merveille. Elle a passé un long moment à lire, et n’est sortie de ses appartements qu’un peu avant le diner, lors duquel, je m’en suis assurée, elle n’a pas manquer de manger. Je vous assure qu’en la voyant, il est presque impossible de se douter qu’une maladie la ronge. -Bien, merci. Continue de garder un œil sur elle.
Iolan s’éloignait déjà lorsqu’une idée germa dans son esprit tourmenté. Il fit demi-tour, et retourna vers la jeune fille qui n’avait pas bougé. Il posa une main sur son épaule et l’autre saisit doucement son menton pour lever sa tête vers lui.
-Quel est ton nom ? -Camyle, monsieur. -Bien, Camyle. Est-ce que je peux te faire confiance, dis-moi, fit sans quitter ses yeux admirablement bleus. -Je… Oui, je pense monsieur. -J’aimerais que tu en sois certaine, car ce que je vais te demander est très important, tant pour moi que pour notre seigneur. Mais il est encore une fois important que tu n’en parles à personne. -J’en suis sûre monsieur. -Parfait. Il lâcha la pression sur l’épaule de la jeune femme pendant que son autre main descendait effleurer son cou. Il sentit la peau frissonner sous ses doigts, et retira sa main avant d’achever la caresse. Je voudrais que tu cherches quelque chose pour moi. Une lettre que l’on m’a volé, et qu’il est primordiale que je retrouve, pour le bien de cette demeure. Il serait regrettable que cette lettre tombe entre de mauvaises mains, tu comprends ? Alors qu’elle acquiesçait, il reprit : Ne me demande pas pourquoi, mais je soupçonne Juliane. Tu la connais ? Nouvelle acquiescement. Tu es exemptée de travail aujourd’hui. Fouille ses appartements, de fond en comble. Ne renverse rien, remet tout en ordre et ne te fais pas prendre ou je ne pourrais rien pour toi. Je compte sur toi. -Oui mon seigneur. J’y arriverais, je vous promets.
Iolan lui sourit, et laissa retomber sa main. Elle resta un instant immobile, semblant attendre quelque chose, une phrase, un geste. Puis elle se reprit et quitta la pièce, laissant le jeune homme seul.
La journée fut bien plus longue qu’aucune auparavant. Chaque heure en paraissait cinq aux yeux du jeune homme éreinté par sa nuit mouvementée. Il ne cessait de pensait à Camyle et craignait plus que tout qu’elle se fasse prendre. Il tendait l’oreille, aux aguets d’une rumeur qui n’arrivait pas. Lorsque le soir arriva enfin, après le diner et une dernière convocation chez le seigneur qui souhaitait se mettre au courant des nouvelles concernant sa demeure, le second partit à la recherche de Camyle. Lorsqu’il la trouva, elle lui indiqua d’un simple signe de tête qu’elle n’avait rien trouvé. Iolan rejoignit ses appartements sans rien demander de plus. Malgré son inquiétude, sans avoir trouvé de solution, il dormit d’un sommeil de plomb. Le lendemain était le jour du départ de Sareyn, à laquelle il n’avait pas eu l’occasion de reparler. C’est elle qui le fit appeler, par le biais de l’intendant lui-même. Iolan arriva dans la cour sans même jeter un œil à ce dernier, qui lui par contre, ne le quittait pas du regard.
- Mademoiselle ? - J’ai quelques lettres qu’il faudra apporter à un relais afin qu’elles soient envoyées séance tenante. Je peux vous confier cette lourde tâche en toute confiance, j’espère ? - Vous le pouvez. Je m’en occupe immédiatement, fit-il en prenant le paquet qu’elle lui tendait.
Il fit mine de lire les adresses, cherchant le message que, c’était certain, elle venait de lui glisser parmi les lettres. Il trouva un fin morceau de parchemin plié en deux, sur lequel était écrite une liste de nom. Le sien, presque en bas. Au-dessus, celui de Meena, barré d’un trait. Tout en haut, celui de son maître, et juste en-dessous, celui de « La Borgne », assurément le pseudonyme de Sareyn. Les autres étaient sans réelle importance, n’évoquant que des personnes croisées, ou à peine rencontrées. Deux choses était certaines. Sareyn était de son côté, et bien plus important, elle était sa supérieure. Il leva la tête vers elle, attendant un ordre qui ne tarda pas. Iolan réfléchit un instant et sourit :
-Mademoiselle, je souhaiterais vous faire un présent avant votre départ. Si vous voulez bien vous donnez la peine de me suivre.
La jeune femme acheva de mettre son gant et lui emboita le pas. Lorsqu’ils disparurent derrière une haie et s’engouffrèrent dans un escalier, il lui dit :
-Je vous emmène à la volière. Personne ne va jamais là-haut à part moi. Ils parvinrent en haut des escaliers, au milieu des cris, des déjections et des plumes d’oiseaux. Iolan reprit, je ne sais ce que vous à dis le maître quant à ma situation. Tout se passerait à merveille dans cette maison, et je serais assuré d’avoir le poste d’intendant, si je n’avais pas de rivale : Juliane Mil’Itèr, seconde de l’intendant elle aussi. Elle travaille au moins autant que moi, et dispose de cet avantage que son nom comporte une particule, ce qui n’est pas mon cas, comme vous ne devez pas l’ignorer. De plus, le matin de votre arrivée, le seigneur a reçu une lettre de la part de son fils, me concernant. Ce dernier affirme qu’il serait honteux et inadmissible que j’accède au poste d’intendant, sous prétexte que je ne suis pas noble. J’aurais dû me débarrasser de cette lettre immédiatement, mais j’ai décidé d’attendre, sachant que d’autres arriveraient derrière, face à l’absence de réaction suite à celle-ci. Comprenez que j’aurais beau toutes les intercepter, le message aurait fini par parvenir au seigneur d’une manière ou d’une autre. Sous la pression, il m’aurait renvoyé. Sauf que désormais, cette lettre m’a été volée par Juliane, qui s’en sert pour me faire du chantage. Je l’ai fait chercher. Elle n’est pas dans ces appartements et je n’ai aucune idée du lieu où elle pourrait se trouver. Je ne peux pas non plus la tuer, la faute retomberait immédiatement sur moi. Quel plus beau coupable que le rival de cette jeune noble promise à un riche avenir ?Il me reste jusqu’à demain matin pour trouver une solution ou je devrais quitter cette maison. Et je n’en ai aucune, acheva-t-il d’un ton désespéré.
Aidez-moi je vous en supplie. Pour moi, pour le maître. Dites ce que vous voulez, je vous obéirais.
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| | Messages : 2181 Inscription le : 30/05/2007 Age IRL : 30
| Sujet: Re: En silence, on s'observe [Inachevé] Lun 14 Jan 2013 - 1:26 | | | [@@’ Hésite pas si quoi que ce soit te dérange ou quoi ] - Résumons.
Les sourcils froncés, Marlyn réfléchissait à la situation. Beaucoup de données d’un seul coup. Beaucoup de causes et de conséquences, et elle n’était pas sûre de toutes les voir. Elle avait été surprise que son stratagème pour lui faire accepter son rang au sein des organisations chaotiques ait si bien fonctionné –ou alors il jouait formidablement bien la comédie et essayait encore de la doubler. Elle aurait très bien pu élaborer cette liste à partir d’informations impériales secrètes ; Iolan avait été négligent, mais pour le moment, elle avait sa confiance, et c’est tout ce qui lui importait.
- Nous savons tous les deux que vous devez, à long terme, remplacer Cyrien Hil’ Fébeau en qualité d’Intendant du Seigneur d’Al-Poll. Elle lui jeta un regard en biais. Il acquiesçait d’un hochement de menton. Cela confirmait les derniers doutes qu’elle pouvait avoir sur la mission qui avait été confiée à Iolan Olhuïn. Les mercenaires du Chaos cherchaient à manipuler le Seigneur du Nord et à placer un homme de confiance dans son cercle de proches, mais dans quel but… Ce n’était pas la question à se poser pour l’instant. Sans doute Dolohov surveillait-il la progression dans les échelons de ce jeune homme afin que son insertion soit parfaite et n’éveille aucune question. Voilà à quoi elle devrait tâcher à sa place.
Dolohov aurait trouvé une solution au problème que lui exposait Iolan tout de suite. Il lui aurait suffi de glisser quelques mots dans les bonnes oreilles, quelques signes sur certains papiers, et l’affaire de la lettre volée aurait été réglée comme à la parade. Marlyn commençait à peine à en entrevoir les enjeux. Elle était une joueuse trop récente dans une cour trop grande, et sans appui aucun depuis qu’elle ne pouvait plus communiquer à loisir avec son maître.
- Mais deux problèmes se présentent à ce plan. Un de court-terme. Votre rivale à ce poste vous fait chanter avec une lettre qui pourrait décider le Seigneur à vous congédier. Un de long-terme, que la famille de Xil’Auphone fasse pression sur lui pour vous congédier de toute manière. Enoncer la situation à voix haute lui permettait également de se la clarifier pour elle-même, à la recherche désespérée d’une idée pour tout agencer dans le bon sens. Au premier problème, il faut contrecarrer votre rivale, sur ce chantage là et sur les chantages futurs. Comme vous le dites, c’est vous ou elle.
Elle regarda par la fenêtre. Des flocons de neige tombaient mollement contre les carreaux sales. Ses doigts gantés caressaient pensivement l’arrière de la tête d’une effraie perchée à côté.
- Se débarrasser de la lettre ne réglerait qu’une partie de ce problème. Il faut écarter Mil’ Itèr avant qu’elle ne réussisse à vous évincer. Et manœuvrer pour que vous en sortiez glorifié.
La tuer ne rimerait à rien, s’entendait-elle penser, même en s’arrangeant pour inculper quelqu’un d’autre pour le meurtre. Tout ne devait pas se régler dans un bain de sang. Le moins possible, lui disait-il toujours. Pourquoi n’arrivait-elle pas à mettre la main sur la clef de cette affaire ? Pourquoi ne parvenait-elle pas à trouver la faille, la prise où glisser son esprit et s’accrocher. Mais il ne fallait surtout pas que Iolan ne perçoive son désarroi mental. Elle possédait sa fragile confiance, il suffirait d’une hésitation ou d’une erreur pour que tout flanche et qu’elle soit en danger.
- Mais ça ne vous donnera qu’un sursis de plusieurs jours, s’il suffit d’une lettre d’un membre de sa famille pour que le Seigneur d’Al-Poll cède sous la pression. Il va falloir que vous gagniez sa confiance toute particulière, qu’il soit prêt à vous garder vaille que vaille.. à défendre votre absence de particule. Mais une chose en son temps, termina-t-elle, la voix un peu tendue, comme pour écarter ce problème de long-terme.
Il fallait se concentrer sur l’immédiat. Trouver un moyen pour que Juliane parte… Et vu le comportement que lui décrivait Iolan, c’était peu probable qu’elle parte de plein gré. Marlyn souffla de dépit, et la froid transforma un un nuage givré contre ses lèvres. Ses sourcils se froncèrent à nouveau. Le froid…
Elle jeta un œil par la fenêtre. La borée soufflait fort et la neige tombait désormais en tempête. Les bords des vitres se paraient de milliers de petits cristaux glacials. Les commissures des lèvres de Marlyn s’étirèrent en un demi-sourire.
- Les Dieux sont avec nous, monsieur Olhuïn. Le malheur veut que je doive ajourner mon départ à cause d’une tempête de neige qui est bien partie pour durer plusieurs jours dans les environs. Heureusement, le courrier ne craint ni tempêtes ni températures..
Il la regardait d’un air circonspect, cherchant où elle voulait en venir. " Dites-moi, Cette Juliane Mil’Itèr est-elle une jeune femme frileuse.. ?" A nouveau, Iolan acquiesça. Ca serait lent, et complexe, mais si elle arrivait à convaincre les bonnes personnes et à joindre les bons réseaux..
- Pensons le problème autrement, Monsieur Olhuïn. Juliane n’est un problème pour vous que tant qu’elle convoite à tout prix le poste que vous visez également… Donnons-lui un autre objectif, plus haut, et elle s'en détournera. Il vous faudra alors manœuvrer pour paraître le seul éligible à ce poste. Laissez-moi me charger de votre rivale.. de votre côté, trouvez un moyen de gagner la confiance du fils de votre Seigneur. Et de l’Intendant, sire Hil’ Fébeau.
J’ai encore besoin de temps pour réfléchir, voulait-elle lui dire. Mais elle ne pouvait pas.
- Faites-moi confiance. J’agis au nom et au fait de Sa Majesté. Elle n’employait que rarement ce surnom qu’utilisait parfois Dolohov pour impressionner les basses sphères des mercenaires du Chaos, mais nul doute que Iolan le connaissait aussi. Attendez quelques heures, puis prenez votre air le plus maussade, et dites à votre rivale que je tiens à la voir pour une affaire que je ne songerais à confier à qu’elle. Nul doute qu’elle sautera sur l’occasion de vous surpasser… Bien, séparons-nous.
*
- Combien de temps pensez-vous que cette lettre mettra pour atteindre la capitale ? - Difficile à dire, Dame, avec ce temps.. Et tous nos coursiers dessinateurs sont actuellement en déplacement. - Quand pensez-vous que le prochain reviendra ? Cette lettre est extrêmement urgente. - Je conçois bien, Demoiselle, mais je ne vous être d’aucune aide tant que – Ah ! Voilà justement Mazarin qui revient, mais normalement, nos coursiers doivent prendre au moins une journée de repos après avoir utilisé les Spires, mesure de sécurité vous comprenez. Marlyn fit jouer trois pièces d’or entre ses doigts. - .. Bien sûr, tout peut s’arranger quand on trouve comment faire, évidemment, évidemment… Mazarin, veux-tu bien prendre la commission de notre distinguée cliente ? - C’pour où, M’dame ? - Makel Vil’ Ryval, à Al-Jeit. A délivrer en personne.
*
- Ah, vous voici ! Je commençais à m’inquiéter que cet incompétent ait également oublié de vous faire mander. Le ton de Sareyn était maussade, tenant compte du fait que la jeune femme devait rester quelques jours de plus dans une ville où il faisait si froid, alors que la vie de cour l’attendait au Sud, lieu de fêtes et de jouissances. - Puis-je être d’un quelconque service pour apaiser votre mésaventure, Demoiselle Til’ Lisan ? répondit protocolairement la sous-Intendante. - J’aurais une faveur à vous demander. Accepteriez-vous désormais de vous occuper de mon service pour le restant de mon séjour ? Je n’ai eu qu’à me plaindre de votre collègue, et voilà que les circonstances m’obligent à rester contre mes vœux. Sans doute, une présence amicale entre ces murs glacés ne serait pas de trop.. Les yeux de Juliane s’illuminèrent plus qu’ils n’auraient dû. A l’évidence, elle s’attendait à une telle victoire, et elle répondit trop rapidement : « Ce serait un honneur. »
*
La tempête rugissait, dehors, les grêlons battaient les vitres. Sareyn s’inquiétait de ne pas avoir encore reçu de réponse du Sieur Vil’ Ryval. Les coursiers-dessinateurs étaient connus pour leur promptitude, surtout avec quelques pièces d’or au fond de la poche. Se pouvait-il qu’il lui soit arrivé malheur ? Juliane entra avec le souper, que Sareyn avait demandé à prendre dans sa chambre. - Une lettre est tout juste arrivée pour vous, j’ai pris la liberté de vous l’apporter moi-même. - Vous êtes d’une remarquable diligence, Miss Mil’ Itèr.[/color][i] Marlyn prit l’enveloppe et regarda le cachet. Son œil frémit. Makel avait mordu. Elle parcourut rapidement les quelques lignes tracées à l’encre verte, tiquant à une des phrases. Il ne renonçait jamais, n’est-ce pas. Mais son aide était trop précieuse, ses relations trop haut placées pour qu’elle se permette de tourner le dos à ses conditions. Jusqu’alors, il s’était contenté d’émettre des conditions sur leurs accords, les stocks, les informations, toujours tissés de sous-entendus, mais désormais.. Elle verrait plus tard. Elle n’avait que jusqu’au lendemain matin pour persuader Juliane. C’était peu.
- Juliane ? L’Intendante s’affairait avec le plateau, mais acquiesça quand Marlyn l’appela par son prénom et releva les yeux vers elle d’un air intrigué. Je peux vous appeler Juliane, n’est-ce pas ? Quel âge avez-vous ? .. 23 ans ? D’où aviez-vous dit que vos parents étaient originaires ?
Casuellement, comme on fait la conversation à une amie, Sareyn commença à s’enquérir du passé de cette sous-Intendante, qui n’était pas native des contrées froides. Elle, confiante, répondait avec entrain, persuadée que s’attirer les faveurs et l’amitié d’une noble de passage ne pourrait que l’aider à renforcer sa position et sa suprêmatie sur Iolan. Sareyn était de peu son aînée, mais de jeune femme d’Al-Jeit à jeune femme qui rêvait d’en être, il suffisait de peu de choses pour que le courant passe.
- Voyons, vous n’envisagez pas sérieusement de faire toute votre vie dans cette ville polaire ! s’exclama la jeune femme, comme si évoquer les températures d’Al-Poll suffisaient à la geler sur place ; Marlyn détestait le froid, et il n’était pas difficile d’en jouer. Alors que tant de personnes s’arracheraient vos services, je pourrais vous citer au moins cinq noms parmi les personnes que je connais. - Le prestige d’être Intendant d’une des grandes puissances de l’Empire dépasse celui de n’importe quelle maisonnée, fut-elle plus riche que l’Empereur, répondit-elle, mais son ton interrogatif signifiait qu’elle était intriguée. - Ah, mais c’est là que vous vous trompez, vous savez…
*
La conversation avait duré bien au-delà de Minuit. Juliane avait mordu à l’hameçon, et tenu à en entendre plus. Marlyn, rasant les murs, se rendit dans les quartiers de Iolan. Tapie dans l’ombre, elle attendit le temps nécessaire pour déterminer que personne ne la verrait entrer chez le mercenaire. Lorsqu’elle entra, il était en train de faire les cent pas. Sans doute l’attendait-il plus tôt. Elle lui tendit directement la lettre voulue. Celle qui pesait sur le jeune homme comme une épée de Damoclès. Elle le sentit brûler d’impatience de savoir comment elle avait réussi ce tour de force, mais elle le devança :
- Votre rivale s’est rendue compte qu’il n’était pas dans son meilleur intérêt de prendre la place d’Intendant de votre Seigneur tout de suite, fit-elle d’un ton énigmatique.
Sareyn avait évoqué la place vacante d’Intendant auprès du Seigneur d’Al-Chen, celle également vacante à l’Académie d’Al-Jeit, deux positions parmi les plus renommées, les plus prestigieuses… et les plus agréables que l’Empire ait à offrir. Sans oublier de préciser qu’il serait à l’avantage de Juliane de … « convaincre » des Seigneurs plus jeunes et moins vérolés de ses nombreuses qualités. Bien sûr, rien n’était fait. Sareyn avait ensuite évasivement évoqué un de ses amis « là bas, à la Capitale » qui « pourrait vous aider », elle avait promis de lui écrire dans les plus brefs délais, « il saurait vous recommander auprès des bonnes personnes, et si vous ne me croyez pas, libre à vous ensuite de rester Intendante ici, sire Hil’ Fébeau a encore de beaux jours devant lui ».
- Mais le problème n’est qu’ajourné pour l’instant. Au plus tôt, j’aurais des réponses demain soir. Je ne peux qu’espérer que le Maître sera prompt à organiser cela.
Il valait mieux pour elle, pour sa couverture, pour la confiance de Iolan, qu’il ait l’impression que Dolohov était en train de tout orchestrer, au loin, depuis Al-Jeit, et que Marlyn ne servait que de relai. Qu’elle agisse en son âme et conscience, en demandant l’aide d’un noble, secrètement trafiquant, auquel elle était liée d’affaires, passerait mal.
- Vous devrez agir de votre côté aussi. Dès demain, il faut que vous donniez l’impression à sire Hil’ Fébeau, et particulièrement à sire Xil’ Aufone, que vous êtes irremplaçable. Je peux écarter Juliane, mais je ne peux pas empêcher le Seigneur de choisir quelqu’un d’autre. Il ne tient qu'à vous de ne pas commettre d'autre erreur, termina-t-elle d'une voix grondante, encore énervée de l'accord qu'elle avait du passer avec Makel, qui était inévitable mais qu'elle avait réussi à repousser... jusqu'à maintenant.
Si Sareyn avait gardé Marlyn sous clef jusqu'à présent, sa véritable personnalité, sa véritable colère émergeait de nouveau aux lueurs des chandelles. " Les gens comme toi sont censés servir ... pas obliger leurs supérieurs à sauver leur peau. Je ne te fais cette faveur qu'une fois, Iolan Olhuïn. " Elle saisit le col du mercenaire, plus violemment qu'elle n'aurait du, sans doute.
- Si tu es faillis encore une fois à remplir la tâche qui t'a été confiée, ce n'est pas de cette Juliane Mil' Itèr que tu devras t'inquiéter, me suis-je bien faire comprendre ?
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